Le posthumain descend-il du singe ? : Littérature évolution et cybernétique
219 pages
Français

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Description

À la fois hybride, monstre, cyborg ou mutant, le posthumain est une figure pour le moins paradoxale ; annonciatrice bien souvent de la fin de l’Histoire, elle incarne pour l’homme la possibilité de transcender sa propre mortalité, tout en présentant, à l’instar des utopies, un état figé, final et abouti. Cependant, en replaçant le posthumain dans l’histoire de l’évolution, ne peut-on pas, justement, le faire évoluer ? Il ne serait plus l’idéal à atteindre ou le pire à éviter, mais la représentation des possibles, les branches fantasmées d’un futur arbre évolutif. Les ramifications en sont nombreuses et fertiles, largement irriguées sur le plan du discours et de la narration par les différentes théories de l’évolution des espèces et par celle de la cybernétique, science pluridisciplinaire à l’origine même du posthumanisme. Dans cet ouvrage, l’autrice se demande, en relisant des romans et des nouvelles de science-fiction publiés surtout entre 1948 et 2005, de quelle façon le posthumain littéraire s’inscrit dans la logique de ces théories et dans quelle mesure il en mobilise les signes et les savoirs.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 novembre 2020
Nombre de lectures 1
EAN13 9782760642577
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1150€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Elaine Després
Le posthumain descend-il du singe?
Littérature, évolution et cybernétique
Les Presses de l’Université de Montréal

Dans la même collection
Sous la direction de Claire Barel-Moisan et Jean-François Chassay, Le roman des possibles. L’anticipation dans l’espace médiatique francophone (1860-1940)
Sous la direction de Isabelle Boof-Vermesse et Jean-François Chassay, L’âge des postmachines
Bernabé Wesley, L’oubliothèque mémorable de L.-F. Céline. Essai de sociocritique



Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: Le posthumain descend-il du singe?: littérature, évolution et cybernétique / ElaineDesprés. Noms: Després, Elaine, 1983- auteur. Collections: Cavales (Presses de l’Université de Montréal) Description: Mention de collection: Cavales Comprend des références bibliographiques.. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20200076779 Canadiana (livre numérique) 20200076787 ISBN 9782760642553 ISBN 9782760642560 (PDF) ISBN 9782760642577 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Transhumanisme dans la littérature. RVM: Évolution dans la littérature. RVM: Cybernétique dans la littérature. Classification: LCC PN56.T37 D47 2020 CDD 809/.93356—dc23 Mise en pages: Folio infographie Dépôt légal: 3 e trimestre 2020 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2020 www.pum.umontreal.ca Cet ouvrage a été publié grâce à une subvention de la Fédération des sciences humaines de concert avec le Prix d’auteurs pour l’édition savante, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les Presses de l’Université de Montréal remercient de son soutien financier la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).




Notes sur l’ouvrage
Les publications originales et le financement
Plusieurs des chapitres de ce livre sont des versions remaniées d’articles ( Cahiers du CEIMA, Otrante. Arts et littératures fantastiques ) ou de chapitres d’abord publiés dans des ouvrages collectifs (Presses universitaires de Rennes, Cahiers Figura, Presses universitaires de Sofia) plus ou moins accessibles selon les cas. Ils ont été d’abord rédigés dans le cadre d’un stage postdoctoral, puis ont été choisis et assemblés parce qu’ils se répondaient et offraient une réponse cohérente à une problématique. Je crois, pour reprendre la thématique d’un des romans ici à l’étude, que la somme est définitivement différente de (pour ne pas dire supérieure à) la somme des parties.
Les travaux de recherche présentés dans ce livre ont été rendus possibles par une bourse postdoctorale du Fond de recherche du Québec – Société et Culture (FRQSC) (2012-2014) et poursuivis grâce à une bourse postdoctorale du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH) (2014-2016).
La traduction des citations
Même s’il existe des traductions publiées, la majorité des citations tirées d’œuvres anglaises ont été traduites en français par mes soins, à moins d’une mention contraire. J’ai fait ce choix afin de rester fidèle au texte original et de conserver le plus d’éléments d’analyse possible. Il arrive couramment que les traductions officielles, en particulier dans le cas des romans de science-fiction, omettent des passages entiers, appauvrissent le vocabulaire ou éliminent certaines figures de style. Il m’aurait donc été impossible de mener à partir de celles-ci une analyse aussi près du texte que celle que je propose.


Liste des abréviations
AD: Les animaux dénaturés (Vercors, 1952)
AE: Ape and Essence (Aldous Huxley, 1948)
DC: Darwin’s Children (Greg Bear, 1999) DR: Darwin’s Radio (Greg Bear, 2003)
G: Galápagos (Kurt Vonnegut, 1985)
H: Hothouse (Brian Aldiss, 1960)
L: Limbo (Bernard Wolfe, 1952)
MTH: More Than Human (Theodore Sturgeon, 1953)
PS: La planète des singes (Pierre Boulle, 1963)
SC: Le silence de la cité (Élisabeth Vonarburg, 1981)
SO: 2001: A Space Odyssey (Arthur C. Clarke, 1968)
TM: The Time Machine (H. G. Wells, 1895)
TW: Twilight World (Poul Anderson, 1961)


Introduction
La science produit depuis toujours questions et hypothèses, savoir et récits, créateurs et créatures, instruments et expériences de pensée, progrès et destruction… Tout comme la littérature (et à travers elle), la science participe d’un riche imaginaire, alimenté par les découvertes, les inventions, les personnages, les alliances qui ponctuent son histoire. La fiction narrative a toujours représenté la science et le rapport de l’humain à la nature, mais cette représentation, au XIX e siècle, se problématise d’autant plus que la science s’autonomise et se laïcise. Activité collective par essence, cette dernière offre de grands espoirs – comme en témoigne la popularité des philosophies positivistes –, mais aussi de grandes craintes lorsqu’elle se pratique derrière des portes closes, par des individus qui en refusent les règles, les objectifs et les méthodes. Ainsi, d’innombrables savants fous peuplent les fictions et les romances scientifiques, de Frankenstein jusqu’à aujourd’hui 1 . Ces figures ont en commun une dangereuse hybris et une tendance à l’isolement, une volonté d’innover à tout prix (souvent exploitée par les plus puissants à partir de la Seconde Guerre mondiale), mais aussi le fait d’être des créateurs, insatisfaits par la fastidieuse recherche du savoir pur et par l’humanité qu’il faudrait impérativement améliorer. Ils inventent parfois des machines, mais ils mettent le plus souvent au monde des êtres nouveaux, monstrueux, problématiques… sans pour autant leur accorder le statut de sujet, ce qui mène habituellement à une rébellion, laquelle aboutit inévitablement à une destruction mutuelle.
Or, si les créatures de Frankenstein et de Moreau demeurent des incidents isolés, troublantes, mais sans descendance dans les récits, la littérature de la seconde moitié du XX e siècle entretient des ambitions plus grandes pour ses êtres artificiels: remplacer l’humanité ou en redessiner les frontières conceptuelles grâce à une figure singulière, paradoxale et hybride, celle du posthumain. Celui-ci se retrouve au croisement de la théorie de l’évolution de Charles Darwin et de la cybernétique de Norbert Wiener, cette science multidisciplinaire de la communication née des ruines de la Seconde Guerre mondiale. Si l’évolution et la cybernétique peuvent sembler a priori éloignées, l’une étant associée au naturel et au biologique, l’autre à l’artificiel et au mécanique, il n’en est rien.
Dès ses premiers textes fondateurs de la cybernétique, Wiener décrit le vivant comme un modèle de lutte contre l’entropie générale de l’univers, inévitable selon le deuxième principe de la thermodynamique. Si celui-ci est promis à une mort certaine, thermique, caractérisée par l’équilibre et la désorganisation, il est possible de contrer temporairement et localement ce mouvement en créant des «poches d’entropie décroissante», des systèmes basés sur l’organisation, la structure, la rétroaction et surtout l’information. Pour Wiener,
Information est un nom pour désigner le contenu de ce qui est échangé avec le monde extérieur à mesure que nous nous y adaptons et que nous lui appliquons les résultats de notre adaptation. Le processus consistant à recevoir et à utiliser l’information est le processus que nous suivons pour nous adapter aux contingences du milieu ambiant et vivre efficacement dans ce milieu 2 .
Or, n’est-ce pas là précisément la définition de l’évolution des espèces? Selon la cybernétique, chaque organisme, l’humain y compris, est une machine qui fonctionne par rétroaction avec son environnement, utilisant l’information amassée ( input ) pour réagir et s’adapter ( output ). Dans La cybernétique et l’origine de l’information (1954) , le philosophe français Raymond Ruyer l’énonce déjà, suivant les écrits de Wiener lui-même (même s’il s’oppose à la composante mécaniste de la cybernétique), en précisant que les organismes vivants ont la particularité fondamentale d’être en équilibre homéostatique:
ils se maintiennent malgré des conditions externes variables. Si l’équilibre organique était statique, et faisait simplement la moyenne résultante des forces internes et externes, la vie serait bien précaire. En fait, l’équilibre organique n’est généralement pas une résultante. Il maintient intégralement une certaine valeur optimum [température, fluidité et acidité du sang, etc.] 3 .
Ainsi, les organismes reçoivent de l’information sur leur écosystème, les ressources disponibles, les conditions de survie, les dangers potentiels, et les mécanismes de l’évolution par la sélection orientent la persistance de certaines caractéristiques qui permettent la survie dans ces conditions précises.
D’ailleurs, selon le psychiatre et ingénieur anglais W. Ross Ashby, dans An Introduction to Cybernetics (1956) 4 , l’adaptation d’un être vivant à son milieu et l’évolution des espèces qui en résulte peut aisément s’exprimer en termes cybernétiques. Pour lui, la Terre est un système autocatalytique 5 dans lequel la vie est devenue une propriété si répandue que son absence rend le système instable et crée un déséquilibre, puisqu’elle en a modifié de manière globale et pérenne la composition chimique (carbone, azote, etc.). Ainsi, la vie s’est adaptée à l’environnement qu’elle a contribué, en retour, à façonner par un processus de rétroaction et de communication. Sara Touiza-Ambroggiani, dans sa thèse intitulée Le paradigme communicationnel. De la cybernétique de Norbert Wiener à l’avènement du posthumain (2018) , explique que la « communication est au cœur de la pensée cybernétique, elle cherche à modéliser les interactions entre un système donné ([…] vivant ou non vivant) et son environnement. Ce faisant, e

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