Un coin tranquille à mourir
328 pages
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Un coin tranquille à mourir , livre ebook

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Description

Un serial-killer insaisissable s’acharne sur les jeunes filles d’une paisible bourgade des Deux-Sèvres. Devant l’impuissance des autorités judiciaires et l’insistance de son conseil municipal, le comte Alexandre de La Roche-Foutray, maire du village, se résout de mauvaise grâce à faire appel aux services du détective belge Archibald Alloupépin, dont son premier adjoint s'est émerveillé des exploits à la lecture d'une obscure feuille de chou. Le prétendu épigone de Sherlock Holmes se révèle bien vite un amateur sans expérience, mais il ne se décourage pas pour autant et met un point d'honneur à résoudre cette énigme. Entre l’aristocrate désenchanté et le détective pataud va alors se nouer une improbable amitié. Mais il est toujours plus tard qu'on ne le pense...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 juin 2015
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332961600
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0112€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-96158-7

© Edilivre, 2015
Prologue
Ce n’était qu’un village comme il en existe des milliers, provincial à la caricature et bourgeois à croquer, où dans une somnolence ouatée s’égrenaient imperturbablement des jours insipides. La carte postale rituelle sur laquelle quelques maisons basses se serraient autour de l’église et l’inévitable café, sans lequel l’office dominical perdrait beaucoup de son sel, le résumaient presque en entier.
Rien ne prédisposait à ce qu’il arrivât jamais quelque chose à Moulois. Depuis le jour où un obscur pionnier avait décidé de poser ses valises dans ce coin de France, que les hagiographes de terroir décrivent généralement comme verdoyant et riant et leur contempteurs urbains comme « le trou du cul du monde », le village s’était complu dans un anonymat des plus profonds. Aucun grand homme n’avait vu le jour dans ses foyers, aucun non plus ne s’y était arrêté, ne serait-ce que pour satisfaire à un besoin pressant, et même les Allemands avaient négligé de faire un détour pour l’occuper à l’époque où c’était leur distraction favorite. Le seul haut fait jamais dû à un Mouloisien demeurait le premier prix obtenu par Henri Dumonier aux comices agricoles de 1957 pour l’excellence de ses navets, mais la grande presse négligea de célébrer l’événement comme il eût convenu et seule une tombe sans faste, ornée de ces charmants chrysanthèmes en plastique violet délavé qui font le charme des cimetières de tout poil, perpétue le souvenir du Dumonier en question.
Selon le vieil adage « Pour vivre heureux, vivons cachés », une seule chose importait à Moulois : qu’on épargnât sa tranquillité. Les mille et une rivalités locales, les commentaires avertis sur les amours en cours et la surveillance jalouse de la moralité du voisin constituaient l’ordinaire pâture des émois locaux et, à défaut de trouver cela exaltant, tout le monde semblait s’en contenter. Pourtant, le destin, que l’on dit volontiers facétieux, surtout quand il a forcé sur les alcools forts, décida de frapper brutalement et depuis qu’un maudit matin d’août avait allumé sur ce petit bourg rural les projecteurs de l’actualité rien n’avait plus été comme avant.
Ce soir là, tandis qu’il nouait autour de son col blanc une cravate vert pomme du plus bel effet, le comte de la Roche-Foutray, présentement maire de Moulois se sentait d’humeur maussade. Quoiqu’il s’en fût souvent diverti par ailleurs, la perspective d’affronter l’insondable vacuité des débats municipaux avait suffi à assombrir une pourtant splendide journée de fin d’automne. Son irritation ne le devait en rien au fait que la séance promît d’être houleuse, au contraire il y voyait plutôt une occasion de s’amuser à peu de frais, mais cette réunion exceptionnelle, devant laquelle il avait dû s’incliner de mauvaise grâce, le privait de son tête à tête galant et hebdomadaire avec Annette Ravaud, la légitime de l’instituteur local, communiste virulent et son adversaire juré au sein du conseil. En s’installant au volant de sa Mercedes, il fulminait toujours contre les fâcheux qui constituaient l’ordinaire de ses relations sociales et quand il rangea sa voiture devant l’hôtel de ville entre celles du pharmacien et du boucher son exaspération culminait à des sommets où il aurait volontiers pendu tous ceux-ci à des crocs de boucher.
Comme il en gardait jalousement l’habitude, il fut le dernier à pénétrer dans la salle du conseil où ses coreligionnaires patientaient bruyamment autour de la grande table ovale. Son entrée imposa un silence immédiat et un aréopage de trognes rougeaudes, dont les multiples veinules violacées témoignaient d’un acharnement sans faille à la résorption des surplus vinicoles, se dressa des fauteuils, à l’exception de Guy Ravaud, qui exprimait par là son mépris de l’aristocratie, son obstination farouche à sa politique et la douleur muette d’hémorroïdes obstinées.
Après un bref salut à la cantonade, le comte s’assit dans son fauteuil et dans un silence de cathédrale ouvrit le dossier posé devant lui. Avec une nonchalance étudiée, il ajusta ses lunettes de vue, pesta intérieurement contre la secrétaire, qui s’obstinait à écrire « délibations du conseil » au lieu de « délibérations », et fit mine de parcourir le texte attentivement. Rien qu’il ne sut déjà, bien entendu, mais l’étiquette imposait de donner le change avec ce genre de simagrées.
Au bout de quelques minutes, jugeant qu’il en avait assez fait, il releva la tête, se cala profondément dans son fauteuil et prit une lourde respiration ressemblant à s’y méprendre à un soupir. La fonction de maire comportait décidément bien des vicissitudes : en plus de se voir infliger l’indigeste pensum de cette réunion, il lui incombait également de mener les débats, prérogative qu’il eût volontiers cédée au premier venu. Il se racla la gorge, le temps de trouver les mots pour présenter l’idée imbécile, partant susceptible de rallier les suffrages, que lui avaient suggérée ses deux adjoints. De toute manière, tout le monde connaissait déjà l’objet de son annonce, ce n’était qu’une formalité protocolaire de plus.
« Comme vous le savez tous… », commença-t-il sans autre effort d’imagination. Effectivement, tout le monde savait. Tout avait commencé quatre mois auparavant…
1
Lucien Morilloux était ce qu’il est convenu d’appeler, par un doux euphémisme, une personne simple. Il avait voué sa vie, ou plutôt la vie l’avait voué, à la culture céréalière ainsi qu’à l’élevage en tous genres et il s’en tirait, sinon avec bonheur, du moins avec constance. Né à Moulois, ayant usé ses pantalons et la patience de ses maîtres à son école communale, il ne s’en était éloigné qu’une seule fois pour un pèlerinage à Lourdes dans le but de solliciter de la Vierge, soit un gain substantiel au Loto, soit, si des impératifs techniques rendaient la chose impossible, d’accorder à sa tante Eulalie une fin rapide et indolore, l’une ou l’autre alternative lui procurant des liquidités peu ou prou équivalentes. La sainte Vierge, dont rien n’indique qu’elle milite à la SPA, lui ayant en l’occurrence montré qu’elle avait d’autres chats à fouetter, il avait différé ses rêves de grandeur et s’était résigné à un univers se limitant à ses cinquante hectares de champs, ses étables, son logis, à l’église, en laquelle il sacrifiait le dimanche à de somnolentes dévotions, et au bistrot local où après la messe il retrouvait toute son énergie pour des parties de belote acharnées.
Rien ne semblait devoir jamais troubler l’ordonnancement soigneusement réglé de cette vie sans heurts, quand un hasard malencontreux précipita le pauvre homme sous le feu des projecteurs et, même si un passage éclair à la télévision régionale lui valut un surcroît de considération de la part de ses proches, il se serait volontiers passé de cette faveur.
Un matin d’août, en ramenant au champ ses vaches fraîchement traites, il aperçut dans un chemin de terre à l’orée d’un bosquet une bicyclette rutilante, négligemment couchée à même la mousse. Moulois n’étant pas la banlieue de Chicago, que son propriétaire l’eût abandonnée dans cette position désinvolte, même à cette heure matinale, n’avait rien de particulièrement bizarre, mais en bon esprit du terroir, conscient de la valeur des choses, Lucien se révolta intérieurement qu’on pût laisser sans surveillance un aussi bel objet, ne serait-ce que quelques instants. Si son troupeau lui en avait laissé le loisir, il s’en serait volontiers emparé pour la ramener au village, histoire de donner une leçon à son inconscient de propriétaire, mais comme il était hors de question qu’il laissât ses vaches seules au milieu de la route il ne s’arrêta pas et, ruminant la haine indicible que lui inspiraient les êtres assez lâches pour abandonner en pleine nature un pauvre vélocipède sans défense, se dépêcha de conduire celles-ci à leur pâturage.
La mémoire n’étant pas son point fort, après avoir profité de la solitude de son champ pour s’épancher la vessie, ce qui par une physique bizarre lui vidait aussi le cerveau, il avait presque oublié la bicyclette en refermant l’enclos. Cependant, sur le chemin du retour, il jeta un coup d’œil machinal vers l’endroit où il l’avait repérée précédemment. Elle reposait toujours là, tout aussi négligée, et délaissant le testicule droit qu’il se grattait frénétiquement depuis dix minutes il résolut de mettre à exécution l’idée envisagée à l’aller. En se baissant pour attraper le guidon du cycle, il entrevit furtivement un bout d’étoffe rouge par la trouée d’un buisson. Piqué de curiosité, il écarta les fourrés pour pénétrer dans le sous-bois et se trouva nez à nez avec un tableau d’une brutalité à laquelle même ses visites régulières à l’abattoir de la sous-préfecture voisine ne l’avaient pas préparé. Sur la mousse qui tapissait la futaie, gisait une jeune fille, la tête renversée en arrière, les yeux révulsés, et le torse zébré de sillons vermillons. Le meurtrier s’était visiblement acharné à lui poignarder le cœur de part en part, zèle excessif et superflu, la vie s’en serait de toute manière chargée.
Malgré son émotion, Lucien l’identifia immédiatement comme « la fille Baratier », rejeton d’un fermier des environs, une adolescente aux formes généreuses, qu’il lui était arrivé de surprendre au détour d’alcôves improvisées s’initiant avec Morilloux fils aux plaisirs de la chair. Il réprima à grand peine un haut le cœur et encore tremblant d’émotion tituba jusqu’à la route où il entreprit de demander de l’aide à grands renforts de moulinets des deux bras. Vu l’heure matinale et le taux de fréquentation des vicinales rurales, même aux heures de pointe, la

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