Messaouda
486 pages
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Messaouda , livre ebook

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Description

Messaouda est un roman (écrit à la première personne) dont l’histoire se situe en Algérie en 1958.
Un militaire du contingent en poste sur un piton de petite Kabylie est fait prisonnier par une bande de fellaghas et emmené dans leurs différents repaires. On va tout d’abord se servir de lui pour le transport du poste de radio puis pour des travaux beaucoup plus délicats qui engageront son avenir.
On lui dit qu’il va être conduit en Tunisie pour servir éventuellement de monnaie d’échange... Mais le prisonnier est sous la coupe d’une infirmière de l’ALN, qui de surcroît, est une belle femme. Il en résulte à la fois une histoire de guerre et d’amour, où tout est possible...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 10 mars 2014
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332689795
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0112€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright














Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-68977-1

© Edilivre, 2014
I
Juillet 1958.
Nous sommes en plein combat au bord du Soufflât, un oued de Kabylie. Les fusils mitrailleurs crépitent de toutes parts. Mon ami Lucien vient de s’écrouler dans la boue. Je ne puis me précipiter tout de suite à son secours car on tire sur mon abri. A la fin de la rafale je lève la tête, Lucien n’a pas reparu. Sans réfléchir je plonge dans le trou où il vient de disparaître. Je le sors en hâte et le traîne sur la berge. Mais une rafale m’oblige à baisser à nouveau la tête.
Lucien a le visage recouvert de boue et de sang. Il a même avalé de cette fange. Pendant que le fusil mitrailleur tire encore je penche la tête de mon ami et essaie de le faire vomir. Je n’ai pas suivi des cours de secourisme mais je sais obéir à l’instinct de conservation. Et je puis vous assurer que faute d’instruction la pensée de la mort vous donne du génie. Il me semble que Lucien ne respire toujours pas. Je m’aplatis sur son corps et l’idée me vient de lui souffler dans la bouche de toutes mes forces. Je n’ai soufflé qu’une fois. Il a eu comme un sursaut. Il est vivant.
L’ennemi ayant décroché un moment, les autres gars de la patrouille nous ont rejoints pour s’enquérir de l’état de Lucien. Il est blessé à l’épaule et à la tête.
A la tête la balle n’a fait qu’une éraflure au crâne. L’os est visible, mais pas atteint, près de la tempe. Le casque lourd a dû imprimer une légère déviation au projectile, qui a ricoché.
Avant que la blessure ne s’aggrave il faut rejoindre le camp situé là-haut sur un piton, au lieu dit Souk-El-Kémis. Pas d’hélicoptère disponible pour le moment, pas d’ambulance. Un camarade, qui a quelques notions de secourisme et du matériel fait un pansement à la tête et à l’épaule. La seconde balle a traversé Lucien juste au-dessus de la clavicule. Petit à petit l’hémorragie s’arrête mais avec l’intense chaleur de juillet et il est préférable de transporter le blessé assez rapidement, pour qu’il reçoive des soins plus importants. Il a perdu beaucoup de sang.
Mais les hommes sont en plein djebel, au cœur du baroud qui commence. Et il ne saurait être interrompu parce qu’il y a un blessé. Je n’ai que le grade de brigadier, je ne puis me permettre de prendre des décisions quand un supérieur est là. C’est le sergent Vigier, commandant notre groupe qui me demande de ramener Lucien au camp. Il me donne quatre hommes, comme brancardiers, et un FM et son pourvoyeur. Nous essuyons encore quelques rafales et nous tirons au jugé sur des formes humaines qui se réfugient derrière une touffe importante de figuiers de barbarie.
Nous n’avons pas de brancard mais Le Gorec et Boissonnade ont tôt fait d’en constituer un avec deux fusils et leur veste de treillis. Je place en tête du groupe Martin et Labadie réputés pour être les meilleurs éclaireurs de pointe de la section.
A peine avons-nous parcouru cinquante mètres qu’un crépitement lointain d’armes automatiques nous plaque au sol. Ce sont les rochers qui en font les frais, ou çà et là quelques touffes d’herbes. J’ose dire que notre expédition est un suicide. Mais nous n’avons pas le choix. Nous disposons d’un appareil radio. Je le porte. Je renseignerai la batterie et le camp au fur et à mesure de notre progression. J’ose demander au commandant à Aïn-Bessem, un hélicoptère pour que l’on transporte Lucien à l’hôpital Maillot d’Alger.
Le commandant me demande de suivre l’oued’ jusqu’à la côte 520. Je consulte la carte. C’est possible. Là je devrais attendre. On m’avisera si je dois rentrer à Souk-El-Kémis ou si une Alouette, d’Alger, viendra à notre secours.
Nous avons attaché un panneau spécial en tissu, sur la poitrine de Lucien afin que l’avion de reconnaissance qui passe en rase-mottes au-dessus de notre tête sache bien que nous sommes des amis, en difficulté. Le T 6 vire sur l’aile, ronfle en prenant de l’altitude et s’éloigne vers le Sud, plein gaz. Tandis que le groupe se remet debout, pour gagner au plus vite la vallée, le Vampires de Bir Rabalou surgissent dans le ciel qu’ils déchirent comme deux obus. Ils montent à la verticale, tournent quelques instants comme l’épervier en quête d’une proie, et puis plongent en crachant la mort : mélange de bruit, de feu, de ferraille et d’éclats de rochers.
J’ordonne :
– « En route ! »
Les brancardiers soulèvent Lucien et le convoi repart. Ils vont se relayer deux par deux pour assurer ce transport difficile parce que le brancard est rudimentaire. Les deux brancardiers libres font office d’éclaireurs de pointe. Le fusil Mitrailleur est porté par Sanchez. Corona s’occupe des chargeurs. Il n’est pas possible que notre avance soit rapide, mais il suffit de mener à bien l’évacuation du blessé avant la nuit. Le danger est peut-être derrière le moindre accident de terrain. Une détonation et tout notre sauvetage serait remis en question si l’un de nous était tué ou blessé seulement. Nous partons huit, nous devons arriver huit au camp. D’instinct, nous sommes tous en état d’extrême vigilance.
Maintenant nous avons atteint le lit desséché de l’oued. De temps en temps nous rencontrons un trou plein d’eau sale, sur des argiles presque bleuâtres. La tranchée naturelle creusée par le cours d’eau en crue est une longue crevasse qui serpente très capricieusement dans cette vallée. Le trio du blessé marchera le plus possible dans le lit de l’oued, les autres nous longerons les berges. Les deux éclaireurs partent les premiers, s’assurent que la voie est libre, que personne n’est embusqué dans les recoins et pendant ce temps Sanchez le couvre avec le P. M. en s’installant sur quelque promontoire qui domine notre progression.
Cette marche qui n’a rien de commun avec du lèche-vitrine dure environ une heure, sans incident.
– J’ai soif ! dit Lucien.
– Tu ne devrais pas boire, reprend Boissonnade. Patiente un peu.
– T’occupes ! Donne-moi de l’eau !
– C’est du bouillon, je la traîne depuis ce matin.
Et en plus je dois te recommander de l’économiser parce que si nous devons boire celle du Soufflât ce ne sera pas du pastis.
Soudain deux détonations claquent dans l’air ; c’est Martin qui vient de tirer sur un fuyard sorti de l’oued, devant nous. L’homme a stoppé sa course au milieu d’un champ et lève les bras.
– Arroua menna ! crie Martin.
Pendant que l’homme s’approche de nous le P. M. reste braqué sur le trou d’où il est sorti. Les autres armes du groupe sont prêtes à l’action. Le fuyard n’est plus qu’à quelques mètres de nous. Avec les quelques mots d’arabe que nous entendons nous réussissons à connaître son nom, et son domicile. Il n’a pas de papiers sur lui Omar Lakkri né à Ghéraba ; c’est un fellah d’une trentaine d’années. Il travaillait aux champs tout à l’heure, au début de l’opération, nous dit-il, puis il a entendu les avions, il a eu peur et il s’est réfugié dans l’oued. Il attendait la nuit pour rejoindre Ghéraba. Je lui demande :
– Montre le champ où tu travaillais !
– Là-bas ! murmure-t-il.
Son histoire tient debout comme la bêche fichée en terre, qu’il me désigne ; mais en période de guerre aucune histoire ne tient debout. Personne ne croit personne.
– Tu connais les fellaghas ? »
Bien sûr il ne connaît pas de rebelles dans la région, il n’en a jamais vus et il n’en est pas un ! J’ai sur moi, au cours des opérations, un carnet contenant la liste des présumés rebelles du secteur. C’est le deuxième bureau qui a établi cette liste, d’après les interrogatoires des suspects arrêtés au cours d’opérations antérieures.
Je la consulte et effectivement elle mentionne un certain Lakkri.
– C’est mon frère dit Omar.
– Ton frère est fellagha et toi tu ne l’es pas ? »
Omar assure qu’il ignore où se cache son frère et ce qu’il fait. Nous lui ordonnons de nous suivre. Il va aider Le Gorec à transporter Lucien, jusqu’à Gheraba. Là, nous lui demanderons de nous trouver une mule. Le fellah ne manifeste aucun sentiment d’hostilité et se dirige vers le brancard.
J’avise par radio le théâtre opérationnel de l’incident Omar.
« Gazelle mobile » me reçoit trois sur quatre. Je lui raconte ce qui se passe. Elle avise le P C de l’opération et « Soleil » me demande de garder Omar afin de l’interroger plus longuement au camp.
Nous reprenons notre marche cahotante, entrecoupée d’ordres et de soupirs. Lucien a toujours soif. Omar ne veut pas qu’on le remplace au brancard. Ghéraba est en vue.
C’est un village d’une vingtaine de mechtas, dans un nid de figuiers de barbarie, à flanc de coteau.
« Halte ! » dis-je, bras levé.
Lucien est déposé sur une touffe d’herbe. Les hommes prennent position derrière les rochers, face au village. Omar, les bras ballants, le visage dur, attend. Je lui montre le village et je lui répète ce que nous attendons de lui : une mule et le meilleur bât pour transporter le blessé. Il part aussitôt à longues enjambées malgré ses pieds nus.
De Ghéraba nous parvient le chant d’un coq, puis un aboi de chien. C’est peut-être un signal, peut-être la réalité. Je me méfie de tout.
Nous surveillons attentivement la progression d’Omar. Lucien a dénoué son foulard maculé de sang et a caché son visage, parce que les mouches l’importunent.
Vigier m’a prêté son fusil à lunettes. Je lui ai laissé ma MAT. Je me demande si je ne préfère pas un pistolet-mitrailleur à un fusil à lunettes. Il faut être calme pour se servir de cet engin. Avec la MAT on sulfate à la cantonade. Avec le fusil à lunettes il faut prendre le temps de viser, donc réfléchir avant de tuer. A la guerre je veux bien tuer, mais de grâce, ne pas réfléchir !
A travers la lunette j’observe le village et ses alentours. Omar prend son temps. Il parle avec de grands ges

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