Le Mur - Tome 1
384 pages
Français

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Description

L'inquiétude et la peur, le dévouement maternel et l'accompagnement de son enfant, la confrontation à la réalité psychiatrique et la maladie qu'il faut, tant bien que mal, apprivoiser... C'est ce que relate I. Winteregg dans ce nouveau témoignage saisissant, où elle livre totalement son expérience de mère d'un fils qui souffre de troubles bipolaires, chez qui le mal s'est déclaré à l'âge adulte. Le regard des autres, l'incompréhension, mais encore la solidarité et l'entraide forment les autres sujets forts de ce texte qui dit sans détour les répercussions de ce trouble sur un réseau d'existences, et la lutte acharnée de son auteur auprès de son enfant. Digne, sincère et émouvant, un ouvrage qui brise bien des silences et des non-dits.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 mars 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342049701
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Mur - Tome 1
Ileana Winteregg
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Le Mur - Tome 1
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
 
 
 
Stigmatisation et préjugés
 
 
 
De l’ombre à la lumière
 
Aucune autre maladie, sauf peut-être la lèpre, n’a causé aux patients tant de confusions, leur a fait commettre des erreurs, que la maladie psychique.
 
Quelle que soit l’époque, les personnes atteintes de maladies mentales ont été exclues, bannies de la société.
Encore de nos jours, la maladie mentale est très souvent considérée comme un crime à sanctionner, un péché à expier, un démon à exorciser, une honte à dissimuler, une tare à déplorer, un problème d’assistance sociale à régler à moindre coût.
 
Comment peut-on mettre fin à la stigmatisation des personnes souffrant de maladie mentale ? En en parlant autour de nous, en étant ouvert, en informant nos amis, voisins, pour qu’ils participent à la déstigmatisation . Si on n’a plus peur d’en parler, les gens comprendront que c’est une maladie comme une autre.
 
La maladie mentale peut atteindre n’importe qui, indépendamment du niveau intellectuel, de la classe sociale, ou des revenus. Eux ne sont pas « paresseux, faibles, sans volonté, pauvres, incapables de gérer les choses, dangereux ». Eux ne peuvent tout simplement pas s’en sortir.
 
Accablés par tous ces préjugés, les proches sont très peu disposés à admettre l’existence de la folie dans leur famille et attendent d’être au bord du gouffre avant de chercher de l’aide et de consulter.
 
Pourquoi les maladies du cerveau devraient être considérées comme un plus grand déshonneur ? Les malades n’ont pas choisi leur condition.
Les personnes souffrant de maladie mentale peuvent jouer un rôle important dans leur guérison. Mais la stigmatisation, les préjugés, la dévalorisation à leur égard joue beaucoup.
 
Il existe moins de traitements efficaces pour soigner les maladies mentales que pour traiter les maladies physiques.
La maladie psychique est surnommée « vallée de la mort », ou parent pauvre de la médecine, par les chercheurs en psychiatrie qui manquent de moyens.
La Fondation Alamaya a pour objectif de récolter les fonds privés nécessaires à l’avancement de la recherche – et ainsi de redonner espoir aux malades et à leur famille.
La schizophrénie, qui touche une personne sur cent dans le monde, impose de grandes souffrances aux patients et à leurs proches. À ce jour, aucun traitement ne permet de traiter la totalité des symptômes, souvent très invalidants, liés à la maladie. Cependant, la recherche a accompli des progrès considérables, qui permettent d’entrevoir de nouvelles perspectives thérapeutiques et, à plus long terme, des mesures visant à prévenir la schizophrénie.
Les fonds publics couvrent environ la moitié des coûts de la recherche, l’autre moitié doit être assurée par le soutien de donateurs privés. Malgré la prévalence importante et reconnue de la schizophrénie et d’autres maladies psychiatriques, le financement de la recherche dans ce domaine demeure un défi majeur et accuse un retard considérable par rapport aux moyens investis sur le plan de la médecine somatique.
 
Si j’ai décidé d’écrire un livre, c’est pour partager mon expérience avec d’autres familles, qui se trouvent dans la même situation que moi.
Tout au long du chemin parcouru, je me suis rendu compte de l’absence de structures pour les proches qui accompagnent une personne souffrant de maladie psychique. Maladie qui fait honte, peur, qui isole. Mal connue par la société, elle est diabolisée.
Les structures d’accompagnement pour les familles sont quasiment inexistantes, à part l’association Le Relais, qui tient des réunions deux fois par mois.
Suite à l’expérience vécue, j’ai appris que la maladie n’était pas une fatalité. La maladie nous a obligés à vivre autrement. Les valeurs sont renforcées, on trouve l’énergie et la force nécessaires pour surmonter des périodes critiques. Contre vents et marées, on est arrivés, mon fils et moi, à gérer les symptômes et à vivre avec la maladie qui est entrée dans nos vies sans y être invitée.
 
Le Mur , c’est celui qui sépare le monde « normal » du monde de la psychiatrie, difficile à percer pour passer de l’autre côté.
Ce mur, c’est aussi la loi qui dit :
« Art. 5 Conditions d’admission
L’admission non volontaire d’un patient peut avoir lieu aux trois conditions suivantes :
- le patient présente des troubles psychiques ou une déficience mentale ;
- son état constitue un danger grave pour lui-même ou pour autrui ;
- un traitement et des soins dans une institution de santé s’avèrent nécessaires. »
 
D’après moi, les lois actuelles en place déresponsabilisent d’une part les médecins qui n’interviennent pas quand il y a urgence. On conseille alors aux familles de porter plainte contre leurs propres enfants ou mari, sœur, frère, épouse, et de faire intervenir la police. D’autre part, la police est embêtée d’intervenir quand il s’agit d’une personne souffrant d’une maladie psychique qui est en crise ; elle dit que c’est aux médecins de s’en occuper.
Les familles sont au milieu, tiraillées entre les deux représentants du pouvoir, démunies devant leur proche qui a besoin de soins. Les personnes malades, leur famille, sont victimes du paradoxe des lois actuelles ; ce sont eux qui paient le prix fort.
L’hospitalisation non volontaire par la police crée un traumatisme qui empêche la relation de confiance entre une personne et les médecins. Les soins qui sont proposés sont perçus comme une contrainte. La maladie psychique, c’est la seule qui est traitée par la force, avec l’aide de la police ; le malade n’est plus considéré comme tel, il devient un délinquant aux yeux de la société, qui doit être puni parce qu’il est psychiquement malade.
Comme quoi, on peut choisir d’être malade.
Quelle autre maladie est traitée de la sorte ?
Pour quelle autre maladie la police intervient pour une hospitalisation ?
Aucune.
 
Le traumatisme subi, après une hospitalisation non volontaire, marque à vie les personnes malades et leurs proches. Nos enfants, maris, épouses, subissent l’usage de la force, l’intervention de la police lors de l’admission, des traitements forcés (la camisole chimique), de la mise en isolement (chambre fermée).
Ils deviennent des légumes, des zombies, ce qui crée un autre traumatisme qui se manifeste tout au long de leur vie. Après l’usage de cette méthode, c’est la lutte qui commence contre l’arrêt du traitement. L’alliance est rompue entre les psychiatres et les patients, la famille perd sa crédibilité vis-à-vis des psychiatres. Voilà sur quelle base commencent les soins en psychiatrie !
 
La psychiatrie se trouve à jouer un rôle entre soins et répression, entre devoir d’assistance et protection de la société. La divergence fondamentale n’est pas réglée par les cadres législatifs, les droits des citoyens contre l’arbitraire et le droit de la société à contraindre des individus à se soigner.
Comment une personne qui est en crise peut-elle donner son consentement ?
 
 
 
Chapitre I La fin et le commencement
 
 
 
Voilà notre histoire, qui ne prévoyait pas, qu’un jour, on devrait faire face à une maladie psychique qui changerait à jamais nos vies.
 
Mon fils est venu au monde le 15 mars 1972 ; ce fut la plus belle chose qui me soit arrivée dans ma vie. Dès sa naissance, nous avons vécu une relation fusionnelle ; mon petit ange a tété pendant quatorze mois. J’ai porté un amour inconditionnel à mon fils, comme toutes les mères sur terre.
À l’âge de cinq ans, je lui ai fait prendre des cours d’anglais. Par la suite, il a étudié plusieurs langues à l’école – l’espagnol, l’italien, l’allemand, le français – il était très doué pour les langues étrangères. Il a fini l’école obligatoire et il a continué ses études au lycée pour obtenir le baccalauréat .
En 1989, eut lieu la Révolution roumaine, à laquelle mon fils a participé malgré son jeune âge ; il avait dix-sept ans. J’y ai participé aussi, sans savoir où mon fils se trouvait.
J’étais désespérée, sans aucunes nouvelles. Je l’ai cherché partout, à l’hôpital parmi les cadavres. Un jeune de dix-sept ans est mort dans mes bras.
Ensuite, je suis allée devant l’ambassade américaine, où plusieurs personnes avaient été fusillées ; j’ai cherché mon fils en regardant les chaussures des cadavres pour le reconnaître, certains étaient méconnaissables.
J’avais l’espoir que je retrouverais mon fils vivant, malgré toutes les images atroces que j’avais vues. Je me suis accrochée à la foi, j’ai supplié Dieu de garder mon fils en vie, de me donner la force de surmonter les horreurs que j’avais vues et vécues. Dieu a entendu mes prières. Le lendemain, mon fils m’a téléphoné, il m’a dit :
— Maman, je suis libre et en vie, on a gagné ! La révolution a vaincu !
Quand il est arrivé la maison, j’étais tellement heureuse de le voir vivant.
Mon fils m’a raconté ce qui s’était passé, qu’il avait été arrêté pour avoir participé à la révolution, battu et mis en prison. Il était couvert de bleus, sur les bras, sur le dos, les pieds, partout. Il m’a dit que la police l’avait tapé avec une matraque en caoutchouc. Parmi les manifestants, il y avait une femme enceinte qu’il avait protégée avec son corps ; il avait été tapé pour tro

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