Ne dites pas à ma mère que je suis vivant
169 pages
Français

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Ne dites pas à ma mère que je suis vivant , livre ebook

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Description

Alors qu’il était enfant, un drame familial a secoué l’univers de Thomas : sa sœur et son père entretenaient une relation incestueuse. Lorsqu’elle a découvert cette relation, Béatrice, la mère de Thomas, a cessé de parler et s’est repliée sur elle-même. Dans une atmosphère de bord de mer et de poésie, Lyne Richard nous raconte une fable où la vie et l’espoir, même après de longs déchirements, peuvent triompher.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 septembre 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782764423264
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L i t t é r a t u r e d ’ A m é r i q u e Collection dirigée par Normand de Bellefeuille et Isabelle Longpré
De la même auteure

Adulte
Une barque peinte en rouge , Les Éditions David, 2012 (poésie).
Il est venu avec des anémones , Éditions Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, 2009 (nouvelles).
Marcher pieds nus sur nos disparitions , Les Éditions David, 2009 (poésie).
Le Bruit des oranges , Éditions Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, 2007 (roman).
La patience des cerfs-volants suivi de Le bruissement des cendres , Les Éditions David, 2007 (poésie).
Tout ce blanc près de l’œil , Les Éditions David, 2006 (haïkus).
Dans l’infini du rouge , Le Loup de Gouttière, 2002 (poésie).
La nuit fait semblant de mourir , Le Loup de Gouttière, 2000 (poésie).
Agenouillée dans vos bouches , Le Loup de Gouttière, 1999 (poésie).
Une dernière pomme en septembre ou ailleurs , Le Loup de Gouttière, 1997 (poésie).
Les soifs multipliées , Le Loup de Gouttière, 1994 (poésie).

Jeunesse
La Nuit Woolf , Éditions Québec Amérique, coll. Titan+, 2009.
Le petit soleil amoureux , Le Loup de Gouttière, coll. Les petits loups, 2000.
Ne dites pas à ma mère que je suis vivant
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nation ales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Richard, Lyne
Ne dites pas à ma mère que je suis vivant
(Littérature d’Amérique)
ISBN 978-2-7644-2235-9 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-2325-7 (PDF)
ISBN 978-2-7644-2326-4 (EPUB)
I. Titre. II. Collection : Collection Littérature d’Amérique.
PS8585.I146N4 2012 C843’.54 C2012-941870-6
PS9585.I146N4 2012



Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.
Les Éditions Québec Amérique bénéficient du programme de subvention globale du Conseil des Arts du Canada. Elles tiennent également à remercier la SODEC pour son appui financier.

L’auteur remercie le Conseil des arts et des lettres du Québec pour son aide financière lors de l’écriture de ce roman.

Québec Amérique
329, rue de la Commune Ouest, 3 e étage
Montréal (Québec) Canada H2Y 2E1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010

Dépôt légal : 3 e trimestre 2012
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada

Projet dirigé par Isabelle Longpré en collaboration avec Anne-Marie Fortin
Mise en pages : André Vallée — Atelier typo Jane
Révision linguistique : Émilie Allaire et Chantale Landry
Conception graphique originale : Isabelle Lépine
Adaptation de la grille graphique : Nathalie Caron
En couverture : © Lysanne Pepin
Conversion au format ePub : Studio C1C4 Pour toute question technique au sujet de ce ePub : service@studioc1c4.com

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés

© 2012 Éditions Québec Amérique inc.
www.quebec-amerique.com
Lyne Richard
Ne dites pas à ma mère que je suis vivant
roman
À mes enfants, que j’aime tellement.
Quand Thomas ouvre les yeux, il voit le merveilleux et triste sourire de Marilyn Monroe au-dessus d’une lune fendue par une fermeture éclair. Il murmure « Je t’aime Marilyn » et se rendort. Une heure plus tard, malgré ses yeux clos, il sort suffisamment de son sommeil pour se demander comment il se fait qu’il rêve encore, alors qu’il est mort. Il a déjà lu quelque part que les gens très intelligents peuvent contrôler leurs rêves. Se dire « C’est fini, je m’éveille » ou, au contraire, continuer de voler au-dessus des îles Seychelles en se demandant si vraiment le sable aspire les vacarmes des siècles. Mais la mort est censée blanchir la mémoire, abolir les pensées et les questions, et, surtout, ne pas faire revenir Marilyn au-dessus d’une lune brisée, mais nue comme au début des mondes.
— Pouls normal. Tension un peu basse. C’est la deuxième fois.
— La première fois c’était… ?
— Les poignets.
— Il s’en est fallu de peu cette fois-ci. Il dort depuis longtemps.
— C’est son père qui l’a fait transférer ici.
Quand Thomas soulève ses paupières à nouveau, il voit un mur bleu et un tableau de Modigliani. Une femme avec un chapeau. Il sourit et referme les yeux.
Un bruit de pas lui rappelle ceux de sa mère. Petit garçon, il les entendait tous les soirs quand elle s’approchait de sa chambre pour les derniers câlins avant la nuit. Sa mère avait une façon assez particulière de le border : elle ramenait les couvertures sous son menton très lentement et refermait les mains de chaque côté de sa tête en appuyant les pouces sur ses paupières. « Bonne nuit mon plus grand trésor », disait-elle ensuite, avant de lui embrasser le front et de fermer la lampe.

— Pouls normal. Il a prononcé quelques mots.
— Lesquels ?
— « Amedeo. »
— C’est tout ?
— Non. Il a aussi dit « Bonne nuit, maman. »
Il n’y avait plus de joie. Plus de beauté. Pas même une lueur d’espoir. Alors dormir, dormir jusqu’à la fin des temps. Dormir. « Nous sommes au fond d’un enfer dont chaque instant est un miracle » avait écrit Cioran. Thomas aurait tant voulu échapper à cet enfer. Mais il n’arrivait plus à trouver dans son quotidien ces petits miracles qui l’auraient aidé à survivre. La beauté des fleurs crevait sous les tornades, une journée chaude en décembre le faisait pleurer sur les changements climatiques, la vue d’un Noir au supermarché le propulsait à la bibliothèque où il dévorait des livres sur le génocide rwandais, sur l’esclavage et sur le racisme. L’horreur du monde était un cilice qu’il portait volontairement, et l’ampleur de sa souffrance et de sa révolte mettait la beauté à genoux, la nuque offerte au bourreau.

— Pouls accéléré. Mouvements oculaires accélérés.
— A-t-il reparlé ? De l’Italien ou de sa mère ?
— Non.
— …
— Juste une larme. Une larme a coulé.
Son estomac lui fait mal. Lieu suprême où s’installent la douleur et la mélancolie, il l’avait plutôt malmené ces dernières années. L’expression « avoir des papillons dans l’estomac » l’avait toujours étonné. Depuis l’adolescence, il lui avait semblé que c’était plutôt des rats qui habitaient le sien à la moindre émotion. Il ouvre les yeux et réussit à les tenir ouverts. Le tableau de Modigliani est toujours là, mais Thomas réalise que c’est plutôt une affiche entoilée. Les murs sont bleus et il est branché à un soluté.

Il sait maintenant qu’il a encore manqué son coup.
Thomas regarde dehors. Les arbres sont encore dénudés malgré l’éveil du mois de mai. L’infirmière entre et il ne se retourne pas. Elle prend son pouls.
— Pouvez-vous me dire votre nom ? demande-t-elle.
— Thomas.
— Comment vous sentez-vous, Thomas ?
— Comment vous sentiriez-vous si vous aviez envie de vous faire baiser par George Clooney et que c’est Mr. Bean qui se présentait ? dit-il, la bouche pâteuse et le regard éteint.
— Je lui demanderais si on peut prendre un café. George Clooney n’est pas le type de madame.
— La mort, quand elle vous trahit, vous attache à une plus grande solitude encore. Je me sens comme un bateau pris dans les glaces.
— Voulez-vous manger un peu, Thomas ? Des rôties, des fruits en purée ? demande l’infirmière d’une voix douce, si douce qu’il pourrait croire qu’il est quelque part dans ce qu’on appelle le paradis, un monde sacré, sans peur ni inquiétude, où l’enfance est une parole d’éternité.
— Avez-vous des oranges ?
— Bien sûr. Thomas ?
— …
— Je m’appelle Mathilde.

— « Ma mère, voici le temps venu / d’aller prier pour mon salut / Mathilde est revenue », chante Thomas d’une voix basse et rauque, totalement désaccordée.

Il se retourne péniblement et regarde enfin

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