Partout où nous irons
124 pages
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Partout où nous irons , livre ebook

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Description

D'une plume apparemment tournée vers le passé, ce récit évoque sous forme de fragments autobiographiques quelques-unes des premières années de l'existence de son auteur, second fils d'un couple d'instituteurs dévoués à leur métier et à leurs enfants au sein d'une école de campagne dans la France du début des années 1970.

Au-delà de la narration des faits qui vient conjurer le sentiment du temps qui passe et menace de tout effacer, voici un livre de souvenirs dont les pages célèbrent la vie simple, authentique, éveillée et solidaire.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 octobre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334211604
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-21158-1

© Edilivre, 2016
À celles et ceux qui ont fait de mon enfance la sublime joie qu’elle fut. Puissent ces êtres demeurer dans les mémoires.

« – Est-ce que le fleuve t’a aussi initié à ce mystère, que le temps n’existe pas ?
– Oui, Siddhartha, lui répondit-il. Tu veux dire sans doute que le fleuve est partout simultanément : à sa source et à son embouchure, à la cataracte, au bac, au rapide, dans la mer, à la montagne : partout en même temps, et qu’il n’y a pas pour lui la moindre parcelle de passé, ou la plus petite idée d’avenir, mais seulement le présent ?
– C’est cela, dit Siddhartha. Et quand j’eus appris cela, je jetai un coup d’œil sur ma vie, et elle m’apparut aussi comme un fleuve, et je vis que Siddhartha petit garçon n’était séparé de Siddhartha homme et de Siddhartha vieillard par rien de réel, mais seulement par des ombres. (…) »
Hermann Hesse (Extrait de « Siddhartha »)
I Saint-Clément
Notre joli cerisier

Il trônait en roi au sein de notre minuscule contrée et son pouvoir de séduction n’avait pas d’égal. Temps chaud ou froid, ciel bleu ou ciel gris, le cerisier déployant ses branches depuis le jardin attirait nos jeux de petits enfants, suscitait notre curiosité ou attisait notre imagination quand ce n’était pas tout cela à la fois. Peu importait la saison, il était toujours notre grand ami généreux et bienveillant. Et comme en ce petit univers clos sur lui-même dans lequel mon frère et moi découvrions la Terre et la vie il n’avait pas de rival à sa hauteur, nous lui avions en quelque sorte conféré le titre d’ambassadeur de toutes les merveilles et de tous les mystères naturels du dehors, celles avec lesquelles nous nous retrouvions nez-à-nez sitôt la porte au bas de l’école franchie qui ouvrait sur le vaste monde.
Une fois par printemps, notre joli cerisier annonçait de façon imparable l’arrivée des beaux jours. Il recouvrait alors le jardin surplombant la cour, le préau et tout notre domaine d’un épais duvet de fleurs blanches et rosées. À ce moment de l’année, le spectacle était tel que notre ami l’arbre faisait même davantage qu’annoncer les beaux jours : il rendait les jours plus beaux car sa transformation en bouquet géant modifiait la couleur et la saveur du quotidien quel que fût l’endroit où l’on se trouvait dans l’école.
Comme nous l’aimions notre cher cerisier ! Un peu plus tard, au mois de mai, ses fruits aux teintes rougeoyantes le faisaient ployer de toutes parts. Un ami tout à la fois si large et si généreux que les extrémités de certaines de ses branches touchaient presque le sol au plus loin sur la terrasse. Délicieuses, à portée de mains d’enfant, on n’oublia pas le jour où mon frère nous fit la frayeur de se rendre malade pour de bon en se gavant de trop de cerises ! Le bel arbre nous intéressait même lorsqu’il ne produisait ni fruits ni fleurs. Tantôt c’était son tronc, qu’il avait très imposant et dont nous nous amusions à faire le tour, à éprouver la dureté, à observer la texture, la noirceur, les proéminences. Tantôt c’était ses racines robustes et pour parties émergées dans lesquelles il s’agissait de ne pas se prendre malencontreusement les pieds, au hasard d’une course. Ou bien encore son feuillage épais, sombre, qui en été nous protégeait de la chaleur excessive, en hiver nous préservait du vent et dont l’odeur un peu âpre mêlée à celle de la terre du jardin nous prodiguait toute l’année ses sensations voluptueuses et bienfaisantes.
Mille et un projets naquirent là. C’était bien souvent au pied de notre vénérable cerisier que Christophe Colomb, Ulysse, Marco Polo, prenaient la décision de leurs aventureuses expéditions. Là aussi que Sioux, Comanches, Navajos, Cheyennes et autres Peaux-Rouges de légende venaient se retrouver entre eux ou au sein du Très Grand Conseil de toutes les tribus indiennes.
L’électrophone dans un coin du salon… Un disque de vinyle… Un air de musique… Une voix :
« Quand nous chanterons le temps des cerises,
Et gai rossignol et merle moqueur
Seront tous en fête !
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur !
Quand nous chanterons le temps des cerises
Sifflera bien mieux le merle moqueur !
Mais il est bien court, le temps des cerises
Où l’on s’en va deux cueillir en rêvant
Des pendants d’oreilles…
Cerises d’amour aux robes pareilles,
Tombant sous la feuille en gouttes de sang…
Mais il est bien court, le temps des cerises,
Pendants de corail qu’on cueille en rêvant !
Quand vous en serez au temps des cerises,
Si vous avez peur des chagrins d’amour,
Évitez les belles !
Moi qui ne crains pas les peines cruelles
Je ne vivrai pas sans souffrir un jour…
Quand vous en serez au temps des cerises
Vous aurez aussi des chagrins d’amour !
J’aimerai toujours le temps des cerises,
C’est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte !
Et dame Fortune, en m’étant offerte
Ne saurait jamais calmer ma douleur…
J’aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au cœur ! »
Cette chanson sur le tourne-disque familial… un air gracieux, envoûtant, qui parlait de notre beau cerisier. Parce qu’il était sûr que c’était bien de lui, de notre arbre là-haut sur la terrasse, dont parlait la chanson ! Souvent dans les têtes et les cœurs de petits enfants tout se mêle, s’emmêle. Ainsi donc un jour prochain, par grand beau temps, de belles jeunes femmes aux robes chatoyantes et aux boucles d’oreilles pareilles aux cerises viendront là-bas dans le jardin, à l’ombre de notre arbre, pour simplement y jouir des beautés de la vie et de la nature. Pour les seuls plaisirs d’aimer et de s’y faire aimer. Alors comme si cela ne suffisait déjà pas qu’il nous ravisse toute l’année, voilà soudain qu’il devenait encore plus enchanteur, magique et merveilleux, notre joli cerisier.
*
J’ai vécu les tout premiers temps de mon existence dans le village de Brullioles situé au cœur de la campagne des monts du Lyonnais à la fin des années 1960. Je n’ai pourtant pas le moindre souvenir d’avoir habité ce village-ci que mes parents ont quitté l’été de ma première année pour aller vivre et poursuivre leur travail dans le petit village voisin de Saint-Clément-les-Places accompagnés de nous, leurs enfants, mon frère alors âgé d’un peu plus de trois ans et moi-même.
À l’ouest de Brullioles et à une petite cinquantaine de kilomètres de Lyon, sitôt gravies ou dévalées les pentes de quelques collines parfois boisées parfois herbeuses, sitôt traversés quelques prés d’un vert bien vert sur lesquels on rencontre ici et là de vastes fermes typiques de ce pays, closes sur elles-mêmes, dotées d’imposants murs d’un brun jaunâtre ou orangé et bâties il y a fort longtemps, Saint-Clément-les-Places est une charmante petite commune rurale comme il en existe pléthore dans cette région de basse montagne qui forme un contrefort du Massif Central. Son village n’est pas l’un de ceux, magnifiques, dont le nom et la photo figurent dans les répertoires des plus remarquables d’ici ou de là. Non, car il n’a rien de véritablement exceptionnel. Mais il est tout simplement attrayant. Il en émane quelque chose de profondément charmant. D’humblement charmant. Et d’un charme tranquille. Cette beauté simple et discrète ne me paraissait jamais aussi flagrante que lorsque nous nous en approchions par la route venant du village voisin de Saint-Laurent. Et c’était encore plus vrai au printemps ou en été quand les jours froids, rudes ou sombres des saisons mortes étaient parvenus à se faire totalement oublier.
Si je ne me rappelle guère de Brullioles, du petit village de Saint-Clément il me semble en revanche me souvenir du moindre bout de chemin. Presque de chaque pierre. Lorsque l’on y arrive de nuit par la route de Saint-Laurent on ne voit rien ou presque mais de jour on commence par le deviner au loin peu après avoir tourné à gauche à un dernier croisement. Et puis un peu plus tard, à la sortie d’une énième courbe, voilà surgir son petit bourg discret baignant dans la verdure en toute saison. Telle une heureuse surprise et comme posé au pied d’un monticule boisé égaré en pleine nature, avec son église et son clocher contre lesquels se serrent frileusement la plupart des autres demeures, voilà qu’il paraît d’un coup tout entier ainsi que le grand pré très particulier au devant de lui qui forme comme une vaste arène verdoyante, accueillante et végétale.
* *
Au temps de ma prime enfance, mes parents étaient là-bas à Saint-Clément-les-Places les deux instituteurs de l’école publique. Dans ce joli petit coin de campagne, nous habitions derrière les murs d’enceinte du bâtiment scolaire et nous entretenions avec la plupart des gens du village des relations bien cordiales, assez souvent même amicales, qui faisaient que notre famille se trouvait solidement intégrée à la communauté locale. Bien que notre lieu de vie était l’un des plus fréquentés du bourg de par la fonction sociale qu’il remplissait (l’école, ce n’était pas rien dans cette commune rurale de cinq cents habitants) nous y demeurions tout de même un peu à l’écart du reste de la population. Non seulement parce que nous étions les seuls à vivre dans l’établissement mais aussi car celui-ci était situé à une extrémité du village, qui plus est derrière d’assez hauts murs qui enserraient de partout le bâtiment ainsi que la mairie attenante. De surcroît, le seul côté de notre espace d’habitation dont les façades n’étaient pas totalement aveugles donnait depuis l’étage sur le jardin du presbytère, rarement fréquenté, tandis que par ailleurs nous entouraient des prés à vaches. Notre isolement restait cependant très relatif car à

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