Un autre ami
160 pages
Français

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Un autre ami , livre ebook

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Description

Deux hommes que tout semble opposer deviennent amis à la suite d’un match de football télévisé diffusé dans un pub de Brighton.
Mais Benny l’Anglais et Bertrand le Français voient leur indéfectible amitié mise à rude épreuve quand Sybil, en fuite d’un établissement hospitalier, surgit une nuit dans leur vie. Elle provoque un enchaînement d’événements qui viennent bouleverser une existence jusque-là bien réglée et fait renaître en eux des sentiments qu’ils avaient préféré ignorer.
La disparition soudaine de Sybil, après quelques mois, puis la fuite de Benny amènent Bertrand à se pencher sur son passé et ses relations aux autres.
L’histoire conduit le lecteur jusqu’à Liverpool et entraîne les protagonistes, tous en quête d’amour, dans une aventure dont aucun ne ressortira indemne.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 février 2021
Nombre de lectures 15
EAN13 9782370115935
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

UN AUTRE AMI

Catherine Messy



© Éditions Hélène Jacob, 2018. Collection Littérature . Tous droits réservés.
ISBN : 978-2-37011-593-5
À Annick
Il y aura toujours une autre occasion, un autre ami, un autre amour, une force nouvelle.
Pour chaque fin, il y a toujours un nouveau départ.
Le Petit Prince , Antoine de Saint-Exupéry


It is better to have loved and lost, than never to have loved at all.
Lord Tennyson
(Mieux vaut avoir aimé et perdu ce qu’on aime que de n’avoir jamais connu l’amour.)


A friend is someone who knows all about you and still loves you.
Elbert Hubbard
(Un ami, c’est quelqu’un qui vous connaît bien et qui vous aime quand même.)
– 1 –


— C’est moi !
— Mais t’étais où, putain ?
— J’avais envie de sortir, seul.
— Écoute, je suis désolé pour ce que je t’ai dit hier ! J’étais en colère, contre Maureen et contre moi-même. Pas de bol pour toi ! Tu as écopé de ma mauvaise humeur. Je peux passer ?
— Oui ! Viens ! J’ai des trucs à te dire. Il s’en est passé des choses, pendant cette journée !
Je viens enfin de réussir à joindre Benny. Il sort rarement seul le dimanche. Il est tard, et je commençais à me faire du souci. Ce genre d’excursion en solitaire est très inhabituel pour qui le connaît. Et je le connais bien. Ou je croyais bien le connaître avant ses sorties nocturnes.
Mais il y a eu mon coup de fil de la veille.
— Tu m’emmerdes ! Si tu savais comme tu m’emmerdes ! Je veux bien comprendre que tu te sentes triste, mais elle s’est foutue de ta gueule pendant des années. Il serait grand temps que tu l’oublies.
« Elle », c’est Nancy, l’ancienne girlfriend de Benny.
— Il faudrait peut-être passer à autre chose ! De l’eau a coulé depuis votre séparation. Et n’oublie pas que, moi aussi, j’ai du vague à l’âme ! Alors, arrête de geindre ! Tu ne vas pas traîner ça encore des années ! Ça finit vraiment par m’emmerder !
C’est vrai. Je n’en peux plus des jérémiades incessantes de mon mate . Cela fait plusieurs années que nous nous connaissons, et Benny vient régulièrement pleurer sur l’épaule de son pote, c’est-à-dire moi, Bertrand. Bertrand Dubreuil, français, originaire de Lille, pâtissier de profession. Je travaillais autrefois en France, pour un boulanger, mais j’ai décidé un jour de tenter ma chance en solo, qui plus est à l’étranger. C’est ainsi que je me suis retrouvé en Angleterre, à Brighton.
Et je venais de rembarrer mon meilleur ami au téléphone. Ne soupçonnant pas que cela allait chambouler toute une existence jusque-là bien rodée.
Ça finit vraiment par m’emmerder !
Voilà mot pour mot ce que j’ai dit à Benny avant que sa vie bascule. Des mots qui allaient lui faire mal.
C’était il y a quatre mois. Ces paroles sont bien gravées dans ma mémoire. Je revenais tout juste de France, mon ultime voyage là-bas.
Benny ne manque jamais une occasion de se pointer chez moi, et mon retour du Vieux Continent en est une. Des moments d’échange qui lui sont réservés, à lui, rien qu’à lui. Il m’a accompagné quelques fois en vacances sur mon sol natal, mais pas depuis un long moment. Il aime que je lui parle de ma vie là-bas, mais il n’aime pas me savoir parti. Il a toujours peur que je ne revienne pas.
J’en suis toujours revenu. Et cette fois pour de bon. Mon divorce d’avec Maureen est maintenant officiel. Alors, les plaintes de mon pote m’indisposent vraiment.
– 2 –


Benny, pilier d’une modeste équipe de soccer de quartier, est de taille moyenne et corpulent, au teint souvent rougeaud encadré par une chevelure blonde coupée en brosse. Un physique à la Wayne Rooney, en faisant abstraction de la couleur des cheveux. Je ne le lui ai jamais dit : Rooney est l’un des attaquants du club ennemi, Manchester United !
Il me fait penser à un bouledogue, trapu et court sur pattes. J’aime bien trouver des correspondances entre les individus et les animaux. Moi, je serais plutôt du genre épagneul. Sans doute à cause de mes cheveux bruns mi-longs qui plongent sur le devant et cachent souvent mon regard de chien battu, comme celui du moment.
Il n’est pas méchant, mais c’est un impulsif qui réfléchit après avoir agi. Des conséquences désastreuses peuvent s’ensuivre. C’est moi qui le calme quand un événement le contrarie au point de l’enflammer et de le faire sortir de ses gonds. Il ne parvient plus à maîtriser la colère qui s’empare de son esprit et de son corps. Il se met à cogner, donner des ruades, tout en hurlant de rage. Un jour, j’ai dit à ma mère : « Il peut exploser à n’importe quel moment ! » Il lui est arrivé parfois d’avoir envie de faire du mal à ceux qui lui en faisaient, de se déchaîner contre eux. D’utiliser sa force pour démolir tous ces fumiers ! Et de la force, il en a, le bougre ! Même s’il aboie plus souvent qu’il ne mord vraiment, il vaut mieux ne pas l’asticoter. Parce qu’une fois lancé, il attaque bel et bien, et la morsure peut faire mal, très mal !
Demandez à Peter, un gars du pub où nous nous rendons régulièrement. Il doit encore s’en souvenir. Une remarque déplacée au sujet de Nancy, et les coups sont partis. Il n’a pas eu le temps d’esquisser un mouvement. Benny, c’est un peu celui qui vous envoie valser plus vite que son ombre ! On s’est tirés avant que d’autres décident d’intervenir. Je ne peux pas me permettre d’afficher, devant les clients, un faciès marqué par les turbulences du temps qui passe !
Il est âgé de 46 ans. Derrière sa force apparente se dissimulent une grande émotivité et des troubles de santé presque quotidiens. Dont il évite de se plaindre, mais que je devine à l’expression de son visage. Il travaille comme manutentionnaire dans un supermarché dont il déballe chaque jour les marchandises. Il fait aussi des petits boulots de jardinage pour arrondir ses fins de mois.
Pour mieux comprendre Benny, il faut savoir qu’il fait partie de ces personnes que le sort a bien secouées depuis la naissance. D’abord en étant né d’un père qui s’est tiré sans laisser d’adresse, après avoir engrossé deux fois sa compagne à deux années d’intervalle. Il a été élevé par un amant de sa mère, devenu l’époux de celle-ci, en compagnie de trois autres enfants, un frère, deux sœurs. Ses deux demi-sœurs faisaient l’admiration de leur père. Son frère et lui avaient la malchance d’être les fruits de la première idylle de leur mère, Ann. Celle-ci faisait des ménages, son beau-père était chauffeur de bus. Il n’a guère de souvenirs des caresses parentales, plutôt ceux des roustes paternelles qu’il recevait sans comprendre ce qui avait pu déclencher leur déferlement. Il n’a connu l’école que de manière sporadique. Beaucoup d’absentéisme pour des raisons qu’il préfère taire, même encore maintenant. Je n’aimais pas l’école ! Elle ne m’aimait pas non plus. J’avais très peu de copains. Il se remémore les récréations passées à regarder les autres. Puis, en grandissant, des bagarres auxquelles il participait, et celles qu’il déclenchait en raison d’un mot de travers sur son physique ou sur ses difficultés à s’exprimer. Alors, il a un jour quitté sa famille, pris des petits boulots dès l’âge de 16 ans, après une scolarité hachée dans une comprehensive school. {1}
Il a fini par atterrir à Brighton. Il n’a jamais cherché à revoir sa mère ou savoir ce qu’elle était devenue. Son jeune frère est resté longtemps en contact avec lui : Brian, le cadet de la fratrie, celui qu’il a souvent protégé des coups de ceinturon de son beau-père. Mais depuis dix ans, plus de nouvelles.
À l’époque de sa jeunesse, son seul lien affectif inconditionnel était celui qui le rattachait à son chien, Domino, un petit bâtard noir et blanc, trouvé moribond dans un parc.
Benny m’a raconté comment il l’avait emmitouflé dans une vieille couverture pour le rapporter à la maison, que le chien était si faible qu’il n’avait même pas la force de se nourrir tout seul. Il était obligé de lui mettre la nourriture directement dans la gueule.
— J’avais 8 ans. Je jouais dans un parc, pas très loin de la maison. J’ai entendu des gémissements au momen

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