Cascade sanglante
72 pages
Français

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Description

Il est étonnant de constater comment un banal accident de voiture peut vite basculer en une machiavélique entreprise d’élimination.


Le commissaire Odilon QUENTIN va en faire l’amère expérience durant l’enquête sur la mort d’un jeune homme heurté par une automobile quand le médecin légiste remarque que le crâne du défunt est perforé par une balle de 7,65.


Le vieux policier patauge lamentablement.


La victime est un dévoyé, joueur invétéré, criblé de dettes, bien qu’étant le fils d’un riche industriel.


Pourtant, Odilon QUENTIN ne baisse pas les bras et les événements vont rapidement lui démontrer que ce décès correspond à la chute du premier domino d’une terrible cascade sanglante...


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 4
EAN13 9782373475104
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Odilon QUENTIN
* 46 *
CASCADE SANGLANTE
Roman policier
par Charles RICHEBOURG
CHAPITRE PREMIER
ACCIDENT DE ROULAGE
Dehors, il pleuvait à torrents et l'eau ruisselait le long des fenêtres du commissariat, traçant des sillons capricieux sur le s vitres que noircissait la nuit. De rares passants se hâtaient sous l'averse, pataug eant dans les flaques et, de temps en temps, précédée du pinceau mouvant de ses phares, une auto glissait, silencieuse, sur l'asphalte luisant où le halo des réverbères dessinait des auréoles d'un jaune sale.
Dans le corps de garde, il régnait une chaleur lourde, presque sénégalienne, et les tuyaux du chauffage émettaient des borborygm es incongrus, tandis que, affalés sur des chaises, les hommes de service somn olaient béatement, sans se soucier de l'atmosphère qui empestait le fond de pi pe et le chien mouillé.
Seul, le brigadier Lucien Février échappait à l'amb iance de torpeur ouatée dans laquelle s'enlisaient ses collègues ; il est v rai qu'il cherchait le nom d'une papavéracée des régions tropicales, afin de remplir cinq cases blanches de son mot croisé.
Cette activité strictement intellectuelle ne nuisai t d'ailleurs en rien à ses instincts de limier toujours en éveil, et il posa s oudain son crayon en fronçant les sourcils : dans la pièce voisine, le murmure étouff é d'un monologue haché de longs silences venait de succéder à l'appel aigrele t de la sonnerie du téléphone.
— Misère de misère ! soupira l'honnête flic en perd ant ses dernières illusions. Il y a eu un pépin quelque part et le pa tron va m'envoyer sur les lieux faire les premières constatations. Charmante perspe ctive, par un temps pareil...
Les événements devaient hélas confirmer ces pessimi stes appréhensions : la porte du fond s'ouvrit brusquement, encadrant la silhouette trapue de M. Cauchois, le commissaire adjoint.
— Prends deux hommes avec toi, Février, lança le fo nctionnaire d'une voix lamentablement enrouée, et file rue de Flandre. Un accident de roulage s'est produit à la hauteur de l'immeuble portant le numér o 88. Il y aurait un mort, paraît-il. En tout cas, le chauffard est en fuite. Ramène les témoins, s'il y en a !
Le service est le service ! Le brigadier acquiesça tout haut en pestant tout bas, et il partit à la tête de son escorte, tandis que l'officier de police regagnait son cabinet ; il était de mauvaise humeur, lui auss i et, comme il couvait un mauvais rhume, il suça une gomme au menthol tout en rédigeant le début de son procès-verbal, pour gagner du temps :
« Ce 11 janvier 195..., à 23 h 20 ; par-devant nous , Cauchois Émile,
commissaire adjoint, a comparu le nommé... »
C'était empoisonnant, d'autant plus que les affaire s de ce genre requièrent une kyrielle de devoirs administratifs accessoires : coups de téléphone aux brigades de la route pour retrouver le fugitif, apo stilles au Parquet et à l'Institut médico-légal, sans parler des interrogatoires propr ement dits. Cauchois en aurait jusqu'à six heures du matin. Après, ce serai t la bonne vie : grog et plumard. Vivement demain, qu'on se couche !
Un bruit de godasses dans la permanence annonça le retour de Février ; claquement de vêtements que l'on secoue, brouhaha ; puis le brigadier passa la tête dans l'entrebâillement de la porte :
— J'ai fait le nécessaire sur place, déclara-t-il, laconique. On a emporté le cadavre et les témoins sont ici.
— Fais-les entrer.
Ils étaient deux ; des costauds du genre « déménage urs de pianos », à la carrure épaisse de buveurs de bière ; l'un, chauve comme une bille de billard ; l'autre, d'un roux ardent. Des Belges, sans aucun d oute.
— Voulez-vous décliner vos noms, prénoms et identité complète ?
Le Rouquin prit la parole le premier, en un françai s guttural et raboteux, encore que parfaitement compréhensible :
— Moi, c'est Jef Van Buggenhout, précisa-t-il, en m artelant ses syllabes. Je suis né à Malines, le 30 octobre 1909, et je suis c hauffeur chez M. Langendries.
— Et vous ?
— Stan Verbist, 42 ans, Malinois également, employé comme convoyeur par le même M. Langendries.
L'homme au crâne passé au papier émeri s'exprimait avec plus de facilité que son collègue, mais sans parvenir à faire oublie r ses origines ; en tout cas, comme s'ils répétaient un gag soigneusement mis au point, les deux compères hochèrent la tête en même temps, et ils proclamèren t en chœur :
— C'est un bien brave homme, M. Langendries !
Leur unanimité était si touchante que le commissaire faillit pouffer de rire.
— Quelle est la profession de votre patron ? demand a-t-il, décidé à faire toute la lumière sur l'activité de ses interlocuteu rs.
— Le transport de légumes ; en ce moment, c'est des endives.
— Non : des chicorées !
Suivit une interminable digression en patois flaman d, à laquelle Cauchois ne comprit pas un traître mot, mais que le nommé Verbi st daigna résumer en une
formule lapidaire :
— En France, les chicorées c'est des endives, et en Belgique, les chicorées c'est des chicorées !
L'explication était passablement nébuleuse, mais le policier se garda bien d'insister.
— Arrivons-en au fait ! bougonna-t-il. Que s'est-il passé, au juste ?
— Ben voilà ! fit Stan qui était décidément le fort ténor de l'association. Nous avions cassé la croûte chez une compatriote, Fintje , qui tient un bistro rue de Dunkerque et, vers dix heures et demie, nous avons décidé de reprendre la route, de manière à arriver à Malines entre cinq et six heures du matin.
— Faut vous dire que M. Langendries...
— Laissez parler votre camarade ! aboya Cauchois, q ui commençait tout doucettement à s'énerver.
— Nous montons donc dans la cabine du camion, et Je f débraye ; il faisait un temps de chien, des rafales de pluie s'abattaien t sur le pare-brise et, à certains moments, on ne voyait pas à trente pas. Br ef, nous traversons le boulevard Magenta et nous passons devant la gare du Nord pour emprunter la rue de Flandre.
L'officier de police jeta quelques notes sur son bl oc puis, redressant la tête, il fit signe au convoyeur de poursuivre sa dépositi on.
— Une grosse conduite intérieure nous a doublés ; e lle roulait en longeant le trottoir, à peine plus vite que nous. Je puis l'aff irmer, car, malgré la pluie qui tombait ferme, je voyais distinctement son feu roug e.
« C'est alors que j'ai aperçu une ombre surgir just e à côté de la bagnole et s'effondrer aussitôt sur la bordure du trottoir. Sû r que le type a voulu traverser ; il ne s'est pas donné la peine de s'assurer que le pas sage était libre, et il a été pris en écharpe, soit par l'aile de la roue avant, soit par le bord du pare-chocs.
— En êtes-vous certain ?
— Oui... ou plutôt non... Enfin, c'est mon impression.
— Qu'a fait le conducteur de la voiture ?
— Il a poussé sur le champignon et il a foncé dans la nuit, sans demander son reste.
— Avez-vous pu relever le numéro de la plaque ?
— Non ; mais la carrosserie portait un « B » nickel é à l'arrière, même que j'ai dit au copain : « V'là un gars de chez nous qu'est venu faire la bringue à Paname ! »
— Pourriez-vous préciser la marque du véhicule ?
— Euh !... Une Chevrolet, peut-être ?... Ou une Chrysler ?...
— De quelle couleur ?
— Sombre, en tout cas : noire ou bleue foncée ; à m oins que ce ne soit grise ! Il pleuvait tellement qu'on voyait fort mal et puis, au moment même, je n'ai pas fait attention.
— Et vous ? enchaîna le commissaire en s'adressant cette fois à Jef Van Buggenhout. Ne pourriez-vous me fournir aucun éléme nt qui permette d'identifier le fuyard ?
— Pour ça, non ! maugréa l'interpellé. J'étais occu pé à zyeuter devant moi ; tout ce que j'ai vu, c'est le feu rouge qui nous pr écédait, et quand il a pris le large j'ai dû donner un solide coup de frein pour é viter le mec qu'était ratatiné dans la rigole !
« J'ai stoppé aussitôt et nous sommes descendus, St an et moi, pour lui porter secours, mais il n'y avait rien à faire, le pauvre diable ne bougeait plus. Sa tête avait dû porter sur l'angle du trottoir, car il avait la joue pleine de sang.
— Combien de temps s'est-il écoulé entre le moment de l'accident et celui auquel vous avez prévenu l'agent 7.412 ?
— Pas longtemps... quelques minutes à peine. Je pro posais justement à Stan d'aller donner un coup de fil au poste de poli ce le plus proche quand le flic s'est amené... Pardon :le garde-ville, comme vous dites, en France !
Tout cela était lamentablement inconsistant. N'empê che que Cauchois chargea le brigadier Février d'alerter la Brigade d e surveillance routière ainsi que les postes-frontière, avec mission d'arrêter le con ducteur d'une conduite intérieure noire ou bleue, à moins qu'elle ne soit grise, et de marque indéterminée, mais américaine de préférence !
— Dites donc... fit Van Buggenhout dès que le commi ssaire reparut, est-ce que nous ne pourrions pas mettre les voiles, des fo is ?... M. Langendries est un brave homme, mais c'est pas une raison pour...
— Je dois d'abord acter vos dépositions.
La cérémonie s'éternisa pendant un bon bout de temp s. Les Flamands épelèrent laborieusement leur nom et adresse respec tive, étonnés qu'un homme aussi instruit que leur interlocuteur pût hésiter s ur ces questions d'orthographe élémentaire puis, après avoir écrasé un paraphe pué ril au bas de leurs déclarations, ils prirent congé :
— Si vous avez encore besoin de nous, faut pas vous gêner ! fit Stan Verbist, la main sur la poignée de la porte. I l vous suffira de laisser un mot chez Fintje, rue de Dunkerque. Nous y passons régul ièrement deux fois par
semaine en rentrant des Halles, après avoir décharg é notre cargaison d'endives.
— Non ! protesta Van Buggenhout, qui avait décidéme nt de la suite dans les idées. C'est des chicorées !
Le brigadier Lucien Février succéda aux Malinois da ns le bureau du commissaire.
— J'ai rédigé mon rapport, dit-il, en tendant à son chef un« pro-justicia » d'une trentaine de lignes. L'affaire est limpide : l'accidenté a été victime de son imprudence. La seule chose qui m'étonne, c'est que le chauffard ait décampé. Sa responsabilité n'était pourtant pas engagée.
— Il ne tenait probablement pas à être mêlé à une e nquête judiciaire.
— Possible ! Vous croyez qu'on le retrouvera ?
— J'en doute. Les renseignements sont trop vagues p our permettre l'identification du véhicule ; en tout cas, ça prom et quelques embouteillages à la frontière ! À propos... tu as relevé l'identité du client ?
— Il s'agit vraisemblablement d'un certain Philippe Larsac. Je dis « vraisemblablement » parce que nous n'avons découv ert aucune pièce officielle sur le cadavre ; rien qu'un agenda. Le v oici, d'ailleurs.
Le commissaire feuilleta le petit calepin relié de plastique rouge d'un doigt distrait, sans s'attarder à déchiffrer les notes qu 'il contenait, puis il émit une supposition bien normale, en somme :
— Serait-ce le Larsac des entreprises de béton ?
— Je ne crois pas ; celui-là s'appelle Joseph. Nous serons, du reste, fixés sous peu : la première page du carnet contient une annotation :« En cas d'accident, prévenir Étienne Massignon, avocat près la Cour d'Appel, Paris. »
— Tu as téléphoné ?
— Bien entendu ; mais le cher maître n'était pas ch ez lui.
— Essaye encore. Il est près de deux heures du mati n, il sera peut-être rentré !
Février prit la communication à l'appareil de la pe rmanence et il revint après quelques instants, porteur de nouvelles réconfortan tes.
— J'ai eu l'homme de loi au bout du fil, expliqua-t -il en étouffant un bâillement. Il arrive. Juste le temps de sauter dan s sa bagnole, m'a-t-il dit.
— Ça va, merci !...
La pluie avait cessé ; le brigadier était retourné à ses mots croisés et le commissaire noircissait du papier en mâchonnant ses gommes mentholées.
D'ici une heure, tout serait liquidé : les avocats savent généralement ce que parler veut dire ; il n'y a qu'en plaidoirie qu'ils arrondissent des périodes interminables... afin de justifier leurs honoraires .
— Maître Étienne Massignon ! annonça le planton.
Le nouveau venu était un petit homme d'une cinquant aine d'années, au teint bilieux, dont...
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