Christ en cabane
140 pages
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Christ en cabane , livre ebook

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Description

Une femme en milieu carcéral masculin et les détenus qu’elle y rencontre : Christ en cabane apporte, par touches brèves, ancrées dans le quotidien de la prison, l’histoire de ces vies qui se croisent le temps d’un partage amical, d’une incompréhension, d’une rencontre forte, d’une étincelle.
De cette chronique de foi, de souffrance, d’humour aussi, se dégagent des éléments de méditation. C’est en ce lieu improbable que la femme aumônier, envoyée, pense-t-elle, pour accompagner, enseigner et soutenir « l’autre », trouve en fin de compte ses maîtres spirituels les plus inattendus.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 juillet 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332586599
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-58657-5

© Edilivre, 2015
Du même auteur
Du même auteur :
Gadji , roman, QWIP, 2002 (prix Benjamin Franklin, 2003)
Writing the Book of Esther , roman, QWIP, 2003
Chats with le Chat gourmet , humour, avec Susan Marx, Lulu, 2006
Mariam’s Wedding Gift and Other Offerings , nouvelles, Lulu, 2007
La Nokriyah , roman , Amalthée, 2007
Les archanges n’ont pas le sens de l’orientation , fable, Xlibris, 2009
Cœurs et blessures, L’Harmattan, 2013
Citations


J’étais (…) en prison et vous êtes venus à moi.
Matthieu 25 : 36



Mien tien.
Ce chien est à moi, disaient ces pauvres enfants. C’est là ma place au soleil.
Voilà le commencement et l’image de l’usurpation de toute la terre.
Pascal, Pensées
Préface
Tous, nous sommes en prison.
Un mur se construit d’abord dans la conscience avant de prendre forme dans la pierre, le béton et le métal.
Tant que nous construirons des murs pour enfermer l’« autre », nous serons en prison. Tant que nous commettrons des délits passibles d’une peine d’incarcération, nous serons en prison. Tant que nous consentirons à nous sentir victimes d’un autre, nous resterons en prison.
La notion de séparation est entrée dans la conscience humaine lorsque nous avons voulu dire mon bien, « ma place au soleil », selon la formule de Pascal, mon Dieu et non le tien. Dès lors que nous avons rejeté notre frère de la sphère que nous considérions comme divine, nous nous en sommes exclus du même coup, et les murs ont commencé à s’ériger. Les murs s’appellent jugement, comparaison, arrogance ou sentiment d’indignité, besoin d’asservir, soif de pouvoir.
Une altérité saine nous permet de considérer notre frère dans la beauté de son unicité, de son individualité, tout en sachant que nous sommes constitués d’une seule et même Essence. Cette altérité-là permet de prendre dans les bras, de se tenir la main, de marcher ensemble. Lorsqu’elle est oubliée en faveur de luttes, conflits, abandons et rejet, alors il s’ensuit que Caïn tue Abel qu’il jalouse.
Pourtant nous savons que le sceau de la grâce fut apposé sur le front de Caïn sans que jamais rien ne puisse l’enlever. Nous sommes Caïn et nous sommes Abel. Certains d’entre nous tuent encore leur frère, tandis que d’autres vont trouver l’assassin pour lui rappeler Qui il est en vérité : enfant d’un « Père » qui porte le même regard d’amour sur toute la création. Ces derniers sont-ils pour autant supérieurs ? Non, il n’y a pas de marches plus élevées que d’autres dans « la Maison du Père ». Il n’y a qu’ici ou là que l’oubli de l’Origine est plus profond, que les volets sont encore tirés sur la fenêtre de la conscience. L’aumônier voudrait être un rappeleur, un ouvreur de volets, un scieur de barreaux.
Temps de rentrée
Les champs qui entourent la nouvelle bâtisse pénitentiaire pour hommes sont brûlés par un mois d’août sec. L’été s’étire de vide en néant pour la population derrière les murs. Au groupe scolaire, les cours s’arrêtent. Les activités, à part quelques stages ponctuels, ne sont plus que points de suspension. Le campus pénal sombre dans un demi-sommeil, troublé de rêves inquiets.
Toujours du bruit, moins de vie en dehors des cellules. L’aumônerie est fidèlement représentée par l’un ou l’autre d’entre nous.
Je prends mes nouvelles fonctions au moment de la rentrée scolaire. Je suis née un jour de rentrée scolaire. J’ai passé ma vie à enseigner. Aujourd’hui j’entame une rentrée dans un curieux pensionnat pour garçons, gardé par des videurs qui m’impressionnent, me rassurent par leur présence et parfois me tancent (lorsque dans mon ignorance de débutante, je contreviens à certains fonctionnements que personne ne m’a expliqués). D’aucuns me parlent comme à un malfaiteur (que voulez-vous, c’est devenu pour eux une seconde nature). Et puis, nul n’est censé ignorer le règlement intérieur.
Le premier pas dans cette imposante construction du ministère de la Justice est celui qui coûte. Un gros orteil s’aventure dans la mare et oui, l’eau est froide. Elle donne même des frissons. Au deuxième plongeon, on lui trouve de la tiédeur, et pour finir : Quelle joie quand on m’a dit : « Allons à la maison du Seigneur * ! »
* Ps. 122 : 1.
Je me tiens à la porte * et je sonne
Une maison d’arrêt est une contrée exotique. On passe la douane avant d’entrer. On enlève ses chaussures. Non pas avec respect comme à la mosquée, mais comme à l’aéroport. Et si l’on veut apporter un objet, on le déclare avant, on ne le passe qu’avec une autorisation. J’ai appris à voyager léger : un mouchoir, les clés de ma voiture, quelques papiers, l’Évangile, que j’ai le droit et le privilège d’offrir (là où il me semble qu’il peut ensemencer et non pas servir à rouler des cigarettes).
Parfois on reste devant l’immense et lourde porte d’entrée dix minutes, un quart d’heure, une demi-heure. Le temps que les « parloirs » (les visiteurs et surtout les visiteuses avec leurs gros sacs remplis de linge à laver) se fassent examiner et repartent. On passe son badge à puce devant une borne électronique pour se faire compter. Et on attend. Partout où il y a des barrières, il y a des prisons. Ces gens ne pouvaient sortir, je ne peux entrer. Qui de nous est en prison ?
L’aumônier s’arme de patience. Quand un détenu poireaute devant une grille à l’intérieur des lieux, il est rare qu’il soit patient. Mais où vont-ils tous si vite ? Le stress de la montre ne les quitte-t-il pas même ici ? Le passage d’un lieu de détention à un autre revêt un sens symbolique puissant. Ouvrez-moi, b… de m… ! Mais laissez-moi donc y aller !
J’observe un jeune en survêtement atteint apparemment de la danse de Saint-Guy devant un portail qui résiste insolemment à son envie de passer. N’en pouvant plus, il se met à arroser d’invectives le surveillant planqué dans sa cage vitrée, devant son panneau de contrôle. On devine à peine ses traits.
Cet être mystérieux ne dispose pas d’une épée foudroyante comme les chérubins qui veillent à l’entrée d’Eden, mais il reste, comme eux, un ange sévère doté de pouvoirs magiques : ouvrir, fermer, garder. Tous, nous désirons secrètement, et le plus souvent inconsciemment, le retour au Jardin intérieur de notre conscience. Au plus profond, nous voulons passer les portails dressés en nous : mésestime de soi, manque de foi, peur, culpabilité. La prison est une puissante métaphore.
Et quand nous aurons passé ces portes ? Qu’y aura-t-il ?
D’autres frères. Seulement cela. Avec plus de lumière. Avec plus d’amour. Et d’autres portes encore, et toujours plus d’amour. Ad infinitum.
* Apocalypse 3 : 20.
Bénir avant d’entrer !
Les détenus sourient le jour où je leur décris, lors du culte, mes impressions à l’approche de la maison d’arrêt, face à ce mur haut et plat, couleur sans-couleur, qui affiche en majuscules colossales : MINISTERE DE LA JUSTICE, MAISON D’ARRET MARVILLE – LES PEUPLIERS.
« Accueillant comme une porte de prison… »
Je leur demande si une maison d’arrêt peut être une maison de Dieu. Sagement, ils me donnent la réponse attendue : « bien sûr ». Pourtant, lors d’une de mes journées de formation, il nous a été asséné : « Une prison est un lieu de désamour/de violence/de malheur. » A croire qu’on cherche à nous faire fuir, nous les aumôniers, à toutes jambes.
Si le Seigneur ne bâtit la maison, ses bâtisseurs travaillent pour rien * . Nous sommes ses bâtisseurs. Avec quels matériaux faisons-nous les prisons ? Avec les briques de la peur, le mortier de l’hostilité, le tout enduit de vengeance ? Qui bâtit la maison ?
J’ai dû, dans les premiers temps où j’affrontais sa façade aveugle, trouver le moyen de l’apprivoiser, de la traverser, dans tous les sens du mot. J’avais intériorisé la barricade.
J’ai décidé de lire autrement son enseigne : MAISON DE DIEU MARVILLE – LES PEUPLIERS. Si notre regard change, les personnes et les choses font de même. Voilà pourquoi je veux accéder au monde dans le saint maintenant, alourdie ni d’histoire ni de considérations futures. Présent veut dire Présence. Elle seule a le pouvoir d’éclairer notre vue.
Il restait une étape pour m’aider à abattre le mur dressé devant et en moi : celle de la bénédiction. Désormais je ne franchis jamais le seuil sans bénir cette maison et tous ceux qui y demeurent, détenus ou travailleurs. En bénissant, nous nous faisons canal de la Grâce. Le Seigneur ne bâtit pas de maison sans ouvriers. Depuis le jour où j’ai mis en application le « Bénir avant d’entrer », non, je ne crois pas rêver : les surveillants sont plus souriants. Les portes s’ouvrent plus vite.
* Ps. 127 : 1.
La loi de la République
Mon cousin Samuel enseigne les mathématiques dans un collège de la ville. Nous sommes au café. Il pose sa tasse si brusquement qu’un peu de liquide brun foncé s’échappe.
– Aumônier ? Tu es nommée aumônier dans une prison ? Tu es folle ! Ça ne devrait pas exister.
Samuel est outré. Je n’avais pas prévu la vigueur de sa réaction.
– Je t’assure, c’est prévu par la loi de la République. L’État met en place « le soutien moral et spirituel » des détenus.
– C’est indécent. La religion n’a aucune place dans un établissement d’État.
– Tu veux dire plutôt que tu ne veux pas que tes impôts servent à ça…
– Exactement ! On vit dans un État laïc.
– Mais « laïc » ne veut pas dire sans religion… On garantit la liberté de pratiquer à ceux qui le veulent, c’est tout.
– Je ne vois pas pourquoi les meurtriers, les voleurs et les escrocs auraient un traitement de faveur. Il y a plein de braves gens qui n’ont que leur fierté et qui ne volent pas. Si tu n’as rien à faire de ton temps, pourquoi tu n’aides pas ceux-là ?
– Parce qu’eux au moins sont revêtus

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