Adiós Ibiza
177 pages
Français

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Description

L’intrigue d’Adiós Ibiza se déroule à Ibiza (Baléares), à la fin de l'été 1969. L'île était alors un point de rencontre pour les hippies. C’était la naissance d'une nouvelle culture et d'un nouveau mode de vie. Le franquisme vivait sa dernière décennie. L’histoire : Deux étudiantes françaises partent en vacances à Ibiza. L'une d'elles n'en reviendra pas. Une détective est dépêchée sur place et tente de remonter la piste de la disparue, au sein de la communauté hippie. Inexpérimentée, son enquête la place dans des situations qui la dépassent. Entre mysticisme et faux-semblants, il s'agit pour Mireille de déceler la vérité, en se gardant bien d'être piégée à son tour dans la toile colorée d'Ibiza.

Informations

Publié par
Date de parution 27 octobre 2014
Nombre de lectures 19
EAN13 9782312025827
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0012€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Adiós Ibiza
Annette Dufrêgne
Adiós Ibiza

















LES ÉDITIONS DU NET 22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

































© Les Éditions du Net, 2014 ISBN : 978-2-312-02582-7
Chapitre I
Interview Paris 2014
Ignoble ! Vomitif ! On avait tartiné la porte d'une laque translucide couleur de framboise. Elle luisait sournoisement dans la pénombre comme une sucette géante. L'estomac frémissant, Mandarine examinait le bouton du timbre dépourvu d'inscription, lorsque l'huis bascula soudainement. Une silhouette improbable se profila à contrejour : une tête énorme, posée sur un corps qu'une masse de tissu drapée dérobait à la vue. L'image d'une cape accrochée à un balai tête de loup traversa l'esprit de la visiteuse. Elle plissa les paupières pour accommoder sa vision. Elle restait plantée là, déroutée, à tenter de discerner un visage, quand une poigne énergique la tira vers l'intérieur…
Posez vos chaussures !
Je suis Mandarine…
Évidemment ! Sinon, vous croyez que je vous aurais laissée entrer ? Mandarine, Qu'est-ce que vous entendez par là ?
Ce que j'entends ?… C'est mon nom de plume !
C'est le féminin de mandarin, ou bien le fruit ? Qu'est-ce que vous écrivez sous ce nom ? Des recettes de cuisine ?
Mandarine ne se laissa pas démonter par le ton acerbe de son interlocutrice.
Vous avez reçu mon email ?
Venez !
Elles longèrent un couloir obscur au sol tiède et caoutchouteux, moelleux aux orteils, poussèrent une lourde tenture, pour s’introduire enfin dans un petit salon. Une forte odeur d'encens prit Mandarine à la gorge. Elle se tourna instinctivement vers les fenêtres. Hélas ! Elles étaient totalement occultées par d'épais rideaux de velours grenat. Quelques lampes, posées çà et là, diffusaient une lumière voilée. Des d'étagères chargées de livres couraient autour de la pièce. Une collection de bibelots exotiques alourdissait les meubles orientaux incrustés de cuivre. L’œil s’égarait dans une foule hétéroclite de figurines, de pots de toutes formes, de bougeoirs tarabiscotés. Une boule de cristal trônait au centre d'un guéridon aux pieds tournés. Les murs étaient couverts de masques, de plats en cuivre ou en céramique, de tapisseries poussiéreuses. C'était l'antre d'une sorcière, ou l'arrière-boutique d'un antiquaire.
Asseyez-vous là !
Un grand chat persan, au pelage gris bleuté, s'étalait sur le velours défraîchi du fauteuil. Il leva sur la visiteuse un regard glacial. Ses yeux mordorés et les poils hérissés de ses oreilles lui donnaient l'air d'un hibou courroucé. Il sauta du fauteuil, planta voluptueusement ses griffes dans le tapis, s'étira longuement, l'échine tendue et la queue dressée, avant de se diriger majestueusement vers la porte.
On dirait qu'il a suivi la conversation ! Il me laisse la place ! C'est incroyable !
Sympathie pour vous ? Besoin de se dégourdir les pattes ? Mystère ! L'obéissance chez les chats découle toujours d'un libre choix.
Mandarine prit docilement la place encore chaude du matou, sans sourciller. Son postérieur requerrait un brossage, mais tant pis. Afin de clore le sujet de la psychologie des félins, elle délogea la boîte qu'elle serrait sous son bras gauche.
Je vous ai apporté des macarons.
Des macarons ? Qui vous a dit que je supportais le sucre ? Je pourrais être diabétique, ou allergique ! Tout le monde est patraque, de nos jours !
Néanmoins, la mégère ouvrit prestement la boîte, et pêcha un macaron, qu'elle se fourra tout entier dans la bouche. Mandarine profita de ce répit pour la dévisager. Sa crinière bouclée, noire et rousse, d’un volume imposant, évoquait Jimmy Hendrix ou Angela Davis. Sa peau tannée, plissée par quelques rides, parlait de soleil et de grand air. Un minuscule scarabée d'or était fiché au coin de sa narine. Elle flottait dans une longue tunique noire, à la poitrine surchargée de motifs égyptiens. Ses yeux, d’un marron verdâtre, détaillaient Mandarine des pieds à la tête.
Très bon, merci bien ! Prenez-en un ! Je vais faire du thé.
Elle s'éclipsa. Quand la porte se rouvrit, Mandarine mordillait, pensive, un macaron à la pistache.
C'est une nouvelle venue qui déposa tasses et théière sur la table, sans prendre la peine de saluer. Un caleçon gris et une fine marinière assortie moulaient son corps mince, mais musclé, sans un poil de graisse. Ses cheveux blonds étaient coupés courts. Elle s'assit en face de Mandarine, qui sursauta. Sans la perruque bouclée et le kaftan égyptien, le changement était total. Il ne restait de la mégère que le bijou de nez.
Alors ? Comment vous me trouvez dans le rôle de la vieille sorcière hippie ? Pardonnez-moi la mise en scène, mais j'adore me déguiser ! Arrêtez de fixer ma narine, ça vous fait loucher. Ce scarabée m'accompagne depuis un voyage en Asie, il y a bien longtemps. C'était dans une autre vie, mais je ne l'ai jamais ôté. Ne le traitez pas de piercing, vous le vexeriez.
Étonnant ! … Mais qu'est-ce que… ?
Qu'est-ce que c'est que cette mascarade ? Mandarine s’abstint de terminer la phrase. Elle s'interrogeait sur son hôte : une sexagénaire qui se conduisait comme une gamine, ça n'était pas bon signe. L'entretien s'annonçait acrobatique.
Eh bien, vous souhaitiez interviewer une ancienne hippie, d'où l'idée de cette réception. C'était aussi pour tester votre caractère. Je ne suis pas une femme facile, je ne pactise pas avec n'importe qui. Jusqu'ici, vous ne vous êtes pas trop mal comportée. Voyons la suite !
Comme je vous l'ai proposé au téléphone, je souhaiterais que nous parlions d'Ibiza… Vous avez fréquenté l'île pendant les années hippies. C'était une époque mémorable ! Vous pourriez me raconter votre arrivée, la première fois ?
À l'été soixante-neuf. C'est la période qui vous intéresse ?
Tout à fait : celle des années soixante-dix à quatre-vingts. Vous n'avez jamais eu envie d'écrire là-dessus ? Une nouvelle, un blog ?
J’ai ébauché un blog, mais j'ai vite déclaré forfait.
Elle se leva. Un ordinateur portable, que Mandarine n'avait pas remarqué, émergea d’entre les tasses de thé.
J'avais rédigé une page d'accueil, tenez !
Mandarine se pencha pour lire.
« Ibiza ? Qu'en savez-vous ? Que c'est une île ? Le mot est surdimensionné ! Au survol, on dirait un petit pâté de sable noir et collant, comme celui qu'on déterre à la plage, quand on gratte sous la jolie couche beige.
C'est un rocher aride, piqué de résineux maigres et clairsemés. Tout autour, la mer, et par-dessus, un soleil féroce qui fond, qui grille, qui dessèche. Ne lui offrez rien. Si vous exposez naïvement votre carcasse, il n'en laissera que la peau boucanée. Si par hasard, il vous reste une étincelle de conscience, elle ira se noyer dans le scintillement de la mer. N'allez pas vous croire en terrain conquis ! Ne grattez pas sous la surface… »
Eh bien, c'est un style… original. Je doute qu’il plaise à l’office de tourisme. Vous n'êtes pas allée au-delà de cette première page ? Pourquoi ?
Après quelques recherches sur Internet, j'ai constaté que toutes sortes de gens avaient analysé le phénomène hippie d'Ibiza. J'ai eu l'impression que tout avait été dit, et même tout et son contraire. À quoi bon en rajouter ? Quelques sujets m'ont horripilée : rédigés par des prétentieux, que le plus grand des hasards a conduits là-bas, et qui s'en glorifient comme d'un exploit. Forts de leur expérience incomparable, ils érigent leur vécu étriqué en vérité absolue. D'autres vous présentent comme hippies des commerçants qui avaient monté des business juteux, et qui nageaient dans l'opulence pendant ces années-là. Balivernes !
Un hippie ne pouvait pas nager dans l'opulence, comme vous dites ?
Prenez un quidam qui avait réalisé ses avoirs quelque part où il avait pignon sur rue, pour les réinvestir à Ibiza. Disons qu'il suivait la mode en faisant une petite vir

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