Iggins & C° détective - Tome 2
124 pages
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Iggins & C° détective - Tome 2 , livre ebook

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Description

Tout le monde se souvient du « Mystère des trois crimes » qui se sont déroulés dans la demeure du sénateur Eustache Poivrier.


Ce dernier y fut retrouvé mort, une balle dans la tête, après avoir été égorgé, auprès de sa fille, également abattue par un projectile dans le front.


Non loin des deux corps gît celui d’un inconnu, assassiné de la même façon...


Mais ce qui désempara la police officielle fut que toutes les balles provenaient d’armes différentes, dont celle qui tua le père et qui appartenait à son enfant...


Ces meurtres sanglants et ceux qui suivirent seraient demeurés irrésolus si les membres de l’agence de détectives IGGINS & C° ne s’étaient pas lancés sur la piste du ou des coupables avec le succès que l’on sait et que vous allez découvrir maintenant...

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Informations

Publié par
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EAN13 9791070039304
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0019€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

I
UN SAVANT QUI N'EST PAS COMMODE

— Monsieur, il y a là un monsieur qui veut voir Monsieur !
— Sortez, Casi !
— Monsieur sait bien...
— Je sais bien, Casi, que je vous ai donné l'ordre de ne m'éveiller sous aucun prétexte avant midi.
— Monsieur, ce monsieur a déclaré qu'il démolirait la maison plutôt que de partir sans avoir vu Monsieur.
— Il a dit cela, Casi ?
— Bien sûr, Monsieur, et le voilà qui commence, Monsieur, et je suis seul ! M. Dalton est sorti de grand matin, et son domestique est absent...
— Et tu n'es pas assez grand, peut-être, pour flanquer cet individu à la porte ?
— Bien sûr non, Monsieur, dit Casi avec flegme.
C'est ainsi que je fus désagréablement réveillé au petit jour — quelle heure pouvait-il être ? — huit heures, peut-être — par mon domestique Casimir, garçon dévoué, mais pacifique, et c'est par ce dialogue habile que ma paresse gagnait du temps. Tout de même, il fallait me hâter de me lever, si je ne voulais voir cet individu frénétique mettre ses menaces à exécution. Je l'entendais dans le salon marcher de long en large, d'un pas nerveux.
Nous étions rentrés la veille avec Dalton. Harassés, brisés nerveusement surtout par cette suite d'émotions, d'espoirs et de désillusions successives, et dans un état de telle fatigue morale que ni l'un ni l'autre nous n'avions parlé de l'affaire, chassant d'instinct de notre esprit trop tendu tout souvenir des scènes qui venaient de se dérouler.
Dalton avait insisté seulement pour me faire coucher chez lui. Il y avait, à côté de sa chambre, une petite pièce où l'on pouvait m'installer un lit de fortune, assez confortable pour un vieux soldat comme moi. J'aurais hésité ; mais je compris à la nervosité de mon ami, à deux ou trois phrases qui lui échappèrent que, après s'être ainsi démasquée par une publicité retentissante, la Société Iggins ne pouvait reculer. Cet assassinat déjà si mystérieux prenait de telles proportions qu'il fallait, pour mes amis, ou triompher en l'éclaircissant, ou disparaître. J'avais compris qu'ils donnaient tout leur effort, que tous leurs hommes s'employaient, que mon aide enfin devenait nécessaire à tout instant, et qu'il ne fallait plus penser qu'à être un soldat discipliné dans cette bataille, un soldat qui obéirait toujours, même quand il ne comprendrait pas.
D'une poignée de main, Dalton m'avait remercié.
En hâte, maintenant, je m'habillais. Mon esprit reposé repartait en chasse. Je revoyais le beau visage tragique de Madeleine de Beaumont. J'entendais le cri de désespoir de Jacques Dambleuse. Mais que pouvait bien me vouloir cet individu qui m'éveillait en sursaut, avec des manières si comminatoires ? Ou plutôt que pouvait-il bien vouloir à Paul Dalton ? Je me croyais autorisé par les circonstances à le recevoir en son lieu et place.
Correct et digne, je m'étais installé dans le cabinet de travail. J'avais étalé, dans un désordre habile, deux ou trois livres sur le bureau, devant moi. J'avais allumé une cigarette matinale. J'avais pris un air indifférent et distant, et froid comme il convenait, pour recevoir cet importun que je daignais entretenir. Puis je fis signe à Casimir, inquiet, de l'introduire.
Casimir ouvrit la porte et s'effaça, pour laisser passer un vieillard sec, maigre et vif, qui, en quelques enjambées trépidantes, s'élança au milieu de la pièce. Il était grand, et décidément extraordinairement maigre. Il s'arrêta, il s'immobilisa plutôt, car soudain il n'y eut plus un muscle de sa personne qui ne fut rigide, il me regarda, et je le regardai.
Il faut sans doute attribuer à mon zèle de débutant le souci de scrupule avec lequel je détaillai cet individu, tandis que, l'espace de quelques secondes, nous nous contemplions en silence. Mais encore aujourd'hui, quand j'essaye de me rappeler l'image de cet homme, c'est ainsi que je le vois, avec cet excès de détails minutieux, tel qu'il m'apparut ce matin-là.
Il était vêtu d'un long manteau de voyage en caoutchouc verdâtre, et qui flottait autour d'un torse étroit. Il tenait à la main un chapeau haut de forme, démodé et à bords plats, et son autre main s'appuyait sur une canne normande, en bois de frêne. Des pantalons noirs trop longs, retroussés du bas, tombaient cependant sur des bottines, carrées du bout.
Je regardais les mains, qui étaient longues et fines, mais comme desséchées, avec des articulations énormes. De grosses veines les sillonnaient, remontaient des doigts, s'enflaient en larges plaques bleues avant de disparaître aux poignets. Les ongles étaient longs, taillés en pointe.
Avec une extrême rapidité, j'avais volontairement noté ces détails, et je me réjouissais de mon talent professionnel.
Quand je m'avisai de regarder attentivement la figure de l'étranger, un trouble singulier sembla me paralyser. À peine si je vis le front démesuré, haut, barré de rides, couleur de vieil ivoire, la barbe grise qui tombait en longs filaments et se terminait en une pointe jaunâtre, tout le visage couleur de safran de ce vieil homme. Ce ne fut plus moi qui le regardai, mais lui qui me regardait. Ses yeux brillaient derrière les lunettes teintées de jaune, et les traversaient comme d'un rayon de lumière. Je vis que ses cils étaient remarquablement longs, et sous ses paupières tombantes filtrait un regard aigre.
— Eh bien ? dit l'étranger.
Ici commença un dialogue incohérent et fantasque et dont je m'efforcerai de rendre la qualité.
— Eh bien ? répéta-t-il.
Il s'empara d'un fauteuil, lourd et massif, et, d'un élan dont je l'aurais jugé incapable, le poussa contre la cheminée. Il s'assit, posa son chapeau à terre, puis croisant ses bras et faisant disparaître ses mains dans les vastes manches de son pardessus d'un geste frileux, il pencha légèrement la tête en avant et sur le côté.
— Eh bien ? dit pour la troisième fois cet être étrange.
— Asseyez-vous, dis-je, car enfin, ce sans-gêne m'irritait.
— Merci, tout à l'heure ! affirma, cet homme brutalement. Pourquoi votre feu n'est-il pas allumé ?
— Je n'attendais pas votre visite.
— Ah ! c'est possible. Êtes-vous Paul Dalton ?
— Je n'ai pas le plaisir d'être M. Paul Dalton.
J'avais pris le parti de m'amuser et d'être patient. Cependant, son regard me fatiguait. J'atteignis une autre cigarette.
— Qui êtes-vous, alors ?
— Un homme quelconque parmi d'autres hommes.
J'allumai ma cigarette.
— Ne fumez pas, ne fumez pas ! Dieu me damne ! dit l'étranger, vous n'allez pas fumer maintenant !
Il bondit avec une vivacité incroyable, saisit mon bras qu'il serra de ses cinq doigts maigres, comme dans un étau, avec une vigueur qui me parut surnaturelle.
Je lâchai la cigarette, mais le repoussai un peu rudement.
— Je supporte difficilement l'odeur du tabac, dit cet homme avec flegme, comme en manière d'excuse. Mais êtes-vous Paul Dalton ?
— Non !
— Alors, qui êtes-vous ?
— À qui ai-je l'honneur de parler ?
— Comédie ! gronda le vieillard, redevenu frénétique.
Ses lèvres tremblaient. Je vis les veines de ses mains se gonfler.
— Êtes-vous, oui ou non, quelqu'un de la bande à Iggins ?
À ce nom, je repris tout mon sang-froid, décidé à écouter, à apprendre et à comprendre.
Je dis :
— Je suis quelqu'un de la bande.
— Ah ! murmura le vieillard, le bandit ! Pourquoi le poursuivez-vous ?
— Qui ? Jacques Dambleuse ?
— Taisez-vous !
— Comme il vous plaira.
Je commençais à croire que j'avais affaire à un aliéné échappé, et que la lecture des derniers journaux avait violemment ému. Tout en surveillant ses mains, car je n'étais rassuré qu'à demi, ignorant le contenu de ses poches, et la façon dont il m'avait serré le bras m'avait renseigné sur sa force physique.
— Mon cher Monsieur, commençai-je avec bienveillance, nous ne le poursuivons pas. On vous a trompé...
Et j'appuyai discrètement sur le bouton électrique. J'entendis bien le bruit éloigné du timbre, là-bas, dans l'antichambre. Mais Casimir n'était pas là ou jugeait plus prudent de ne pas se montrer. C'était un garçon bien dévoué, mais qui était trop pacifique pour m'aider dans le métier que j'avais choisi.
— Pour le compte de qui marchez-vous ?
— Pour notre propre compte, mais contre personne.
Cette conclusion m'avait paru habile. Insensiblement, ma main gauche tirait un tiroir du bureau où je savais qu'il y avait un browning. C'était fait. Ma main sentait le froid rassurant de l'acier. Un bond en arrière, et j'aurais l'arme dans la main droite. Et tant pis pour cet individu s'il m'attaquait. Mais lui hochait la tête.
— C'est invraisemblable ! Et pourquoi ?
— Vous le savez bien, nous l'avons crié partout. C'est une affaire de publicité.
— Occupez-vous de ce qui vous regarde ! dit-il violemment.
— Cela nous regarde.
— Non !
Il hésita.
— Les Beaumont et les Limandoux vous payent bien ? Non ? Alors c'est Jacqueline Desbois ? Non ? Qui donc ? ceux de la petite fille ?
— Vous, divaguez.
— Est-ce la police elle-même ?
— Oh ! non.
— Les affaires étrangères ?
— Mais non, mais non. Et puis vous m'ennuyez, Monsieur, comprenez-vous ? Avez-vous quelque chose de sérieux à me dire ? Non ? alors, sortez, et vite, voulez-vous bien ? Je suis décidément, pressé.
J'avais mis le revolver à la main.
Un pas lourd et pesant résonna dans l'antichambre.
L'inconnu s'était vivement levé et adossé à la cheminée.
La porte s'ouvrit. Un homme de haute taille, aux épaules larges, une sorte de géant calme, entra. Il salua, regarda attentivement mon visiteur et dit simplement :
— Docteur Dambleuse, votre fils Jacques n'est pas l'assassin du capitaine de Limandoux.
Ces mots furent pour moi une révélation.
Je regardai le malheureux vieillard adossé à la cheminée. Une pâleur verdâtre couvrait son visage ; ses mains aux veines gonflées, ramenées contre la poitrine, comme pour contenir une émotion trop forte, étaient agitées d'un tremblement fébrile. À la fin, il se ressaisit. Il toussa légèrement. Un flot de vie parut le ranimer.
J'étais debout, incertain, mon revolver à la main. Mille pensées confuses se heurtaient dans mon esprit. L'homme de haute

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