L Argent
132 pages
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L'Argent , livre ebook

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Description

« Aujourd’hui plus qu’hier encore, l’argent gouverne en maître. J’ai voulu comprendre pourquoi. J’ai cherché et me suis lancé sur les traces de cette énigme. L’argent, on l’adore et on le maudit tout à la fois. J’ai découvert le règne de l’argent fou, de l’argent roi, de l’argent dieu. Et aussi un secret que, vers la fin, je me hasarde à délivrer. » J.-C. C. Une grande enquête, riche et documentée, où le talent de l’écrivain se conjugue au souffle du pamphlétaire. Scénariste, dramaturge, écrivain, Jean-Claude Carrière est l’auteur de grands succès comme Einstein, s’il vous plaît, Fragilité, Tous en scène. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 janvier 2014
Nombre de lectures 3
EAN13 9782738172723
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

©  O DILE J ACOB, JANVIER 2014 15, RUE S OUFFLOT, 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-7272-3
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
S OMMAIRE
Couverture
Titre
Copyright
Des livres, pour commencer un livre
À la cote
Longue marche d’un futur dieu
L’argent vend de l’argent
Habileté
Être visible ou ne pas être
Le vin des riches
Un membre de la famille
Un ami très cher
Mais l’ami masquait une idole
Infaillible ?
Premier intermède
Pieuvre ou fourmi
Vers la transcendance
Usages antiques
Et modernité
Les mots de Shakespeare
Le centre serait-il partout ?
Être – et paraître – riche
Accusé, aussi
Insulté, même
La question des pauvres
Une classe dite moyenne
Le malheur des riches
La conquête des âmes
D’un paradis l’autre
Une théologie de l’argent
L’argent, valeur morale
Loin du mensonge
Un conseil au mendiant
La vraie richesse
La honte des pauvres
D’abord l’emploi
Premières banques
Tout commence avec des fleurs
On spécule à Paris
Les dévoyés
Un bel outil dans l’ombre
Des regrets ?
En tout cas des anathèmes
Un peu d’histoire
Dangers de la fortune
Premières invectives
Et premiers compromis
Apparition (publique) des misérables
Fourier, Proudhon et le troisième
La grande offensive marxiste
Le capitalisme, enfant sans père ?
L’argent garde son calme
Réclame et banknotes
Terres neuves
L’argent at home
Une image pieuse
À l’est du nouveau
Le siècle terrible
Le vagabond du monde
Économie de guerre
Un nouvel idéal
L’argent entre deux blocs
Une autre voie ?
Made in ailleurs
Du jetable au déchet
L’argent coupable ?
Une large victoire
Un effondrement
Quelle crise ?
Une araignée sur ses fils
L’argent devenu fou
Le temps des requins
Un nouveau langage
L’avenir de l’argent (quand il en avait un)
Une alerte venue de l’Est
Le flash krach du mois de mai
Trois (ou quatre) petites notes
Respirer dans le noir
Dictateurs fortunés
La surprise chinoise
En Europe, un nouveau venu
Les secrets des monnaies
L’argent travesti
Petites nouveautés
Du noir au blanc
Où seront cachés les trésors de demain ?
Quel avenir pour nos banques ?
Une autre parenthèse
À quoi on joue ?
Infréquentable ?
La faute à pas de chance
Un autre argent ?
Réalité de la fiction
Et le profit ?
Un avenir nomade ?
L’aveuglement inévitable
Enfin la crise
Les économistes au créneau
Entre deux conclusions
Toujours croître
Du surnaturel en cachette, à l’anglaise
L’autre parole
Une porte étroite ?
Le plus dur à dire
Je crois, parce que c’est absurde
L’argent rengaine
Assis au bord de la mer
Pas fou
Cherche sept planètes
Le nouveau péché originel
Quelle confiance ?
Bénéfices réconfortants
La rumeur
La fatale nouvelle
Oraisons funèbres
Post mortem
Comme une étoile morte
Regrets pour une absence ancienne
Autopsies et prophéties
In memoriam
Du même auteur chez Odile Jacob
Je suis perdu dans une ville inconnue. Je demande mon chemin à un passant. S’il est un habitant de cette ville, s’il connaît le quartier, il me renseigne à la va-vite, avec quelques gestes. Il le fait selon ses propres repères, et je suis de nouveau perdu.
S’il s’agit d’un étranger, d’un touriste, qui a pris soin de consulter un plan avant de se lancer dans les rues de la ville, il me renseigne avec précision (s’il est aimable) et je trouve alors mon chemin.
Ce livre s’adresse aux voyageurs perdus dans la vaste cité de l’argent, pleine de souterrains, d’impasses, de buildings élevés, de circuits inconnus, de ruelles étranges. Ils y rencontreront un autre voyageur, au départ tout aussi égaré qu’eux-mêmes, mais qui s’est efforcé de se renseigner. Il leur fournira, à leur demande, quelques détails pittoresques sur les détours du labyrinthe et même, sait-on jamais ?, le récit d’une aventure fabuleuse à laquelle ils n’avaient peut-être jamais pensé.
Des livres, pour commencer un livre
Gérard Oberlé, écrivain, libraire et ami, me disait il y a peu : « Le temps de la bibliophilie, que nous avons bien connu toi et moi, est révolu. Nous n’en conserverons que la nostalgie. Un beau livre, rare et recherché, que j’achetais cinq mille francs il y a quinze ans, je le paie aujourd’hui – ou je le vends –, dix mille, quinze mille euros et plus, parfois beaucoup plus. »
Autrement dit, il est passé, le temps des amateurs. Jadis, et même encore naguère, un médecin, un professeur, un ouvrier dans certains cas, pouvait se constituer, en trente ou quarante ans, une belle et très enviable bibliothèque. Il y fallait de la patience, de l’argent méticuleusement mis de côté chaque mois, ou presque, et aussi, comme il est normal, des connaissances, des préférences et du goût. Mais cela se rencontrait assez fréquemment. À l’hôtel Drouot, de temps à autre (de plus en plus rarement, à vrai dire), nous voyons encore « se disperser » la collection de tel ou tel bibliophile, souvent un notable de province, mort depuis peu. Elle nous étonne, elle nous semble souvent admirable, singulière, l’œuvre secrète et patiente d’une vie. Jamais ces ouvrages n’avaient été rassemblés en un seul endroit, par un seul individu, et plus jamais ils ne le seront.
Cette activité culturelle, que nous faisons remonter en Europe au XVI e ou au XVII e  siècle (mais dans d’autres traditions, iranienne ou chinoise par exemple, l’amour du beau livre, ou du manuscrit, sont certainement plus anciens – et que savons-nous du goût des Romains pour tel ou tel volumen illustré ?), est désormais perdue.
Tout « beau livre », rare et forcément cher (cher parce que rare, c’est la règle admise), est aujourd’hui une proie guettée par les fonds d’investissement, que ceux-ci soient publics ou privés – surtout privés. Un nouveau négoce s’est établi en une trentaine d’années, où le seul critère est désormais le prix ; un prix qui doit être élevé – sinon le livre ne vaut rien, ne représente rien, quel qu’en soit le propos –, et qui doit aussi se montrer susceptible, après toute une série d’opérations de mise en valeur, de monter encore et encore, jusqu’à des sommets inviolés.
Cela constitue désormais un réseau complexe, une bourse des livres rares où les amateurs d’autrefois n’ont plus accès, faute de moyens. Porte close. Adressez-vous à un autre niveau. Ici, seuls les riches peuvent acheter.
Et ils n’achètent pas pour lire.
Lentement, silencieusement, subrepticement, en un avatar inattendu, l’argent s’est emparé du domaine – longtemps discret, bien élevé, réservé, secret même – de la bibliophilie, c’est-à-dire de l’amour déclaré, souvent irraisonnable, qu’un petit nombre d’individus éprouvaient pour quelques bons et beaux livres, ces livres-là. « Exem plaire désirable et recherché, nous disait-on, en parfait état, dans sa première reliure, d’une belle provenance », et quelquefois même : « Exemplaire unique. » Arrachés aux rayons de noyer verni des bibliothèques particulières d’autrefois, souvent spécialisées, que nous nous plaisions à visiter, ces exemplaires gisent désormais dans les coffres des banques.
Là, invisibles, tapis, oubliés, ils attendent d’être revendus, le plus cher possible. Métamorphosés, ils sont devenus des placements, des valeurs marchandes. Ils ne sont plus ce qu’ils croyaient être – des livres.
Si j’avais les moyens, naguère, d’acquérir, par exemple, une édition originale de Madame Bovary dédicacée par Flaubert à Victor Hugo (je rêve), je pouvais avoir l’impression, en tenant cet exemplaire unique entre mes mains, d’être entré, comme par effraction, dans une intimité plus étroite, d’être le troisième côté d’un triangle sans égal. J’étais presque assis entre l’auteur du livre et son prestigieux lecteur. Ils me parlaient, et je les écoutais. Flaubert se demandait : « Est-ce qu’il va me lire ? Et s’il me lit, me répondra-t-il ? Pour me dire quoi ? » Et je voyais Hugo ouvrant l’enveloppe et murmurant : «  Madame Bovary , c’est qui encore, celle-là ? »
Aujourd’hui, ce même exemplaire serait tout simplement coté. Il aurait un prix, il n’aurait plus d’âme.
 
Dans ce territoire tenu à l’écart, où quelques centaines de personnes à peine, dans le monde, entretenaient depuis des siècles une relation sentimentale et personnelle, jalouse, maniaque même, avec la beauté d’un texte, d’une illustration, d’une impression, d’une reliure, d’une dédicace autographe, l’argent a tout avalé. Dédaignant la diversité des attirances, qui caractérise toute forme de culture, il a ramené ces différentes qualités à leur seule valeur commerciale. Elles lui sont désormais asservies.
Je le vois parfaitement en ce qui me concerne. Lorsque je rencontre, dans le catalogue d’un libraire ou dans celui d’une vente publique, un exemplaire qui eût pu me séduire vingt ans plus tôt, il est fixé à un prix de vertige, qui me paraît irrationnel, totalement inconnu dans le passé. L’ouvrage s’est placé hors d’atteinte, intouchable. Il s’est définitivement coupé de moi. Il ne s’achète plus comme livre mais, en fin d’enchères, comme simple objet de spéculation.
Donc, je passe. Je referme avec tristesse le catalogue, en me disant, une fois encore, que ce temps-là n’est plus ; et que probablement il ne reviendra pas.

À la cote
Nous étions préparés à cette disparition, déjà, depuis plusieurs dizaines d’a

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