L Aube et l Éternité
97 pages
Français

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L'Aube et l'Éternité , livre ebook

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Description

L’auteur met l’accent sur ces petits « riens », ces détails sans importance que nous ne voyons plus, mais qui représentent pourtant la clé qui ouvre vers d’autres galaxies et nous précipitent vers d’autres avenirs.
Ces récits sont souvent très courts pour aller à l’essentiel, mais sans que l’essentiel n’ait été dit ou à peine suggéré. Les mots de l’auteur résonnent en nous et éveillent des souvenirs que l’on croyait avoir oubliés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 mars 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782381535005
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'Aube et l'Éternité
La SAS 2C4L — NOMBRE7,ainsi que tous les prestataires de production participant à laréalisation de cet ouvrage ne sauraient être tenus pourresponsables de quelque manière que ce soit, du contenu engénéral, de la portée du contenu du texte, ni dela teneur de certains propos en particulier, contenus dans cetouvrage ni dans quelque ouvrage qu’ils produisent à lademande et pour le compte d’un auteur ou d’un éditeurtiers, qui en endosse la pleine et entière responsabilité
Érick DEMEURS
L'Aube et l'Éternité

Récits
IL ESTUN HOMME HEUREUX
— C’estquoi ça   ?
— Deslentilles.
— C’estnormal qu’elles soient crues   ?
— Oui, ainsielles gardent toute leur valeur nutritionnelle.
Il hausse les sourcilsen se disant : « ça, c’est del’argument   ! »et il mastique laborieusement ses lentilles crues.
Un peu plus tard, ilpointe à nouveau l’index vers son assiette, l’œilinquisiteur :
— Et ça   ?
Son épouse,toujours très placide :
— Desgraines de courge.
— Et àcôté   ?
— Desgraines de lin.
Et avant qu’ildemande leur utilité, elle prévient :
— Ellesrenforcent tes défenses immunitaires.
Il songe en continuantà mâcher :
— Ça,je n’y aurais pas pensé : « Ellesrenforcent tes défenses humanitaires. » C’estbien ça   !C’est très bien   !Je ne comprends pas trop ce que cela veut dire, mais c’estbien   ! Je le sens   !
Avant le cycle desgraines, il avait traversé le cycle des carottes. Il en amangé tous les jours, des carottes, pendant des mois. Mais, aulieu qu’elles soient râpées avec un petit filetd’huile d’olive ou marinées d’un jus decitron, son épouse les préférait crues découpéesen bâtonnets plus ou moins gros, plus ou moins longs. Il s’estmordu plusieurs fois la langue ou les joues en les mâchant.Elles devaient posséder de très hautes performancesnutritives qu’il a oubliées bien sûr. Un soir, uneamie était restée pour manger avec eux et il arriva àla cuisine au moment où les deux femmes se demandaient, enouvrant les placards, ce qu’elles allaient préparer pourle repas. L’invitée suggérait :
— Nouspourrions faire quelques carottes râpées, pourcommencer   ?
Il profita de saprésence pour passer le message à son épouse, ens’exclamant, très spontanément, les bras auciel : « Ah   !Non   ! Pas descarottes   ! Je n’enpeux plus des carottes   !J’en mange tous les jours des carottes   !À tous les repas   !Surtout : pas de carottes   ! »
L’amie étaitpliée de rire, tandis que son épouse un peu crispéesemblait songer : « J’ai peut-êtreforcé sur ce légume. »
L’autre jour, sonépouse lui a servi une belle salade de légumes crus. Ildit belle parce que l’assortiment des couleurs étaitagréable à l’œil. Il ajouta une bonnecuillère de mayonnaise. Son épouse le regarda faire,sidérée, et finit par exploser :
— Une bonnesalade comme ça   !Que j’avais préparée longuement, avec soin etavec beaucoup d’attention   !Tu gâches tout son potentiel nutritionnel avec cette mayonnaiseindustrielle   !
Il rit, pendant qu’ellepoursuivait, excédée :
— Tu en metsun peu, sur la pointe du couteau   !Pas une demi-louche. Tu vas te détraquer le foie.
Il continua àrire et lui expliqua :
— Je l’aifait express, pour te faire un peu râler.
Son épouse sansl’écouter continuait :
— C’estta santé, pas la mienne. Tu fais comme tu veux. C’estcomme l’eau : tu t’obstines à boire de l’eaufraîche alors que je t’ai dit mainte fois que l’eaufraîche casse l’appétit. C’est dommage. Etquand ce n’est pas l’eau fraîche, ce sont lessodas. Cela sert à quoi que je fasse des efforts si tun’écoutes rien   ?
Le plus souvent, il nedit rien, ou ne répond pas, car le soir, quand il regarde latélévision, seul, il rattrape cette diètealimentaire par quelques barres de chocolat au lait, et aux noisettesbien sûr, complétées par quelques biscuits aubeurre. Parfois, il ajoute un esquimau glacé au chocolat.
L’étédernier, son épouse lui a proposé de passer leursvacances dans un centre dont le programme prévenait :« Nos équipes pédagogiques cherchent lesconditions favorables à l’émergence de projetséducatifs. »
Devant sonenthousiasme, elle décida de payer le séjour.
Tous les jours, matin,après-midi et soirée, il leur était proposédes ateliers pour développer le « respectmutuel », « l’écoute »,des animations pour « l’épanouissement pardes séjours novateurs ». Il fit un ou deux de cesateliers et en resta là. Pendant que les vacanciers seregroupaient dans les différents laboratoires de projetséducatifs, il s’installait dans un coin isolé ausoleil avec un livre. Il passait un merveilleux moment dans lesilence, à écouter les mouches dans la campagne et lacaresse du soleil sur ma peau. Le soir même, son épouselui fit remarquer, sans reproche, mais indignée, qu’ilsétaient dans un lieu privilégié, où illeur était proposé des exercices par des personnesspécialisées en communication non violente.
— Nous avonsla chance, lui expliquait-elle, de participer à une expériencepédagogique active. Je comprends que tu aies envie de lire.Mais, nous ne retrouverons pas de formateurs de cette qualitén’importe où. Ton livre, tu es venu avec et turepartiras avec. Et tu en as des dizaines d’autres à lamaison. Tu ne pourras pas travailler le besoin fondamental de progrèsintérieur qui nous habite tous si tu ne participes pas auxstages.
Il lui sourit et promitqu’il ferait un effort.
Le lendemain, ilretourna dans un coin, paisible, seul, au soleil.
Il ne comprend pas cesgens qui veulent faire son bonheur malgré lui, sans sepréoccuper de son avis, de ce qu’il pense. Il n’apas envie d’être heureux comme son épouse veut lelui imposer en voulant lui faire croire que c’est une simpleproposition, seulement et rien de plus. Le plus, justement, c’estla bagarre s’il refuse. Il ne veut pas de son bonheur formaté.Même si elle a raison – ce qui est possible au fond –il préfère rester ignorant et faire ce qu’ilveut. Il veut bien lui faire plaisir, mais à condition quecela lui fasse plaisir aussi. Il n’a pas envie de suivre desformations dites « pour son bonheur » quine l’intéressent pas.
Une fois sa colèrepassée, il se calme et constate que son épouse veut,seulement, qu’il soit heureux. C’est bien, c’estbeau, c’est simple, c’est peut-être mêmegénéreux. Il rit, tout seul, enchanté àl’idée de toute la peine qu’elle se donne pourfaire de lui un homme heureux.
Mais, quelque part, enlui, bien au fond, quelque chose se révolte. Il ne veut pas dece bonheur-là. Bien formaté. Il ne veut plus faire soncaca dans le popo du bébé pour qu’on puissevérifier qu’il est bien moulé. Il veut pisser surle mur extérieur de l’urinoir à l’angle dela place des joueurs de boules. Il ne veut plus que l’on penseà sa place   !Que l’on respire à sa place   !Que l’on mange à sa place   !Il revendique le droit de ne pas être conforme   !Il crie :
— Réveillez-vousmes sœurs   !Révoltez-vous mes frères   !Osons être malheureux   !
D.E. La Seyne
18/10/2015,13 h 15.
LESBOUTONS
Aujourd’hui, jevoudrais vous poser une grave question. Je voudrais vous demandervotre aide. Oui, oui, à vous qui lisez. D’habitude,c’est moi qui fais tout. Vous, vous vous contentez de payer leprix du bouquin au libraire ou au kiosque. Puis, vous vous installezconfortablement dans le train, le bus, dans votre fauteuil, vouscalez les oreillers de votre lit, et vous lisez le bouquin comme onmange un gâteau, page après page, comme unmille-feuille.
Mais aujourd’hui,je voudrais vous poser une question. Vous remarquerez, si l’éditeura accompli correctement son travail, à la dernière pagedu livre, là où apparaît le dépôtlégal, on a ajouté, à ma demande, mon adressemail. C’est pour que vous puissiez répondre à maquestion. Et je vous rassure tout de suite, ne vous croyez pas obligéde me faire une thèse   ;ne craignez pas, non plus, de dire une sottise, laissez parler votreintuition. Le plus beau, bien sûr, serait que ma question vousait déjà interpellé, peut-être mêmedepuis longtemps, qu’elle fasse partie du champ de recherche devotre mental, des investigations de vos neurones   ;que l’on soit du même club.
C’est unequestion que je me pose depuis de très nombreuses années.J’observe, je ne dis rien, j’attends un signe. Maintenantque je deviens âgé, je n’ai plus le goûtd’ouvrir seul cette porte secrète. Peut-être même,ai-je peur, au fond de moi, de mourir avant de la franchir. Je suisdisposé à partager ma réussite, s’il doity en avoir une, comme à accepter vos railleries s’il n’ya pas de porte.
Mais, ne tardons plus.Écoutez bien. Voilà la question :
« Pourquoiavons-nous tous une boîte de boutons   ? »Une boîte, un sachet, une vieille chaussette, un récipientquelconque. Pourquoi gardons-nous ces boutons de chemise, de veste,de pantalon, qui sont tombés un jour, décousus. Mêmesi nous le refixons immédiatement, le plus souvent nous lerangeons dans la boîte pour ne pas le perdre. Et nousl’oublions là et le remplaçons par un autre, plustard, à peu près pareil. Pas la peine de vousprécipiter chez la mercière – je l’ai fait– elle ne sortira jamais de ses tiroirs, strictement le mêmeque celui perdu   ;pour un égaré, vous devez toujours en racheter au moinsquatre. Nous en utiliserons un et thésauriserons les autresdans la précieuse boîte. De déménagementen déménagement, nous n’oublions jamais la boîteà boutons. Nous ne la jetons surtout pas.
L’autre jour, jepassai devant la vitrine d’une couturière. Je restai enarrêt. Sur une vieille machine à coudre à pédale,au plateau en bois marqueté, avec le côté enfonte ouvragée, la couturière avait renversé,pour attirer l’œil, une vieille boîte àbiscuits de nos grand-mères en métal sombre et uséeau décor de grosses fleurs un peu écaillé d’oùdégoulinait un flot de boutons sur le bois verni. D’unpas je m’écartai sur le côté de la vitrineet, comme un voyeur, je contemplais, discrètement, le trésor.Je remplissais mon œil de boutons de toutes sortes, des gros,des petits, des moyens, des normaux, des en plastiques, des en bois,des en nacre brillant, des bleus, des jaunes, des gris, des marrons,des en métal, des dorés comme de l’or comme de

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