LA La petite fille en haut de l escalier
55 pages
Français

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Description

C’est un destin bien singulier que celui de ma mère, quand on y pense. Certains enfants ont été élevés dans des tentes, des roulottes, des chambres d’hôtel, des orphelinats, des bungalows de banlieue ou des châteaux, d’autres ont sans doute grandi dans des endroits plus insolites et même improbables, mais je parierais que rares sont ceux qui auront passé leur jeunesse dans des presbytères.
À l’automne 1920, Martine a quatre ans et s’apprête à passer sa première nuit chez son oncle, curé. Sa mère vient de mourir. Son père l’a abandonnée. Ses frères et sœurs ont été dispersés aux quatre vents. La petite aurait besoin d’être consolée, mais son oncle refuse de la gâter. Du haut de l’escalier qui mène à sa chambre, Martine se dit qu’elle devra s’habituer, que ce sera toujours comme ça. Ce soir-là, elle se construit un blindage que personne ne réussira jamais à percer.
Dans ce récit doux-amer où jaillit néanmoins l’humour qu’on lui connaît, François Gravel raconte la vie de sa mère, cette femme complexe qui laissera à son tour ses enfants « en haut de l’escalier ».
Au moment de passer à table, on s’aperçoit qu’il manque un couvert. On y va à la bonne franquette et on trouve vite une solution : Martine et Gérard s’assoiront côte à côte et partageront une assiette de service.
Ils partageront ensuite le reste de leur vie.
Bien racontée, cette histoire pourrait être tout aussi intéressante que celle de Roland – elle a en tout cas été plus productive –, mais je ne l’ai entendue qu’une seule fois. Mes frères et mes soeurs ne la connaissaient pas.
Gérard et Martine se fréquenteront donc, avec la bénédiction d’Hormisdas, pendant cinq longues années qui n’ont, semble-t-il, laissé aucun souvenir dans la mémoire de ma mère puisqu’elle ne nous en a jamais parlé. Si je n’avais pas trouvé une photo d’eux en tenue de skieurs, je n’aurais jamais su qu’ils prenaient parfois le train du Nord pour aller dans les Laurentides. Je me rappelle lui avoir posé des questions à ce sujet après lui avoir montré cette photo et n’avoir rien obtenu de plus qu’une réponse expéditive. Je lui aurais présenté une vieille publicité de gruau qu’elle aurait été plus émue.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 janvier 2018
Nombre de lectures 1
EAN13 9782764434277
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Du même auteur chez Québec Amérique
Adulte
Idées noires , 2017.
Toute une vie sur les bancs d’école , 2016.
Ostende , coll. Littérature d’Amérique, 1994 ; coll. QA compact, 2002 ; coll. Nomades, 2015.
Nowhere man , coll. Tous Continents, 2013.
À deux pas de chez elle , coll. Tous Continents, 2011.
Voyeurs, s’abstenir , coll. Littérature d’Amérique, 2009.
Vous êtes ici , coll. Littérature d’Amérique, 2007.
Mélamine Blues , coll. Littérature d’Amérique, 2005.
Adieu, Betty Crocker , coll. Littérature d’Amérique, 2003.
Fillion et frères , coll. Littérature d’Amérique, 2000 ; coll. QA compact, 2003.
Je ne comprends pas tout , coll. Littérature d’Amérique, 2002.
Vingt et un tableaux (et quelques craies) , coll. Littérature d’Amérique, 1998.
Miss Septembre , coll. Littérature d’Amérique, 1996.
Les Black Stones vous reviendront dans quelques instants , coll. Littérature d’Amérique, 1991.
Jeunesse
Au nom de la loi ! – Tout plein d’histoires avec des bandits, des policiers, des lois et des juges , 201 7 .
La Vraie Vie , coll. Titan+, 2016.
L’Étrange Pouvoir de Léo Langelier , coll. Bilbo, 2015.
Bienvenue à Wawa ! – Tout plein d’histoires sur les noms des lieux , 2014.
Lazare Vollant , coll. Magellan, 2014.
Arthur Prophète , coll. Magellan, 2014.
Le Guide du tricheur 2 – L’École , 2013.
Granulite , coll. Bilbo, 1992 ; nouvelle édition, 2013.
Drôles d’écoles ! – Tout plein d’histoires avec des écoles , 2013.
Cocorico ! – Tout plein d’histoires qui parlent des langues , 2013.
• FINALISTE, PRIX DU LIVRE JEUNESSE DES BIBLIOTHÈQUES DE MONTRÉAL
Le Guide du tricheur 1 – Les Jeux , 2012.
Schlick ! – Tout plein d’histoires avec des mots , 2012.
Hò , coll. Titan+, 2012.
• PRIX ALVINE-BÉLISLE 2013
• FINALISTE, PRIX DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL 2012
• Finaliste, Prix du livre jeunesse des Bibliothèques de Montréal
La Cagoule , coll. Titan+, 2009.
Lola superstar , coll. Bilbo, 2004.
Kate, quelque part , coll. Titan+, 1998.
Le Match des étoiles , coll. Gulliver, 1996.
Guillaume , coll. Gulliver, 1995.
• MENTION SPÉCIALE : PRIX SAINT-EXUPÉRY (FRANCE)
Série Klonk
12 titres parmi lesquels :
Klonk contre Klonk , coll. Bilbo, 2004.
Le Testament de Klonk , coll. Bilbo, 2003.
Série Sauvage
Sauvage , série regroupée, 2010.
6 titres parmi lesquels :
Sales Crapauds , coll. Titan, 2008.
Les Horloges de M. Svonok , coll. Titan, 2007.


Projet dirigé par Marie-Noëlle Gagnon, éditrice

Conception graphique et mise en pages : Claudia Mc Arthur
Révision linguistique : Jean-Sébastien Bourré et Line Nadeau
Photographie en couverture : gracieuseté de François Gravel, adaptation par Anouk Noël
Conversion en ePub : Marylène Plante-Germain

Québec Amérique
7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) Canada H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010

Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L’an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l’art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.



Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Gravel, François
La petite fille en haut de l’escalier
ISBN 978-2-7644-3425-3 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-3426-0 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3427-7 (ePub)
1. Gravel, François - Famille. 2. Mères et fils. 3. Écrivains québécois - 20e siècle - Biographies. I. Titre.
PS8563.R388Z46 2018 C843’.54 C2017-941117-9 PS9563.R388Z46 2018

Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2018
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2018

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés

© Éditions Québec Amérique inc., 2018.
quebec-amerique.com




À mes frères et sœurs, qui ont vécu, chacun à leur façon, la même histoire, et à l’enfant que j’étais.


1
Maquillage
J’ai deux ans, pas plus. L’âge où on marche encore d’un pas hésitant dans son pyjama à pattes antidérapantes et où on voudrait déjà courir. Je joue dans ma chambre lorsque j’entends ma mère qui m’appelle depuis le salon. Je me dirige aussitôt vers elle. J’ai alors une vision d’horreur : une inconnue à la peau noire se trouve dans la pièce. Comment se fait-il que cette femme me parle avec la voix de ma mère ? L’aurait-elle mangée ?
Apeuré, je me réfugie en courant dans ma chambre, où je pleure à chaudes larmes.
Quelques instants plus tard, j’entends à nouveau la voix maternelle. Je retourne vers le salon, plein de confiance, mais le cauchemar continue : ce n’est pas ma mère qui m’a appelé, mais cette même étrangère à la peau noire. C’est à n’y rien comprendre et je me réfugie une fois de plus dans ma chambre, où je pleure de plus belle. Et ça recommence, encore et encore, et je réagis chaque fois de la même façon, parce que j’ai deux ans et que je ne sais pas faire autrement.
Le problème, c’est qu’il ne s’agit pas d’un cauchemar. Ma mère se rend à un bal masqué. Elle s’est barbouillé le visage de cirage à chaussures et s’est coiffée d’un fichu pour ressembler à une négresse, comme on le disait alors. Elle s’est sans doute inspirée de l’image qu’on voit sur les boîtes de préparation pour crêpes Aunt Jemima.
Trouvant ma réaction très drôle, elle recommence jusqu’à ce que mon frère aîné, qui a une douzaine d’années et qui ne voit pas ce qu’il y a d’amusant à faire pleurer un enfant, la supplie d’arrêter.

Je n’ai évidemment aucun souvenir de cette histoire, que j’ai reconstituée à partir de ce que mon frère m’a raconté, quarante ans plus tard. Ce frère avait parfois tendance à fabuler, mais j’ai de bonnes raisons de croire qu’il disait vrai, ce jour-là. Pourquoi diable aurait-il inventé cela ? J’ai d’ailleurs toujours éprouvé une profonde répulsion pour le rouge à lèvres et pour le maquillage outrancier des dragqueens et des clowns. J’ai alors compris d’où venait cette aversion.
Mon premier réflexe, étrangement, a été de prendre la défense de ma mère : les notions de psychologie étaient rudimentaires, à cette époque, elle ne croyait sans doute pas mal faire, et cætera.
J’ai longtemps eu ce genre de réflexe. Je ne l’ai plus aujourd’hui.


2
Cent ans
Cette femme, ma mère, vient de mourir.
Au terme de sa vie, elle ressemblait étrangement à un bébé naissant : ses muscles étaient atrophiés et sa tête, sur laquelle ne poussaient plus que quelques cheveux épars, paraissait énorme. Comme elle était presque toujours recroquevillée en position fœtale, on aurait dit une virgule.
Elle ne parlait plus, ne distinguait plus ce qu’on lui écrivait en grosses lettres sur du papier, n’entendait plus rien de ce qu’on lui disait et ne lisait plus sur nos lèvres. Pendant les derniers jours, c’est à peine si elle réussissait à ouvrir une paupière, l’espace de quelques secondes. Il lui arrivait alors d’esquisser des semblants de sourires, mais on ne savait pas si elle nous reconnaissait vraiment et cet effort l’épuisait. Elle levait parfois le bras, ultime geste de quelqu’un qui se noie et demande de l’aide.
L’extraordinaire énergie dont elle avait fait preuve pendant toute son existence se résumait maintenant à la minuscule flamme d’une veilleuse, cachée je ne sais où et qui la maintenait en vie.
Cette flamme s’est éteinte le 21 août 2016. Elle avait cent ans, huit mois et des poussières.
Personne ne devrait être obligé de vivre aussi longtemps.


3
Willie
Cette histoire commence un siècle plus tôt, en 1915, pendant la Grande Guerre.
Edmond William Robillard, le père de ma mère, est épicier, mais il ne tire pas un grand profit de son commerce. Les hommes de la famille Robillard, nous dira souvent notre mère, ne sont pas doués pour les affaires et celui que tout le monde appelle « Willie » l’est sans doute encore moins que les autres. Son épouse, Marie Lachapelle, accomplit par contre son devoir de bonne catholique avec une efficacité

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