Les très riches heures d’un Français anonyme
434 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les très riches heures d’un Français anonyme , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
434 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Le poignant récit autobiographique d'un ancien prisonnier de guerre, avec son lot d’événements tragiques, lors d'une période où la définition même de la nature humaine a été remise en question.
À travers de bouleversantes rencontres, il rappelle les conditions très difficiles, souvent ignorées, des prisonniers de guerre en Allemagne nazie et la cruauté sans limite des hommes. Heureusement, l'amour et l'amitié sont également présents et permettent de survivre malgré l'horreur et le désespoir...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 mars 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334031042
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0142€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-03102-8

© Edilivre, 2016
Dédicace


A ma tante
Elle était mon recours dans les peines. Nul mieux qu’elle, puisque ma mère était morte à ma naissance, ne savait apaiser mes chagrins d’enfant, guérir mes bobos, et plus tard, dans les évènements pénibles, les douleurs. C’est vers elle que je me tournais, c’est elle que je désirais voir, sa présence me pacifiait, me redonnait une quiétude perdue. Elle qui n’était que bonté et douceur, irradiait de la force, une force tranquille, vivifiante.
Avant propos de l’auteur
Toute chose t’appartient que tu peux amasser dans ta mémoire et conserver dans ton cœur. Et cette richesse-là, rien ni personne ne pourra te l’arracher.
J’avais juré de ne rien raconter. Et j’ai menti.
Ce livre est toute ma jeunesse ;
Je l’ai fait sans presque y songer.
Il le parait, je le confesse,
Et j’aurais pu le corriger.
Mais quand l’homme change sans cesse,
Au passé pourquoi rien changer ?
Va-t’en pauvre oiseau passager ;
Que Dieu te mène à ton adresse !
Qui que tu sois, qui me lira,
Lis en le plus que tu pourras,
Et ne me condamne qu’en somme.
Mes premiers sont d’un enfant,
Les seconds d’un adolescent,
Les derniers à peine d’un homme.
A. D. Musset


La réflexion de Montaigne est toujours d’actualité. « Que l’enfance regarde devant elle, la vieillesse derrière. » N’était-ce pas ce que signifiait le double visage de Janus ?
Les ans m’entrent, mais à reculons. Néanmoins restons zen, en toutes circonstances quoique certains ennuis de santé m’indiquent que moi aussi je vais devoir passer l’éponge sur cette vie traumatisante bien qu’attachante.
Ainsi que le disait Romane le bohémien, il me faudra franchir l’Archéron, ce fleuve qui roule les douleurs dans ses eaux où errent les ombres. Sans doute les amis d’autrefois disparus si brutalement, du moins leurs formes éthérées, seront-elles là pour m’accueillir et parcourir à nouveau les lointains horizons de jadis et mesurer la vacuité des choses de la vie sur terre.
Sans doute vais-je retrouver ma mère inconnue de moi, mais dont la présence virtuelle m’a guidé dans des situations périlleuses. La revoir enfin dans d’autres circonstances que dans les instants où près de la mère mourante git le petit avorton que l’on immerge dans l’eau chaude, puis dans l’eau froide afin de faire vivre malgré lui, ce petit être démuni.
La vie fut belle près d’une compagne aimante et quatre enfants adorés comblant nos désirs. Avec leurs compagnes, ils forment maintenant, de nouveaux couples qui nous ont donné des petits-enfants, soleil de nos vieux jours embrumés ; espoirs, mansuétude, synergie à leur égard. On voudrait tellement les voir gravir les marches que nous grands-parents n’avons pu atteindre !
Mais toute vie a une fin que nous ne pouvons éviter, et rendons grâce à Dieu de tous les bonheurs accordés. Chaque moment de la vie est une grâce accordée par Dieu, nous dit le prêtre de Bernanos.
Je dédie ce livre à mes enfants, ce livre où ils trouveront le parfum de mes souvenirs d’enfance, d’adolescence et d’homme mûr.
S’il est un temps pour parler, l’Ecclésiaste nous rappelle qu’il y a aussi un temps pour se taire. Quelques décennies de silence se sont écoulées, maintenant je reprends la plume laissée en attente.
Si j’aime l’histoire, peut-être est-ce parce que je discerne dans le présent l’émergence brulante du passé ! C’est, cette nécessité du passé dans la lecture du présent, qui m’incite à une incursion rapide dans le passé proche de ma jeunesse. Mais l’histoire, au cours des cinquante dernières années, n’a-t-elle pas été à la pointe de toutes les aventures des sciences humaines…
L’histoire c’est aussi l’écume…
L’erreur est, au même titre que la vérité, pâture d’historien. L’histoire est d’abord pensée, représentation, conscience… Dans l’histoire, dans sa composante ; l’aventure humaine est une, à condition que l’on accepte de lui donner un sens qu’elle ne peut recevoir d’elle-même. « Les hommes font l’histoire, mais ils ne savent pas l’histoire qu’ils font. » C’était la formule favorite de Raymond Aron.
Puisse ces récits expliciter le sens de mon aventure humaine, qui m’a « rempli le bol d’un supplément d’âme » comme disait Teilhard de Chardin.
L’hiver des âmes Le temps des amertumes
L’arrivee au Kommando – Grabenhof – le marché aux esclaves
Le Kommando… Il serait bon d’expliquer au profane ce qu’est le Kommando. Ce mot qui de 40 à 45 dans les bouches françaises par sa consonance rugueuse soulevait une interrogation muette, angoissante et mystérieuse. Celle de lieux coercitifs, inhumains, froids, durs, rigides, gardés militairement.
Le Kommando est un centre de regroupement pour une unité de travail, il est stationné près du lieu de corvée. Les membres de ce Kommando sont les exécutants des travaux offerts par des entrepreneurs allemands. Ce terme d’entrepreneur peut aussi bien désigner le simple particulier (artisan, paysan) qu’une personne morale (chemins de fer, école, mairie, armée, complexe industriel.)
Le composant d’un Kommando peut varier de quelques membres à plusieurs centaines. Il est régi par l’administration militaire, ce peut-être un soldat (gardien) pour le plus simple, ou une unité militaire (compagnie), pour les plus importants. Toutes ces subdivisions sont hiérarchisées pour aboutir au noyau matriciel (Le Stalag) ou camp. Celui-ci alimente en hommes, gère, soigne, vêt, les individus le composant.
Le tout est supervisé par l’état-major des armées (la Wehrmacht). Le but essentiel est d’amener l’ennemi (prisonniers de guerre) à participer à l’effort de guerre du vainqueur. Autrement dit produire à la satisfaction de l’employeur ceci afin de remplacer une main d’œuvre absente pour fait de guerre.
En somme, contraindre l’ennemi capturé à participer à l’effort de guerre du vainqueur, afin d’obtenir la victoire finale. Un bien, comme l’honneur ou la liberté, ne se prise ni se mesure. A Grabenhof le point zéro, c’est le Kommando. Pour nous en cet endroit étrange et glacial se concentrent l’humiliation, la misère et la souffrance.
Que nous reste-t-il ?
L’espoir en un avenir lointain, la foi, comme Pierrot pour prier, car la prière selon les mots du curé de campagne de Bernanos, est la seule larme qui ne soit pas lâche. Voici la nuit qui m’étreint, me traverse ; quand de sa clarté elle touche ma tête, me rend gauche comme un cheval arrêté, tremblant comme un petit chat sous l’averse. Je ne sais plus, j’ai perdu mon village, le puits, le four croulant sous les figuiers. Un peu de lune en saurait davantage. La lune ne veut pas briller. Certaines valeurs humaines n’acquièrent de valeur intrinsèque que dans l’adversité, mais jouissons-nous de notre libre arbitre ? Si peu… Les faibles ont recours à la prédestination, l’opportunité les y pousse. En Kommando, la tyrannie les écrase par la force, les y conduit par une sorte de détermination mécanique. C’est écrit, à quoi bon, laissons couler, pas de vague, une sorte de fatalisme musulman qui imprègne cette masse amorphe spirituellement. Nous ne connaissons pas la vie future qui nous serait réservée en cas de victoire du nazisme, mais notre ignorance du nazisme ne nous empêche pas de préjuger sur le sort qui nous attend, et cela ne nous stimule guère. On se sait voué à la solitude, à la perdition ; et l’angoisse de la dépendance nous meurtrit l’esprit.
La liberté dans le choix des actes et la responsabilité qu’elle implique, confèrent une dignité éminente, et fonde une vie morale de l’individu. Mais la liberté est morte, bien morte. Un inventaire généralement fait suite à une mort et annonce une liquidation. L’inventaire de notre vie passée, sa liquidation pour une plongée brutale dans le monde paysan Prussien, voilà ce qui venait de se passer. Sans doute n’est-ce qu’un accident malheureux qui ne se reproduira plus… L’histoire va reprendre son cours préalable… Non, non ! Mortels, c’est la fin d’une grande illusion, ce n’est pas la fin d’un monde, mais l’ironique monde à l’envers qui suit les grandes mutations.
Je n’avais pas paisiblement traversé l’époque de l’adolescence, et maintenant l’existence dans la société que je découvrais au fil des ans, suscitait dans mon inconscient de précoce analyseur, d’innombrables questions !
Quelle étrange communauté d’humains, dont la morale adaptée à la propriété, chose la plus sacrée, couvre un océan de contradictions. Les sages de cette époque se basent tous sur cette morale, les religions de même. La réponse aux questions soulevées en mon inconscient n’existe pas, la clef de ces mystères a été perdue sans doute et rien ne peut satisfaire mon appétit de profonde clarté. C’est comme la première éraflure d’une voiture neuve, les autres sont toujours moins pénibles à supporter par la suite.
Assommé moralement, je pars vers les durs hivers Prussiens, où la neige tombe en épais flocons formant d’immenses tapis blancs. Cette neige qui me murmurera, que la vraie vie est par-delà son épais tapis blanc, par-delà ce fugitif royaume, où s’incarnent les rêves dans le tictac habituel des choses d’autrefois.
Mais ici dans ce monde immaculé, habité d’ombres brutales, où dans les nuits froides, brillent des étoiles glacées, ici le poète est mort l’haleine gelée, dans une lumière irréelle en attente de mouvement. Là le monde est plein de Judas. Oui le poète est mort… ! Sans doute m’a-t-il légué à moi pauvre hère, le plaisir irrésistible de raconter, l’idée chimérique de créer le monde sans le changer. Soudain sous mes paupières filtre l’éclair cruel et froid de la dérision.
Nous arrivons à Sensburg, le train stoppe après quelques secousses brutales, puis lentement il repart en ma

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents