Une autre que moi
288 pages
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Description

Dans chacune de nous sommeille une autre. On ne sait pas qu'elle existe, on ne l'a jamais vue, jamais soupçonnée, pas même imaginée. Mais elle est là. Une parfaite inconnue. Quelque part en vous. Clandestine, souterraine, endormie ; si un jour les choses dérapent dans votre vie, vous avez une nouvelle partenaire. Amie, ennemie, elle va vous tirer de la nuit ou vous y enfoncer, mais une chose est sûre, elle va vous surprendre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 novembre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342058178
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Une autre que moi
B. Chaleix Ferri
Mon Petit Editeur

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Mon Petit Editeur
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Une autre que moi
 
 
IDDN.FR.010.0120615.000.R.P.2015.030.31500
 
 
 
À Yvette et Claude Chaleix
À Léna et Clara Ferri
 
 
 
 
Prologue
 
 
 
Mathilde
Cinq secondes ont suffi.
Le temps qu’une porte s’ouvre et se referme. Pas de chblang à lézarder les murs, aucune vibration à faire tomber les aquarelles de leur crochet X, juste un CLAC sec, bref, à peine bruyant.
Cinq secondes diaboliques.
La porte a claqué.
Un soir de mai. Lourd et orageux.
Un signe, c’était un signe, il suffisait de regarder le ciel : une plaque de béton, basse et menaçante. Un ciel d’automne, plombé, sans lumière, en mai. Mais non, la météo n’y était pour rien, ça devait arriver, ça couvait, ça faisait des gros bouillons dans ma tête, bloup, bloup, bloup, ce qui devait arriver est donc arrivé, point. Un soir de mai, le couvercle a sauté et puis c’est tout. Et moi. Avec.
Ma vie a volé en éclats. Trois tours de mixeur, cinq secondes top chrono : ma cervelle, pulvérisée ; mon âme noire, désintégrée ; mon cœur, broyé. A insi font, font, font, trois petits tours et puis s’en vont…
Louise
Une seconde a suffi.
J’ai tourné la tête et ma vie a changé. L’intranquillité a pris le pas sur l’insouciance à l’instant où je me suis retournée et à partir de cette seconde-là, tout a changé.
Un mouvement de nuque et je suis devenue une autre.
Mathilde
Écrasée contre la surface lisse et froide des dalles de l’entrée, les yeux accrochés à la porte d’entrée, je ne peux plus bouger un cil. CLAC. Cinq secondes. Je fixe la porte, paralysée, j’ai peur de comprendre, de réaliser, de devenir dingue. Trop calme, je suis trop calme, je me fais peur. Une vague d’épouvante me cloue au sol et je suis calme, ce n’est pas normal, je sens bien que ce.n’est.pas.nor.mal. Ma joue collée sur un carreau poli par le passage des amants ou des chaussons de la petite vieille qui vivait ici avant moi, je regarde la porte, les nœuds du bois, la vitre en verre trempé même pas fêlée après ça, la petite grille en fer patiné derrière, la poignée en porcelaine blanc crasseux, le ciel noir entre les arabesques du fer forgé, tiens, d’ici, je vois pas les étoiles. C’est normal, t’as vu ce ciel ? Et le carrelage ? Glacé. Ultra-doux mais glacé. Et pourtant on est en mai. Pas un son, un sursaut, pas le moindre frémissement de vie en moi mais je pense à la météo, aux étoiles, aux amours de la petite vieille quand elle était jeune et belle, avait-elle été heureuse ici ? Avait-elle eu les hommes à ses pieds ? Avait-elle crevé de solitude ? Traversait-elle ce couloir en charentaises fourrées ou en escarpins Lanvin ? Et puis je regarde tout ce qui m’entoure comme si c’était la première fois et je note : sale, rouillé, écaillé, à nettoyer, redresser, lasurer… Ça tourne à cent à l’heure dans ma tête, je pense à mille trucs en même temps, des trucs débiles qui ne m’intéressent pas d’habitude mais je m’accroche à cette liste absurde que j’allonge, détaille, corrige.
Vue du ciel, je dois avoir l’air calme, muette, vissée au sol, inerte mais je sens bien que je suis dans un état de panique absolue, complètement hystérique et que je pense à des conneries pour ne pas penser à autre chose, je me concentre à mort sur des choses qui ne m’étaient jamais venues à l’esprit, des choses dont je me fous complètement en principe. Les rayons de Castorama et les astres se télescopent dans mon cerveau affolé, des messieurs en costume passent devant moi et la petite dame aux cheveux argentés trottine, arpente l’entrée encore et encore, martèle le sol de ses pas rapides devant mes pupilles dilatées par l’impossible vérité pendant que la chape de béton là-haut s’abat sur ma maison. Tu voulais voir des étoiles ? Tu vas en voir, crois-moi.
J’en ai vu, ça a tourné pendant des heures, pas moyen de décoller du carrelage, de bouger ne serait-ce qu’un doigt. Les méninges en ébullition, je regardais la porte les yeux secs en attendant le moment où j’allais enfin me mettre à hurler et à me jeter contre les murs.
Louise
Un soir, Boucle d’or a rencontré un ours. Fatiguée, les cheveux trempés par une averse féroce, la peau luisante, elle n’était pas au top de sa forme physique quand elle avait croisé son chemin mais elle avait malgré tout réussi une performance : accrocher son regard. Sur le moment, elle ne s’en était pas rendu compte, c’est plus tard qu’elle l’avait compris : l’ours l’avait vue. Elle, la discrète et rêveuse Boucle d’or.
Boucle d’or était sentimentale aussi, très sentimentale et toutes les tares qui vont avec cette tare, elle les avait, son chemin n’allait pas être simple.
L’ours l’avait donc vue, voulue, l’avait eue et depuis, elle en bavait, en voyait, en encaissait, comme si elle aimait ça. Aimait-elle ça ? Évidemment, non, à moins qu’obscurément… ? Non, elle n’aimait pas.
Sept mois que le climat est à l’insécurité mais elle tient bon, se découvre maso ou pieuse, penche pour pieuse quand elle y réfléchit. Elle a trouvé son Dieu, sa raison de respirer, son énergie solaire, sa force céleste.
L’homme mi-ours mi-dieu est complexe. Sauvage. Indomptable. Mais fascinant. Une tendance à prendre la tangente au premier obstacle, un maître absolu dans l’art de l’esquive, une montagne de silence. Boucle d’or a du mal à le comprendre, du mal à suivre mais elle s’accroche, prête à tout, elle se défonce pour lui plaire. Elle n’a pas intérêt à commettre la moindre erreur, un faux pas pourrait lui être fatal, alors, elle veille. À tout. Ce qu’elle dit, fait, pense, ressent, la haute voltige est devenue sa profession de foi. Elle en oublie de s’occuper d’elle, sa nouvelle religion lui prend tout son temps : ne pas le brusquer, lui laisser le temps de s’habituer à elle, lui apprendre à lui faire confiance et à croire en elle. Pour qu’il se laisse aller, pour qu’il l’aime, un jour. Elle a tout le temps et la foi et l’amour qui bat en elle. Un jour, il lui dira : « Viens, Boucle d’or, je t’emmène avec moi. »
Mathilde
J’ai pris la raclée de ma vie.
J’aurais dû voir venir les choses, mais non. Les signes, les crises, l’avalanche de crises, je n’avais jamais voulu les voir, y croire, me dire : « Ça y est, cette fois-ci, c’est la fin, pour de bon. » Je n’avais jamais pu me dire ça, jamais su ralentir le rythme, faire une pause, regarder les choses en face et admettre : « Petite maline, ça ne va pas pouvoir durer comme ça cent sept ans, tu imagines bien ? »
Me ramasser et en prendre plein la gueule ? Moi ? Non, je n’avais jamais pu me dire ce genre de choses. Moi, sur le carreau, ha, ha… J’étais stupide. Suffisante. Narcissique. Par ignorance, manque d’expérience, de coup dur ? N’empêche, j’étais comme ça, une prétentieuse centrée sur sa pomme, une foi inébranlable en bibi et l’avenir, sans aucun doute sur demain, pas la moindre petite crainte, l’avenir m’appartiens, la vie en rose, la vie en rose, la vie en rose  ♫
Irréfléchie et égocentrique comme tous les mômes (sauf que je n’avais plus l’excuse d’être une môme depuis bien longtemps), j’avais avancé dans une vie ouatée, n’écoutant personne, n’obéissant qu’à mes pulsions et mes envies, suivant mon instinct, rien que mon stupide instinct. Je n’avais jamais souffert, jamais douté, jamais eu le moindre effort à fournir. Naître, peut-être ? Ce n’est même pas sûr, si quelqu’un avait morflé dans la salle d’accouchement, je ne pense pas que ce soit moi, je n’avais pas eu la plus mauvaise place ce jour-là et ça a toujours été comme ça après. Je n’ai jamais eu la mauvaise place. J’ai toujours eu ce que je voulais, mis qui je voulais dans ma poche sans jamais trouver ça curieux ou injuste. C’était normal. Une base. Famille, amis, amours, parcours scolaire et pro sans faute, certitudes, projets. Et, (je vous vois venir d’ici : « Pour qui elle se prend celle-là ? ») j’étais belle, oui, peut-être que ça ne se dit pas, mais on sait ces choses-là et je le savais, je me le disais à peu près vingt fois par jour, dès que je me croisais dans un miroir. Être belle peut vous chauffer la cervelle et vous rendre simple d’esprit, si vous n’y prenez pas garde, aujourd’hui je le sais.
Bref, un horizon bleu des mers du sud devant moi. Un bonheur insolent, injuste, éclaboussant. De chaque instant. Je n’ai jamais pensé que j’avais de la chance, c’était comme ça, point. Est-ce que j’étais complètement conne ou simplement heureuse ?
Et puis la porte a claqué. CLAC. Terminé. Fin du show. Des océans ont coulé sous des ponts, des flots déchaînés se sont déchaînés, des digues ont lâché, finie la rigolade. J’ai arrêté d’être conne ou heureuse ou les deux. J’ai cessé de voir du monde du jour au lendemain, je suis passée de populaire à asociale, d’enviée à pathétique, de la lumière aux ténèbres, du haut de l’affiche au fond du puits. En une nuit. Et avec le temps qui n’a rien arrangé du tout, contrairement à ce que tout le monde raconte, je me suis mise à parler toute seule. Des fois tout bas, des fois tout haut. À me répondre aussi, quel intérêt sinon ? J’ai donc développé et adopté un mode d’auto communication, je suis émetteur et récepteur à la fois, je joue tous les rôles : douce-brutale, intolérante-souple, morale-amorale, inconsciente-responsable, impatiente-impassible… Je pèse désormais le pour, le contre, laisse le démon se battre avec l’ange et je ne fonce plus tête baissée sans réfléchir, comme avant. Je me félicite, m’apostrophe, m’encourage, me défie, me rassure.
Mais non, t’es

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