Mémoires d un taximan
206 pages
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Mémoires d'un taximan , livre ebook

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Description

Enfant, roulant dans sa voiture imaginaire, Jean Jacques rêvait être président de la République. Le statut financier de son père ne put lui permettre de poursuivre ses études. Ce fut la fin d’un rêve. Jean Jacques devint taximan.

« Jean Jacques c’est dur ! C’est vraiment dur ! Ce métier de taximan est dur ! Il est aussi un métier à problèmes. Le volant que nous tenons chaque jour peut nous entraîner droit devant une cour de grande instance pour finir dans une cellule de prison, il peut aussi nous conduire à l’hôpital après avoir été victime d’un sérieux accident, il peut encore faire pire, en nous jetant prématurément à toute vitesse dans une tombe affamée, largement ouverte, qui attend d’avaler un cadavre depuis des mois. Et c’est la fin d’une vie qui pourtant méritait un autre destin. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 juillet 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332856029
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-85600-5

© Edilivre, 2015
Citation


Père, je ne t’ai pas oublié.
Il n’y a aucun coucher de soleil que j’ai connu sans que je pense à toi.
Je pense à toi, tout le temps…
Je n’ai pas oublié tes enseignements, ta parole.
Tu es toujours présent dans mon cœur, dans ma mémoire,
Je n’ai pas oublié ma promesse,
L’évidence, c’est qu’à tous reliefs, nous existerons…
Perrussel MABIKA La MONTAGNE
Chapitre premier
Jean-Jacques, c’est dur ! C’était l’avant-dernière phrase que je prononçai avant la fatalité de l’impact. Un poids lourd chargé des grumes perdit son contrôle, se dirigea droit sur moi comme un taureau enragé, encore que ma voiture était peinte en rouge… En une miette de seconde, je compris que ce jour-là n’était pas le jour de mon jour. Déjà, je n’entendis pas le coq de mon voisin chanter ce matin-là. Pourtant, chaque jour, chaque matin, régulièrement à cinq heures du matin, parfois très tôt, dès quatre heures trente minutes du matin, le coq de mon voisin de derrière me fait sursauter dans mon lit avec son timbre vocal qui domine ceux de tous les coqs du quartier. Ce matin-là était quand même bizarre, comme si quelque chose ne voulait pas que je quitte mon lit, peut-être même mon domicile. J’aurais dû m’en douter, après mon réveil, lorsque j’aperçus des cancrelats en train de s’accoupler sur mon permis de conduire. Je n’avais jamais vu des cancrelats s’accoupler jusque-là. D’ailleurs, je me demandais même comment ces insectes puants faisaient pour se multiplier. J’eus la réponse ce matin-là du mois de mars. J’observai quelques secondes le cancrelat mâle, celui-ci s’agita sur sa femelle, déployant ses ailes. Je supposai qu’il atteignit le septième ciel, comme le disent les humains. Je réfléchis sept fois à la question avant de les chasser, parce que je n’avais pas pensé à les écraser, les tuer. Je me sentis tout d’un coup étrange à l’idée de tuer des êtres vivants qui procréaient. Si j’avais fait appel à l’esprit d’analyse du mbongui du village de mon père, j’aurais certainement vite conclu que ces deux indices suffisaient pour m’éclairer du mauvais présage. J’attendais un troisième signe pour me rassurer. Cela n’arriva pas jusqu’à ce que je quitte ma maison pour me rendre à la station de lavage où j’avais garé mon taxi.
Depuis mon taxi, j’entendis des piétons crier les noms de tous les saints sur le trottoir. C’était à ce moment-là que j’avais prononcé ma dernière phrase avant l’impact fatal. Je me levai légèrement de mon fauteuil, je frappai mon volant de mes deux mains puis je criai par la suite :
– Kifoumou ya tata ni… (Le pouvoir de mon père).
Ma voiture a été prise en sandwich entre le camion et un mur. Le choc était mortel. Les gens se précipitaient pour tenter de dégager le chauffeur de taxi qui serait sans aucun doute sérieusement touché, peut-être même mort…
– Où est le taximan ?
– Où est-il ?
– Est-ce que quelqu’un l’a vu sauter ?
– Non !
– Mais où est passé ce taximan ?
– Regardez sous la voiture.
– Il n’est pas là !
– Sous le tracteur.
– Il n’est pas là !
– Sous la remorque.
– Il n’est pas là non plus…
– Alors qui l’a vu ?
– Mais il est où ? C’était une voiture sans chauffeur ou comment ?
Je n’étais nulle part sur le lieu de l’accident. Les habitants du quartier chaud-chaud croyaient rêver. Cependant, je me retrouvais à plus de deux kilomètres du lieu de l’accident. Jusque-là, je n’avais encore jamais mesuré le degré du pouvoir que m’avait légué mon père. Un héritage de père en fils, depuis plusieurs générations. Un gri-gri capable de me déporter à plus de deux kilomètres à l’instant T pouvant se produire un accident, ou de n’importe quelle situation grave suscitant une question de vie ou de mort.
Ce gri-gri est un héritage, un pouvoir que mon grand-père avait légué à son fils, Mahal Kakou. Ce dernier à son tour l’attribua à son fils, Jean-Jacques Kakou, que je suis. Mon père me révéla qu’il n’avait pas beaucoup expérimenté la « chose » comme mon grand-père, c’est-à-dire son père. Mon grand-père fut un grand chasseur. Un chasseur dans tous les sens du terme. Un chasseur dont la renommée avait franchi les limites de son village natal. Mon père me raconta que mon grand-père aurait fait la chasse aux dinosaures s’il était né au jurassique, à l’ère secondaire. Mon père me dit, avec la plus grande certitude, que mon grand-père était capable de chasser un tricératops, un stégosaure et même un tyrannosaure. Mon grand-père était grand et fort. Il faisait 1,98 mètre. Il avait une grande calvitie qui s’ouvrait sur douze ou quinze centimètres de large, elle partait du front jusqu’à l’arrière du crâne. Cette vue offrait un décor spécial. Il laissait contempler deux rives de touffe de cheveux séparés par une lumineuse et lisse peau. Mon père appelait ça la Seine. Mon grand-père avait une barbe qui encerclait sa bouche, elle couvrait ses joues, son menton, une partie de son cou. Une barbe qui ressemblait à une crinière. Ce qui lui valut le sobriquet de « nkonsi » qui veut dire le lion, sobriquet qu’il incarnait parfaitement. Sur la photo qui reste accrochée au mur de la maison de mon père, on voit bien mon grand-père, assis sur son fauteuil de chef fait en peau de fauve, les yeux vifs comme un aigle, avec l’allure d’un lion qui vient de conquérir une savane. Torse nu, brassards faits en peau de reptile, bien attachés aux deux bras. Une longue plume d’aigle piquée dans la partie gauche de la chevelure. C’était comme une antienne. Je crois que mon père ne plaisante pas quand il parle de mon grand-père. Parce que sur cette photo qui est accrochée au mur du salon de mon père, on sent et on ressent de l’énergie dégagée sur l’image de ce grand homme au regard objectif, mort et enterré au cimetière du mont Florie depuis longtemps. Il est très impressionnant sur sa photo. Mon père me dit que je craignais de fixer mon grand-père sur la photo lorsque j’étais gosse. Mon père me dit que c’est peut-être parce que mon grand-père me parlait pour me transmettre un message, et moi, j’avais peur d’écouter mon grand-père qui me parlait depuis sa belle photo accrochée au mur.
Mon père porte souvent un chapeau fait en peau de lion. C’est un chapeau très remarquable et très impressionnant puisqu’il traîne une queue de lion derrière. Mon père me dit que ce chapeau avait été fabriqué avec la peau d’un lion que mon grand-père avait tué dans la grande brousse. Le père de mon père avait chassé plusieurs espèces animales. Il avait chassé des sangliers, des singes, des calaos. Il avait capturé des boas, des gazelles… Mon père m’affirme encore avec la plus grande certitude, que mon grand-père s’était battu corps-à-corps avec un gorille dans la brousse. Mon père me raconte qu’à l’époque il avait huit ans, et il s’en souvient comme si c’était hier.
Ce jour-là, le père de mon père était allé chasser dans la grande brousse. Il pourchassait une gazelle blessée quand, soudain, sa route croisa celle d’un gorille qui s’était certainement réveillé sur un mauvais pied, ou alors qui voulut simplement jouer les justiciers de la brousse. Mon grand-père poursuivait la gazelle, son chien Titi courait après lui et le gorille les suivait à grande vitesse. Une scène qui fit vivre un dicton : l’animal devant, l’homme au milieu, un chien derrière, et un autre animal derrière. Qui pourchasse qui ?
Le gorille avançait à grande vitesse. Mon grand-père Binguimba sentait son poids se rapprocher de lui. Les branches des arbres se brisaient, des arbustes se coupaient, des feuilles mortes tombèrent de leur branche sur son passage. La manière dont ce gorille déposait son poids sur le sol déterminait la rage qu’il avait pour cet homme qui courait après une gazelle blessée. Le sol vibrait. Mon grand-père semblait percevoir les cris des oiseaux de mauvais augure qui s’adressaient au gorille : Tue-le, tue-le… Binguimba stoppa brusquement sa course. Il se tourna pour faire face au justicier de la brousse. Malheureusement pour lui, le gorille justicier était maintenant à moins de trois grands pas de lui. Le gorille justicier tendit son grand bras droit et donna un bon coup du revers de la main à Binguimba. Ce coup projeta Binguimba à plus de quatre mètres. Son fusil tomba à plus de dix mètres. Binguimba était un homme fort, il avait plus qu’un totem de gorille. Et ce n’était pas pour rien que sa renommée avait franchi les limites de son village natal. Mon grand-père était un chasseur qui avait été initié durant les cérémonies d’initiation de grande chasse. Son fils Mahal me raconta encore que lorsque Binguimba était un enfant, sa mère, Toto, le plongeait dans un demi-fût contenant une eau spéciale ; une eau qui avait bouilli à plus de cent degrés avec des os de gorille et des écorces d’arbres dedans. Mon père me raconta aussi que mon grand-père Binguimba accédait à une autre dimension quand il entrait dans une colère démesurée. Mon père me révéla, avec la plus grande certitude, qu’une fumée de feuille verte sortait sur les deux rives des cheveux de Binguimba, que ses yeux devenaient rouges comme des noix de palme quand celui-ci entrait dans une de ses colères incommensurables. La Seine en ces instants ne brillait plus. Elle était sèche. Elle ne brillait à nouveau que lorsque Binguimba retrouvait son calme.
Mon grand-père tenta de se relever pour prendre une posture de riposte après ce coup violent qu’il avait reçu, mais le gorille justicier ne lui accorda pas cette opportunité. L’animal était déjà à ses pieds avant qu’il ne prenne ses appuis. L’animal lui envoya à nouveau un coup, Binguimba l’esquiva proprement avec le dernier réflexe qui lui restait. Il riposta par un coup d

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