Lieux-Racines
80 pages
Français

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Description

« À travers des bribes de souvenirs, offerts presque comme des photos instantanées et sur le ton d'un voyage sensoriel, je vous invite à m'accompagner dans le voyage de l'écriture et de la construction de mon identité – au moment même où je m'apprête moi-même à transmettre en donnant la vie. Je veux offrir une ode au voyage, un hommage à la richesse des identités plurielles. » Avec le recul des années écoulées, l'auteure se remémore ses premiers voyages aux quatre coins du monde : de Cuba au Chili, en passant par le Brésil, l'Argentine, la Catalogne et Israël. Précieusement consignée dans des carnets de voyage, sa découverte du monde lui a réservé autant d'émerveillement que d'interrogations. Sans faux-semblants, elle fait part de ses réflexions, toujours sensible aux personnes qui l'entourent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 04 mai 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342160970
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0064€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lieux-Racines
Julie Médam
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Lieux-Racines
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
 
 
« Les histoires n’arrivent qu’à ceux qui sont capables de les raconter. »
Paul Auster, La Chambre dérobée
 
 
 
 
À toi, Noam, qui seras
À Antoine et nos rêves de fous
À mes parents et notre amour des mots
À Leonard Cohen
 
Remerciements
Il y a tant de gens à remercier que je n’ose tous les nommer.
Un si beau grand réseau de gens précieux autour de moi.
Ils se reconnaîtront, tous et chacune, chacun.
 
Ceux qui m’aiment et que j'aime.
Ceux qui m’ont encouragée.
Ceux qui m’ont lue.
Ceux qui m’ont conseillée.
Ceux qui ont su patienter et ne pas trop poser de questions.
Ceux qui m’ont prêté leur lieu pour écrire.
Ceux qui m’ont accueillie chez eux en voyage.
Ceux qui m’ont inspirée.
Ceux que j’ai croisés.
Sans oublier le hasard.
 
Merci.
Ce projet porte un peu de chacun d’entre vous.
 
Prologue : ici, maintenant
Lac Lacoste, 19 décembre 2011
Ça y est. Les deux temporalités, celle d’hier et celle d’aujourd’hui, sont sur le point de se rencontrer. Pour la première tempête de neige de l’année. Retrouvailles avec cette sensation étrange de n’être qu’un point minuscule sur le lac gelé. Un point qui pourrait facilement être enseveli. Est-ce que tout s’arrête ici, à partir du moment où je rassemble le casse-tête épars de mes voyages ? Ou au contraire, est-ce que tout n’est pas sur le point de commencer, alors que je m’apprête à y donner un sens ? Tant de visages, de sonorités, de couleurs et d’odeurs m’accompagnent. Comment mettre de l’ordre, construire le trait d’union entre tous ces souvenirs ? Dans quelques instants, j’aurai replongé, les souvenirs seront redevenus familiers, des mots leur seront associés. Encore quelques instants à savourer le paysage du haut du plongeoir.
Entre 17 et 28 ans, j’ai eu la chance de voyager et séjourner à Cuba, au Chili, au Brésil, en Argentine, en Catalogne, en Israël. Née en France, fermement ancrée à Montréal depuis que j’ai 12 ans, nourrie d’origines familiales diverses, j’ai toujours eu le sentiment d’osciller entre plusieurs mondes. À travers des bribes de souvenirs, offerts presque comme des photos instantanées et sur le ton d’un voyage sensoriel, je vous invite à m’accompagner dans le voyage de l’écriture et de la construction de mon identité – au moment même où je m’apprête moi-même à transmettre en donnant la vie. Je veux offrir une ode au voyage, un hommage à la richesse des identités plurielles.
Commencer ce récit, ce nouveau voyage, c’est créer une familiarité entre mes carnets. Pour chacun, j’ai en tête sa forme, son poids, son motif, le souvenir du moment où je suis cérémonieusement allée l’acheter. Toujours la veille du départ. Comment vont-ils réagir au fait que je les réunisse aujourd’hui ? Que j’extraie du secret leurs mots ? Aller jouer dans ces souvenirs de la jeunesse, de l’enfance presque, c’est aussi tenter de retrouver la pureté du premier regard sur le monde. De saisir à la fois ce qui lie et sépare la jeune femme d’hier qui en était à ses premiers voyages – et la femme d’aujourd’hui, presque mère, qui les regarde du « haut » de ses trente ans.
Ce livre peut se prendre de différentes façons. Comme un voyage des voyages. Mais aussi comme les voyages entrelacés de l’écriture et de la construction de soi. Une écriture volontairement laissée imparfaite pour mieux en saisir l’évolution, qui se cherche et s’affine au fil des ans. Un regard sur le monde qui mûrit au fil des rencontres et des lieux parcourus. Une identité qui se découvre pas à pas. Pour transmettre à son tour.
En filigrane, une question toute simple : que cherchons-nous, au fond, en voyageant ? Quelles racines cherchons-nous à déterrer en imposant le mouvement au corps et à l’esprit ?
Être en voyage, c’est se laisser envahir par une totalité qui nous est étrangère, qui a son organisation propre, et dans laquelle on se retrouve propulsé malgré nous dans les moindres pores de notre peau. Nous transpirons, nous mangeons, nous écoutons, nous courons, nous aimons le Brésil. Lorsque la distance des années a fait son œuvre, il ne reste bien souvent plus qu’un ou deux souvenirs précis, tangibles, qui nous ramènent de manière fulgurante à l’émotion brute du moment. Qu’il soit présent ou passé, le voyage ne fait pas appel à la même sensorialité en nous ; il s’écrit et résonne distinctement en nous. La mémoire nous joue des tours. C’est l’enchevêtrement de ces regards que je veux saisir dans ce livre.
La neige a arrêté de tomber sur le lac gelé. L’histoire peut commencer.
Cuba – 17 ans : l’appel humaniste
Aujourd’hui : Acadia National Park, 16 juillet 2011
Depuis deux jours, nous avons pris la route avec le beau Bruno – notre Westfalia beige 1980 – qui roule à merveille malgré quelques peurs anticipées. Le voyage ne fait que commencer que, déjà, le temps s’est arrêté, les pique-niques et les ciels larges sont revenus. C’est le vent salé de la mer sur les lèvres, c’est le bonheur, la liberté, la contemplation. Aussi, c’est le plaisir retrouvé d’écrire. Sur un beau carnet. Au papier au grain ni trop fin ni trop épais. Avec un stylo à pointe large dont le tracé donne des airs – modestes – de plume de Victor Hugo. Ce voyage, c’est aussi l’occasion de renouer avec tous les autres qui m’ont marquée.
J’ai envie de faire le compte à rebours des strates qui forment mon identité. Mais est-ce possible de décortiquer de manière si méthodique ce que l’on est ? Je suis certaine d’une chose : le bonheur viscéral que j’éprouve, chaque fois que je me retrouve dans cet état bien précis, à écouter le bruit du stylo tracer mes mots sur le papier blanc. C’est l’invitation à l’évasion qui est à nouveau au rendez-vous.
Au bout d’une péninsule ensoleillée. À marée basse. À l’heure où le soleil descend et tout s’apaise. Cuba. 17 ans. Les brigades internationales. La soif de révolution. Trois semaines en famille d’accueil, à la mer, à la montagne et au milieu des champs de canne à sucre. Arrivée en avion russe et cahotant, le soir. Les interstices de l’appareil suintant la condensation de manière inquiétante pendant tout le vol. Traversée de l’île la nuit en autobus, tout aussi cahotant que l’avion. Musique assourdissante. Arrêt vers 3 heures du matin, au milieu de nulle part. Tout le monde dort. Sauf moi. Trop énervée, excitée, émerveillée. J’ose. Je quitte mon siège et m’avance dans l’allée pour descendre de l’autobus et fouler un instant la terre. Et je lève la tête. Le ciel me rentre dedans. Un ciel de milliers d’étoiles comme je n’en ai jamais vu ailleurs depuis. Ça sent les plantations de tabac, la mangue. Ça sent la liberté. J’englobe le ciel, je l’avale en moi et je n’oublie jamais la pureté brutale de ce premier sentiment de liberté.
Cuba, c’est aussi respecter ou non ce qui m’a été inculqué par respect pour mes hôtes. Nous étions dans les montagnes. J’étais hébergée par une famille de paysans dont la mère devait avoir 17 ans, comme moi. Le premier enfant de la famille avait un an et demi. Il avait pour unique jouet un vieux couteau rouillé arrondi avec lequel il pouvait s’amuser des heures en creusant la terre rouge et sèche de la cour. La cour, c’était à la fois le terrain de jeux de l’enfant, l’enclos du porc et le coin où se doucher avec un seau d’eau. Pas de frigo. Encore moins de télévision. Ils m’avaient prêté leur chambre pour mon séjour d’une semaine. Et ils s’entassaient avec le petit dans l’autre moitié de la pièce qui constituait le reste de la maison. La veille de notre départ du village, en rentrant d’excursion, une odeur exquise de viande envahit la maison. La table est à la fête, la mère rayonne de fierté. Il doit s’agir d’une des rares fois de l’année où la famille mange de la viande. Le petit, ravi, joue de plus belle avec son vieux couteau au milieu de tout le monde qui s’agite. Le verdict tombe. «  Chancho ?  » «  Si, si, chancho ! El chancho de la casa !  » Le porc de la maison ! Mon compagnon de douche depuis une semaine ! Le porc qui a cuit à la broche depuis cinq heures et que la famille exhibe fièrement, décidée à le partager avec les autres familles voisines. Comment ne pas me réjouir moi aussi ? Comment leur expliquer que dans ma famille, on ne mange pas de porc ? Comment – et pourquoi – dire non à cette générosité ? En un instant, c’est décidé : aucun principe, quel qu’il soit, ne doit m’amener à créer une frontière entre les autres et moi. Au fin fond d’une montagne haut perchée de la Sierra Maestra. Sur l’Île de la Révolution.
Hier : La Havane, 21 juillet 1999
Arrivée mouvementée. Premiers contacts avec la vraie pauvreté. Paysages époustouflants de palmiers et de brume matinale. On dirait que les odeurs s’imprègnent dans notre peau. Tout aurait été parfait si on n’avait pas eu la surprise de ne pas trouver nos valises à l’arrivée. Restées à Montréal pour des raisons inconnues. On devrait les retrouver demain – ou après-demain, ou…
* * *
Bermejo, 27 juillet 1999
Aujourd’hui, le travail ...

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