Pierre Gassendi : Le voyage vers la sagesse (1592-1655)
219 pages
Français

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Pierre Gassendi : Le voyage vers la sagesse (1592-1655) , livre ebook

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Description

Figure centrale de la République des Lettres, Pierre Gassendi a souvent été réduit au rôle du rival malheureux de Descartes ou du philosophe sans système. Cet ouvrage présente pour­tant un savant passionnant, à la pensée riche et complexe, que la pratique et l’éthique de soi ont mené sur le chemin de la connaissance et de la sagesse.
En se penchant sur les choix poétiques et discursifs de Gassendi, l’auteure met en avant l’actualité de sa pensée, proche de nos questionnements sur notre rapport aux émotions, à notre corps ou à la nature. Elle tente par ailleurs de saisir sa pensée dans son ensemble, à la fois dans ses dimensions scientifique et spirituelle, sans chercher à opposer ces deux aspects. Ce faisant, elle montre le lien particulier qui s’établit entre vérité, savoir et raison au xviie siècle et la manière dont se racontait alors le métier de savant et de penseur – Gassendi empruntant, quant à lui, la voie de la conversion.
Judith Sribnai est professeure adjointe au Département des littératures de langue française de l’Université de Montréal.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 septembre 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782760637955
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

PIERRE GASSENDI
Le voyage vers la sagesse (1592-1655)
Judith Sribnai
Les Presses de l’Université de Montréal
Mise en pages: Yolande Martel Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Sribnai, Judith Pierre Gassendi; le voyage vers la sagesse (1592-1655) (Espace littéraire) Comprend des références bibliographiques. Publié en formats imprimé(s) et électronique(s). ISBN 978-2-7606-3793-1 ISBN 978-2-7606-3794-8 (PDF) ISBN 978-2-7606-3795-5 (EPUB) 1. Gassendi, Pierre, 1592-1655. 2. Philosophie française – 17 e siècle. I. Titre. II. Collection: Espace littéraire. B1887.S64 2017   194   C2017-940945-X C2017-940946-8 Dépôt légal: 3 e trimestre 2017 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2017 www.pum.umontreal.ca Cet ouvrage a été publié grâce à une subvention de la Fédération des sciences humaines de concert avec le Prix d’auteurs pour l’édition savante, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).
Table des matières
REMERCIEMENTS
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE
ITINÉRAIRES
CHAPITRE 1
«Nous arriverons bientôt au bout du rouleau»
Les chemins du savoir
Les vies de savants
Épicure
Peiresc
CHAPITRE 2
La conversion volontaire
Philosopher librement
La relation pédagogique
Admirer les grands hommes
L’exemple
Le prince
La conversion par la science
Géographies
Géographies intérieures
L’événement
CHAPITRE 3
«À force de dépenses, de veilles, de peine»
La passion du savant
Le temps du commentaire
DEUXIÈME PARTIE
EXILS
CHAPITRE 4
«Je renonce absolument à tout»
«Au milieu de la ville et presque comme à l’extérieur»
La citadelle
«À l’écart de tout vacarme mondain»
Le sacerdoce du sage
Vita activa, vita contemplativa
«Abandonner la vérité aux dieux et aux enfants des dieux»
D’Aristote au scepticisme
«Combien est toujours vaste le domaine du doute et de l’incertitude»
L’écorce des choses
Des polyphonies savantes
L’orgueil ou le péché du savant
La paix des sages
Les voix du savoir
CHAPITRE 5
Rappeler d’exil l’espace des Anciens
L’oubli et la succession
Les paradoxes de l’actualité savante
Le nouveau par l’ancien
TROISIÈME PARTIE
RETOUR
CHAPITRE 6
Étudier la nature
Dædala rerum
Les canons: «la vérité de l’existence se donne»
Le langage de la nature
Les mathématiques
L’astrologie
L’emploi des mots
CHAPITRE 7
«Autant qu’un guetteur, un chasseur de la nature»
Le lecteur et le physicien
Mercure et l’astronome
Toute l’économie du corps
chapitre 8
Le philosophe, le savant, le sage
Plutôt le nom de sage que celui de philosophe?
Le nouveau philosophe
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Œuvres de Pierre Gassendi
Ouvrages cités
Autres titres de la collection «Espace littéraire»


Les hommes qui veulent sincèrement penser ressemblent souvent au ver à soie, qui accroche son fil à toutes choses autour de lui, et ne s’aperçoit pas que cette toile brillante devient bientôt solide, et sèche, et opaque, qu’elle voile les choses, et que, bientôt, elle les cache; que cette sécrétion pleine de riche lumière fait pourtant la nuit et la prison autour de lui; qu’il tisse en fils d’or son propre tombeau, et qu’il n’a plus qu’à dormir, chrysalide inerte, amusement et parure pour d’autres, inutile à lui-même. Ainsi les hommes qui pensent s’endorment souvent dans leurs systèmes nécropoles; ainsi dorment-ils, séparés du monde et des hommes; ainsi dorment-ils, pendant que d’autres déroulent leur fil d’or, pour s’en parer.
  Ils ont un système, comme on a des pièges pour saisir et emprisonner. Toute pensée ainsi est mise en cage, et on peut la venir voir; spectacle admirable; spectacle instructif pour les enfants; tout est mis en ordre dans des cages préparées; le système a tout réglé d’avance. Seulement, le vrai se moque de cela. Le vrai est, d’une chose particulière, à tel moment, l’universel de nul moment. À le chercher, on perd tout système, on devient homme; on se garde à soi, on se tient libre, puissant, toujours prêt à saisir chaque chose comme elle est, à traiter chaque question comme si elle était seule, comme si elle était la première, comme si le monde était né d’hier. Boire le Léthé, pour revivre.
Alain , Les Marchands de sommeil
Une fois qu’on lui demandait à quelle fin il avait été engendré, il répondit: «Pour observer le soleil, la lune et le ciel».
Diogène Laërce, «Anaxagore», II, 10


REMERCIEMENTS
L’aide du Conseil de recherches en sciences humaines a été particulièrement précieuse et m’a permis de me consacrer à ce travail.
Je tiens à remercier chaleureusement Lucie Desjardins pour m’avoir encouragée à écrire ce livre et pour m’avoir soutenue et guidée tout au long de sa rédaction.
J’aimerais également adresser ma très grande reconnaissance à tous les membres du Centre de recherche interuniversitaire en sociocritique des textes pour leur générosité intellectuelle, leur infatigable enthousiasme et leur indéniable sens de la fête. Ils ont été les premiers à écouter et à éprouver les thèses de ce livre.
Un immense merci à Sylvie Taussig qui a partagé avec moi son intérêt pour Gassendi, ainsi que son savoir et son érudition. D’une manière ou d’une autre, elle a été présente tout au long de ma réflexion.
Toute ma gratitude va à mes relecteurs et à ceux qui ont toujours témoigné d’une imperturbable confiance: Jean-Pierre et Christiane Sribnai, Anne Bertrand, Marjorie Dennequin, Sara Harvey, Élise Revon-Rivière, Cécile Poletti, Bernabé Wesley.
Enfin, toutes mes pensées à l’incroyable Julian Menezes, Socrate moderne s’il en est.
LISTE DES ABRÉVIATIONS
DM  Recherches métaphysiques (Disquisitio metaphysica )
LF  Lettres familières
LL  Lettres latines
LP  Lettres à Peiresc
OO  Opera omnia
PA  Dissertations en forme de paradoxes contre les aristotéliciens (Exercitationes paradoxicæ)
PP  Préliminaires à la physique
VP  Vie de Peiresc


INTRODUCTION
Jouir d’un ciel plus libre, plus lumineux, plus humain.
Gassendi , Lettres latines
Malgré les importantes études qui lui ont été consacrées, Pierre Gassendi (1592-1655) est encore peu ou pas connu, non seulement du grand public mais aussi des spécialistes de l’Ancien Régime. Voilà un philosophe qui appartient définitivement à un autre temps. C’est peu dire qu’il souffre de l’envahissante prédominance de Descartes dans l’imaginaire occidental. Les deux hommes avaient peu en commun, se sont opposés sur presque tout, et il faut reconnaître à Descartes un sens de l’à-propos qui l’a certainement aidé à devenir une figure emblématique, et un peu monolithique, de la pensée et du sujet modernes. L’intérêt des dernières décennies pour les auteurs dits «libertins» a sans doute redonné à Gassendi quelque notoriété parmi les dix-septièmistes, littéraires et philosophes. Son nom apparaît fréquemment au côté de ceux de Cyrano de Bergerac, La Mothe Le Vayer, Naudé, Saint-Évremond ou La Fontaine. Mais, l’effet de lecture peut être trompeur car on est alors tenté de faire passer la foi de Gassendi au second plan, ou de la prendre comme un voile prudent jeté sur des idées séditieuses. Enfin, pour l’histoire des sciences, il reste certes une personnalité importante, mais qui a eu le tort de ne rien inventer et d’avoir la réputation de n’être pas bon mathématicien, deux caractéristiques qui lui laissent peu de chance face aux impératifs de l’historiographie contemporaine.
Pourtant, à beaucoup d’égards, Gassendi me semble incroyablement proche de nos préoccupations et de nos inquiétudes actuelles. Soucieux de ne pas trahir la complexité du monde et de l’être, il ménage une place essentielle aux émotions, aux passions et à la singularité de chaque corps dans la compréhension de ce que nous sommes. Tout individu, irréductible au genre humain, est un composé de chair et d’esprit, une mémoire fragile mais tenace, un fragment, éphémère et minuscule, du monde. Émerveillé par le foisonnement complexe et inépuisable de la nature, le philosophe aspire à la comprendre, non par volonté de la dominer ou de l’exploiter mais par désir de célébrer sa beauté et de rendre hommage à son créateur. Pédagogue, il s’interroge sur la manière dont on peut renoncer à l’autorité, transmettre des connaissances et des pratiques, tout en faisant retour à des philosophes anciens qui ont, eux aussi, passionnément cherché à mieux vivre. Dans sa recherche et son intérêt pour la nouveauté, il réfléchit aux conditions d’élaboration d’un savoir qui n’est jamais une œuvre solitaire mais un ouvrage collectif et infini. Pour toutes ces raisons, Gassendi est un penseur qui nous est sûrement plus familier qu’il n’y paraît au premier abord. On peut expliquer de plusieurs manières le relatif oubli dans lequel il est tombé, alors même qu’il fut de son vivant un personnage visiblement important et respecté 1 . De façon générale, Descartes a été l’arbre cachant la forêt des philosophes du XVII e siècle 2 . Plus spécifiquement, les ouvrages de Gassendi sont souvent fort touffus, écrits dans un latin difficile, lardés de nombreuses références ce qui en rend l’accès mal-aisé. Ces caractéristiques, cependant, relèvent en partie d’un choix rhétorique et éthique qui me paraît essentiel. Les traductions et les études récentes dont Gassendi a fait l’objet, la curiosité renouvelée pour un siècle moins univoque qu’il ne semblait, nos interrogations présentes sur le rôle des sciences et la transmission des savoirs finiront peut-être par venir à bout de cet isolement.
Dans ses textes théoriques comme dans sa correspondance, Gassendi raconte souvent comment il travaille, il dit le difficile et répétit

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