Napoléon à Moscou
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Napoléon à Moscou , livre ebook

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Description

En 1812, Napoléon est à la tête de la plus grosse armée qu’il ait jamais rassemblée. Il ouvre les hostilités contre le tsar Alexandre Ier, avec qui il a pourtant conclu une alliance. Un de ses ministres se désespère :« L’Empereur est fou ; tout cela finira par une épouvantable catastrophe. » Pourquoi cette décision ?Il pensait l’emporter vite. Mais il lui fallut avancer, avancer encore, jusqu’à Moscou. Et c’est une ville déserte, en proie aux flammes, que découvrit la Grande Armée. Avait-il les moyens de triompher ? Qu’est-ce qui a déterminé l’enchaînement des événements : la volonté ou le hasard ?Napoléon a fasciné et ne cesse de fasciner. Même la retraite, loin de l’anéantir, a révélé son exceptionnelle aptitude à tirer parti de l’adversité. C’est sa capacité de réaction à l’épreuve, sa volonté de la surmonter et sa faculté de redémarrer que montre ici Anka Muhlstein. Anka Muhlstein est historienne, écrivain, biographe. Elle a notamment publié Elisabeth d’Angleterre et Marie Stuart ou les périls du mariage, Reines éphémères, mères éternelles et Victoria.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 septembre 2007
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738191298
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE 2007
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
EAN 978-2-7381-9129-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Pour Isabella, Henri et, un peu plus tard, pour Julien.

Avant-propos

« Voulez-vous que je vous dise la vérité […] ? L’Empereur est fou, tout à fait fou, [il] nous jettera tous tant que nous sommes cul par-dessus tête, et tout cela finira par une épouvantable catastrophe. » Ainsi s’exprimait l’un de ses ministres juste après que Napoléon se fut lancé, en juin 1812, à l’assaut de la Russie, avec laquelle il avait pourtant conclu une alliance, en 1807, par le traité de Tilsit. À la bataille comme en politique, depuis les premières victoires, les beaux jours d’Arcole ou du coup d’État du 18 brumaire, toute sa carrière avait été fondée sur des défis audacieux. Mais, cette fois, obnubilé par sa lutte contre la Grande-Bretagne, à laquelle il voulait couper tout appui, il s’engageait au mépris de deux données qu’il connaissait mal : la volonté du tsar Alexandre et la loyauté de ses sujets. Pour qu’il gagne la partie, l’une devait chanceler et l’autre faillir avant que l’hiver n’arrive. On sait ce qu’il advint.
Voici l’histoire de cette campagne de Russie sur laquelle depuis près de deux siècles on ne cesse de débattre. Pourquoi Napoléon s’est-il embarqué dans cette folle entreprise ? Avait-il les moyens de triompher ? Qu’est-ce qui a déterminé l’enchaînement des événements : la volonté ou le hasard ? La politique de retrait des Russes fut-elle une stratégie ou simplement une nécessité ? La défaite nous semble rétrospectivement prévisible : qu’en était-il réellement pour les acteurs ? S’explique-t-elle par le caractère de Napoléon ou bien par les aléas du climat ? Et pourquoi l’Empereur prit-il la décision de rentrer, alors que l’occupation de Moscou lui avait tant coûté ? Pourquoi ce revirement, chez un homme qui jusqu’alors s’était montré sourd aux avertissements ? La retraite, d’ailleurs, de sinistre mémoire, fut-elle vraiment un renoncement ou bien le vrai coup de génie de l’Empereur dans cette catastrophe quasi annoncée ?
Napoléon ne fut ni le premier, ni le dernier à se lancer dans une guerre sans issue, dans un pays où ses intérêts vitaux n’étaient pas menacés et contre un peuple dont il ne savait rien. Il ne fut pas le seul général d’une armée surpuissante à être vaincu. Nous en avons vu bien des exemples dans un passé récent, nous en voyons encore aujourd’hui. Mais, si le personnage continue à fasciner, c’est que sa réaction à l’épreuve, sa volonté de la surmonter et sa capacité à la transformer sont uniques. En ce sens, cette campagne et ses suites sont particulièrement révélatrices de ses limites à ce point de sa vie, et aussi de son aptitude saisissante à rebondir.
Mais revenons au début de l’été 1812, vingt après la première guerre révolutionnaire. Six cent mille hommes s’apprêtaient à passer le Niémen : c’était la plus grosse armée jamais déployée par celui qu’on pouvait considérer comme le plus grand chef de guerre de l’époque et peut-être de tous les temps.
I
La plus grande armée du monde

Napoléon ne croyait guère en l’équilibre des pouvoirs. Le pouvoir absolu l’intéressait davantage : aussi l’immense accroissement de sa puissance en Europe continentale n’assouvit-il pas son ambition. L’Angleterre demeurait hors d’atteinte. La faiblesse de sa flotte interdisait à l’Empereur toute attaque directe. Mais il lui restait, du moins le croyait-il, l’arme économique. Il imagina de contraindre le continent européen entier à refuser toute marchandise venue d’Angleterre et à interdire toute exportation en sa direction. Il ne s’agissait plus de protéger l’industrie française, il s’agissait de ruiner la Grande-Bretagne. Dans ce système, la neutralité n’existait pas : un port ouvert était un port ennemi. Sa réussite dépendait donc de l’accord unanime de l’Europe. Or l’alliance russe, scellée en 1807 par le traité de Tilsit, lui permettait en sorte de boucler presque entièrement le continent. En théorie.
Dans la réalité, le blocus se fit de plus en plus poreux. On supportait mal, même en France, la privation des cotonnades, de toutes les denrées coloniales – café, thé, sucre, cacao ou épices – transportées d’Afrique ou des Indes par les bateaux anglais. La corruption des douaniers, la prolifération des contrebandiers firent le reste. D’après Mollien, le ministre du Trésor public, 100 000 contre-bandiers opéraient sur la très longue étendue des frontières de l’Empire, défendues par 20 000 douaniers dont les postes étaient connus de tous. Les marchandises passaient en France, en Hollande, dans les ports hanséatiques. Le trafic avec l’Espagne et le Portugal demeura actif pendant toute la période. La Russie, ne pouvant pas survivre à la perte de ses échanges avec la Grande-Bretagne – essentiellement la vente de bois –, les reprit ouvertement à partir de 1810. La pression sur le Tsar était telle qu’il redoutait en restant fidèlement dans l’orbite de Napoléon d’y perdre son trône. Napoléon réagit en ouvrant les hostilités en juin 1812 contre Alexandre I er . Imaginait-il pouvoir effectivement fermer les ports russes au commerce ? Cette guerre, entreprise malgré l’inquiétude évidente des notables et l’hostilité de la bourgeoisie d’affaires, entrait dans la logique du Blocus continental, un système implacable et absurde qui entraîna la France à faire la guerre à la Grande-Bretagne dans les steppes russes tout en proclamant son attaque justifiée par la nécessité de refouler les Russes « dans leurs glaces afin que de vingt-cinq ans, ils ne viennent pas se mêler des affaires de l’Europe civilisée 1  ». À Caulaincourt, il avoua qu’il « ne poursuivait que l’Angleterre 2  ».
 
Un homme réfléchi n’ouvre pas les hostilités sans préparatifs diplomatiques. Napoléon ne faisait pas exception à la règle, mais malgré ses succès en Europe centrale il ne put isoler la Russie avant de l’attaquer. Il pouvait compter sur l’alliance de l’empereur d’Autriche, dont il avait épousé la fille, Marie-Louise, en 1810, après son divorce d’avec Joséphine de Beauharnais ; la Prusse désarmée pliait devant lui et la réorganisation d’une poussière de principautés allemandes lui était favorable, en revanche, ses forces avaient été battues au Portugal et Wellington, le commandant en chef du corps britannique, demeurait toujours aussi menaçant en Espagne. De plus, l’attitude hostile de la Suède et la rupture d’anciens liens avec la Turquie favorisaient la Russie. Il restait donc à Napoléon sa redoutable réputation de chef de guerre et l’espoir que le puissant instrument de guerre qu’était la Grande Armée ferait trembler Alexandre. Et sur le papier l’armée paraissait effectivement formidable.
L’armée mise sur pied par Napoléon en 1812 était considérable : plus de 600 000 hommes dont plus des deux tiers passèrent le Niémen du 22 au 26 juin 1812. Les forces d’invasion furent divisées en trois blocs : l’ensemble le plus important comptait 250 000 hommes, en majorité français, et constituait l’armée du Centre placée sous le commandement direct de l’Empereur. Ses flancs étaient protégés par deux armées auxiliaires : au nord, 70 000 soldats allemands et polonais, sous les ordres du frère cadet de l’Empereur, Jérôme, roi de Westphalie, et au sud 50 000 Italiens et Bavarois confiés à son beau-fils, Eugène de Beauharnais, le fils de Joséphine. Napoléon tenait à mettre les hommes de sa famille au premier plan. Malheureusement, si Eugène se montra à la hauteur de sa tâche, Jérôme, le benjamin de la tribu Bonaparte, qui compensait sa nullité par une vanité, un orgueil et une ignorance démesurés, eut un rôle des plus néfastes avant d’abandonner son poste et de rentrer chez lui. Enfin, deux corps d’armée restaient en couverture : celui du maréchal MacDonald, rassemblant Prussiens et Polonais, et celui du prince autrichien Schwarzenberg, composé de ses compatriotes. Parmi les grands guerriers, Murat occupait une place particulière. Sa souveraineté – il avait reçu le royaume de Naples en 1808 – et ses liens de famille avec Napoléon, dont il avait épousé la sœur, Caroline, en 1800, lui donnaient la précéance sur tous les autres maréchaux. En 1812, il commandait toute la cavalerie. Ses qualités de meneur d’hommes, son courage insensé en faisaient le point de mire des vétérans et des jeunes recrues, des Français comme des étrangers. « La flamme guerrière [dont il était animé] se transmettait irrésistiblement à tout son entourage [et] exerçait sur l’armée entière une influence très profonde et très bienfaisante 3 . » À la tête de différents corps, on trouvait tous les capitaines légendaires parmi lesquels se détachaient le maréchal Davout, le plus accompli et le plus réfléchi de tous, et le maréchal Ney, « adoré de tout le monde pour sa simplicité et sa bonté de cœur sans compter que son origine alsacienne et sa connaissance de la langue allemande permettaient à tous ces Bavarois, Badois ou Westphaliens de le regarder un peu comme un des leurs 4  », avantage non négligeable dans cette armée dite des « Vingt Nations ».
1812 marquait le vingtième anniversaire de la première guerre révolutionnaire. Si, en 1792, la France, comprenait une énorme proportion de jeunes gens (la vaccination antivariolique avait eu des résultats démographiques immédiats en libérant la géné

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