Les dividendes de l'Apocalypse

Stéphane Desienne

Description

En exil sur Nouveau-Vatican, une petite planète isolée à l’écart du mercantilisme spatial, l’Église Catholique Romaine s’apprête à affronter sa Seconde Apocalypse. Une faction dure de dignitaires conduite par le puissant Cardinal Valero estime qu’il est temps que l’Église effectue son grand retour dans les affaires humaines et qu’elle fasse payer les responsables de la Première Apocalypse qui a failli la détruire sur l’ancienne Terre.

À la tête de l’Inquisition, le Cardinal Valero a la ferme intention, par tous les moyens, de faire table rase de la période de Refondation. Afin que sa victoire soit totale, Valero doit se débarrasser du Pape Célestin. Pour affaiblir le Souverain Pontife, il va faire chanter son bras droit, le secrétaire Joseph Joachim Janssen qui n’a pas réussi à dissimuler aux inquisiteurs son goût pour des mœurs controversées.

Le plan machiavélique de Valero est sur le point d’aboutir lorsque l’équipage d’un cargo de la Mission Commerciale des Œuvres découvre une Archive informatique qui se comporte comme un redoutable virus capable de détruire des systèmes d’informations, même les plus robustes. Valero voit dans cette Archive une future arme absolue pour semer le chaos dans l’Espace Humain.

Une arme qu’il convient, au préalable, de tester.

Sujets

• Catholicisme
• Science fiction
• Fiction

Informations

• Publié par: Les éditions du 38
• Date de parution: 19 novembre 2019
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782374537221
• Langue: Français

Extrait

Présentation

En exil sur Nouveau-Vatican, une petite planète iso lée à l’écart du mercantilisme spatial, l’Église Catholique Romaine s’apprête à af fronter sa Seconde Apocalypse. Une faction dure de dignitaires conduite par le pui ssant Cardinal Valero estime qu’il est temps que l’Église effectue son grand retour da ns les affaires humaines et qu’elle fasse payer les responsables de la Première Apocaly pse qui a failli la détruire sur l’ancienne Terre. À la tête de l’Inquisition, le Cardinal Valero a la ferme intention, par tous les moyens, de faire table rase de la période de Refond ation. Afin que sa victoire soit totale, Valero doit se débarrasser du Pape Célestin . Pour affaiblir le Souverain Pontife, il va faire chanter son bras droit, le sec rétaire Joseph Joachim Janssen qui n’a pas réussi à dissimuler aux inquisiteurs son go ût pour des mœurs controversées. Le plan machiavélique de Valero est sur le point d’ aboutir lorsque l’équipage d’un cargo de la Mission Commerciale des Œuvres découvre une Archive informatique qui se comporte comme un redoutable virus capable d e détruire des systèmes d’informations, même les plus robustes. Valero voit dans cette Archive une future arme absolue pour semer le chaos dans l’Espace Huma in. Une arme qu’il convient, au préalable, de tester. Stéphane Desienneleuve sauvageest établi sur les bords de la Loire, le dernier f d’Europe, dit-on. Il est féru de science-fiction de puis son plus jeune âge, influencé par le côté obscur des technologies, l’exobiologie, les thèmes liés à la survie. Puisque dans le futur, tout peut arriver, ce n’est pas le pire qui provoque la terreur, mais son anticipation. Site Web de l'auteur Bibliographie : Romans Voyager Tome 1 - Jonctions, Les Éditions du 38, 2019. Voyager Tome 2 - Confins, Les Éditions du 38, 2019. Voyager Tome 3 - Andromède, Les Éditions du 38, 2019. Roses mécaniques, Les Éditions du 38, 2019. Exilalrus Books).Saison 1, Les Éditions du 38, 2018 (1ere Edition W ToxicSaison 1, Gephyre Editions 2018 (1ere Edition Walrus Books). ToxicSaison 2, Gephyre Editions 2019. Anneaux, Mirabelles et Macchabées, Nutty Sheep Editions, 2018. Nouvelles En immersion avec Bella Rushaoût 2014, auto-édition numérique, dans le :

cadre du Ray Bradbury’s day. Monaztèrefévrier 2014, bonus pour : Toxic& épisode 6, chez Walrus l’intégrale Books. Hérésie Minéralks.e : décembre 2013, collection Micro chez Walrus Boo Faces Cachées: mars 2013, AOC n° 28 chez Présence d’esprit. Dealer d’icebergoctobre 2012. 2e place au concours ENSTA Paris T  : ech 2012, chez Presses de l’ENSTA.

LES DIVIDENDES DE L'APOCALYPSE

Stéphane DESIENNE

COLLECTION DU FOU

1

Trois cents mètres à peine séparaient le Palais Apo stolique où résidait le Pape, du bâtiment carré qui abritait la puissante Inquisitio n. Entre ces deux centres du pouvoir s’étalait la place Saint-Pierre, comme si les nombr eux fidèles qui en foulaient le sol constituaient une sorte de zone tampon, un espace n eutre entre les ego qui se dressaient de part et d’autre. Le lien entre les de ux pôles était presque direct. Il suffisait d’emprunter l’un des tunnels qui passaien t sous l’esplanade. Joseph Joachim Janssen accomplissait ce trajet pour la pre mière fois depuis sa prise de fonction, peu après l’élection de Célestin VI. Une affaire de quelques minutes que le Secrétaire d’État de la Curie Romaine mit à profit pour réfléchir à la situation. Le Grand Inquisiteur lui proposait audience. Dans s es propres bureaux. Une démarche devenue rare. Ces derniers temps, le Saint -Office, autrefois appelé, Congregatio pro Doctrina Fidei– Congrégation pour la Doctrine de la Foi –, envoy ait surtout des convocations à comparaître devant le tribunal de l’Inquisition. Les mains dans les manches, Janssen descendit les e scaliers qui débouchaient sur le hall à l’extrémité ouverte sur l’allée couve rte reliant la place Saint-Damase à celle du Perroquet. Le caporal de La Garde Suisse s e raidit à son passage, mais Janssen demeura concentré sur ses pensées. Ses pas le menèrent à un second escalier puis au tunnel. Il ne s’était jamais rendu aussi loin. À chaque mètre, son ample pardessus frottait contre le tissu rêche de s a chasuble. Maintenant qu’il se trouvait seul dans un lieu confiné, il percevait le s froissements, la musique de l’étoffe comme une respiration. La congrégation du Saint-Office avait pour mission de protéger la doctrine et promouvoir les mœurs conformes à la foi, un cadre q ui n’avait guère évolué depuis sa fondation. Il lui appartenait de rendre des juge ments en s’appuyant sur la liste des graviora delictal de l’Inquisition. La. Les délits graves étaient examinés par le tribuna particularité de cette juridiction d’exception étai t sa capacité à «s’autosaisir» d’une affaire, un pouvoir attribué afin d’instruire rapid ement et efficacement tous ceux qui pouvaient être soupçonnés d’hérésie. Un pouvoir exo rbitant. Comme toujours, tout dépendait des mains qui le détenaient. À l’extrémité de la galerie, un escalier le conduis it en surface. Là, il fut salué par un autre caporal. À côté du militaire se tenait un homme en chasuble foncée, Monseigneur Oliviera. — Cardinal Secrétaire d’État, bienvenue. Que la paix du Christ vous accompagne ! l’accueillit-il sur un ton bienveillant. Janssen esquissa un sourire. — Que la paix du Christ vous accompagne. Les deux hommes gagnèrent un ascenseur qui les emme na vers les étages supérieurs du bâtiment aux façades jaunes et pourvu d’une cour fermée en son centre. La rumeur courait que le Grand Inquisiteur y avait fait installer une guillotine. Une guillotine… D’où venait une pareille ineptie ? Janssen ne demanda pas à la vérifier.

Monseigneur Oliviera était un secrétaire. Un parmi de nombreux employés du Saint-Office de l’Inquisition. L’exil, sur une plan ète en marge de l’Espace Humain, avait donné un nouveau souffle à l’institution. En quatre siècles, elle était devenue un État dans l’État. Avec ses secrets, ses rites et, depuis quelques années, avec une figure de proue : le cardinal Valero. Il avait remi s au goût du jour le titre de Grand Inquisiteur. Janssen en convenait : ça sonnait mieu x que préfet. Pour nombre de ses plus proches fidèles, cela sonnait même mieux que P ape. Les portes s’ouvrirent en silence sur un couloir as sez vaste pour y circuler en voiture. Janssen s’avança vers l’unique source de l umière du grand vestibule, un rectangle d’une blancheur crue sur le marbre dans l a pénombre. Oliviera resta à l’intérieur de la cabine. — Je ne vous accompagne pas, déclara-t-il. C’était un honneur de vous avoir rencontré. Janssen sourcilla. Ils ne s’étaient pas adressé un mot durant la montée. Les portes se refermèrent sur son visage jovial. Des br uits de pas résonnèrent alors. L’individu à la peau sombre vint à sa rencontre ave c le sourire. Filiforme et à la calvitie naissante, il portait une soutane filetée noire avec une doublure, un liseré et des boutons rouges, la couleur des cardinaux. — Cardinal Secrétaire d’État Janssen, c’est un plaisir. — Cardinal Brown, reconnut Janssen. — Permettez-moi de vous remercier d’accéder si rapi dement à notre requête. Le secrétaire s’abstint de commenter sa promptitude à répondre à l’appel du Grand Inquisiteur. Il se contenta de souffler unje vous en prieavec prononcé légèreté. Son esprit nota lenôtre. La missive sur papier vélin et remise par un diac re était signée de la main de Valero. L’une des raison s qui l’avaient poussé à bousculer son agenda. — Par ici, fit Brown. Son Éminence vous attend. En s’arrêtant sur le seuil du cabinet de travail, J anssen patienta le temps que Valero se détourne d’une projection virtuelle. Dans la vaste pièce chichement meublée, la lumière était éclatante, se déversant l ittéralement par les baies qui donnaient sur l’esplanade Saint-Pierre. Brown solli cita l’attention du Chef de l’Inquisition appuyé lourdement sur une canne, le r egard capté par l’immense carte interactive de l’Espace Humain. Avec la distance, l e secrétaire ne perçut pas ce que Brown lui souffla à l’oreille. La comparaison entre les deux hommes – l’un maigre et l’autre plus que corpulent – ne cessait de l’étonne r, comme une sorte d’alliance contre nature, une impossibilité. Son esprit éluda le terme de monstruosité que son subconscient se plut à lui projeter. Brown s’écarta pour laisser la place au cardinal qu i se retourna sans aucune grâce, mais avec vivacité : — Ah ! Cardinal Janssen. Une maladie génétique seule expliquait son obésité, un état que soulignait sa tenue d’apparat taillée sur mesure. Il fallait une volonté, un caractère hors du commun pour transformer cette masse en un symbole, une marque de pouvoir. D’une faiblesse, Alessandro Valero en avait fait un e force, une supériorité qui s’étalait à la vue de tous. Surtout de ses ennemis. Le signal était clair : il écraserait quiconque se dresserait sur son chemin.

— Cardinal Valero, salua le secrétaire. Les deux hommes se serrèrent les mains, à la manièr e de vieux amis. Joufflu et partiellement chauve, Valero possédait une poigne s olide, la peau moite. Il donnait l’impression de s’exprimer par grognement en raison de sa voix grave et, se dit Janssen, il semblait en forme, entièrement remis de son opération de remplacement du cœur réalisée à l’hôpital du Saint-Siège. L’inte rvention remontait à trois semaines. C’était un Valero revigoré qui lui secouait énergiq uement la main. — Je suis content que vous ayez répondu aussi vite. Il l’invita ensuite à prendre place sur l’un des so fas, ce que Janssen accepta. Sur la carte, la rivière d’étoiles occupait toujours un pan de mur. On devinait à peine la tapisserie en filigrane de la projection. Des point s représentant les mondes civilisés parsemaient une langue colorée qui avait pour origi ne une croix. L’Ancienne-Terre. — L’Espace Humain, déclara alors Valero qui avait r emarqué le regard en coin du secrétaire. Vous savez quelle religion relie ces ce ntaines de planètes, ces milliards d’habitants ? — Un grand nombre, sans doute. Tant de cultes avaient prospéré sur les ruines des vieilles religions monothéistes. Entre les sectes, les mouvances, les rites éphémère s, il était impossible d’en tenir le compte. — Faux. Janssen plissa légèrement les yeux en signe d’étonn ement, mais ne répondit pas. — En réalité, reprit Valero, il n’y a jamais eu qu’ une seule religion universelle entre les hommes : le commerce. Ah, se dit le secrétaire, le mercantilisme spatial. La libre circulation des astronefs, des hommes et la transmission neutre des données. C ’était l’idéologie de base. Tout l’Espace Humain participait à cette vaste communion qui s’étendait à travers des dizaines d’années-lumière. À l’exception de quelque s mondes fermés. Comme Nouveau-Vatican. — Je ne suis pas certain qu’on puisse parler de rel igion au sens strict. — Au sens strict ? — Par définition, s’entend. Pourquoi justifier un point sur lequel dissertaient les spécialistes de la mission diplomatique depuis des lustres ? Le Chef de l’Inqu isition connaissait ces sujets. — Fut un temps lointain, je vous l’accorde, une seu le religion reliait les hommes. — Quelques millions sur une terre unique, ignorants de l’existence d’autres continents sur leur propre planète qu’ils pensaient aussi plate qu’une table. Nous avons parcouru du chemin depuis. Le sourire aux lèvres, Valero commanda un élargisse ment de la carte, ce qui eut pour effet de rétrécir l’Espace Humain à une minusc ule virgule perdue au milieu d’un bras galactique. — Quelques dizaines ou centaines de milliards d’êtr es humains au milieu d’un immense continent, une galaxie aussi aplatie qu’un disque. La situation de l’Humanité n’est jamais qu’une question d’échelle. En fait, rien n’a changé. L’homme a évolué, mais dans le fond il n’a pas changé. Il c herche toujours une lumière au bout d’un tunnel. Ou bien la lumière à l’entrée de la grotte. Valero évoquait-il Platon par une ellipse

de l’allégorie de la caverne ? Le cœur est neuf, mais l’esprit reste classique, ru stique même, songea le secrétaire. — Vous n’avez pas sollicité ma présence pour une di scussion philosophique. La bouche du cardinal s’étira. — Hélas, non. J’aurais préféré. Il produisit un écran souple qu’il posa sur la tabl e basse. La vidéo à plat démarra immédiatement. Janssen se pétrifia sur le sofa, com me s’il venait de se changer en statue. — Un procès pour hérésie n’est pas à l’ordre du jou r, ajouta Valero. Du moins, je n’ai pas l’intention de faire ouvrir une instructio n en ce sens. Pour le moment. Cela demeurera entre vous et moi. Janssen resta sans voix. L’outrecuidance du cardinal semblait sans limites. Il le menaçait, lui, le bras de Sa Sainteté. L’attitude normale aurait été de s’indign er et de partir sur-le-champ. Mais il ne pouvait pas s’offrir ce luxe. Pour se débarrasse r de ses opposants, Valero utilisait la compétence exceptionnelle du tribunal de l’Inqui sition. Or les inquisiteurs ne l’avaient pas convoqué. Dans le regard sombre qui é tudiait ses réactions, Janssen le comprit. Le cardinal allait lui proposer un marché.Un chantage, lui souffla son esprit. — Que voulez-vous ? — Voyez-vous, il est temps que nous sortions de not re coquille. La période de l’isolement touche à sa fin. Comme souvent, une nou velle ère nécessite de nouveaux dirigeants, des intellects éclairés, tourn és vers l’avenir, capables d’atteindre la lumière au bout du tunnel. Et Valero incarnait ce futur… Il n’y avait pas que le cœur qu’il avait regonflé à bloc. La vidéo, qui déversait ce que des millions de pers onnes auraient considéré comme des insanités dignes de la décadence de l’Esp ace Humain, arriva à la fin. La preuve à charge ne ferait pas que l’excommunier. El le l’humilierait en public. En un sens, c’était encore pire que disparaître sans lais ser de traces. Bien sûr, il existait un moyen d’éviter ce sort. — Qu’attendez-vous de moi ? Lorsque Valero se pencha, le siège grinça sous son poids. — Un obstacle demeure sur le chemin de la renaissan ce. Seul le responsable suprême de l’Église restait, qu oi qu’il advienne, hors d’atteinte du tribunal de l’Inquisition. — Célestin VI ? — Je vais avoir besoin de votre concours pour pouss er Sa Sainteté vers la sortie. Le Secrétaire d’État, bras droit de Célestin VI, se leva sans un mot, épousseta sa chasuble et ajusta son pardessus. Il jeta un regard maussade à l’écran souple sur la table. — Vous me demandez de trahir mon engagement envers le Pape ? — Je vous offrirai l’absolution. N’ayez crainte.

2

Le Secrétaire d’État bénéficiait, en toutes circons tances ou presque, d’un accès privilégié au Pape. Seule une antichambre séparait les bureaux du Secrétariat du domaine privé de Sa Sainteté qui s’étendait sur deu x étages, incluant un toit- terrasse. C’était là, au milieu du jardin que Janss en rejoignit le Saint-Père occupé à admirer un parterre fleuri au pied d’une fontaine. Le petit monument était orné d’une sculpture finement ouvragée. Au-delà du parapet, un reflet étincela sur la coupole recouverte d’or de la basilique Saint-Pierre. Le ci el était d’un azur sans nuages. Célestin VI portait une soutane blanche, un fascia de la même couleur autour de la taille. Il avait laissé sonzucchettosur le banc de pierre qui bordait l’étroite allée. — Ah ! Joseph, dit le Pape en posant son sécateur. Janssen s’inclina respectueusement, puis baisa la m ain baguée que lui tendit le chef de l’Église. — Faisons quelques pas, voulez-vous ? Le secrétaire hocha la tête. Célestin l’entraîna ve rs l’extrémité du jardin. Ses chaussures maculées semblaient glisser sur les dall es. Il croisa ses bras dans ses manches. — Le cardinal Valero désire ma place, commença-t-il . Ardemment. C’est encore plus criant depuis qu’il a reçu son nouveau cœur. Il se sent rajeuni, conquérant. — Il fait preuve de dynamisme dans sa fonction, c’e st certain, répondit prudemment Janssen toujours sous le choc de son entrevue, deux jours auparavant. — Trois procès pour hérésie, le dernier pour un dét ournement de fonds. Les accusés sont tous des soutiens loyaux, des personne s qui m’étaient proches. Vous appelez ça du dynamisme ? En quatre mois, le Chef de l’Inquisition avait déca pité la garde rapprochée du Pape, désormais privé de ses soutiens les plus fort s. Les autres dignitaires n’osaient plus s’opposer au pouvoir et à l’influence du Saint -Office. Ils se demandaient qui tomberait avec la prochaine affaire en espérant ne pas se faire entraîner dans la chute. Valero avait fait d’une pierre deux coups en affaiblissant l’autorité pontificale dans la foulée des mises en accusation. La stratégi e de harcèlement annonçait-elle une future purge ? À présent, tout semblait possible. Y compris le pire. — Vous disposez du droit de nommer de nouveaux card inaux électeurs, avança le secrétaire. N’hésitez pas à vous en servir. — Une riposte juridique ? Cela ne fera que le ralen tir. — Vous pourriez le destituer de sa charge. — J’aurais dû. Avant. Maintenant c’est trop tard, i l a acquis suffisamment d’influence pour séduire la plupart des cardinaux. Quant aux opposants, le chantage et la peur les réduisent au silence. Une telle décision n’est plus possible, je le crains. Célestin se retourna brusquement : — Joseph, je me demande comment il se fait que Vale ro n’ait pas découvert vos… escapades ? Lorsqu’il l’avait nommé, Janssen avait été franc en vers son souverain. Il s’était

confessé. Célestin l’avait absous. — Je suis très prudent. La vidéo en possession de Valero démontrait la fail lite de son dispositif, mais il n’en était plus là. — Vraiment ? L’insistance du Pape signifiait soit qu’il savait q uelque chose, soit qu’il le sondait. — Suggérez-vous que Valero exerce une pression sur ma personne dans le but de vous espionner ou de vous nuire ? — Ai-je des raisons de m’inquiéter à ce sujet ? Une question pour une question. Janssen le décela d ans les yeux du Saint-Père : la peur. La peur de se retrouver seul et trahi. — Non, mon Père. — Je vous crois, lui sourit Célestin. Maintenant, j ’aimerais savoir ce que c’est que cette demande farfelue de réquisition d’un courrier et d’un pilote. Quand j’en ai pris connaissance, j’ai imaginé le pire, que vous vous p répariez à fuir Nouveau-Vatican. Le secrétaire comprit alors le désarroi qui avait d û s’emparer du Pape. — Je dois me rendre sur Équinoxe. Une affaire privé e. — L’un des mondes de l’Espace Humain ? Par le Chris t, Joseph ! Ce n’est pas le moment. Valero lance ses limiers partout ! — Il le faut, Votre Sainteté. Je serai prudent, rép éta Janssen. Et je ne serai pas parti bien longtemps. — J’ose l’espérer. Je vais avoir besoin de vous.