Nelky ou quelle sera la couleur de l arc-en-ciel ?
157 pages
Français

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Nelky ou quelle sera la couleur de l'arc-en-ciel ? , livre ebook

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Description

Nelky mêle fiction et réalité. C’est un texte fouillé et documenté. L’auteur, un curieux de l’Afrique du Sud, vous emmène dans le Veld, à la découverte d’un pays beau, mais un pays étranglé par l’homme. Son récit est porté par une langue claire et limpide, une langue dépouillé qui va à l’essentiel, une langue entraînante qui ne vous autorise pas à déposer le livre avant de l’avoir fini.

Informations

Publié par
Date de parution 01 août 2016
Nombre de lectures 28
EAN13 9782372230377
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lacina COULIBALY Salim
NELKY ou quelle sera la couleur de l’arcenciel ?
CIV 3037
Pour Diata Je ne t’ai pas oubliée.
Pour La vieille Tiétin Karna Le petit garçon que tu as tant aimé a construit pour toi, dans le plus bel endroit de son cœur, un immense jardin où viennent voltiger les plus beaux papillons du monde.
Pour Adiaf Jean-Marie Adé Les bossons te laisseront-ils venir tous les soirs à ma table de travail te pencher sur mes épaules pour achever la correction de mes nom-breuses maladresses de scribouillard ?
Pour Coulibaly Ténéna Filbien Cotenl, c’est toi qui me demandais pourquoi j’aimais tant les écri-vains sud-africains. Ils m’ont permis de capter la psychologie des Noirs et celle des Bœrs. J’aurais aimé que tu sois là pour lireNelky.
L’homme condamné à l’esclavage est esclave par destin et non par nature.
Vassili Grosmann Vie et destin
CHAPITRE 1
Les Malan habitaient un quartier calme de Jo-hannesburg. Leur maison ressemblait aux autres habita-tions. Le grillage qui servait de clôture n’était pas haut. De chaque côté de l’allée pavée qui conduisait jusqu’à la terrasse, s’étendait une pelouse verdoyante. Tous les jours, quand les maîtres du logis se rendaient au travail, leur petit garçon était coné à Louise.
*
Le petit Malan n’était pas un enfant turbulent. Il res-tait assis parmi ses cubes multicolores et regardait vague-ment pendant des heures. Louise vaquait à ses occupations et laissait l’enfant seul parce qu’elle savait qu’il serait sage. Néanmoins, de temps en temps, elle se rendait à la terrasse pour voir Lucky. Quand il était calme, elle le chatouillait. Parfois, elle l’emmenait dans la cuisine, le mettait sur une chaise et lui chantait des chansons zoulous. Le petit garçon répétait maladroitement.
*
Les Malan étaient satisfaits du travail de leur do-mestique. Louise avait trouvé elle-même cet emploi. Un matin, elle était arrivée à la ville. Elle avait âné dans les
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centres commerciaux, s’était adressée aux propriétaires de plusieurs magasins, restaurants et pâtisseries. Elle avait quitté le centre-ville, s’était aventurée dans les quartiers. Elle avait réussi à éviter les hommes en uniformes – Ils lui auraient certainement demandé son Pass – Elle avait son-né à plusieurs portes. Certaines s’étaient ouvertes. Certains locataires lui avaient conseillé d’aller ailleurs. D’autres la menacèrent d’appeler la police ou de lâcher le chien. Elle était repartie sous le soleil, s’était retrouvée dans un quartier calme. À travers le grillage de plusieurs villas, elle s’était adressée à des domestiques noirs, à des Blancs qui s’étaient à peine intéressés à elle. Elle avait aperçu à une terrasse une femme qui tricotait. Lorsque la jeune lle sa-lua, la tricoteuse abandonna son ouvrage, et vint jusqu’au portail. Que puis-je pour toi, petite sœur ? Je cherche du travail, madame. Entre. La femme était enceinte. La lle s’assit sur une chaise de ro-tin, s’essuya le visage avec un pan de sa robe. La maîtresse de maison apporta de l’eau et un verre de jus d’orange. Je te trouve très jeune. Tu ne vas pas à l’école ? J’ai arrêté d’y aller. Mon père ne peut plus s’occuper de moi. Il a perdu son emploi. J’ai douze ans. Je m’appelle Louise Dube. Je parlerai de toi à mon mari. La femme regardait la jeune lle nir sa boisson. La ga-mine portait une robe élimée. Ses sandalettes étaient usées. Ses cheveux, coupés courts, étaient propres. Quand le verre fut vide, l’épouse de Brian Malan indiqua la cuisine à Louise. Lorsque la visiteuse revint à la terrasse, Nadine avait repris son ouvrage.
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D’où viens-tu ? De Soweto. Tu es venue seule de Soweto chercher du travail ? As-tu eu la permission de tes parents ? Je ne leur ai rien dit. Elles parlèrent avec familiarité. Dube aida Nadine à la cui-sine. Brian téléphona pour dire qu’il rentrerait tard. Louise, il faut que tu retournes à Soweto. Reviens de-main. Prends cet argent pour t’acheter des chaussures. La jeune lle fut impressionnée par le comportement de Nadine. Qui était cette femme sympathique qui faisait conance à une lle noire qu’elle voyait pour la première fois ? À Johannesburg, les gens avaient peur des Noirs. Un domestique avait mis le feu à la maison de son employeur qui l’avait licencié alors qu’il lui devait plus de neuf mois de salaire. Un autre avait poignardé le propriétaire d’un restaurant qui l’avait fait condamner pour une faute qu’il n’avait pas commise. Le lendemain, à la première heure, Louise se pointa et sonna à la porte des Malan. La dis-cussion fut courte et le marché conclu. Les Malan eurent pitié de Louise. Ils lui donnèrent une chambre pour lui per-mettre d’économiser l’argent du transport. Elle ne se ren-drait à Soweto que pendant les week-ends.
*
Le petit Lucky était très attaché à Louise. C’est elle qui l’accompagnait à l’école jusqu’à ce qu’il fût capable d’y aller seul. Le garçon des Malan faisait peur à la domes-tique. Quand l’enfant eut trois ans, elle l’entendait souvent rire seul dans sa chambre et parler. Il refusait de répondre aux questions de Louise. Un matin, sur la route de l’école,
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Lucky parla en zoulou à sa baby-sitter. Où as-tu appris à parler cette langue ? C’est toi qui me l’a apprise. Ce n’est pas vrai. Mes chansons ne comportent pas les paroles que tu viens de prononcer.
*
Un soir, Nadine fut effrayée par le comportement de son ls. Elle l’entendit rire dans sa chambre et parler une langue qu’elle ne comprenait pas. Quand elle ouvrit la porte, l’en-fant était assis sur le lit les jambes croisées. Avec qui parles-tu ? Il n’y a personne, maman. Qu’est-ce qui te faisait rire alors ? Je pensais aux blagues de mon voisin de classe. La mère haussa les épaules et referma la porte. Les rires et les monologues continuèrent. De plus en plus inquiète, Nadine en avait parlé à son mari. Ils épiaient leur enfant. Se sentant observé, Lucky leur dit que c’est Louise qui lui apprenait quelques mots zoulous et xhosas. La petite Dube avait couvert son petit camarade. Elle ne comprenait pas le xhosa. Voyant que ses parents s’inquiétaient de plus en plus pour son équilibre mental, l’enfant adopta un autre comportement. À la maison, nul ne l’entendit plus parler une autre langue sauf l’anglais. Il redevint calme.
*
Brian offrit une bicyclette à son ls. Lucky avait dix ans. Tous les jours, après les classes, il faisait le tour du
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quartier à vélo. Malgré l’interdiction de ses parents, le petit Malan donnait son vélo aux enfants qui le lui demandaient. Un soir, Lucky aperçut devant une villa un garçon qui avait le même âge que lui. Le cycliste freina contre le mur et proposa son engin au garçon qui tenait un râteau. Tu ne veux pas faire un tour avec mon vélo ? Je ne sais pas monter. Dépose ton outil et viens essayer. Malan devint le moniteur du garçon. En une semaine, son élève roulait aussi bien que lui. Certains voisins, excédés, dénoncèrent Lucky. Nadine lui posa des questions concer-nant le petit Noir qui montait tous les soirs sur le vélo. C’est mon ami. D’où vient-il ? C’est l’enfant du jardinier des Adam. Il s’appelle Nel-son. Il y a quelque chose ? Non. Tes parents ont le droit de connaître tes amis. Ils n’en avaient plus reparlé. Les Adam étant en vacances, Nelson venait de Soweto pour aider son père. Ils y retour-naient tous les soirs. Deux semaines avant le retour des Adam, Lucky invita son ami. Les garçons s’installèrent derrière la maison, à la terrasse de la buanderie. Ils man-gèrent des cacahuètes, burent du jus d’orange, jouèrent aux cartes. De temps en temps, on les entendait rire aux éclats. Tout l’après-midi, les deux amis ne conversèrent qu’en zoulou. Nelson fut surpris d’entendre Lucky parler avec une maîtrise et une aisance extraordinaires une langue que les parents de son ami ne comprenaient pas. Qui t’a appris à si bien parler ma langue ? Je l’ai fait tout seul, répondit Malan. Personne ne peut atteindre ton niveau en apprenant seul.
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Tu as raison. C’est Louise qui est mon professeur. Malgré cette réponse, le petit garçon de Soweto avait des doutes. Une semaine plus tard, allant emprunter un bus pour retourner chez lui, Nelson aperçut Louise dans un groupe de femmes qui parlaient en faisant de grands gestes. Le garçon salua. Les femmes répondirent machinalement. Louise quitta le groupe. Tu rentres sans ton père ? Il ne rentrera pas ce soir. Il a eu un travail de nuit. Grande sœur, je voulais te demander quelque chose. Oui? t Louise en fronçant les sourcils. Lucky est très gentil avec moi mais je le trouve étrange. Il serait difcile de trouver à Soweto un Noir parlant aus-si bien le zoulou que le ls de Brian. Il a voulu me faire croire que tu étais son professeur. Il pourrait enseigner notre langue dans une université. Lucky est gentil avec tout le monde. Je l’ai toujours trouvé étrange. Il me raconte beaucoup de choses mais re-fuse de me dire comment il a appris nos langues. Pourquoi refuse-t-il de révéler son secret ? Louise haussa les épaules. C’est son droit. Nous n’y pouvons rien. Ils changèrent de sujet. Grâce à Lucky, Nelson et Louise devinrent familiers. À Soweto, ils habitaient le même quar-tier. Un mois avant les grandes vacances, Louise apprit à Lucky que Nelson ne viendrait plus à Johannesburg, son père ayant perdu son emploi. Les Adam licencièrent leur jardinier à cause des voisins indiscrets qui racontèrent que le pauvre homme faisait venir des Noirs dans la maison. Toutes les semaines, le petit Malan envoyait une partie de son argent de poche à Nelson.
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CHAPITRE 2
Non loin de Durban, il existe une grande ferme. Elle appartient au vieux Jacques. Le fermier y avait invi-té son petit-ls pour les vacances. C’étaient les premières vacances de Lucky chez son grand-père. Il était content de se retrouver dans la maison où sa mère avait grandi. Les premiers jours, accompagné par Jacques, le garçon visita la ferme. Le vieux présentait èrement son petit-ls aux ouvriers qui étaient tous des Noirs.
*
Tous les matins, le garçon se promenait dans les champs avec York, le vieux saint-bernard. Quand il retour-nait à la maison, la grand-mère feignait d’être en colère à cause de la boue qui recouvrait les chaussures de Lucky. Le ls de Nadine aimait aider les ouvriers. Il savait leurs noms. Les Noirs trouvaient étrange le petit-ls de leur Baas. Ils constatèrent avec beaucoup d’émerveillement que le petit Malan parlait parfaitement leurs langues.
*
Trois semaines après son arrivée, Lucky tomba ma-lade. Tous les jours, les travailleurs de la ferme passaient
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