La Révolution sida
77 pages
Français

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Description

Trente millions de personnes ont été tuées en trente ans par le virus du sida dans le monde. Cette épidémie n’en finit pas d’infliger la mort, mais depuis quinze ans, grâce aux traitements, aux trithérapies, de très nombreux séropositifs vivent presque normalement avec cette maladie devenue chronique. Le sida a tout perturbé, la science, la médecine, la politique, le domaine social et associatif, et a contraint la société française à se réformer au plus profond d’elle-même. C’est ce que raconte ce livre. Le combat contre cette maladie doit continuer car le virus, toujours aussi menaçant, n’a pas livré tous ses secrets. Et ceux qui le combattent doivent disposer des moyens nécessaires pour qu’un monde sans sida soit un jour possible. La révolution sida a tout bouleversé, beaucoup reconstruit, elle est toujours en marche. Hélène Cardin, Danielle Messager Hélène Cardin est journaliste. Passionnée par les sujets de santé, elle a dirigé la rubrique santé-médecine de France Inter pendant trente ans. Auteure de plusieurs ouvrages, son expertise l’amène aujourd’hui à participer à de nombreux colloques sur les problèmes liés à la santé. Danielle Messager est journaliste, grand reporter santé et spécialiste de ces questions sur France Inter, auteure d’un ouvrage sur la sexualité coécrit avec Hélène Cardin. avec la participation du Pr Françoise Barré-Sinoussi Françoise Barré-Sinoussi, colauréate du prix Nobel de médecine 2008 pour sa contribution à la découverte du virus du sida, est directrice de recherche de classe exceptionnelle à l’Inserm et professeur à l’Institut Pasteur, où elle dirige l’unité de régulation des infections rétrovirales. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 janvier 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738177858
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les auteures remercient l’association Aides et tout particulièrement Michel B OURRELLY pour ses connaissances, son extrême disponibilité et son accompagnement efficace.
© O DILE J ACOB , JANVIER  2013
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-7785-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Avant-propos  par le Pr Françoise Barré-Sinoussi  prix Nobel de médecine 2008

Il y a trente ans, une petite équipe de chercheurs et de cliniciens français, à laquelle j’appartenais, identifiait l’agent infectieux responsable du sida : un nouveau rétrovirus humain baptisé, quelques années plus tard, VIH.
À cette époque, bien que conscients de l’urgence sanitaire face à cette maladie mortelle jusqu’ici inconnue, nous étions loin d’envisager la violence avec laquelle l’épidémie de sida allait frapper et l’ampleur mondiale qu’elle allait prendre. Qui aurait pu imaginer les millions d’êtres décimés, l’impuissance du milieu médical, la détresse de ceux qui se savaient condamnés et de leur famille, les centaines de milliers d’orphelins, la honte et le rejet qui se sont installés autour de l’infection ? Personne. Les années les plus sombres du sida ont marqué chacun de nous d’une empreinte douloureuse et indélébile.
En même temps, nous étions loin d’imaginer l’extraordinaire élan de solidarité qui allait unir des milliers d’hommes et de femmes à travers le monde dans un même combat contre ce fléau. Chercheurs, cliniciens et personnels soignants, patients et leurs représentants se battent depuis trois décennies pour faire avancer la recherche, pour que tous et toutes accèdent aux traitements partout dans le monde, pour que cesse la stigmatisation des personnes séropositives, pour abolir toutes formes de dis-crimination à l’encontre de celles et ceux qui sont les plus -vulnérables face à l’infection. Au-delà d’être seulement une bataille contre un virus, la lutte contre le VIH est aussi une bataille pour l’avancée des Droits de l’homme.
 
Bien que le prix payé ait été très lourd, ce mouvement collectif a remporté de nombreuses batailles. Le combat est loin d’être gagné, mais nous avons aujourd’hui une certitude : un monde sans sida est possible. Si ce rêve est à portée de main, c’est grâce à l’engagement et à la détermination de tous ces hommes et ces femmes, connus ou anonymes, qui partout dans le monde ont élevé leur voix ou travaillé dans l’ombre. Ils ont tous contribué à construire, pas à pas, un monde meilleur faisant triompher la justice face aux inégalités et la raison, face à l’ignorance. Le sida a bouleversé le monde. La lutte contre le sida a révolutionné les sociétés.
Introduction

Le 5 juin 1981, une déflagration frappe le monde de la médecine ! L’agence épidémiologique d’Atlanta annonce au monde entier que cinq patients homosexuels, à Los Angeles, souffrent d’une pneumonie rarissime. Une maladie infectieuse qui très vite va se révéler mortelle. Dans la communauté scientifique, ils sont nombreux à ne pas y croire, ils ont des arguments : pendant plusieurs décennies, une véritable guerre a été menée contre les maladies infectieuses. La vaccination et les antibiotiques étaient le fer de lance de ces batailles et semblaient avoir vaincu ces maladies qui faisaient mourir. Pourtant, un an plus tard, des toxicomanes et des hémophiles ayant reçu des transfusions sanguines sont également contaminés. En France, les premiers malades, tous jeunes, sont hospitalisés et sont emportés en quelques semaines. La peur envahit la planète, la peur d’une épidémie.
Le virus coupable est isolé en 1983 à l’Institut Pasteur à Paris, dans une certaine indifférence ; il recevra plusieurs noms de baptême (LAV, VIH) dont celui que nous connaissons tous : le sida. Ce virus va se répandre rapidement, provoquant un véritable cataclysme dans les services qui prennent en charge les malades. Ses modes de transmission sont rapidement connus : le sang, les relations sexuelles et la transmission de la mère à l’enfant pendant la grossesse, l’accouchement et l’allaitement.
Mais en plus d’être une maladie transmissible, le sida est une maladie honteuse. En 1986, Thierry Le Luron, l’un des plus grands humoristes français, meurt, officiellement, d’un cancer des cordes vocales. Une explication fournie à la presse à la demande de la famille. Il a 34 ans. Son médecin, le cancérologue Léon Schwartzenberg, affirme, contre la rumeur, qu’il est mort d’un cancer et non pas du sida. Le Conseil de l’ordre le sanctionne pour avoir violé le secret médical. La véritable cause de la mort de Thierry Le Luron, le sida, ne sera révélée qu’en 2011, par son amie Line Renaud, au cours d’une émission de télévision.
Si en France, le virus tue quatre cents personnes en 1985, il en fera mourir dix mille chaque année dans les années 1990 contre mille cinq cents aujourd’hui, depuis la mise sur le marché des trithérapies. La région la plus touchée au monde est l’Afrique subsaharienne avec près de vingt-trois millions de personnes vivant aujourd’hui avec le virus du sida. Cette épidémie insoupçonnée s’y est répandue dans le silence alors que toute l’attention était braquée sur les pays du Nord. Elle a frappé cette région où vit un peu plus de 10 % de la population mondiale, mais qui regroupe 70 % des personnes séropositives du monde, dont une majorité de femmes.
En France, pour faire face à la menace de cette nouvelle maladie mortelle contre laquelle il n’existe aucun traitement, on assiste à une incroyable mobilisation. Une véritable résistance s’organise. Devant l’impuissance médicale, les associations de militants et de patients comme Aides, Act Up ou Sidaction s’imposent face au pouvoir médical. Elles affirment que la maladie appartient au malade, pas au médecin. C’est une première, qui a décidé de toutes les transformations qui ont été élaborées par la suite. Les révolutions se succèdent alors grâce et à cause de la lutte contre le sida. D’abord à l’hôpital qui accepte des malades différents ; la place des personnes malades est reconnue, la relation médecin-malade est bousculée, le médecin devenant un conseiller plus qu’un soignant. Ensuite, il a fallu construire une politique de réduction des risques pour les toxicomanes qui, très touchés, risquaient de transmettre le virus. Pour la première fois, ont été pensés et organisés la prise en charge de la douleur, les soins palliatifs, les groupes de parole pour les malades et pour leurs proches. Il a fallu prendre en charge les détenus infectés mais aussi les prostitué(e)s, les transsexuel(le)s, les migrants. On a inventé de toutes pièces le TRT-5, une cellule de réflexion sur les médicaments et leurs effets, regroupant face à face et coude à coude les militants des associations, les séropositifs et les représentants des laboratoires pharmaceutiques.
Cette maladie mortelle qui a tout perturbé a permis de tout réformer : des pans entiers de la médecine, de la recherche scientifique, de la vie associative, de la politique ont été ébranlés. Dans un engagement sans pareil, les acteurs se sont alors regroupés, ont réfléchi et ont construit quelque chose dépassant la prise en charge de la maladie. La lutte contre le sida a été le catalyseur du débat sur l’égalité des droits individuels donnant naissance au Pacs, mais aussi à la loi sur les droits des malades. La révolution sida a tout bouleversé, beaucoup reconstruit et est toujours en marche.
Chapitre 1
Le sida perturbateur  et réformateur scientifique

Prix Nobel de médecine
Françoise Barré-Sinoussi est au Cambodge ce 6 octobre 2008, comme si souvent, en pleine discussion, à l’Institut -Pasteur de Phnom-Penh, entourée de jeunes chercheurs cambodgiens qu’elle apprécie tant, et de Français, qui, comme elle, entretiennent cette transmission du savoir. Il est alors question des projets en cours. Soudain son téléphone sonne. Danielle Messager, journaliste de France-Inter, semble presque surprise de l’avoir au bout du fil : « Je ne pensais pas réussir à vous joindre, j’avais peur que la ligne soit en permanence occupée à la suite de cette grande nouvelle. — Pourquoi, quelle nouvelle ? » Françoise Barré-Sinoussi, un court instant, craint qu’il ne s’agisse d’une mauvaise nouvelle, d’ailleurs ceux qui l’entourent la voient pâlir et s’inquiètent. De Paris, la journaliste perçoit comme un flottement. « Comment, vous n’êtes pas au courant ? vous avez le prix Nobel de médecine ! » Dans la rédaction de France-Inter c’est la stupéfaction. C’est incroyable, elle avait oublié que c’était le jour de l’attribution du Nobel, elle n’y pensait même pas ! « Surtout, ne raccrochez pas, je vous passe en studio pour l’enregistrement. »
Danielle Messager court au studio, fébrile, pourvu que la ligne ne soit pas coupée ! L’excitation gagne la rédaction, il faut dire que Françoise Barré-Sinoussi n’y est pas inconnue. En dehors de sa réputation déjà bien établie, elle est l’épouse de Jean-Claude Barré qui était technicien du son à la radio… On a presque l’impression que c’est quelqu’un de la famille qui vient d’être honoré.
L’interview dure longtemps, à tel point que personne n’arrive à la joindre pendant un certain temps, ni le Comité Nobel, ni Alice Dautry, la directrice de l’Institut Pasteur.
Évidemment, fière d’obtenir cette distinction suprême, Françoise Barré-Sinoussi vit alors pleinement le sentiment d’apparte

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