La Geôle
182 pages
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La Geôle , livre ebook

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Description

Le roman teinté de merveilleux d'Éric Feron conte le cheminement d'une jeune femme vers la réconciliation avec elle-même. Clothilde, une lycéenne complexée par son surpoids, rêve de ressembler aux canons de beauté sur papier glacé. Après avoir essayé en vain plusieurs régimes, elle se tourne vers la magie à l'invitation d'un certain Arnaud de Lavallière qui réveille son goût de l'aventure. Ce fascinant esthète possède le don de voyager dans l'espace et le temps. Il faudra bien du courage à la jeune femme pour relever le défi qu'il lui propose. Accompagnée de deux femmes inspirées des mythiques sorcières de Salem, elle traverse les époques, souvent au péril de sa vie. Au terme de ses trépidantes pérégrinations, Clothilde acquierra-t-elle la sagesse d'accepter son corps tel qu'il est ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 mars 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414168019
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-16799-9

© Edilivre, 2019
Chapitre I La Geôle
La femme entra brusquement dans le bar. Son corps se mit à tourbillonner comme un cyclone tropical. Elle virevolta de table en table, bouscula les clients, fit valdinguer les chaises et d’un revers de la main précipita les verres et les bouteilles du comptoir sur le sol. Ses hurlements plaintifs laissèrent supposer qu’elle perdait la raison. Son pied heurta un chenet de la cheminée. Elle chuta lourdement sur le carrelage. Un silence de mort s’installa dans le bar. La patronne fit irruption de derrière son comptoir, s’agenouilla et tapota son visage de ses mains potelées. Elle fit couler de l’eau fraîche sur son visage et sur sa nuque.
– Apportez-moi encore de l’eau et un verre de whisky, demanda la patronne au serveur.
La femme repris lentement conscience. Son visage frissonna d’horreur. Ses yeux se rouvrirent et se braquèrent sur les clients médusés venus la secourir. Ses bras s’agrippèrent au cou de sa protectrice puis elle chuchota à son oreille :
– Mon bébé… On a volé mon bébé… je veux qu’on me le rende… Madame s’il vous plaît… Appelez la police !
La patronne et le barman la soulevèrent du sol et la transportèrent sur une chaise à proximité du comptoir. La malheureuse, les joues couvertes de larmes, resta prostrée jusqu’à l’arrivée de deux policiers. Ils ordonnèrent aux clients de s’éloigner d’elle. La femme d’une pâleur cadavéreuse se redressa sur sa chaise et affronta les questions des deux hommes. Ses paroles trébuchèrent sur ses lèvres tremblantes.
– J’étais… j’étais à deux pas d’ici… en train de regarder les robes d’été dans une boutique… Pendant ce temps là… mon petit Ludovic dormait… tranquillement dans son landau… puis détournant la tête de la vitrine… je me suis aperçue qu’il… qu’il avait disparu !…
La femme s’interrompit et de nouveau hurla son désespoir.
– Allons ! Allons ! Ne vous en faites pas ma petite dame, ces messieurs de la police vont le retrouver très rapidement votre petit Ludovic, assura la patronne d’une voix affectueuse.
Le petit verre de whisky que le serveur lui donna la fit toussoter. Ses sanglots s’étranglèrent au fond de sa gorge. Sa respiration s’accéléra et gonfla sa poitrine comprimée par sa robe. Dès qu’elle fut en mesure de s’exprimer, la jeune femme reprit son récit.
Un jeune couple assis au fond de la salle venait d’assister à la scène. Clothilde, troublée par le drame, termina son café. Elle sortit un guide touristique de son sac à main et le consulta. Le bar y était référencé parmi les curiosités historiques de la ville.
« Situé au cœur de la ville, Le bar-hôtel du quinze avenue de la République est l’un des plus ancien établissement d’Aix en Provence. Construit sous le règne du roi Louis XIV, il a su préserver à travers les siècles son architecture élégante et raffinée. Initialement ses trois étages servirent de prison. On y écrouait des détenus en partance pour le bagne ou les barbaresques d’Afrique du Nord. Pendant la révolution française le rez-de-chaussée fut transformé en tribunal populaire. Les prisonniers politiques remplacèrent les prisonniers de droit commun. De nombreux combats entre forces royalistes et révolutionnaires s’y déroulèrent. On distingue encore sur les poutres massives qui traversent le plafond des impacts de balles, témoignage d’une lutte armée et acharnée. Les remarquables toiles qui décorent les murs ont été exécutées par le peintre provençal Joseph-Siffred Duplessis (1755-1802) portraitiste du roi Louis XVI. Sous le premier empire, l’immeuble servait d’entrepôt à la marchandise venue d’Orient. C’est en mille huit cent cinquante-deux qu’il fut transformé en bar-hôtel. Il a conservé depuis cette attribution. »
Elle referma son guide et jeta un coup d’œil sur les tableaux du bar. Benjamin feuilletait une revue en buvant son café. Clothilde lui prit la main et l’embrassa dans le cou. La séance de cinéma débutait dans trente minutes.
Le bar s’appelait « La Geôle ». Son nom inscrit en caractères gothiques sur la carte des boissons lui rappela les vieux grimoires des livres de contes de son enfance. Le temps avait accompli son œuvre en donnant au bois du comptoir une patine de caractère. Du salpêtre accumulé sur les murs sculptait de fines arabesques sur les pierres apparentes. Des portraits de demoiselles d’harmonieuses proportions appartenant à une époque lointaine étaient suspendus aux murs. Les chaises et les tables rondes en bois reposaient sur un sol à damier blanc et noir. Une cheminée séculaire attendait patiemment le retour de l’hiver. L’escalier en bois donnait accès aux cuisines du sous-sol et aux chambres des étages supérieurs. La patronne, femme brune au visage joufflu était pourvue de lèvres épaisses d’une sensualité animale. Son nez s’abaissait fortement sur la lèvre supérieure. De son regard émanait une force de caractère peu commune. Une robe noire lui descendait jusqu’aux genoux en enveloppant ses formes généreuses. Un petit tablier rond à motifs fleuris lui ceinturait la taille.
Le barman très affable avait les cheveux grisonnants. Son apparence distinguée et désuète lui donnait des airs de gentleman anglais échappé d’un roman de Conan Doyle ou de Charles Dickens.
Clothilde jeta un coup d’œil à l’extérieur. La pluie fouettait les rues de la ville et ruisselait sur les vitres du bar. Elle regarda Benjamin avec tendresse et lui demanda :
– On reprend un autre café ?
– Oui et nous partirons quand la pluie sera calmée, répondit-il.
Clothilde, lycéenne de dix-huit ans, préparait un bac littéraire. Son surpoids la complexait et la poussait quotidiennement à consulter des revues de diététique louant les vertus d’un corps mince et bien portant. Les régimes rigoureux auxquels elle s’astreignait constituaient une grande déception. Les mannequins fluets des magazines de mode lui renvoyaient d’elle une image négative qu’elle ne supportait plus.
– La pluie s’est calmée, on peut y aller dit-elle.
– Nous pourrions revenir ici demain après-midi, ajouta Benjamin.
Benjamin, pourvu d’un tempérament réservé, avait dix-neuf ans et préparait aussi un bac littéraire. Passionné de littérature, il étudiait de grands auteurs classiques et modernes. Il s’adonnait au jeu d’échecs avec habileté et participait à des compétitions d’amateurs.
* * *
Les policiers quittèrent l’établissement accompagnés de l’inconnue toujours en état de choc. Clothilde contrôla sa montre. Il était temps de partir au cinéma s’ils voulaient éviter la cohue de la séance de vingt heures. Ils réglèrent l’addition et quittèrent le bar.
Le soleil commençait à réapparaître timidement derrière une brume transparente. La boutique d’un marchand de bouquins dans une ruelle sombre les intrigua. Son délabrement contrastait avec les somptueuses résidences du voisinage. La pierre poreuse de sa façade se désagrégeait et recouvrait le trottoir d’un tapis de poussière. Une boiserie peinte en bleu encadrait sa vitrine. Son verre présentait un fin réseau de fissures semblable à des fleurs de givre. De l’eau s’échappait de la gouttière et dégoulinait sur la peinture écaillée du bois. On ne distinguait plus la teinte de la porte d’entrée, encrassée par la poussière. Sur une enseigne de bois éclairée par six ampoules électriques, des lettres gothiques à moitié effacées indiquaient simplement : Arnaud de Lavallière, revues et livres d’occasion. Une vieille planche pourrie coiffait l’ensemble. À l’intérieur de la boutique, des piles de livres et de magazines s’entassaient pêle-mêle sur des étagères qui ployaient sous leurs poids. Des revues empilées sur le sol entravaient le passage des clients. Des objets hétéroclites, de la quincaillerie d’une autre époque laissée à l’abandon, s’amassaient sur des revues ou derrière des étagères. Bijoux fantaisies d’Extrême-Orient, bougies, briquets en plastique, bonbons aux couleurs éclatantes, éponges végétales, fleurs artificielles aux ternes couleurs constituaient cet univers étrange.
Un homme à l’allure aristocratique, grand, mince et dans la force de l’âge s’affairait derrière son bureau. De ses yeux semblaient jaillir des éclairs prêts à foudroyer la rare clientèle s’aventurant dans son magasin. Ses doigts souples et fins contrastaient avec l’impression de puissance que dégageaient ses mains. Son costume de ville, une vieillerie à rayures noires sur fond jaune appartenait sans doute à la garde-robe d’un gentleman de l’époque victorienne. Ses sourcils noirs et épais étaient effrayants.
Il rangea quelques livres sur une étagère puis vint se rasseoir derrière son bureau encombré par une pile de bouquins. Des revues de diététique poussiéreuses et écornées étaient abandonnées sur une table branlante. Incapable de résister à la tentation, Clothilde entra dans la boutique suivie par Benjamin. À peine eurent-ils franchi l’entrée que l’homme se leva de son siège, pointa du doigt la porte et lança sur un ton rageur :
– Je ferme ! Sortez !
– Bonsoir Monsieur, me permettez-vous de jeter un rapide coup d’œil sur vos revues, implora Clothilde.
– Je n’aime pas que l’on vienne me déranger quand je ferme. Il est exactement dix-neuf heures deux. Désolé mais je suis fermé depuis deux minutes, dit-il en regardant sa montre. Je ne suis plus à votre disposition. Repassez demain ! Je suis ouvert de quatorze heure trente à dix-neuf heures. Vous disposiez d’une après-midi complète pour venir ici et c’est à l’heure de la fermeture que vous arrivez. C’est incroyable ! Pourquoi faut-il donc toujours que les gens viennent m’importuner quand je ferme !
Il se tût un instant et ajouta d’un ton plus modéré.
– Tenez ! Prenez cette carte du magasin avec

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