Les Soins palliatifs en France : psychopathologie d une voix de l inaudible
518 pages
Français

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Les Soins palliatifs en France : psychopathologie d'une voix de l'inaudible , livre ebook

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Description

Dès sa création, le mouvement des soins palliatifs français s'est inspiré des initiatives anglaises et plus particulièrement d'une fondatrice : Cicely Saunders. À partir d'un refus de certaines pratiques, d'abandon des mourants ou de mésusage de médicaments pour provoquer la mort de façon active, le mouvement a pu formaliser ses principes tels que l'approche globale, l'humanisme et l'écoute de la singularité, ceci avec l'aide de groupes d'horizons divers, laïcs, religieux, ou encore des citoyens, non professionnels, concernés par ces questions hautement complexes de la fin de vie ou des maladies graves. Aujourd'hui, le défi central à venir se situe au niveau de la transmission et de l'intelligibilité du discours de la « philosophie palliative », discours qui peut parfois se rigidifier. Sans forcément le vouloir délibérément, une transformation s'opère en une doctrine qui peut soutenir une certaine version d'un « bien mourir », devenu normé et standardisé. Cette rigidification peut être analysée comme un retour de la dimension de refus qui a constitué le mouvement à sa base. En effet, d'un rejet des dimensions de gestion purement administrative et statistique de l'humain ainsi que de certaines logiques hospitalières, le questionnement identitaire à venir, pour le mouvement, se situe dans sa transformation vers deux horizons opposés : une opposition stricte à ces logiques ou une assimilation. Ces évolutions impliquent de s'intéresser de façon rigoureuse à ces dynamiques d'opposition, de transformation et d'assimilation, afin de mettre en lumière les enjeux invisibles de la voix du discours des soins palliatifs, au sein d'un contexte sociétal tourmenté et d'opinions instrumentalisées. Cette voix du mouvement des soins palliatifs français peut-elle se transformer d'un mouvement d'opposition vers un mouvement de proposition ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 septembre 2017
Nombre de lectures 14
EAN13 9782342156034
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0157€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les Soins palliatifs en France : psychopathologie d'une voix de l'inaudible
Benoist Fauville
Connaissances & Savoirs

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Connaissances & Savoirs
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Les Soins palliatifs en France : psychopathologie d'une voix de l'inaudible
 
Jury : Madame le Professeur Sophie de Mijolla-Mellor (Université Paris Diderot-Paris 7), Monsieur le Professeur Christian Hoffmann, Président (Université Paris Diderot-Paris 7), Madame le Professeur Marie-Frédérique Bacqué, rapporteur (Université de Strasbourg) Madame Marie-José Del Volgo MDC HDR, rapporteur (Université Aix-Marseille II)
Remerciements
Parce que ce travail traite de la Mort, mais que toute vie commence par l’Amour, voici différents témoignages d’Eros, d’Agapè, de Storgê et de Philia que j’adresse à ceux et celles qui ont croisé ma route dans cette aventure…
 
A Madame Sophie de Mijolla-Mellor, dont les richesses de l’œuvre et de l’esprit m’ont permis d’aiguiser le mien, par ses précieux conseils et sa constance bienveillante,
 
Aux membres du jury, Monsieur Christian Hoffmann, Madame Marie-Frédérique Bacqué et Madame Marie-José Del Volgo, pour leurs écrits et l’intérêt porté à ce travail de recherche, un intérêt manifesté par l’honneur de leurs présences,
 
A mes parents et à mes proches, qui en croyant en moi, m’ont permis d’y croire à mon tour,
 
A Jasmine, pour qui aucun mot ne saurait reconnaître la hauteur du soutien que tu m’as apporté, je me réserverai donc des actes pour transcrire fidèlement le retour que tu mérites,
 
A Alain Vernet, le pygmalion à qui j’espère faire honneur avec ce travail, ainsi qu’aux grandes orientations humanistes que tu m’as transmises,
 
A Isabelle pour sa relecture rigoureuse, son soutien et surtout son amitié… « Algunos tanto y otros tan poco »
 
Aux membres du Réseau Emeraude 58, pour leur compagnonnage constant de vérités et de doutes.
 
A tous les patients, proches et professionnels que j’ai eu l’honneur de côtoyer, ce travail c’est un peu leur rendre ce qu’ils m’ont apporté, dans l’espoir d’une amélioration des pratiques,
 
Aux étudiants du séminaire de méthodologie pour leur écoute attentive et leurs conseils,
Enfin, à l’Université Paris 7 et plus particulièrement l’Ecole Doctorale Recherches en Psychanalyse, dont l’organisation du cursus a permis à un psychologue « de province », en l’occurrence de la Nièvre, de bénéficier de la richesse et du rayonnement des enseignements, certes au prix de certains sacrifices personnels et de longs voyages en train, mais comme le dit l’adage : « Quand on aime, on ne compte pas ! »
A toutes et tous, Merci.
Prologue
La Société Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP) débutait le 18 juin 2014 à Montpellier son 20 e congrès sur le thème : À la croisée des tensions : du mouvement des soins palliatifs aux soins palliatifs en mouvement . Dans son discours d’introduction, le président de la SFAP, Vincent Morel, a pu expliciter cette thématique, plus particulièrement sur la notion de tension, en la reliant à la question du langage et à la diffusion de la philosophie du mouvement des soins palliatifs auprès du grand public et des gestionnaires politiques, par l’intermédiaire des médias. La question pourrait se formuler ainsi : Comment faire entendre et comprendre le discours porté par le mouvement ?
 
À ce titre, certaines faiblesses du mouvement des soins palliatifs ont pu être ciblées et le président de la SFAP, en tant que porte-parole incarnant la voix du mouvement, a notamment pu expliquer que des formations de « média trainings » sont actuellement effectuées par de nombreux acteurs de l’organisation. Cet enseignement vise à pouvoir transmettre de la façon la plus pédagogique possible le positionnement et les apports théoriques et cliniques de la « philosophie des soins palliatifs », pour que les grands médias tels que la presse ou la télévision puissent retranscrire fidèlement auprès du grand public les questions hautement complexes de la fin de vie, de l’euthanasie et du suicide assisté, toujours en lien direct avec des volontés politiques et des situations tragiques largement médiatisées. Cette question de la non-intelligibilité a d’ailleurs été reprise par Vincent Morel, lorsqu’il a évoqué au cours de son intervention qu’il serait « nécessaire de parler le même langage » et que les tensions surviennent le plus souvent sur les différences de conceptions et de définitions pour différentes notions communes. Nous songeons ici à la notion de dignité, devenue instrument de rhétorique pour justifier tout autant le fait de faire évoluer la Loi vers l’euthanasie, ou pour justifier de ne pas rompre l’interdit de tuer, fondateur de civilisations.
 
Sur cette question, de nombreux sondages récents ont pu montrer l’orientation du souhait des Français vers une législation plus ouverte, notamment en faveur d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté 1 . Ces sondages sont largement à mettre en perspective par d’autres études qui témoignent de la méconnaissance de ce que permet déjà la législation actuelle. En effet, 64 % des Français expriment avoir « entendu parler de la Loi Leonetti » 2 et donc 36 % disent n’en avoir « jamais entendu parler », 49 % « en avoir entendu parler mais ne pas savoir précisément de quoi il s’agit » et seuls 15 % du grand public indiquent « savoir précisément de quoi il s’agit ». Nous soulignons que dans cette étude, l’emploi des verbes « entendre » et « parler » n’est pas anodin pour l’angle d’approche de notre problématique. De plus, en ce qui concerne le personnel soignant, près de la moitié des professionnels interrogés exprime connaître la loi Leonetti, mais seulement 5 % connaissent le principe de collégialité des décisions, c’est-à-dire la réunion en équipe pluridisciplinaire pour aborder une situation complexe et orienter la prise de décision éthique. De plus, seuls 4 % des soignants interrogés connaissent le principe du « double effet » de l’article 2 de la Loi Leonetti 3 , pourtant voté en 2005, et qui permet d’administrer des antalgiques à un patient dans le but de le soulager, même si ce geste a pour effet secondaire d’abréger sa vie. 4 Sur cette question, nous insistons à nouveau sur la notion de « dignité de la vie humaine », instrumentalisée tant par les défenseurs de l’euthanasie que par ses opposants, ce qui conduit à une confusion de vocabulaire et plus tragiquement à une non-rencontre des arguments de part et d’autre, et donc à un débat peu fertile. Ceci se déroule malheureusement au détriment des principaux concernés, les plus fragiles, qu’ils soient accompagnants ou atteints d’une maladie grave.
 
Ces débats illustrent largement un questionnement qui traverse toutes les branches de la médecine à l’heure actuelle, compte tenu des progrès fantastiques de cette dernière et qui permettent de maintenir en vie, parfois au-delà du raisonnable : comment concilier une médecine de plus en plus technique, spécialisée et scientifique, avec une approche clinique, humaine, et qui comporte comme optique inhérente à sa constitution le respect du colloque singulier entre le soignant et le soigné ? Plus largement, sur cette question qui pourrait vite être réduite à une opposition simpliste entre objectivité et subjectivité et entre rationalisme et humanisme, c’est plus spécifiquement dans le rapport entre ces deux positions que l’éclairage peut être le plus fructueux, c’est-à-dire par la mise en perspective et l’interrogation des liens de dénonciation entre ces deux dimensions. En effet, le mouvement des soins palliatifs s’est fondé d’abord sur une révolte face au sort fait aux mourants, sur l’abandon de la médecine face à des patients incurables ou au contraire ceux dont le décès pouvait être accéléré par un mésusage de certains médicaments. À partir de cette révolte, de nombreux progrès ont été faits, notamment en matière de gestion de la douleur. Ces progrès, qui pourraient même être qualifiés de révolutions, ont potentiellement mis en avant le fait de privilégier une forme unique d’accompagnement, certaines pratiques bien déterminées, et en extrapolant, un certain scénario d’un « bien mourir », tout autant liberticide dans sa finalité que le fait de provoquer activement la mort. Le fait que la voix du mouvement des soins palliatifs soit inaudible auprès du grand public, comme relevé ci-dessus, est largement préjudiciable, non dans la certitude que ces pratiques puissent apporter un bénéfice certain aux patients, mais bien en amont, dans le fait que ces derniers puissent être informés et ainsi avoir le choix de bénéficier ou non des propositions et de juger en toute liberté des informations apportées. En effet, la moitié des patients qui aurait pu bénéficier d’un accès aux soins palliatifs n’ont pas rencontré d’équipes palliatives en réalité. En ce qui concerne les professionnels, il a pu être rappelé lors de ce congrès que le mouvement des soins palliatifs n’en était qu’à ses balbutiements en matière de présence dans les formations médicales : la formation des médecins en soins palliatifs se limite à une heure par an, ce qui représente une dizaine d’heures sur l’ensemble de leur formation, toutes thématiques confondues : gestion de la douleur, législation, dispositif d’annonce, soutien de deuil, etc.
 
Jacques Lacan soutenait que le discours est une forme de lien social, et c’est effectivement sur cette question que se concentrent très certainement de nombreux défis à venir pour le mouvement des soins palliatifs,

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