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Description
Sujets
Informations
Publié par | Odile Jacob |
Date de parution | 26 août 2020 |
Nombre de lectures | 19 |
EAN13 | 9782738153425 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE 2020 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-5342-5
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Composition numérique réalisée par Facompo
Introduction
On ne peut pas aborder la question du libéralisme et la mise en perspective du libéralisme, du socialisme et du populisme sans traiter d’abord de l’opposition entre libre arbitre et déterminisme.
Face aux grandes interrogations qui taraudent l’homme – sur le bien et le mal, l’ordre et le désordre, la mort et l’au-delà, la famine ou la prospérité –, les idéologies, les sciences et certaines religions ont souvent eu un point commun : le déterminisme. Qu’il soit religieux, économique, sociologique, psychologique ou politique, le déterminisme exonère l’homme de toute responsabilité sous réserve d’obéir à son maître : Dieu, le Matérialisme, l’Inconscient ou le Parti.
De rares religions, certaines lectures des textes sacrés, reconnaissent à l’homme sa liberté de choix mais, le plus souvent, les grandes religions sont fondées sur un déterminisme absolu – comme l’islam avec la « prédestination divine absolue » – ou sur l’élection divine des individus dans certains courants du judaïsme, du catholicisme ou du protestantisme.
À l’opposé du déterminisme, dans la fragilité et le dénuement, une idée a tenté d’éclairer la liberté de l’homme : le libre arbitre de l’être humain acceptant la pleine responsabilité de ses actes est plus fort que tous les déterminismes.
Notons immédiatement que l’opposition libre arbitre/déterminisme ne doit pas être confondue avec l’opposition dualisme cartésien/matérialisme. Dans le prolongement du développement des neurosciences au XX e siècle, le dualisme cartésien est très contesté. Le libre arbitre ne suppose pas qu’il y ait un « fantôme dans la machine 1 », c’est-à-dire une âme séparée du corps et constituée d’un matériau divin de nature inconnaissable, mais que l’homme, même dans un monde matérialiste, ait toujours le choix de prendre un chemin plutôt qu’un autre, quelles que soient les contraintes.
Le déterminisme suppose que nous sommes déterminés dans nos choix par des forces matérielles, culturelles, familiales, psychologiques telles que nous ne sommes pas libres même quand nous croyions l’être. À l’inverse, toute la société moderne est construite sur l’hypothèse explicite ou implicite que nous sommes capables de choisir et d’agir de façon autonome, ce qui fonde notre responsabilité morale et pénale. Et c’est la responsabilité de nos actes qui crée notre liberté. Mais, dans le monde contemporain, le fondement de la responsabilité et de la liberté est ignoré ou négligé.
Le libre arbitre est le cœur vivant du libéralisme. Pourtant, il est rarissime que le libéralisme soit expliqué en lien avec ce dernier.
Le libéralisme est souvent présenté comme une doctrine de philosophie politique et morale fondée sur les droits fondamentaux naturels de l’individu précédant toute association. Les individus ont des droits civiques, politiques et économiques inaliénables qui leur permettent de servir leurs intérêts. L’État de droit, inventé par les libéraux, garantit les libertés formelles permettant à l’individu de s’épanouir en dehors des entraves des religions, des traditions, des castes, des monopoles, etc. L’État régalien maintient l’ordre et met en œuvre l’État de droit. Le libéralisme des droits naturels forge la société moderne dans laquelle l’individu maximise son bien-être. Ce qui précède est exact mais peu exaltant car, ainsi présenté, le libéralisme est juridique et matérialiste.
Avant d’être un système politique et juridique, le libéralisme est une intuition philosophique : l’homme est libre de ses choix sous réserve d’en assumer les conséquences. Pour être plus précis, distinguons avec Sartre la situation et la détermination. Nous sommes toujours en situation avec un sexe, une culture, un milieu social, un patrimoine génétique, un pays d’origine, etc. Mais cette situation ne nous détermine que partiellement, et nous pouvons faire des choix, judicieux ou non, notamment aux moments cruciaux de notre vie. Le libre arbitre est au cœur de l’humanité de l’homme.
Le libéralisme du libre arbitre responsable reconnaît et insiste sur le fait que les droits imprescriptibles de l’individu ne sont pas liés à la personne mais à l’existence d’une liberté de choix de la personne . Sans liberté de choix, il n’y a pas de droits fondamentaux, car nous ne sommes alors que des robots ou des animaux ; liberté de choix qui doit s’exercer en pleine responsabilité de ses actes, car c’est la responsabilité qui fonde la liberté. Sans liberté de choix, nous sommes des automates mus par des réactions chimiques et biologiques et des déterminismes absolus.
La liberté de l’homme est donc fondée sur le libre arbitre responsable et le libéralisme est le système philosophique et politique qui permet à l’homme responsable d’exercer son libre arbitre. Sans responsabilité, il n’y a pas de libre arbitre. Sans libre arbitre, il n’y a pas de responsabilité.
Souvent, et rarement pour de bonnes raisons, le libéralisme est assimilé au capitalisme alors que ces deux concepts sont de nature différente. Le libéralisme est un système de pensée qui donne sens à la vie, alors que le capitalisme est une organisation sociale et productive. Comme l’illustre le régime chinois, un pays peut être simultanément communiste et ultracapitaliste. Et on peut avoir un système politique libéral dans lequel l’État joue un rôle important.
La philosophie politique libérale est à l’origine de la démocratie libérale représentative fondée sur les droits imprescriptibles des citoyens, l’élection des dirigeants par le peuple et la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire), l’évaluation des politiques gouvernementales et celles des exécutifs locaux par des instances indépendantes, et la délibération posée de la loi dans le cadre d’un Parlement bicaméral élu par le peuple (Assemblée nationale) ou ses représentants (Sénat). La loi est votée et les décisions publiques sont prises par des élus responsables de leurs décisions, et tout appel à des forces hétéronomes est proscrit : un système démocratique doit être laïc et transparent.
La démocratie libérale fonctionne harmonieusement dans un cadre national dans lequel les citoyens partagent les mêmes valeurs et la même culture politique. Le cadre national donne racines et perspectives, identité et protection. Et les démocraties libérales œuvrent ensemble pour la paix.
La démocratie libérale représentative s’oppose à la tyrannie des majorités grâce au respect des institutions démocratiques, au jeu des contre-pouvoirs et surtout par le respect absolu des droits imprescriptibles des citoyens. Elle s’oppose également à la tyrannie des minorités qui veulent couper les racines intellectuelles et territoriales des peuples, détruire délibérément l’homogénéité des populations et imposer de nouvelles formes de légitimité dans l’action publique fondées sur des a priori ne relevant pas de la délibération prudente de la loi ou de l’exercice du pouvoir contrôlé par des instances indépendantes créées par la loi.
La démocratie libérale représentative est le régime politique le plus sophistiqué conçu par l’homme. Il est intrinsèquement fragile car il est construit sur la raison, la responsabilité des individus et la volonté de vivre ensemble dans le respect des institutions et des règles communes. Les passions tyranniques, la mise en scène des émotions, la manipulation de l’opinion, les lâchetés des dirigeants sont autant de menaces fragilisant le fonctionnement de pouvoirs et contre-pouvoirs qui doit être apaisé.
La démocratie libérale représentative, fruit de trois mille ans de combats intellectuels et politiques, doit être continuellement revivifiée par l’ardeur des hommes libres à œuvrer ensemble pour le Bien commun.
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Le libéralisme fondé sur le libre arbitre de l’homme doit faire face au chaos du monde. Un chaos qui résulte des passions obscures qui animent les hommes mais aussi du changement climatique et d’une révolution industrielle qui provoque un nouveau classement des nations, en fonction de leur capacité à se moderniser, et accentue le conflit pour la domination du monde entre les États-Unis et la Chine. Mais la menace la plus grave vise directement le libre arbitre qui est au cœur de la liberté de l’homme. L’homme est-il déterminé par des forces supérieures, comme l’intelligence artificielle, ou est-il et peut-il rester l’auteur de ses actes ? C’est la question centrale en théologie, en philosophie et en politique depuis trois mille ans. Le chaos du monde est analysé au premier chapitre de ce livre.
Il est essentiel de distinguer le libéralisme politique du libéralisme économique, et de bien définir le premier. Mais il faut aussi analyser les menaces politiques contre le libéralisme politique. Le chapitre 2 est centré sur la nature du libéralisme politique qui doit être distingué du libéralisme économique (que je renomme marchéisme ), du marxisme, du conservatisme ou du populisme.
Le libéralisme politique s’inscrit dans le cadre d’un État-nation homogène et strictement laïc, alors que le marchéisme est par nature globalisé. Le marchéisme s’accommode parfaitement du communautarisme et prône la disparition des frontières, même ouvertes, car, selon lui, tout s’ac