Storm
120 pages
Français

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Description

Un accident de voiture vole les deux parents d’une adolescente. Commence alors pour elle une longue marche vers la survie avec l’aide de son parrain. Mais la France leur rappelle bien trop de souvenirs et ils décident de partir s’installer au Québec. C’est l’automne, la nature s’endort calmement, ils apprennent à vivre ensemble. Le temps leur fait découvrir une faune inconnue, une flore exceptionnelle, une population étonnante et attachante, mais surtout un amour naissant et encombrant. L’hiver est chargé de questions, de doutes, parfois d’incompréhension et toujours de découvertes. Le printemps sera pour eux un orage. Leur amour se développe davantage, devient néfaste, désastreux, les réponses à leurs questions sont absentes. Ce sera une pénible rupture, infernale, destructrice. L’été sera un mélange de peines et de joies, d’agonie et de renouveau.

Informations

Publié par
Date de parution 12 mars 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312006291
Langue Français

Extrait

Storm
Vincent Viellard
Storm













LES ÉDITIONS DU NET 70, quai Dion Bouton 92800 Puteaux
À ma sœur,



















© Les Éditions du Net, 2012 ISBN : 978-2-312-00629-1
Chapitre 1
L'aube me tira lentement d'un sommeil léger. Pelotonné sur mon fauteuil, je demeurai un instant immobile en regardant Caroline qui dormait encore, puis lançai un regard par le hublot.
L'avion traversa le brouillard transpercé de quelques pâles rayons de soleil avant de poser ses roues sur la piste de Matagami.
C'était une journée de fin septembre comme on en voit nulle part ailleurs, une saison comme il n'en existe qu'ici, au Québec, rousse et flamboyante. Un automne magnifique, avec ses bourrasques qui arrachent les feuilles des arbres pour les soulever et les porter très haut dans les airs. Un automne magique, mais trop éphémère.
Non loin de l'aérodrome, la petite ville encore baignée par la brume matinale se réveillait calmement.
Les lumières des maisons s'éteignaient une à une. Des ombres dansaient derrière les fenêtres. Les rues aux nuances vives s'animaient peu à peu d'une foule empressée.
C'était une fabuleuse découverte. Je foulai le sol de l’unique pays qui avait su enflammer mon esprit d'enfant.
Mais notre route était encore longue et nous ne pouvions pas trop nous attarder dans cette ville, beaucoup plus longtemps.
Il nous fallu trois bonnes heures au volant du 4X4 que j’avais loué pour arriver à la maison.
La route qui nous y mena était étonnement droite. Comme si une main géante avait déroulé un épais cordon d'asphalte au milieu de cette contrée. Chaque creux, chaque bosse, chaque virage ou chaque arbre semblaient dissimuler les secrets de l’histoire de ce pays stupéfiant. Nous nous étions imprégnés lentement de ce tableau éblouissant dans un mutisme parfait.
Les couleurs explosaient en se mélangeant, en s'entrelaçant. Les verts les roux, les rouges se mêlaient en un bouquet flamboyant.
A peine arrivés, ce pays nous envoûtait déjà par son gigantisme Sa beauté s'étalait brutalement devant nos yeux. Je n'avais jamais vu de ciel plus limpide, plus lumineux, de terre plus verte que la mousse, de forêt plus rousse que les flammes.
Je m'imaginai sans peine les ours noirs, les loups, les renards, les rongeurs ou les insectes qui, pour les réserves hivernales, pressaient leurs chasses à l'intérieur de ces innombrables forêts d'épinettes.

La maison était toute en bois et se situait à proximité d'un petit lac bordé d'immenses sapins. Quelques érables dorés nous informaient de l'hiver déjà imminent. Tout autour de nous, des épineux, des feuillus, des buissons et des mousses émanaient un mélange d'essences automnales.
En contrebas, un petit chemin serpentait, alliant le chalet au lac et traversant un pré encore bien verdoyant pour la saison. Un ruisseau le longeait, coulant calmement entre les touffes de jonc ou les arbustes accrochés à ses rives par leurs racines crochues.
Très haut dans le ciel, un triangle étendu d'oies sauvages, cap vers le sud, fuyait dans sa migration effrénée le froid qui nous arrivait. Fidèles à leur instinct depuis toujours, ces oiseaux empruntent inlassablement le même itinéraire.
L'endroit était féerique.
- Ca te plaît ? Demandais-je à Caroline.
Elle acquiesça d'un signe de la tête qu'elle avait posée depuis un petit moment sur mon épaule. Ses yeux embués de larmes ne pouvaient cacher son émotion. Une brise légère la fit frissonner:
- J'ai froid.
Nous sommes rentrés et nous eûmes l’agréable surprise de découvrir qu’un feu brûlait légèrement dans la cheminée. Je remis quelques bûches et le bois crépita avant de cracher rapidement une agréable chaleur qui nous réchauffa doucement.
Le salon était très rustique, meublé d'un grand canapé de cuir noir, de deux gros fauteuils de style mille-neuf-cent-trente et d'une grande table de sapin dont les nœuds ressemblaient à de gros yeux exorbités. Le bois du plafond était sombre et noueux. Sur les murs blancs étaient fixés quelques armes et trophées de chasse.
Au-dessus de la cheminée, une énorme tête d'orignal dominait toute la pièce pour nous toiser de son regard de verre.
Une sensation de chaleur, qui ne venait pas seulement du feu, nous enveloppa délicieusement.
Ca sentait la campagne.
Ca sentait la liberté.
Caroline s'était allongée sur l'un des fauteuils devant la cheminée, sans dire un mot. Elle s'endormit rapidement comme pour se libérer de toute cette angoisse qui finalement semblait ne la quitter que dans le sommeil.
Je restai planté là, devant elle, à la regarder et à me demander pourquoi était-ce arrivé. Pourquoi à cette gamine ? Elle ne le méritait pas. Qui le mériterai, d’ailleurs.
Je m'assis sur l'autre fauteuil, poussant un profond soupir de lassitude. Mon regard s'égara un instant dans la pièce, se posa sur la tête empaillée de l'animal, repartit vers les murs, revint sur Caroline.
Je me retrouvai il y a deux jours, en France, avant notre départ. Je la revis adossée contre un muret de mon jardin, droite et superbe, son corps d'adolescente moulé merveilleusement dans une robe noire, ses longs cheveux blonds tirés vers l'arrière, ses yeux terriblement lointains et dévorés par la douleur.
Tout était morne et gris, presque lugubre. La plaine, la forêt somnolaient mystérieusement, le soleil avait perdu tout son éclat, les animaux écoutaient en silence l'inacceptable tristesse de Caroline dans cet endroit habituellement si joyeux.
Pourrait-elle oublier cet accident affreux qui lui avait volé sa mère et son père, mon ami de toujours ?
Cette peine, ce cauchemar, cette démence qui l’avait frappée aussi soudainement, je n'avais eu aucun mal à me les imaginer. Je les ai vécus.
J'avais descendu le petit chemin de graviers pour la rejoindre et lui annoncer notre départ.
Partir pour oublier.
Partir pour revivre.
S'échapper, fuir, abandonner, s'éloigner de cette inacceptable catastrophe.
Elle avait alors fondue en larmes en se précipitant dans mes bras, frissonnante de détresse, tremblante de désespoir. Je l'avais serrée à en crever.
Elle avait sangloté dans le creux de mon épaule, accablée par tout son malheur, s'accrochant à moi, désespérément, éperdument, moi, son parrain et la dernière personne qui lui restait dans la vie.
J'avais partagé sa douleur, je l'avais serrée un peu plus fort. Ce n'était ni mon sang, ni ma chair, mais je l'aimais comme ma fille.
J'aurai tant aimé fermer les yeux un instant, claquer des doigts pour que tout redevienne comme avant. J'avais cherché des mots réconfortants à lui dire, des mots qui l'auraient tirée de sa léthargie, des mots merveilleux, magiques, mais aucune parole n'avait pu sortir de ma bouche. Qu'aurais-je pu lui dire d'ailleurs ? Y a t-il quelque chose à expliquer face à la mort ? La tristesse ne peut que se ressentir, pas se décrire.
J'étais aussi paumé qu'elle, je crois.
Alors, impuissant devant sa peine, j'avais caressé doucement sa tête pour tenter de la rassurer un peu, j'avais déposé quelques baisers sur ses cheveux, comme si mes mains ou ma bouche auraient pu dissoudre ce mal qui la rongeait.
Deux semaines s'étaient écoulées depuis la mort de ses parents. Deux semaines que j'essayais de la consoler, de lui apporter quelque réconfort, de la comprendre, tel que je le fais depuis le jour ou elle m’avait raconté son premier chagrin d'amour.
Et depuis deux semaines, elle ne disait pratiquement plus rien, se refermait sur elle-même, m'adressait des regards les plus tristes que je n'avais jamais vu de ma vie. Des regards qui n'attendaient qu'un ultime geste, qu'une ultime parole dont dépendrait alors toute son existence. Mais je ne savais pas quoi répondre.
Je ne maîtrisais plus la situation. J'étais comme elle, complètement paralysé face à cette insupportable vérité.

Un matin, attablés devant nos tasses de café, elle m'avait dit d'une voix tremblante, cherchant son souffle et ses mots:
- Partons d'ici.
- Tu veux aller où ?
Elle était venue s'asseoir sur mes genoux comme une petite enfant, me fixant d'un regard incendié quelques secondes. Un regard, qui lui, n'appartenait plus à une enfant.
- Tu devais aller au Canada. Emmène-moi et g

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