De l amour : Une philosophie pour le XXIe siècle
87 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

De l'amour : Une philosophie pour le XXIe siècle , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
87 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

« Ce que j’appelle la “révolution de l’amour”, c’est-à-dire la naissance de la famille moderne, enracinée dans le passage du mariage arrangé au mariage choisi par et pour l’amour, a transformé nos vies. Elle apporte un nouveau principe de sens, qui requiert une nouvelle philosophie. Elle ne bouleverse pas seulement nos existences privées, mais tout notre rapport au collectif. C’est ce que j’appelle le “deuxième humanisme”». Le premier fut un humanisme de la Loi et de la raison. C’était celui des Lumières et des droits de l’homme, des républicains français et de Kant. Le deuxième humanisme est un humanisme de la fraternité et de la sympathie. Ma conviction est qu’il est désormais la seule vision du monde portée par le souffle d’une utopie positive. Car l’idéal qu’elle vise à réaliser n’est plus celui des nationalismes ni de l’idée révolutionnaire. Il ne s’agit plus d’organiser de grands massacres au nom de principes mortifères qui se voulaient extérieurs et supérieurs à l’humanité, mais de préparer l’avenir de ceux que nous aimons le plus, c’est- à-dire des générations futures... » L. F.  Luc Ferry s’entretient ici avec Claude Capelier, agrégé de philosophie et conseiller scientifique du Conseil d’analyse de la société. Luc Ferry est agrégé de philosophie, docteur d’État, agrégé de science politique. Il est philosophe. Ses livres sont traduits à l’étranger dans une trentaine de langues. Il a notamment publié chez Odile Jacob Vaincre les peurs et Qu’est-ce que l’Homme ? (en collaboration avec Jean-Didier Vincent), qui ont été d’immenses succès. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 avril 2012
Nombre de lectures 13
EAN13 9782738179906
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB, AVRIL  2012
15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-7990-6
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Préface

La crise mondiale dans laquelle nous sommes plongés a accentué le sentiment que le cours du monde nous échappe, que les remèdes politiques, de gauche comme de droite, ne parviennent plus à embrayer sur la réalité, que les valeurs dont nous nous réclamons correspondent de moins en moins à nos façons de vivre. Nous ne pouvons pas continuer de nous abandonner à cette schizophrénie ou à cette mauvaise foi qui nous font penser le présent selon les idées d’hier, devenues manifestement obsolètes. L’objet de ce livre est d’abord de montrer pourquoi et comment ce long moment d’égarement est en train d’engendrer, sans que l’on en ait encore pris conscience, un nouveau principe de sens qui va nous permettre de reprendre barre sur notre destin, de redonner une cohérence à notre façon de voir le monde, de susciter des idéaux auxquels nous puissions croire ; il est aussi d’analyser les profonds changements qui en résultent concrètement dans les grands domaines de l’existence individuelle et collective : la famille, la politique, l’éducation, l’art.
Le discours public des valeurs républicaines (qui ne sont plus un enjeu de débat, parce que nous y adhérons tous, de l’extrême droite à l’extrême gauche) est maintenant à des années-lumière de nos préoccupations les plus essentielles (l’avenir de nos enfants, l’homme ou la femme de notre vie, l’avènement d’une société qui permette à chacun de s’épanouir pleinement). De là le face-à-face sans issue entre, d’un côté, des gouvernements qui multiplient les mesures les plus sophistiquées dont plus personne ne perçoit plus la finalité d’ensemble et, d’un autre côté, la colère, la peur, l’indignation dont sont saisies les populations.
Nous aurions mauvaise grâce à en rejeter la faute sur les seuls responsables politiques car chacun de nous est sujet à un symptôme identique au leur, qui nous pousse à défendre des principes qui ne correspondent plus à nos façons d’agir réelles. Les mêmes qui protestent chaque jour contre le miroir aux alouettes de la consommation changent d’i-Phone tous les six mois ; ceux qui prônent le retour aux blouses grises laissent leurs enfants s’afficher en tenue légère sur Facebook ; on ne jure que par le bio, mais on roule dans des berlines qui n’ont rien d’équitable. On appelle ça « assumer ses contradictions », façon conquérante de dire que nous n’assumons rien, sinon notre incapacité à choisir des idéaux avec lesquels nous serions véritablement en accord. Bref, nos représentations ne correspondent plus à la vérité de notre expérience intime, ce qui nous voue à un « faites ce que je dis, pas ce que je fais » généralisé.
Comment expliquer ce divorce ? Depuis plus d’un siècle et demi, les arts, la philosophie, nos mœurs n’ont cessé de libérer, puis de valoriser, des dimensions de l’existence humaine jusque-là oubliées, marginalisées ou réprimées : la sexualité, l’inconscient, la part de féminité des hommes ou de masculinité des femmes, l’enfance, l’animalité, la nature en nous. Baudelaire n’est pas le premier à s’être « emmerdé comme un rat mort », mais il a été le premier à en faire un art, à révéler toute la richesse, l’authenticité, la liberté de l’imagination qui peut se déployer dans ces moments de spleen . Il nous a ouvert ainsi un champ dont nous sommes tous les héritiers. De la Première gorgée de bière de Philippe Delerm aux chansons de Bénabar, du week-end au Center Park au « droit de ne pas être une mère parfaite », nous n’en finissons pas de recycler son œuvre pour le meilleur et pour le pire. À l’issue de ce mouvement, paradoxalement relayé et amplifié par le capitalisme mondialisé alors qu’il se voulait radicalement antibourgeois, les valeurs privées sont devenues la source principale des valeurs publiques. Touts les grands idéaux qui donnaient un sens à la vie (Dieu, la Patrie, la Révolution) sont aujourd’hui fragilisées en Europe ; l’amour est désormais la seule valeur à laquelle nous croyons tous sans réserve. C’est pourquoi l’éducation, la santé, l’assistance aux personnes dépendantes, la préservation de la planète pour les générations futures et, plus généralement, toutes les initiatives propres à favoriser la pleine réalisation de chacun sont devenues des thèmes centraux du débat politique.
Le problème, justement, c’est que les grands cadres de compréhension de la vie collective dont nous disposons ne prennent pas en compte cette part devenue décisive de nos existences. Le libéralisme pas plus que le socialisme ou le nationalisme n’intègrent la vie privée dans la dynamique de la vie publique. Au contraire, même, ils la rejettent par principe hors de la sphère politique. Bien entendu, cela partait du souci, qui demeure légitime, de garantir la pleine autonomie de la sphère privée en la soustrayant à l’emprise abusive des pouvoirs publics. Aujourd’hui, cependant, c’est au mouvement inverse qu’il faut faire droit, puisqu’il est patent qu’une part croissante des enjeux collectifs est inspirée par de nouvelles attentes communes qui plongent leurs racines dans la convergence des aspirations individuelles. Cela oblige à reconnaître que l’on a eu tort de limiter la politique à la seule gestion des intérêts, alors que les passions y ont toujours eu une part déterminante. Il aurait suffi de bien lire Shakespeare pour s’en rendre compte.
Autrement dit, nous sommes dans une de ces époques charnières, rares mais décisives, où nos cadres de compréhension, nos repères culturels, désormais périmés, ne nous permettent plus de nous orienter dans le cours des événements, moins encore de le réorienter efficacement, et qui appelle une profonde métamorphose de nos perspectives sur l’existence.
Quand j’ai rencontré Luc Ferry, il y a plus de vingt ans, nous nous sommes immédiatement… engueulés ! Sur à peu près tous les sujets : l’art moderne, l’éducation, la politique… Je voulais absolument qu’on donne tout leur sens à ces formes nouvelles d’existence qui sont désormais au cœur de nos vies, quand il était d’abord soucieux d’intégrer ces nouveautés dans une reformulation « non métaphysique » de l’humanisme qui en préserve les acquis indépassables. En tout cas, nous étions d’accord sur le fait que nous ne pouvions pas en rester là et que les philosophies disponibles ne pouvaient plus suffire, soit parce qu’elles tombaient sous le coup des objections de Nietzsche ou de ses successeurs, soit parce qu’elles conduisaient à un double discours permanent consistant par exemple à critiquer radicalement l’idée qu’il puisse y avoir des valeurs morales, tout en traitant son voisin de salaud.
Depuis, nous sommes devenus les meilleurs amis du monde. Au fil de milliers d’heures de discussion, j’ai vu s’esquisser peu à peu une philosophie qui, je le dis comme je le ressens, permet non seulement de dépasser nos oppositions, mais surtout d’apporter une réponse à notre besoin de disposer d’une pensée qui éclaire vraiment le monde actuel et le cœur même de la vie que nous y menons. Comme nous n’étions ni l’un ni l’autre de mauvaise foi, les expériences humaines sur lesquelles nous appuyions nos raisonnements avaient toutes une part de vérité. Dès lors, le but de la conversation n’était pas de l’emporter sur l’autre grâce à un argument « sans réplique », mais de comprendre la raison de nos différends.
J’ai maintenant le sentiment que Luc Ferry, dans ses derniers livres, est parvenu à développer une philosophie tout à fait originale, fondée sur un principe nouveau, qui nous donne un accès beaucoup plus direct et profond à l’expérience du monde qui est aujourd’hui la nôtre. Pour la première fois depuis des décennies, pour ne pas dire un bon siècle, il propose même un fondement et une façon de le développer, qui permet de construire un véritable système philosophique, c’est-à-dire une manière de donner une véritable cohérence à la diversité de nos expériences, donc de donner un sens d’ensemble à notre vie.
Certes, on peut toujours rétorquer que l’on est pragmatique et que l’on n’a que faire des « idées » : pourquoi pas, en effet ? Sauf que rien n’est plus illusoire que cette affectation de pur réalisme : l’expérience prouve que ceux qui prétendent s’en tenir là n’arrêtent pas, contrairement à ce qu’ils affirment, de nous dire « ce qu’il faut en penser », à ceci près qu’ils nous resservent des « idées reçues », dont nous avons vu, justement, qu’elles ne nous disent plus rien de fécond. À l’inverse de ce que beaucoup imaginent, la philosophie ne sert pas qu’aux philosophes, ni même principalement à eux. Quand Descartes a construit une philosophie fondée sur le seul « bon sens », « la chose du monde la mieux partagée », et sur le fameux « je pense donc je suis », il a fourni un cadre qui, jusqu’à la Révolution française, a libéré des générations dont les ancêtres avaient longtemps errés, sans savoir s’ils devaient s’en remettre aux commandements de l’Église, à ceux du Prince, aux pensées d’Aristote, aux exigences de la tradition, aux volontés du père ou à leur libre volonté : il suffit de lire les pièces de Molière pour voir comment les amours des personnages peuvent être entravées par ces conflits de légitimité. En ce sens, tout le monde a profité de Descartes, même ceux

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents