Vous avez dit enfance ?
102 pages
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Vous avez dit enfance ? , livre ebook

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Description

À l'Estaque, entre 1942 et 1960, voici l'histoire d'un enfant plongé dans le climat difficile de la vie de famille.



L'humour n'est pas absent, les situations sont parfois burlesques, l'humour noir y est salvateur...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 septembre 2021
Nombre de lectures 2
EAN13 9782414433179
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-43311-7

© Edilivre, 2021

« Ce que je raconte j’en ai toujours payé le prix juste… rendu la monnaie de toutes les pièces, ça permet de jouer de certains instruments sans faire de fausse note. »
Alphonse Boudard
Chapitre I
Curieuse décision – vouloir procréer – en pleine guerre – ça peut s’expliquer par un désir inconscient de repeuplement – la survie, coûte que coûte.
Faire un gamin à sa femme – même par surprise, d’après mon père…
… C’était une responsabilité en cette période agitée et tragique ; surtout avec les emmerdements et… les rationnements qui allaient suivre.
La guerre et les privations passées, ma mère est morte… Mais juste avant…
« Maman (mot longtemps imprononçable) va mal ».
Mon père part en voiture chercher le médecin. Il n’est pas chez lui. Plus tard nous aurons des médicaments. Quelques granules à base de bleu de méthylène… Du bleu dans la cuvette des W-C. Dans le tiroir, des petites boîtes de granules « Uroformine Gobey ».
Vision ultime, dans un couloir de l’Hôtel Dieu : ma mère en peignoir, amaigrie, mais toujours jolie, nous fait signe.
Mon père me tient la main, il boite. Nous repartons. Je ne reverrai plus ma mère.
Au retour du cimetière, mon père rentre sa voiture au garage, comme d’habitude…
Son mouchoir est trempé, il n’a plus de larmes.
Mon oncle Louis : « D’accord tu as des problèmes, mais tu te rends compte Lucienne n’a pas eu ses règles, alors tu vois, moi aussi j’ai mes problèmes ».
On vit dans deux pièces, plus la cuisine ; chacun sa chambre. La température : quinze degrés quand tout va bien – bouillotte de rigueur.
Mais, avant tout ce confort, il y a eu les nuits qui ont suivi la mort de ma mère.
Je dors une partie de la nuit dans le lit de mon père, avec lui et la chatte grise, recueillie sous les décombres à la Libération. Je pleure. Mon père ne sait plus comment s’occuper de moi.
Y a ma tante aussi – c’est comme ma mère – c’est mieux que ma mère puisqu’elle est là, vivante.
Enfin, encore quelques années. Ça je ne le savais pas encore. Mon père s’est chargé, à petites doses, de me faire comprendre.
« C’est comme une bougie qui se consume, qui s’éteint, doucement ».
Ma pauvre tante Manée, elle fond, elle se rétrécit, elle n’a plus de larmes, elle non plus.
Posé sur le bureau de mon père, le grand livre de photos – même pas un album – une sorte de classeur, plein de souvenirs.
Sur la couverture, une branche de lierre dessinée – douze feuilles qui s’amenuisent – douze ans de bonheur, c’est tout, pour toute une vie.
Comment mon père a repéré ma mère ? J’ai pas dit flairé. Elle, bonne famille française. Déjà à l’époque on faisait la différence. Tous ces immigrants italiens : maçons, rugueux, grossiers, machos.
Justement, mon père… enfin non, le sien, arrivait du Piémont. Aspect premier, on voit pas toujours qu’il est gros travailleur, honnête. Peut-être l’accent, un reste d’accent ? L’aspect ? Garçon de ferme à 16 ans, ça doit laisser des traces. Et puis, immigré, quoi !
Mon père passe et repasse en voiture. L’un des seuls du quartier à être motorisé… après le toubib.
Automobiliste mais boiteux.
Il passe devant le jardin au moment où ma mère étend le linge. Il a noté l’heure, c’est sûr. Il se dit que c’est pas possible ; elle me regarde passer, elle me sourit, jolie comme elle est, ça m’étonnerait que ça aille plus loin…
C’est allé plus loin. J’en suis la concrétisation.
Presque la trentaine, les tourtereaux. Première rencontre, programmée, dirigée, supervisée, censurée ? Rendez-vous… à trois, jardin de la Colonne. Louis, mon oncle maternel, le superviseur, l’homme, le mâle de toujours, pour les trois belles sœurs. Dix minutes, pas une de plus.
D’après mon père ça s’est vraiment passé comme ça. Montre au poing, les cent pas, sourcils froncés.
D’après ce qu’il m’en disait de cette époque, et d’après ce que j’ai constaté moi-même, par la suite, mon père avait, imprimé en lui, une sorte de complexe – une entrée par effraction dans la famille – une étiquette collée à la peau, qui a tenu bon, longtemps. Un reproche permanent à sa double condition de paysan et de non-français.
Mon oncle, socialiste, anticlérical de la première heure – il n’entrait jamais dans une église – distant avec les questions d’argent, toujours prêt à faire la fête… le contraire de mon père. Plus âgé que lui, et chargé de famille, ça donnait du poids au personnage. Une voix rauque, entretenue...

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