Le rêve d Habib
222 pages
Français

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Description


Deauville, ses belles demeures, sa plage aux parasols multicolores, tel un fragment de paradis. Et soudain, sur le sable blond d’un matin calme, un cadavre atrocement mutilé.


Règlement de compte, trafic humain ? Fraîchement promue capitaine et mutée sur la côte normande, Hadija Mounier va devoir prendre en charge cette affaire sensible. Secondée par un jeune OPJ au tempérament atypique, elle va être confrontée aux profiteurs sans scrupules, mais également aux bonnes âmes locales.


Une plongée éprouvante au sein de la noirceur humaine qui fera remonter à la surface des épisodes enfouis de son propre passé.



Jean-Michel Leboulanger est romancier, musicien et passionné de photographie. Il a beaucoup voyagé de par le monde. Son pays de prédilection est le Japon où il a séjourné à de nombreuses reprises et dont il s’est imprégné de la culture. L’auteur est surtout connu pour ses polars et thrillers, mais pratique également le roman traditionnel. « Le rêve d’Habib », son septième roman, a reçu le prix du Polar normand et le prix Polars de Nacre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 31 mai 2023
Nombre de lectures 1
EAN13 9782382111888
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le rêve d’Habib
Jean-Michel Leboulanger
Le rêve d’Habib
M+ ÉDITIONS
5, place Puvis de Chavannes
69006 Lyon
mpluseditions.fr

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
 
© M+ éditions Composition Marc DUTEIL ISBN : 978-2-38211-188-8
1
Sa foulée était régulière, huilée comme une mécanique de précision. Dans le petit matin, les pas d’Hadija résonnaient sur le sol comme un tambour, puissants, cadencés. La jeune femme était une gazelle du désert, le désert marocain, celui où elle était née. Les piétons qui la voyaient passer ne pouvaient s’empêcher de l’admirer en se retournant. Principalement les hommes. Elle était svelte, le buste en avant, la peau bistre et surtout, comme une couronne, elle portait une chevelure brune léonine qu’elle n’avait jamais réussi à dompter tout à fait.
Comme à son habitude, elle s’était élancée de chez elle, avait descendu les rues de Trouville, franchi la Touques, longé le bassin à flot en direction de la mer pour finir sa course en apothéose sur les planches de Deauville dans un sprint qui la menait hors d’haleine au bout de la plage. Hadija aimait ce moment particulier de la course, cette liberté enivrante du second souffle, avec ce sentiment qu’elle pourrait courir ainsi jusqu’au bout du monde.
Avec l’entraînement, Hadija était devenue une montre suisse, maîtresse du temps et de l’espace. Parvenue sur les planches, la jeune femme ferma les yeux. À cette heure matinale, elle ne risquait pas de percuter le peu de promeneurs qui pouvaient s’y balader. Mentalement, elle visualisa l’infini rectiligne du bois tendre et dur à la fois, sa peinture grise doucement émoussée par le sable fin que le vent saupoudrait à sa surface, comme autant de poussières de mer. Paupières closes, elle se concentra sur la résonance sourde de son pas rapide. Une langue de sable, le bois, un léger tapis de sable à nouveau…
Et puis, la chaleur du soleil dans son dos. Le soleil, enfin. Pour un vrai premier beau jour d’avril. Il lui manquait tellement depuis qu’elle était arrivée à Deauville, six mois auparavant.
Les frimas de l’automne l’avaient saisie, avec son cortège de morosité couleur d’ecchymoses : la pluie, le vent et par-dessus tout, l’absence d’Alan qui officiait désormais dans son ancien commissariat, là-bas à Saint-Étienne.
Ils s’étaient rencontrés lors d’une enquête commune sur des meurtres en série de femmes. Lui à Deauville et elle à Saint Étienne. Malgré le fait qu’ils savaient devoir tenir leurs distances pendant le travail, une attirance réciproque les avait rapprochés. L’amour, plus fort que tout.
Ensuite, ce fut du grand n’importe quoi. Chacun avait voulu faire la surprise à l’autre de se faire muter dans leurs villes respectives.
Une belle surprise…
Sans qu’aucun des deux ne puisse penser que l’autre aurait la même idée. C’est ainsi qu’Alan avait quitté son commissariat de Deauville pour rejoindre celui de Saint-Étienne, et qu’Hadija était partie au même moment de Saint-Étienne pour prendre son nouveau poste à Deauville.
Ils s’étaient croisés le temps d’un week-end, à mi-chemin. Elle qui montait vers la Normandie, lui qui descendait vers le sud. Deux jours d’amour, de rires et de pleurs, avec pour finir une tristesse infinie dans le cœur quand ils se retrouvèrent chacun seul dans une ville inconnue et éloignés l’un de l’autre.
Depuis quelques semaines, Hadija avait pris l’habitude de courir seule chaque matin. Quel que fut le temps. Une routine dont elle avait senti la nécessité pour ne pas devenir folle. Toujours à la même heure, toujours le même parcours entre Trouville et Deauville. Elle connaissait désormais chaque mètre par cœur : le trou qu’il fallait éviter sur le trottoir, la planche de bois mal cloutée qui rebondissait sous son pied comme un trampoline, l’épaisseur du sable plus importante sur la digue, apporté par le même courant d’air.
Les premières semaines, elle avait détesté la pluie horizontale et collante de l’hiver, méprisé le vent marin qui fouettait sa peau caramel de fille de l’Atlas, et pleuré l’absence de son homme. Alors, elle s’était mise à courir pour atténuer sa peine. Son travail de capitaine de police au commissariat de Deauville lui prenait tout son temps. Dès le premier jour, ses nouveaux collègues l’avaient accueillie avec enthousiasme, comme une extension d’Alan qu’ils regrettaient tous, même le commissaire Morin. Les relations avec son étrange supérieur étaient cordiales. Ce bellâtre à la crinière argentée semblait davantage préoccupé par son image que par le suivi des enquêtes, sauf quand celles-ci mettaient son poste en péril. Il montrait alors tant d’efficacité et d’acharnement qu’il suscitait ponctuellement l’admiration de son équipe, prompte à oublier ses travers. Hadija, sur les conseils d’Alan, l’avait rapidement apprivoisé. D’abord par son entière disponibilité, mais également en lui soufflant quelques bonnes idées dont au final il était persuadé qu’elles venaient de lui. Hadija ouvrit les yeux. Sa course n’avait pas dévié d’un centimètre. Parvenue au bout de la plage, elle fit demi-tour sans même prendre le temps de souffler. Au loin se dessinaient les immeubles récents de la marina, puis les bassins et au-delà les pontons qui séparaient Deauville de Trouville.
La lumière était à tomber. La côte normande l’avait séduite dès la toute première fois quand Alan l’avait accueillie à la gare. Le bleu clair et uniforme du ciel l’émouvait profondément, pourtant si éloigné du bleu Majorelle suspendu au-dessus des oueds.
Ce matin-là, le paysage était une immense toile qui se résumait à deux coups de brosse parallèles en à-plat : le blond pâle du sable et au-dessus, la mer assoupie dans un ciel infini. La ligne qui séparait la plage de la mer était droite et pure, dans des couleurs denses que seul un peintre normand aurait pu reproduire.
Hadija se sentait à la fois normande et marocaine. Sans ambiguïté aucune dans cette double culture qui n’en formait plus qu’une, originale et riche.
Au loin, quelques silhouettes vibraient dans l’air chaud qui montait. Un chien noir courait sur la rive des vagues. Le beauceron allait et venait dans une folle liberté qui l’enivrait, un couple marchant lentement derrière lui. Les aboiements joyeux du chien lui parvenaient, portés en écho par la brise.
Essoufflée, Hadija ralentit, puis s’arrêta enfin, étourdie par l’air, mais heureuse de s’être à nouveau dépassée, comme chaque matin. Reprenant son souffle, elle s’amusait à regarder le chien faire des cabrioles pour attirer l’attention de ses maîtres.
Tout à coup, ses aboiements changèrent. Ils devinrent furieux, puis geignards. Les mains sur les hanches, Hadija observait la scène. Elle entendit l’homme appeler : Bahia, Bahia ! Mais le chien n’obéissait pas. Malgré les appels, il s’obstinait à aller et venir nerveusement entre une sorte de masse échouée sur le sable et le couple qui marchait tranquillement. À quelques mètres de la forme sombre, ils se figèrent en même temps. L’homme avança prudemment, gardant sa femme à distance d’un geste du bras. Elle avança néanmoins, jusqu’au moment où elle poussa un cri d’horreur.
Hadija sprinta aussitôt sur la plage. Elle approchait à toute vitesse de la masse reposant dans un creux de sable humide, pas assez proche encore pour en identifier sa nature. Quand elle parvint à la hauteur du couple, l’homme soutenait sa femme, dont les mains recouvraient son visage. Langue pendante, haletant, Bahia était désormais calmement assis à leurs pieds.
Prudemment, Hadija fit quelques pas vers la chose. L’espace de quelques secondes, elle se tint devant elle sans comprendre, incrédule, avant qu’un haut-le-cœur la saisisse. La réalité l’avait rattrapée, ainsi que son métier de flic. Elle se tourna vers le couple en état de choc.
– Je suis officier de police, dit-elle en sortant sa plaque de sa veste de sport. Mes collègues vont intervenir. Pas la peine de rester devant cette horreur. Donnez-moi vos coordonnées et je vous recontacterai pour l’enquête. Si vous avez besoin de l’aide d’une cellule psychologique, n’hésitez pas…
L’homme et la femme ne se firent pas prier et s’éloignèrent, le chien sautillant joyeusement autour d’eux. Désormais, Hadija se retrouvait seule sur la plage devant un torse humain, sans bras, sans jambes, sans tête, mais dont on pouvait encore constater que c’était un homme.
2
C’était un jour de promenade, le long d’un paysage digne d’une œuvre d’art, aux couleurs fauves en lisière de plage, et pastel dans le flou de l’horizon. Un paysage qui incitait n’importe quel barbouilleur à poser son chevalet et à laisser déborder ses tubes de peinture selon son inspiration. Comment était-il possible qu’une ébauche de paradis puisse devenir une telle scène d’horreur ?
Des claustras de plastique vert entouraient le corps pour le dissimuler à la vue des curieux. Par-dessus le cercle ainsi formé, des têtes encapuchonnées de blanc apparaissaient et disparaissaient au gré des prélèvements et des constatations. La mer descendante s’était éloignée vers l’horizon, laissant un large espace aux techniciens de la PTS, la police technique et scientifique, pour mener leurs recherches.
Accroupi près du torse nu, Daniel Neuville, le responsable de l’équipe technique, faisait les premières constatations. L’homme en combinaison blanche était le prototype même de l’individu passe-partout : ni sportif ni relâché, avec une tête qui le faisait ressembler à la fois à monsieur tout le monde et à personne en particulier. Alan avait confié à Hadija que Neuville était un technicien hors pair, sur qui elle pouvait compter, mais dont

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