Cent vingt victimes
50 pages
Français

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Description

Dans la mine, à Ganges, c’est le coup de grisou. De nombreux ouvriers se retrouvent enterrés dans les galeries.


L’ingénieur en chef, M. Caplys, descend pour constater les dégâts et trouve une cartouche de dynamite au pied de l’éboulis. Il est persuadé qu’en fait d’accident, il s’agit d’un acte intentionnel.


Immédiatement, il fait appel à son ami le commissaire BENOIT, de Paris.


Le policier débarque le soir même, en compagnie de son jeune secrétaire Lissier. Plusieurs indices découverts les dirigent sur la piste d’un crime au bilan dramatique de cent vingt potentielles victimes...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 2
EAN13 9791070032169
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES ENQUÊTES DU COMMISSAIRE BENOIT
- 12 -

CENT VINGT VICTIMES

de
Robert et Jean GRIMEY
I
 
Un long rugissement déchira l'air extrêmement limpide du matin.
— Alain ! cria une voix, dépêche-toi ! Tu viens d'entendre la sirène ? Tu vas être en retard, et, ce coup-ci, Muller ne te ratera pas. Tu sais bien qu'il ne peut te sentir et qu'il guette toutes les occasions de te prendre en défaut.
L'homme ne répondit pas. Il regardait rêveusement sa veste accrochée au dossier d'une chaise et ne se décidait pas à la saisir. Sa femme avait raison. La sirène s'essoufflait. En courant tout le long du chemin, il pourrait encore arriver à temps. Il releva la tête et par la fenêtre regarda le paysage qu'il connaissait bien. Sur quelque deux cents mètres, la route filait en droite ligne puis soudain, elle obliquait et devenait excessivement méandreuse pour grimper à flanc de montagne. Au second tournant, on distinguait nettement l'entrée de la mine.
— Dans trois minutes, il sera trop tard ! pensa-t-il.
Nerveusement, ses doigts froissèrent un papier dans la poche de son pantalon.
Peu à peu, le soleil émergeait de l'étang qui bordait une partie de la route.
— Pourquoi ne pars-tu pas ? demanda encore la femme. Alain, tu veux donc te faire renvoyer ?
Elle remuait fébrilement des casseroles. L'homme sentit qu'elle allait quitter la cuisine, paraître sur le seuil de la chambre et l'interroger encore. Que lui répondrait-il ?
La sirène s'était tue.
La route était déserte. Tous les mineurs avaient déjà fait pointer leur fiche à l'entrée.
Un bruit de savates traînant sur le carreau se rapprocha de la porte. Alain saisit brusquement sa veste et sortit.
Jusqu'à la mine, il ne cessa de courir. Lorsqu'il arriva, il était trempé de sueur et hors d'haleine.
L'œil mauvais, les dents serrées par la colère, près de l'horloge pointeuse, Muller l'attendait.
Au moment où Alain se présenta, le contremaître lui cria :
— Ce n'est pas la peine. Fous-moi le camp ! Les équipes sont déjà descendues. On n'a plus besoin de toi.
Et, se précipitant sur le mineur ahuri, il le prit rudement par l'épaule et le secoua fou de rage à peine contenue.
— Pourquoi es-tu justement en retard aujourd'hui ? Dis, pourquoi ? Pourquoi ?
Le portier ouvrit la grille pour laisser passer la petite voiture de M. Caplys, l'ingénieur en chef.
Un coup de frein brusque arrêta la voiture à hauteur des deux hommes.
— Que signifie cette violence, Muller ? demanda l'ingénieur.
— C'est à cette heure-là qu'il s'amène !
Et, repris par sa rage, le contremaître s'entêta à questionner encore :
— Pourquoi ? Me diras-tu pourquoi, charogne ?
— Laissez-le, vous savez que je n'admets pas ces manières.
Maîtrisé par le ton glacial de M. Caplys, Muller préféra s'en aller. En s'éloignant, il dit encore à mi-voix :
— Il me le paiera ! De toute façon, je l'aurai bien un jour.
Abruti par la réception qui lui avait été faite, Alain demeurait les bras ballants, la bouche à demi ouverte devant l'ingénieur qui avait pris sa défense. Celui-ci, très calme, mais très sec, l'interrogea à son tour.
— Vous savez qu'un tel retard est inadmissible. Vous êtes assez mal noté déjà. Avez-vous une excuse valable à me donner ?
Alain ne répondit pas, mais dans son regard passa une détresse infinie qui intrigua M. Caplys. Que cachait ce mutisme ? Un drame comme il s'en passait si souvent dans le petit personnel de la mine ou un abrutissement complet ? L'ingénieur voulut en avoir le cœur net.
— Une dernière fois, pourquoi êtes-vous en retard ?
Le mineur comprit qu'il fallait parler s'il ne voulait pas être l'objet d'une sanction immédiate et grave. Il bégaya :
— Parce que...
— Eh bien, je vous écoute !
— Parce que je ne voulais pas être tué.
— Qu'est-ce que vous chantez là ?
Mais M. Caplys n'avait pas encore eu le temps de revenir de l'étonnement dans lequel l'avait plongé cette phrase qu'une sourde détonation le fit tressaillir.
— Mon Dieu ! murmura-t-il, ce n'est pas possible.
Puis il partit en courant.
Et déjà un cri éclatait partout :
— Le grisou, le grisou... le grisou !
Alain ferma les yeux et respira profondément.
 
* * *
 
Très vite, Caplys organisa les secours. C'était un garçon qui ne perdait pas facilement la tête. Il fallait agir vite pour essayer de sauver le plus de mineurs possible. Il fit mugir la sirène trois fois. C'était le signal convenu de détresse. Aussitôt, le petit village de Ganges se vida de tous les hommes valides, de toutes les femmes aussi, car chacune avait un parent qui travaillait à la mine, et le lugubre appel les avait fait frémir d'angoisse.
En même temps, il téléphona à Nîmes. Si l'accident était grave, les pompiers de la grande ville seraient indispensables.
Puis il fila constituer les équipes de secours. Personne encore n'était remonté, et cependant le monte-charge fonctionnait normalement. Est-ce que les mineurs épargnés essayaient de sauver leurs camarades, ou bien... Mais l'hypothèse que tous étaient ensevelis était trop pénible.
La foule se pressait aux grilles. Étrangement silencieuse, elle présentait des visages déformés par la crainte et demeurait là, immobile, dans l'attente de ce qui allait suivre. Combien en remonteraient de tous ceux qui étaient sous terre ? Telle était la question qui clouait sur place les quelque trois cents personnes qu'un gardien intraitable maintenait derrière les barreaux.
Pâle, mais accentuant son allure autoritaire, Caplys parut sur le seuil de son bureau.
Quelques murmures s'élevèrent. Ils n'étaient nullement dirigés contre l'ingénieur en chef, dont chacun appréciait l'énergie et l'équité, mais on espérait par lui apprendre quelque chose.
Il fit un geste pour marquer son ignorance et annonça :
— Je vais voir ce qui se passe. Que chacun se tienne à son poste et soit prêt à agir s'il y a lieu.
Puis il pénétra dans la vaste cage qui permettait de descendre dans la profondeur de la mine. Dix hommes étaient avec lui.
Lentement, le monte-charge s'enfonça dans la terre. Les quarante mètres qui séparaient l'entrée proprement dite de la mine de l'air libre furent franchis sans accident.
Tout paraissait normal.
Caplys appela.
Nul ne répondit. Surtout, il lui sembla que sa voix était tout de suite arrêtée et ne se répercutait pas dans les galeries habituellement sonores.
L'électricité ne fonctionnait plus.
L'ingénieur tira sa lampe de poche et fit quelques pas. Il n'avait pas voulu emporter de lampe à flamme, de crainte que le grisou ne se fût pas complètement évaporé.
La galerie d'entrée dessinait une légère courbe au-delà de laquelle elle...

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