Le Pendu de l Antiquaille
196 pages
Français

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Le Pendu de l'Antiquaille , livre ebook

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Description

1551, Lyon. Un riche et vieux marchand est retrouvé pendu dans sa maison de l'Antiquaille, son trésor pillé. Fâcheuse nouvelle à un moment historique où troubles sociaux et conflits religieux font craindre le pire...

L'enquête, menée pour faire prompte justice, conduit à inculper tour à tour des rôdeurs vaudois, des mercenaires de l'armée royale, des débiteurs de l'avare, un domestique, un moine corrompu, deux amoureux de la trop jeune et trop belle épouse du marchand accusée de sorcellerie, un peintre talentueux et un cousin huguenot exalté. Tortures, exécutions et autres morts violentes s'ensuivent.

Un médecin de l'Hôtel-Dieu nous fait le récit de l'affaire à laquelle il se trouve mêlé jusqu'à subir un procès de l'Inquisition... Temps anciens. Temps nouveaux...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 janvier 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334064514
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-06449-1

© Edilivre, 2016
J’ai été mêlé aux événements que je m’apprête à rapporter.
Très fier d’avoir été choisi par les Recteurs de l’Hôpital du Rhône pour occuper la même fonction respectée que le grand François Rabelais quelque vingt ans plus tôt, je vivais dans la sérénité et la sécurité.
Ma participation inattendue à l’enquête sur la mort violente d’un riche marchand m’ouvrit les yeux sur la réalité du monde. Cette mort ne fut qu’un événement infime, mais comme elle fut suivie d’une série tragique de désordres, de meurtres et d’exécutions, j’ai voulu en faire le récit. Je rends compte de cette histoire minuscule comme d’un microcosme de la grande Histoire qui a vu, depuis, la ville de Lyon et le pays tout entier dévastés.
Martin PONTILLE
Martin Pontille (1517-1572) Médecin, homme sage, instruit des affaires de son temps – disparition présumée au cours des Vêpres lyonnaises des 31 août – 1 er septembre 1572 ou Saint-Barthélemy lyonnaise .
Chapitre 1 La déplorable mort du marchand Lazzaro Graziano alias Lazare Gratien du Mont
« Montet en ce lieu que l’on dit l’Anticaille
Et me tenoye là, quoy que le lieu peu vaille
Car, quy n’y a victaille, tout y fault jusqu’à l’eau
Mais aultrement, sans faulte, le regard y est beau »
Pierre Sala, Les prouesses de plusieurs roys
On était le jeudi 15 juillet 1551. L’enquête commença, dès la nouvelle connue au Consulat et chez le Sénéchal. Tout hors d’haleine et tremblants de peur, un domestique et sa femme l’avaient apportée, en fin d’après-midi ; ils venaient de découvrir leur maître, le marchand Lazare Gratien du Mont, pendu à une poutre, dans la salle basse de sa maison de campagne, sur la colline de Fourvière.
– Pendu ? Comment diable ? s’exclama Mathieu Buisson, un échevin de la Ville, en recevant la déposition. Gratien du Mont ! Tu parles de Lazzaro Graziano ? Tu viens me dire que le marchand Graziano s’est pendu ?
– Oui, c’est bien lui, mais je sais pas bien s’il s’est pendu, marmonna l’homme.
– Pourquoi dis-tu ça ? Tu l’as trouvé pendu, oui ou non ? Tu ne sais pas ce que tu dis ?
– Si, messire. Il est bien pendu à une poutre. Mais le logis est tout en désordre, comme si on s’était battu alors ça m’a fait penser qu’on l’avait peut-être tué.
– Ah, bon ! C’est autre chose.
Mathieu Buisson marqua un temps d’arrêt. Il repoussa son siège et se dressa en s’épongeant le visage de sa manche. Il était gros, il faisait chaud, il transpirait et cette affaire était désagréable. Le marchand Graziano pendu, volé, assassiné peut-être ! Rien de réjouissant ! Il se prit à considérer avec suspicion les deux misérables qu’il avait sous les yeux. La femme était sans importance, une paysanne sale, en guenilles. Mais l’homme, barbe drue mal taillée, crâne chauve luisant, larges épaules, cinq pieds six pouces, lui était déplaisant, malgré son allure déférente, le bonnet à la main : trop grand, trop puissant, dangereux,
– Je vois. Vous deux, ne bougez pas de là. On va avoir besoin de vous.
– Et comment t’appelles-tu, au fait ? jeta-t-il à l’homme. Et où étiez-vous au moment de la mort de votre maître ?
– Moi, c’est Ennemond Pissard, messire, ancien soldat. Avec la Louise, on est les derniers domestiques de messire Gratien du Mont. On sait rien. Juste avant midi la Louise lui a porté son manger.
– Ah ! Et comment il t’est apparu à ce moment-là ? fit-il à la femme.
La Louise s’avança en bredouillant :
– Comme les autres jours. Il est pas gai tous ces temps, il dit pas grand-chose, il mange à peine.
– Et après ?
– On sait rien ! répéta Pissard, en élevant la main, comme s’il allait prêter serment. Après ? Après on était dans les vignes, la Louise et moi, à biner plus haut sur la colline.
– On vérifiera, mais comment ça, vous êtes les derniers domestiques ? Graziano est riche.
– Oui, on est les derniers à l’Antiquaille ; en bas, il y en a d’autres au magasin avec Cottereau, le commis. Mais à l’Antiquaille, il a renvoyé tous ses gens, les uns après les autres, depuis qu’il a plus sa femme qu’il a chassée. Il voit presque personne à part des clients qui préfèrent le rencontrer là-haut plutôt qu’au magasin. Et encore souvent la nuit, pour pas se faire voir. Et des prêtres, enfin un moine, un cordelier, Frère Grégoire qui venait souvent, au moins une fois par semaine. Et un gros monsieur qui vient de temps en temps avec des filles, en voiture, la nuit aussi.
– D’abord, pourquoi tu parles de la maison de l’Antiquaille ? Il n’y a pas deux maisons de l’Antiquaille, à la Croix de Colle. Je n’en connais qu’une, celle de Pierre Sala, et Pierre Sala, écuyer et maître d’hôtel du Roi Louis XII, c’était autre chose que ton maître. Il a même reçu le Roi François dans sa demeure. Aujourd’hui, c’est son petit-fils Symphorien Buatier qui en a hérité. Et Buatier, c’est un Monseigneur, ce n’est pas non plus ton maître, que je sache.
– Mais, c’est lui qui le voulait, qu’on appelle sa maison l’Antiquaille.
Buisson eut une dernière question sur ce visiteur accompagné de filles sans rien tirer de Pissard. Il n’insista pas, il verrait plus tard. Comme tout le monde, il connaissait la vanité ridicule de l’Italien et ses déboires conjugaux. Il fallait parer au plus pressé. Il dépêcha un commis à la Roanne pour que le Sénéchal puisse aviser. Il fit aussi quérir un médecin de l’hôpital. Le sort voulut que ce soit moi, Martinus Pontillus.
Les uns à cheval, les autres sur leur mule ou à pied, Pissard et sa femme en-tête, l’officier Antoine Bossant qui représentait le Sénéchal, chevauchant de pair avec Mathieu Buisson, un greffier, un des curés de Saint-Nizier, du nom de Poupard, des hommes d’armes et moi-même, vêtu de ma robe noire et jurant tout bas contre ma mule qui bronchait à chaque pas, peu après, nous franchissions le pont sur la Saône, passions devant la Maison Ronde et nous dirigions par la rude Montée Saint-Barthélemy vers la demeure que le riche marchand s’était entêté à faire construire, juste en-dessous de la propriété de Pierre Sala et à son imitation même s’il n’avait jamais porté le moindre intérêt aux collections d’antiquités dont Pierre Sala était passionné et qui avaient donné à sa maison un nom, l’Antiquaille, qui commençait à se répandre sur le quartier de la Croix de Colle.
Au-dessus de leurs têtes, le ciel était uniformément bleu, lumineux, aveuglant. Le soleil avant de basculer derrière la colline de Fourvière chauffait encore durement. Pissard qui guidait notre petite troupe en boitillant, s’arrêta devant une haute porte pour nous laisser pénétrer dans le jardin de Graziano. Le terrain était clos de murs en pierre dorée hauts de près de dix pieds, avec deux ouvertures, la porte du jardin que le domestique venait d’ouvrir et un portail donnant accès à l’allée conduisant à la maison.
– Pourquoi tu nous fais passer par cette porte du jardin ? demanda l’officier qui avait mis pied à terre.
– C’est que le maître nous avait fait condamner l’autre, on s’en servait rarement ; il était craintif et on entre très bien, même avec un cheval, par cette porte, le passage est bien suffisant, mais il faut descendre de sa monture. La porte est barricadée la nuit. Les visiteurs sont au courant et appellent pour se faire ouvrir.
– Ils sont nombreux ?
– Non, plus maintenant. C’est pour des affaires.
– Bon, on sait aussi que Graziano était un usurier. On verra plus tard. Allons.
L’enquête commença. Le jardin était mal entretenu. L’herbe était haute et poussait dans le chemin et l’allée que nous rejoignîmes. On estima que Graziano avait reçu, dans la journée, plusieurs visiteurs dont l’un possédait une monture : il était tombé une averse au cours de la matinée, les herbes mouillées piétinées ne s’étaient pas redressées, la terre avait formé de la boue et, d’après les observations d’un homme d’armes de la suite, on suivait les piétinements des sabots d’une mule de l’entrée jusqu’à une large grotte profondément creusée à flanc de coteau qui abritait une citerne et servait tout à la fois, expliqua Pissard, de cabane de jardin, d’écurie et de logement pour la Louise et lui-même. Les traces de la mule se dirigeaient ensuite vers la sortie avec celles de deux chevaux appartenant à son maître, précisa encore Pissard, des bêtes qui lui avaient été volées. Les nombreuses marques de pas d’hommes étaient peu lisibles.
Ils s’arrêtèrent pour contempler la villa. Elle était laide, inachevée. Graziano s’était flatté de faire mieux que Pierre Sala mais on était loin du compte. La maison, supportée à l’est sur des piliers et s’ouvrant à l’ouest sur la colline, comprenait deux corps de logis de part et d’autre d’une tourelle d’escalier qui permettait d’accéder aux deux étages desservis par des galeries à l’italienne. La construction avait été abandonnée au milieu des travaux. Ils avancèrent vers la façade sud, la seule partie habitable, à en juger, de l’extérieur, d’après les portes et fenêtres. Ils gravirent trois marches pour accéder au rez-de-chaussée et pénétrèrent dans une vaste salle commune. Une longue table, quelques escabeaux et un banc, deux chaises à dossier munis de coussins de velours, un coffre, une armoire éventrée composaient le mobilier ; les deux murs aveugles étaient recouverts de tapisseries représentant des scènes de chasse, seules richesses apparentes.
La vue du pendu les offusqua. Il se fit un silence. Le curé se signa. Messire Buisson retira son bonnet carré et fit une grimace horrifiée : – C’est bien Graziano, murmura-t--il. Il l’avait reconnu au premier regard, un homme dans la cinquantaine, maigre, le visage enflé, bleui par la strangulation sous la barbe grise. La mort ne faisait pas de doute. L’officier de

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