Faim, mort et foi
276 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Faim, mort et foi , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
276 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Faim, mort et foi est une fiction dans un contexte historique respectant la langue romane. J'y fais intervenir, entre France et Italie, des personnages au cœur d'une période s'étalant de la fin du XIe siècle à 1349, et donc la peste noire.



Chacune des trois parties développe une intrigue propre, mais un fil conducteur familial indirect les relie entre elles. Nous abordons les problèmes : faim, maladie, guerre, meurtre, sorcellerie, antijudaïsme à tous les échelons de la société, des plus humbles (artisans, paysans, soldats) aux plus élevés dans la hiérarchie médiévale (abbés, barons, rois, papes).

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414516698
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0075€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com.com
 
Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
 
ISBN numérique : 978-2-414-51670-4
 
© Edilivre, 2021
Précisions pour le lecteur
Ce roman à épisodes contient du vocabulaire médiéval ; pour éviter de surcharger en notes de bas de page, les mots suivis d’un astérisque renvoient au glossaire en fin d’ouvrage.
Les phrases écrites en langue romane des XI e -XIV e siècles sont immédiatement traduites en langue moderne. L’auteur recommande de lire ces premières à voix haute car leur sonorité donne du sens.
Des renseignements sur les personnages ayant réellement vécu sont indiqués en note de bas de page.
 
Tut est muez, perdut as sa colur ;
Ja mais n’iert tel cum fut as anceisurs.
(…) Bon fut li secles ; jamais n’ert si vailant.
Velz est e fraisles, tut s’en vat declinant,
Si’ est ampairet, tut bien vait remanant.

Le monde a changé de forme et perdu sa couleur ;
Il ne sera jamais plus comme il fut pour nos ancêtres.
(…) Le monde était bon : il ne vaudra jamais autant.
Il est vieux et sans force, et tout entier va sur son déclin.
Il a tant empiré que tout le bien se perd.
La vie de Saint Alexis (extraits), poème du XI e siècle.
Première partie Faim et violence
Chapitre premier
Quid de Philippo rege Francorum et Lodeveo filio ejus… ?
[Qu’en est-il de Philippe roi de France et de son fils Louis ? ]
Pendant ce temps, maître Renart était, ce matin, en quête d’une proie dans un bois, près du chemin ; c’est alors qu’il entendit des aboiements de chiens, tout proches de lui et qui étaient sur ses talons…
Et. I. [un] vilain après huiant 1 après les chiens en la forest…
C’est alors que quatre enfants jouaient à l’orée du bois de Saint-Gobain lez un essart fraichement élargi ; là où l’humidité s’évapore en fines volutes dans un brouillard d’octobre. Les deux plus grands qui avaient dans les dix ans tenaient les rôles des célèbres compères Renart et Ysengrin, les deux plus petits qui devaient avoir six ou sept ans, se contentaient des places subalternes – aujourd’hui Couard le lièvre et Espinard le hérisson – en attendant de monter en taille donc en grade.
C’est la vie !
On joue à se cacher du loup, de l’ours et du sanglier, mais aussi on s’aguerrit, on s’estime par le regard de haut en bas, on règle ses comptes sur la lice en ordalie* au fer rouge, ce mot impressionnant qu’ils ont entendu prononcer par les parents qui avaient assisté de loin au bourg à un combat entre gens de la chevalerie, un jour qu’ils étaient allés vendre quelques légumes et maigres volailles. On vend plutôt que de profiter, car Nécessité fait trotter la vieille , le besoin de quelques pièces d’esterlins* est impératif, à la ville comme à la campagne d’ailleurs.
Leurs aïeux étaient serfs. Ils ne le savent plus mais les guerres des âges sombres – peuple contre peuple – avaient fait de leurs ancêtres des esclaves, soit parce qu’ils n’étaient pas chrétiens, soit parce qu’ils avaient été capturés puis vendus lors d’une razzia quelconque. La marchandise humaine, de tout sexe et en priorité les enfants, se vendait bien alors, et les domaines carolingiens en grand nombre avaient longtemps été demandeurs. Puis l’Église s’en mêla, et cette main d’œuvre servile et peu coûteuse, peu à peu, de moins en moins alimentée par les flux de peuples migrants, se fixa, ou plutôt « fut fixée » par les propriétaires terriens carolingiens pour très longtemps. La noblesse franque reproduisait pour partie le système des villae gallo-romaines ; un système extensif où le rendement était faible.
Au commencement du second temps du XI ème siècle, les seigneurs fonciers laïques ou guerriers avaient déjà ramené tous les « bras » aux statuts différents en un seul corps dit « libre » ; et cette nouvelle condition – en leur octroyant le plus souvent un lopin de terre – fit progressivement d’ eux des vilains, pris du sens propre : « ceux qui travaillent dans la villa », plus motivés car plus responsabilisés par leur petit lopin de propriété : on pouvait désormais cultiver son jardin, le faire fructifier, à condition d’œuvrer en contrepartie, et de façon conséquente, sur le domaine seigneurial : élagage, curage des fossés, drainage, culture et moissons. Les rendements avons-nous dit étaient très faibles mais les propriétaires, laïque ou abbé, se servaient malgré tout largement pour tenir « chacun son rang ». Et forcément la faim demeurait perpétuellement au creux des ventres !
Ainsi, Renart, Ysengrin, l’ours Brun et consorts se chipaient ou plutôt volaient au paysan et aux moines du miel, du cochon au saloir, des gélines rousses et des anguilles, des fromages enfin. Pas étonnant que la (plus ou moins) légende du moine gras ait fait rêver des générations de quidams désœuvrés ; entendons-nous : il était dit plus enviable de rentrer au monastère que de s’échiner pour presque rien en payant la dîme. On colportait de village en village des histoires de frères qui passaient leur vie à boire, et manger du fromage… même les enlumineurs des abbayes historiaient les manuscrits de cette chose commune. La dérision ! Encore fallait-il supporter « la règle » stricte : se lever tôt, travailler quand même de ses mains, renoncer à la chair, au vice répréhensible ! Enfin, peut-être !
Un auteur de Neustrie 2 avait fait de la vie misérable de son temps, remplie de lutte entre les Grands, et de famine, une œuvre composée de farces où l’animal vivait près de l’homme ; on contait ces histoires avec force mimes le soir, et pas seulement aux enfants. Le curé du village fermait les yeux sur ces moqueries sans méchanceté, parce qu’il partageait leurs souffrances, et peut-être aussi parce qu’il se doutait que derrière l’histoire, celui ou ceux qui écrivaient ne pouvaient être que clercs lettrés, comme lui ou presque. Et puis rien d’hérétique dans tout ça ! Ça ne sent pas le souffre et on n’aura pas le poil brûlé. L’autodérision était dès lors inventée ; elle ne nous quitterait plus.
Les quatre gosses – heureusement – insouciants, n’avaient pas la moindre idée de ce que l’on vient de dire. Ils sont les survivants des longues années où les inondations perpétuelles à l’année gâtaient ou du moins empêchaient semailles et moissons : trop de pluie, trop de grêle ou même trop de chaleur ; la nourriture pourrit sur pieds, les corps aussi, évidemment. La famine et la maladie avaient emporté ad patres un nouveau-né sur deux, ou peu s’en faut. Les parents avaient tellement peur que les enfants ne survivent pas qu’ils confiaient souvent vers douze ans les puinés malingres ou boiteux au monastère, où on les éduquerait, où on les nourrirait surtout. L’oblat ou « donné » deviendrait après quelques années un frère de chœur, voire a minima un frère convers qui participerait à la mise en valeur des terres, au défrichement, au détournement des ruisseaux pour élever des poissons, à l’élevage des brebis pour leur lait et le fromage, au travail du houblon, de l’orge et de la bière, à la meunerie… à moins qu’il devint chanoine de la cathédrale en construction à Laon : le chantier attirait les artisans charpentiers, maçons, cloutiers, tailleurs de pierre – marteau-pic à l’épaule et scie à la ceinture – français, forgerons itinérants, verriers italiens, brouetteurs allemands, et le « tout venant porte-tout » des deux sexes, attirés par le mouvement ou les belles miettes de la consommation urbaine. Et puis Il prierait comme formidable « intercesseur » pour les âmes errantes des défunts de toutes les familles ; et comme on souffrait ici-bas en se préparant une vie que l’on espère meilleure dans l’Au-delà, le « métier » ne connaissait pas le chômage… et Dieu sait si les âmes arrivaient en flots ininterrompus, et remplissaient pêle-mêle la terre sanctifiée de l’aître* en contrebas de l’église – sans cesse étendu, quand on ne rouvrait pas les cercueils pour y superposer les corps –. La maison de Dieu justement était pleine à craquer ; on y regardait les fresques à peine sèches (ou peut-être déjà en train de moisir) et surtout la Passion du Christ qui « lui aussi avait souffert – Ô combien – pour racheter les fautes »… des autres ! Mais sont-ils responsables ? On leur a dit que oui. Alors il fallait suivre son exemple ! Souffrir encore !
La moitié des vilains est affublée du qualificatif de « culsverts 3  »; le commun des mortels ne sait pas trop ce que cela veut dire, mais on comprend bien que le vocable les attache à leur ancienne condition : celle qui les liait autrefois aux grands domaines agricoles comme esclaves crasseux et galeux. Et puisque les enfants jouent désormais (tous) ensemble, les « culsverts » affublent les autres d’un « culrouge » ou d’un « culbleu » pour équilibrer la balance. C’est de bonne guerre ! L’enfant imite son monde.
Dans son prêche sur la grêle qui a gâté les champs, le curé du village vestu de bure a déclaré «  Or avez bien oï : diablie cor mou par a fet que male beste  » – Oui, vous m’avez bien entendu : le diable s’est conduit là en très méchante bête – tout en aspergeant copieusement d’eau bénite l’auditoire bouche bée (mais on entend des genoux s’entrechoquer) – ; puis il associe comme « maudits et hérétiques » les voraces et laids mulots, les vils hannetons bourdonnants, les limaces gluantes et les chenilles grouillantes qui infestent les champs, car – et là le prêtre vouté détache chaque mot d’une voix forte pour électriser son auditoire tremblant tête baissée – par leur faute, les (pas assez) bons chrétiens manquent de ravitaillement et souffrent de disette. Le ventre crie. Voilà qui est dit : les créatures diaboliques attaquent comme autant d’instruments ce bas monde, et c’est par plus de contrôles des mœurs que l’on pourra lutter avec le renfort des saints. Al

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents