Lucioles
72 pages
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Description

Une rencontre inattendue dans les couloirs de l’hôpital Paul Brousse à Villejuif devient l’occasion d’une rétrospective pour Esther et Constantin.
Dans la pénombre de la vie, quelques lucioles peuvent-elles encore s’éclairer et redonner espoir ?

Informations

Publié par
Date de parution 24 octobre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312047218
Langue Français

Extrait

Lucioles
Eve Lyn J
Lucioles
Petites lumières de la vie
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2016
ISBN : 978-2-312-04721-8
Constantin
En ce matin d’octobre, Esther marche sereinement dans les couloirs de l’hôpital Paul Brousse à Villejuif. Elle se sent apaisée. Le Professeur Frédéric Marin, cet homme avec qui elle est liée depuis sa jeunesse, va prendre sa retraite. Il a tout de même pu la recevoir pour son dernier jour de consultation. Elle repart soulagée.
Au détour d’un couloir, elle aperçoit, de dos, une silhouette qu’elle croit reconnaître. Serait-ce son esprit qui lui joue des tours ? Comment, après tant d’années et en ces lieux, pourrait-elle rencontrer celui qu’elle croyait n’être plus, depuis longtemps, qu’un souvenir ?
Esther accélère le pas pour tenter de rattraper cet homme aux cheveux blancs mais à l’allure encore jeune et athlétique. Plus elle se rapproche, plus son cœur s’emballe. Lorsqu’elle ne se trouve plus qu’à une dizaine de mètres de lui, elle ose l’interpeller :
– Constantin !
L’homme s’arrête brusquement, fait un demi-tour sur lui-même et, prononce d’une voix profondément émue :
– Esther !
Elle s’avance. C’est bien lui ! Les quinze années qui la séparent de leur dernière rencontre n’ont rien effacé du souvenir qu’elle en avait gardé. Il est toujours aussi séduisant, il dégage encore cette profonde sérénité et il a même conservé son regard charmeur.
Avant qu’il n’ait le temps d’esquisser un quelconque mouvement, Esther lui tend la main et s’informe aussitôt de sa présence en ces lieux.
Le beau Constantin, profondément surpris et troublé, n’ose pas prendre Esther dans ses bras. Et pourtant, un flot puissant de souvenirs l’assaille.
D’un air détaché, il exprime ses craintes sur la fin prochaine de son épouse atteinte d’un cancer. Malgré tous les bons soins prodigués dans cet hôpital, le diagnostic est plus que réservé. Ses jours sont comptés et l’essentiel maintenant est d’atténuer au maximum les souffrances.
Constantin oscille entre le plaisir inespéré de revoir Esther et l’inquiétude qu’il ressent de faire une telle rencontre en ces lieux. Il ose tout de même l’interroger :
– Et toi, puis-je savoir pourquoi tu es ici ?
– Oh, rien de bien grave, une visite de routine ! répond-elle d’un air désinvolte.
A ce moment précis, Esther ne souhaite pas gâcher un ultime instant de bonheur. Pour couper court à toutes les interrogations, elle prend l’initiative de changer radicalement de sujet et lui demande s’il accepterait de passer un moment avec elle un jour prochain. Elle aimerait tant qu’il lui parle de toutes ces années.
Constantin , si heureux de revoir Esther , est prêt à se libérer pour la retrouver dès le lendemain après-midi. Il prétextera de nombreuses démarches administratives pour abandonner son épouse quelques heures.
Esther se propose de venir le rejoindre demain, à l’entrée de l’hôpital.
Elle dépose rapidement un baiser sur sa joue et, sans attendre, se dirige d’un pas léger vers la sortie.
Constantin reste, un long moment, immobile, au milieu du couloir. Tant de souvenirs se bousculent. Il se sent soudain envahi par une douceur qu’il n’avait plus ressentie depuis si longtemps.
Esther, la belle Esther, il était pourtant sûr de l’avoir définitivement rangée au rayon des souvenirs. Il s’était tellement fait à l’idée qu’il ne la reverrait jamais.
***
Constantin, malgré ses soixante-dix ans bien sonnés, est impatient et fébrile comme un adolescent qui aborde son premier flirt amoureux.
Il fait les cent pas devant l’entrée de l’hôpital tout en se remémorant ses dix-huit ans, lorsqu’il avait donné son premier rendez-vous à une jeune fille de sa promotion. La timidité de cette époque est pourtant bien loin derrière lui.
Depuis ce temps-là, il a toujours été très à l’aise et plutôt émoustillé lorsqu’il donnait rendez-vous à une femme. Mais, c’est vrai qu’aujourd’hui les rôles sont inversés. C’est Esther qui l’a provoqué en suscitant cette rencontre.
Cela fait plus d’une trentaine de minutes qu’il est perdu dans ses pensées, lorsque une petite Twingo s’arrête devant lui. C’est bien Esther. Avec son air toujours malicieux, elle l’invite à prendre place et lui lance :
– J’ai toujours bien aimé faire attendre mes amoureux !
Constantin lui dépose tendrement un baiser dans le cou et lui murmure à l’oreille :
– Amène-moi où tu as envie. J’ai tellement besoin de quitter ce monde de la mort !
Une halte en bord de Seine sera propice aux confidences.
En cette après-midi d’automne, la nature s’est parée de couleurs chatoyantes sous le soleil déclinant. Les feuilles des peupliers qui longent la rive, petites pièces d’or bruissant légèrement sous la brise, donnent aux lieux une atmosphère imprégnée d’une douceur toute particulière. Les feuilles écarlates de quelques vignes vierges envahissantes rajoutent une touche flamboyante au décor. C’est dans cette ambiance de douceur et de passion ravivée que les deux complices s’installent sur un banc, face au fleuve.
Constantin prend les mains d’Esther dans les siennes et les pose sur ses genoux avant d’engager la conversation :
– Te souviens-tu de notre première rencontre ? Tu étais une toute jeune fille. Tu venais d’avoir seize ans. Ce jour-là, tu avais revêtu une petite robe noire avec un joli tablier de serveuse blanc, en dentelle. Un film se tournait dans ton village et tu venais de jouer un rôle de figurante dans cette tenue.
Pour prolonger le plaisir d’être comédienne, tu avais accepté de servir le champagne à une table où quatre hommes étaient installés. Il y en avait deux d’âge mûr, le maire et le directeur d’une grande entreprise de travaux publics, et deux plus jeunes, le bel Alberto, l’artificier, et moi-même, responsable du grand ouvrage d’art qui se terminait.
Je venais d’avoir trente ans. Mon épouse venait de me quitter. Le chantier terminé, j’allais être muté vers des contrées lointaines et, dans ma tête, tout se bousculait. Cela ne m’a pas empêché de remarquer ta jolie silhouette et cet air malicieux que je viens de retrouver intact aujourd’hui.
Dès le premier regard, tu m’avais charmé. Pour engager la conversation, je t’avais aussitôt demandé ton prénom. Lorsque tu m’avais répondu Esther, j’avais été surpris. C’est sûr, je n’en connaissais aucune autre, sauf le personnage de Racine ou la même dans la Bible hébraïque. Je trouvais qu’il t’allait si bien avec tes longs cheveux noirs et tes yeux verts. Esther, j’allais m’en souvenir. Esther, l’étoile, la brillante, serais-tu ma bonne étoile en ces périodes de doutes ?
Mais toi, je semblais te laisser indifférente. Mes longs cheveux bouclés, mon regard aussi clair et malicieux que le tien n’y faisaient rien. Tu étais manifestement sous le charme de mon voisin de table, le bel Alberto.
C’est vrai que lui, il paradait. Il était flamboyant avec sa chemise blanche à jabot et son pantalon à pinces. Ses longs cheveux noirs ondulés, peignés comme les stars de l’époque, lui donnait l’allure d’un dieu grec tel que les statues antiques les représentent. Il était plus grand que moi, plus athlétique. Mais ce qui faisait la différence, c’était son aisance à s’exprimer, ses gestes de comédien et cette voix chantante, avec son accent italien. Il savait être des plus charmeurs. Même nous, sur le chantier, nous arrivions à céder à ses exigences tant il savait nous baratiner. Lorsqu’il dirigeait les opérations de tir de mine dans sa tenue de gala, il impressionnait tout le monde. Il ressemblait à un acteur qui aurait tenu le rôle principal de la pièce. Cela donnait un air surréaliste aux opérations. Malgré tous ses excès, il était très attachant et il maîtrisait si bien ce dangereux métier d’artificier. C’était un vrai flambeur.
Sais-tu que je l’ai revu il y a quelques années ? Il s’est lancé dans l’aventure des médias et est devenu un homme d’affaires beaucoup plus mesuré, presque conventionnel avec costume sombre et cravate. Il a perdu ses belles boucles noires mais il a toujours une cour de femmes autour de lui.
Et cette bel

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