MatHum

François-Xavier Luciani

Description

Lors d’une banale mission de contrôle dans le désert tunisien, Frøya - une Techno bien notée - commet la faute impardonnable de survivre à une exposition virale d’une variante d’Ebola. Que son métabolisme l’immunise naturellement fait d’elle une endettée envers la compagnie qui possède le brevet du vaccin.
Déclassée brutalement, elle va entraîner le lecteur dans les coulisses d’un univers dystopique où surseoir à l’équarrissage demande beaucoup d’abnégation et de clairvoyance.
Son seul tout petit atout sera sa Duplique, son clone génétique qui va d’abord la suivre puis, au fil des pages, lui suggérer que la seule issue réside dans sa propre humanité à opposer à l’horreur.

Sujets

• Thrillers
• Fiction
• Thriller

Informations

• Publié par: Les Éditions du Net
• Date de parution: 16 avril 2020
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782312072517
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

MatHum
François - Xavier Luciani
MatHum
Tome I
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
Du même auteur :
1997 – Confession d’un Putain (nouvelle), in Mathias et Jean - Jacques Pauvert , « Anthologie du coït » éd. La Musardine
ISBN : 2842710215
2013 – Bastia pour Dames (roman), Pseudonyme : François Xavier éd. Au coin de la rue ( Albiana – Ajaccio )
ISBN : 979-10-91232-18-0
2013 – Hallali (nouvelle), in « Fabula » éd. Materia Scritta
ISBN : 978-2-916402-15-4
2014 – Omerta (nouvelle), in « Fabula » éd. Materia Scritta
ISBN : 979-10-93285-01-6
2014 – La Cana (nouvelle), in « CorsÉrotica » éd. Materia Scritta ,
ISBN : 978-2-916402-16-1
2018 – Subjonctif (roman), Éditions du net
ISBN : 978-2-312-06308-9
2019 – Thalamus & Cortex (pièce de théâtre), Éditions du net
ISBN : 978-2-312-06484-0
© Les Éditions du Net, 2020
ISBN : 978-2-312-07251-7
Un remerciement tout particulier à Frédéric Marceau qui m’a autorisé à photographier ses tatouages figurant en couverture, ils illustrent parfaitement le concept de matériel humain recyclable dont il est question dans cet ouvrage.
Chapitre 1. Viande
Calculés.
L’angle, la force et la vitesse de la claque furent calculés comme l’avaient été la lumière froide des plafonniers et l’exposition ordonnée des instruments métalliques. Tout avait été conçu pour donner l’impression à l’entendue d’être à la fois un rat pris au piège et une souris blanche avant vivisection.
Au travers des cloisons épaisses sourdaient, tranchantes, les vocalises aiguës d’autres pensionnaires en phase d’audition avancée. En d’autres circonstances, la jeune Techno aurait pu apprécier la mise en scène gothique du décorum mais, dans cette cérémonie caricaturale, elle ne savait vraiment quel rôle lui était assigné : Témoin, auditrice, accusatrice, accusée ?
Que signifiait cette frappe sèche contre sa joue ?
Grand, le corps à la musculature augmentée, le profil aquilin, la chevelure auburn à la coupe carrée, une moustache rousse qui soulignait ses yeux jaunes, l’Expert en maïeutique appliquée était vêtu d’une nanocombi noire aux galons d’argent. L’homme imposait sa position hiérarchique avec ostentation. Il est vrai qu’il pouvait être fier de son échelon douze : orgueil des plus hautes instances de sa condition – potentialité contractuelle d’accéder au rang d’Acto – Qu’il fut diligenté pour s’adresser physiquement à Frøya sans passer par une TélInkiz satellitaire conférait à cette affaire une importance qu’elle ne pouvait totalement embrasser.
« Soyez plus précise ! »
Le revers claqua brutal contre les os des pommettes. Sa tête, Badminton mou, percuta les angles du fauteuil en bois épais. Ses beaux cheveux d’un blond vénitien couvrirent en désordre son visage meurtri. Immédiatement un son sifflant vrilla ses oreilles. Sa boîte crânienne devint un shaker lumineux d’où écuma un cocktail d’hormones. La mélasse hachurée de mots rouges matérialisa en force le concept de panique ; concept pour lequel sa formation montrait quelques lacunes ; elle n’avait aucune référence, aucun mode d’emploi, aucune notion sensible propre.
Tenter de respirer le plus calmement possible était la seule option raisonnable. Les stages antistress l’avaient initiée aux techniques de maîtrise des boucles thalamo-corticales. Elle se concentra sur sa réponse comportementale et réussit à s’exprimer posément : « De quel vaccin parlez-vous ?… »
Une autre gifle, également calculée dans son angle et sa pression légèrement supérieure, fusa avec une rapidité et une violence qui électrifièrent sa crédulité.
« Mais, bredouilla-t-elle, vous ne… pouvez… fra… frapper une… Techno ! »
C’était la réponse attendue. Le sujet devait faire référence à ses droits et donc à la Loi. C’est de là que la construction rhétorique de l’interrogatoire tirait ses fondations.
« Une Techno ? Dîtes-moi, mademoiselle Frøya, d’après vous, comment une Techno d’échelon trois peut-elle avoir accès à un vaccin de codage génétique ? Vous savez combien ça coûte ?
– Mais quel vaccin ? »
Le deuxième revers fut donc la troisième frappe enregistrée par les capteurs de mouvements, consignée dans la base de données, classée dans les formulaires d’audition, archivée aux fins de rapport de procédure. La dernière carte de ce brelan vint cueillir la joue droite. La douleur fut plus incisive encore. S’il avait persisté le moindre doute, cette troisième atteinte physique la désignait indéniablement comme une accusée. Le cœur de la jeune Techno battait le tempo Speed d’une FiestaMiuzik . L’air lui manquait ; le sol se dérobait ; l’environnement se fissurait ; un gouffre l’aspirait. Son esprit malmené lançait à l’aveuglette quelque grappin conceptuel. Il lui fallait une pilule rose, mais, à défaut d’une médication improbable, elle chercha un point de stabilité dans le maelström sensoriel où son entendement était happé. La lumière du jour passait par la seule ouverture extérieure de la pièce : une fenêtre en plein cintre où s’arcboutaient des blocs taillés au burin dans une roche de concrétion. La luminosité vivace qui en émanait lui suggéra que la façade devait être exposée plein sud ; l’unique menuiserie vitrée révélait également une épaisseur de mur impressionnante. La structure maçonnée en pierres massives lui évoqua un château fort de l’époque médiévale. L’austérité du lieu lui fit opter pour un ancien ouvrage militaire. Elle distingua furtivement une équipe de MatH - Maçons qui se déplaçait sur le haut d’un rempart. Au loin, les rangées de MatFlors réglementairement alignées la renseignaient partiellement sur l’endroit où elle venait d’être conduite. Des vignes et une vaste oliveraie étalaient leur feuillage sur une plaine vallonnée que des pics rocheux ponctuaient de gris rose. Elle se trouvait sans doute au sud du continent européen, à une distance relativement peu importante de la Méditerranée . Il lui fallait un complément d’information pour se situer plus précisément. Il était urgent de ne pas se penser perdue.
La Loi… Pour l’instant, seule la Loi représentait un repère objectif : « Fra… Frapper une Techno est… est… un… crime… relevant de juridiction transsyndicale…
– Justement… J’ai toutes les polices d’assurance afférentes à une autorité d’interrogatoire en niveau douze. Transsyndicale et transsociétale : le maximum. Mais vous n’avez certainement aucune idée de ce que cela peut signifier…
– Mais… Je… Ce sont les MatHums que l’on traite physiquement… Eux sont conditionnés à ce type de communication… Minidiome et violence sont les seuls langages qu’ils comprennent… Mais attenter physiquement à l’enveloppe corporelle d’un Techno est hors procédure !
– Puisque c’est vous qui le dîtes. Puisque vous invoquez la Loi et… la procédure ; procédons ! »
L’Expert appuya sur un interphone mural et dit : « Apportez-moi la Duplique ; préparation dénudée ; médication hypersensible ; portique d’interrogatoire niveau six. Je la veux en salle de traçabilité éthologique immédiatement ! »
Il avait dit cette phrase en scrutant la jeune entendue d’un regard dur où ses yeux jaune clair la fixaient comme ceux d’un rapace, incisifs, déterminés à matérialiser une violence froide qui n’avait cours que dans le monde réel ; monde que l’univers Technocratique s’évertuait d’ordinaire à éviter à ses membres… tant qu’ils restaient à leur place.
Frøya eut très peur. Une peur sauvage. Elle se savait totalement démunie, impuissante, fragile. Elle avait déjà entendu parler des salles de traçabilité éthologique , il s’y pratiquait des interrogatoires comportementaux d’une efficience absolue. Les aveux inconscients collectés avaient une force de Loi incontestable. Mais de quoi l’accusait-on pour enclencher une telle procédure ? Elle esquissa une impulsion réflexe : Se sauver. Sauver son échelon, ses droits, son épargne, ses privilè