Que le fracas des vagues
158 pages
Français

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Que le fracas des vagues , livre ebook

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Description

« Il a fallu affronter la foule, le soleil, le port, les gendarmes qui vous serrent de près en souriant, vainqueurs, heureux de montrer leur utilité, celle de protéger la nation des individus dangereux. Rien ne vous est épargné, de la veste trop large au béret en passant par ces ridicules et lourds sabots qui raclent le sol bruyamment. Un uniforme, en fait, les hommes amenés ici ont été vêtus d'un uniforme, comme cela on ne peut pas se tromper. Sur le port, quand ils sortent des voitures de police, sous le soleil qui éblouit, la foule des curieux, comme dans une grande fête, une procession, regarde passer les hommes en marche vers un destin dramatique, un peu comme pour une comparaison, une confirmation qu'ils ne sont pas pareils, qu'il n'y a aucun risque qu'ils ne leur ressemblent. » Le bagne, lorsqu'il existait, faisait peur. Même s'il n'entraînait pas la mort immédiate comme la guillotine, il faisait mourir doucement, loin de tout et de tous, oublié. Aussi, lorsque Jean-Baptiste est condamné au bagne de Cayenne pour dix ans, il ne pense pas revenir. Avec lui, les plus durs de ceux qui se sont élevés contre le coup d'État de Napoléon III. Voici l'histoire de l'épopée qu'a vécue un de mes ancêtres, de son village des bords de Durance à ces contrées lointaines redoutées.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 25 mai 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342051711
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0071€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Que le fracas des vagues
Robert Biagiotti
Mon Petit Editeur

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Mon Petit Editeur
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Que le fracas des vagues
 
Prologue
Il n’y a pas que dans les capitales que l’on rencontre de grandes aventures, de grandes histoires. S’il est vrai que les capitales ont marqué l’Histoire de leurs pays, les villages de France et d’ailleurs sont riches de récits de vies réussies, simples et sans prétentions ou brisées, quelquefois. Toutes méritent la lecture car la réalité de ces vies a composé le tableau général d’une nation avec ses couleurs claires et ses couleurs sombres. Autant le récit de la vie d’un grand homme nous enthousiasme ou nous charme, autant est peu intéressante la vie de cette femme de ferme ou celle de ce cocher de diligence. Et pourtant, en y regardant bien, on s’aperçoit que ces personnes-là ont aimé, protégé, défendu leur famille ou autrui et quand on se penche sur leurs humbles personnes, on comprend ô combien leur âme a été grande. Même s’ils ont détesté les autres, ils ont eu leurs raisons et on comprend que parfois leur âme a été sinon grande, plutôt amère, et les âmes amères ne font elles pas de belles histoires ?
 
On racontera ici l’histoire de personnages ayant subi ou agi sur les événements historiques, mais en aucune façon nous ne prendrons parti pour un clan ou un autre car là n’est pas le but de ce roman. Nous ne voudrions certainement pas que l’on considère ces pages comme un manifeste pour ou contre telle ou telle idée. Mais pour expliquer les gestes, les mots, les actes des personnages qui sont décrits ici, il faut bien se pencher sur leur passé, et on découvre alors leur beau côté et le moins beau, leur éducation et leur façon de penser. Il a bien fallu aussi se mettre dans leur peau et dans leur tête, même si leurs pensées et leurs façons d’agir nous dérangent.
 
La vie des hommes est une continuelle lutte entre le corps et l’esprit. Le chrétien met ces deux éléments au service de Dieu, mais des hommes moins portés à ce service-là ont préféré suivre leur instinct, leur éducation, leurs sentiments. Ils n’en sont pas moins des hommes. Cela les a menés dans les chemins humains de l’acceptation lâche des choses et des organisations établies et par là bien souvent au renoncement à changer les choses, ou, prenant le contre-pied, à tort ou à raison, ces mêmes critères les ont menés sur le chemin de la révolte. Nous ne jugeons les choix de personne, nous les respectons car chaque humain a son libre arbitre accordé par Dieu et cela lui donne le droit d’agir selon sa conscience, de se tromper, ou des deux car même celui qui agit selon sa conscience n’est pas sûr de prendre la bonne décision ou de suivre le bon chemin.
 
L’homme qui fait l’objet de ce roman est un homme simple, ordinaire, qui aurait pu traverser son époque dans la tranquillité d’une vie semblable à celle des autres, mais qui, poussé par sa pensée, son idéal, et peut-être aussi son tempérament, a vécu des périodes difficiles. Ce n’est pas un héros, et il ne s’est pas fait passer pour cela, bien que quelquefois des gens ordinaires le deviennent par des actes naturels communs aux hommes.
Chapitre 1. L’auberge
Je m’appelle Jean-Baptiste. Jean-Baptiste Devesmes. Il est une petite auberge à Saint-Pons qui vous reçoit avec joie et simplicité au bord de la route qui va de Sisteron à Tallard, sur la rive gauche de la Durance, à peu de distance du bac qui relie les deux rives, face à Tallard. J’y exerce avec ma femme Angèle et ma fille Élodie un véritable sacerdoce. Pourquoi un sacerdoce ? Eh bien, aubergiste n’est pas un métier de tout repos. Il s’agit bien sûr de faire manger les gens, de les faire boire, modérément, avec tout ce que cela comporte d’efforts de tout genre, du jardin à la salle, en passant par la préparation, le service et le nettoyage. S’il reste un peu de temps, il faut dormir et sur ce sommeil, on prend encore un peu de temps pour les comptes et les prévisions. La petite compte peu à peu dans l’effort familial, mais nous tenons compte de sa jeunesse et de sa fragilité. Toutefois, sa présence égaye la clientèle par son concours souriant à l’effort de servir entre les tables du repas de midi. Le soir, on ne la voit pas car à ces heures-là, les hommes mangent, c’est vrai, mais boivent encore plus et la fillette n’a plus sa place dans l’auberge au milieu des cris de cette clientèle assoiffée. Avec Angèle nous vous attendons donc à l’« Auberge de la Durance », à Saint-Pons. En plus de faire manger les voyageurs de la route et de faire boire les autochtones, j’exploite un lopin de terre qui donne à l’auberge les légumes à incorporer dans ses plats. On comprend qu’Angèle est plus aux fourneaux que moi, mais le soir, j’aime bien recevoir mes amis et connaissances et partager avec eux une bouteille de vin nouveau ou de vin vieux. Le vin ne vient pas de ma terre, celle-ci ne donnant que légumes et fruits sur arbre. Il vient en partie de la vigne des cousins, à Urtis. Mais elle est bien insuffisante et de temps en temps on voit arriver à l’auberge le livreur de vin qui vient de la Drôme. Ce jour-là, un gros tonneau plein remplace le vide et on en profite pour déguster d’autres crus que je commande en petites quantités pour agrémenter les repas de fête. Mais hélas je me retrouve, après trois ou quatre dégustations, selon les reproches d’Angèle, les yeux vitreux et la parole indistincte. Angèle me gronde : « Jean-Baptiste, il y a des clients, ne vois-tu pas ? Et devant ta fille, c’est pas joli !
— Angèle, je lui réponds, laisse-moi tranquille, il faut bien les goûter, ces vins si on veut les acheter et les proposer aux clients, non ?
— Tu n’es pas obligé de t’arsouiller, bon sang. Après, tu ne sais plus ce que tu dis.
— Et flûte, je lui rétorque en prenant le marchand de vin à témoin, on ne peut plus rien faire maintenant, avec les femmes. Tu lui donnes ça, et j’indique une marque fictive sur mon poignet, et elles veulent ça, et je remonte la marque jusqu’en haut du bras.
— Fais un peu ce que tu veux, me répond Angèle. Viens Élodie, on va préparer les légumes. Au moins, il y en a deux qui auront travaillé. » Et Angèle, attrapant Élodie par le bras, l’entraîne en marchant violemment vers la cuisine. Le bruit des talons claquant sur le sol ajoute à la réprobation.
 
Angèle a souvent raison dans ses jugements à mon égard et je vais vous raconter une anecdote qui vous fera mieux comprendre mon caractère. L’an dernier, le soir de l’élection du Président de la République, supputant la réussite aisée de Napoléon aux élections, j’étais entré violemment dans la salle de vote de la Mairie, j’avais saisi l’urne posée sur une grande table au centre de la pièce où les bulletins s’entassaient, j’avais repassé la porte et jeté le récipient électoral dans la cour. Malgré les appels bienveillants du maire au calme, je n’avais rien écouté et pas obéi. Aussitôt, le gendarme de service en faction de surveillance pour le bon déroulement du scrutin avait sorti son arme, menaçant de s’en servir si je ne levais pas les mains dans l’instant. Il me fit renter dans la pièce sous la menace de son arme pendant que les personnes présentes ramassaient les bulletins sur le sol de la cour, dans le soir tombant de cette journée d’hiver. Évidemment, ce geste courageux mais malgré tout absurde m’a beaucoup coûté. Les poignets enchaînés je fus donc conduit à la gendarmerie de Tallard pourvue d’une salle de police avec quelques cellules.
 
Lorsque les gendarmes jugèrent les faits, l’effet de l’alcool sur moi s’était depuis longtemps évanoui, et on ne retint du geste que son côté politique. Je fus libéré assez rapidement car, même si l’acte était inqualifiable car inconnu, je me tins coi au poste et on jugea que je pouvais retrouver la liberté et que je n’étais plus un danger pour la communauté. Toutefois, le procès eut lieu et on retint contre moi la destruction d’une urne et des propos contre l’État. Deux mois de prison furent la peine à purger à la prison de Sisteron. D’abord très remontée contre moi, ma femme vint me voir là deux fois. Élodie resta au village chez sa grand-mère, veuve depuis quelques années. Celle-ci ne put s’empêcher des réflexions comme : « Évidemment, il fallait s’y attendre, tu ne m’as pas écoutée. » Je sais qu’Angèle m’avait défendu : « Écoute, Maman, tu ne vas tout de même pas reparler de choses vieilles de vingt ans et plus, non ?
— Tout se paye un jour ou l’autre, ma pauvre. Tu l’as voulu, tu l’as eu. Avec, en cadeau, un voleur et un casseur d’urne, lança la mère qui ajouta d’une façon prémonitoire : qu’est-ce que ce sera la prochaine fois ?
— Tu ne vas pas revenir sur le vol de trois misérables fagots parce qu’on n’avait plus rien à brûler pour faire chauffer les marmites, non ? Tu ne me les as pas donnés les fagots, toi, tu t’en es bien gardée.
— Il fallait épouser un travailleur, pas un fainéant et en plus un buveur.
— Si Papa avait été là, il m’aurait aidé, lui, déclare solennellement Angèle, les yeux vers le sol dans un mouvement négatif de la tête.
— La honte l’aurait peut-être achevé. Savoir son gendre en prison, tu te rends compte ?
— Maman, il est des fois où je me demande si tu as un cœur, conclut d’une voix faible Angèle, les yeux dans le vague, pensive.
— À force de coups comme ça, le cœur, il n’y en a plus. » Sur ces phrases scélérates les deux femmes s’étaient séparées. Lors d’une visite, Angèle me raconta cela. Je n’en voulus pas à la belle-mère car je compris ses paroles. Malgré ces propos

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