Sciences et Réalité
164 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Sciences et Réalité , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
164 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Les sciences nous font-elles vraiment découvrir la réalité des choses ? Se contentent-elles d’observer impartialement le monde et de nous le donner à voir ? Ou bien le construisent-elles de toutes pièces dans leurs laboratoires, pour nous forcer ensuite à y croire ? Poursuivant son étude de la rationalité scientifique, Gilles Gaston Granger aborde de front ces questions qui sont au cœur du débat soulevé par la critique post-moderne. En analysant ce qui se passe en logique, en mathématiques, en physique et en économie, il en vient à une autre question : et si la réalité scientifique n’était qu’un mode d’accès à un certain type d’objets, bel et bien réels ?Gilles Gaston Granger est professeur honoraire au Collège de France. Il a publié, aux Éditions Odile Jacob notamment, La Vérification, Le Probable, le possible et le Virtuel et L’Irrationnel.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2001
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738175410
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1200€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© ODILE JACOB, JANVIER 2001
15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS
ISBN  : 978-2-7381-7541-0
www.odilejacob.fr
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Sommaire
Couverture
Titre
Copyright
Préambule
Introduction
De l’être au réel : le réel, concept moderne
L’Être platonicien et la réalité
Aristote : l’être, la logique et l’existence
Leibniz : les possibles et le réel
Les sciences formelles et la réalité
Chapitre premier - L’objet logique et le réel
La proposition logique
La logique combinatoire
Enrichissement de l’objet logique : individus et prédicats
Enrichissement de l’objet logique : modalités
Chapitre 2 - Calcul logique et réalité
Les trois techniques du calcul logique
Le calcul intuitionniste
Métapropriétés des systèmes et réalité
Note sur les logiques paraconsistantes et sur la théorie catégoriale des topoi
Chapitre 3 - Les réalités mathématiques
Décidabilité et complétude
Comment saisit-on les objets mathématiques ?
Comment sont produits les objets mathématiques
Permanence des objets mathématiques et progrès
Les sciences de la réalité empirique
Chapitre 4 - Monde empirique et réalités scientifiques : le monde physique
Science et qualités sensibles
La mise en forme « mécanicienne » du réel par la science
La mise en forme probabiliste du réel physique par la science
Chapitre 5 - Le réel technique
Qu’est-ce qu’un objet technique ?
Le passage des techniques pré-scientifiques aux applications de la science
Réalités techniques et savoir scientifique
Les deux fonctions de l’objet technique : énergie et information
Chapitre 6 - Le réel et les sciences de l’homme
La réalité statistique des faits humains
La réalité structurale des faits humains
La réalité clinique des faits humains
La réalité historique
L’imagination conceptuelle
Chapitre 7 - Penser des monstres
Les « Chimères »
Le paradoxe de Banach-Tarski
Les ensembles étranges produits dans une logique para-consistante
Chapitre 8 - Systèmes et réalité
Réalité systémique des objets formels
Réalité systémique et objets empiriques
Conclusion pour un réalisme bien-tempéré
Bibliographie
Index
Préambule
Introduction

1. Qu’il appartienne à la nature de la science de viser la réalité, c’est une thèse — ou une hypothèse — qui ne prend évidemment sens que par l’examen de la question : que convient-il d’entendre, dans ce cas, par « réalité » ? Tel sera le but de cet essai, donner une réponse à la question ainsi posée 1 en cherchant à préciser ce que signifie le réel pour la connaissance scientifique, telle qu’elle s’est constituée de nos jours. Disons, pour résumer déjà une des conclusions de notre étude, que cette réalité visée par la science, si elle apparaît bien comme transcendante à l’acte de connaître et donc d’une certaine manière comme découverte , n’en est pas moins explicitée et d’une certaine manière produite par la science. Tel est le mystère qu’il faudrait éclaircir d’un réalisme bien tempéré. Le réel visé par la science est , mais on ne saurait dire que ses configurations sont déjà là, qu’il suffirait de mettre au jour. L’œuvre de la science est donc à la fois de formuler ces configurations, de les construire, et de les penser . C’est-à-dire de les situer, de les mettre en perspective dans une expérience plus large. Car la science pense. Qu’est-ce donc pour la science que penser ? Nous commencerons par cette question notre cheminement, car penser signifie ici, pour l’essentiel, quoiqu’en diverses manières, confronter une connaissance au réel. Distinguons de ce point de vue, sous une forme très générale, plusieurs aspects majeurs de cette activité de penser.
 
2. Penser, pour la science, c’est d’abord représenter l’expérience en symboles . Nous entendons par là des figures matérielles mais abstraites de leurs contenus sensibles, susceptibles de renvoyer à des objets ou à des activités. Ces figures sont donc abstraites en ce que leur substrat sensible, leur signifiant, est totalement ou partiellement neutralisé en tant que tel, au profit de sa fonction de renvoi, indéfinissable fondamental. Établir des fragments d’expérience sensible comme symboles , et discerner assez clairement les fragments d’expérience auxquels ils renvoient, c’est en cela que consiste d’abord, au sens le plus large et le plus vague, la pensée. Une pensée scientifique exige seulement plus d’abstraction dans la figuration des signes, et une précision plus contrôlée dans la désignation des objets et des actions signifiées. C’est justement l’exercice de cette exigence dans l’institution des univers symboliques de représentation de l’expérience qui fait que la science est véritablement pensée , et non pas seulement enregistrement d’images.
 
3. Un autre aspect de la connaissance scientifique est qu’elle consiste pour une bonne part à suivre des règles . Elle est en ce sens encore pensée . Mais on en manquerait un caractère essentiel si l’on ne remarquait qu’elle consiste aussi à échapper à des règles préétablies, à en créer de nouvelles, à figurer des exceptions. Certes l’obéissance à des règles est bien l’une des marques de la connaissance scientifique comme pensée, par opposition à une démarche incertaine et divagante. Mais c’est aussi penser , et dans une acception plus forte encore peut-être, que de pouvoir en certaines occasions refuser la règle et la violer. Une facette importante du progrès scientifique se révèle justement comme conséquence de tels écarts. Suivre, violer, créer des règles en vue d’une représentation de l’expérience c’est assurément donner au réel visé un sens partiellement normatif. La science, à différents niveaux d’élaboration et dans différentes espèces de l’expérience, établit et impose des règles de représentation qu’elle peut bien paraître subir, mais qu’en fait elle domine, parce qu’elle les juge et les pense.
 
4. Cette activité de pensée se manifeste encore par la détermination de critères de validité pour la connaissance qu’elle propose. Validité qu’établissent des conditions de démonstration dans les sciences d’objets formels, des conditions de systématisation et de vérification dans les sciences d’objets empiriques. Nous essaierons de montrer que, dans l’un comme dans l’autre cas, cette validation définit la confrontation à une réalité.
Expliciter le sens commun de ces réalités concomitantes, telle est l’une des tâches de la philosophie des sciences, qui contribue à lui valoir son titre de philosophie , en tant qu’interprétation et justification de cette expérience spécifique, et en quelque manière de second degré, qu’est l’œuvre de science comme pensée du monde, au sein de l’expérience humaine prise comme totalité. Si philosopher c’est s’interroger sur la signification pour nous de ce que nous faisons, éprouvons, pensons, on ne peut philosopher sur la science sans s’interroger sur la manière dont la science expose et en un sens constitue une réalité. Mais la tâche du philosophe concernant le réel de la science doit être fondamentalement distincte de la tâche propre de la science, qui décrit et explique en représentant par des schémas abstraits le réel. Une philosophie de la science dévoile, et organise si possible en un système, les significations de l’œuvre de science en tant que représentation d’une réalité. Il serait alors juste de dire que cette philosophie est pour une part l’explicitation de ce qui, dans la science, est pensée , et que peut masquer quelquefois l’édifice même de représentations qu’elle construit.
Le plan que nous allons suivre commencera par un préambule historique, qu’on pourrait à tort croire hors sujet : le problème du réel tel que nous l’entendons n’est pas posé vraiment dans la philosophie antique. C’est un problème qui n’est guère présent en ce sens moderne avant Leibniz . La notion actuelle de réalité, étant ainsi historiquement située, nous diviserons notre étude en trois sections. La première : « pensée formelle et réalité », concernera la logique et la mathématique, la seconde : « réalité et sciences empiriques », concernera les sciences du monde physique et les sciences du monde humain. Dans la troisième : « l’imagination conceptuelle », on tentera plus particulièrement de mettre en vedette le moment imaginatif de la science dans sa constitution d’un réel.

1 . Et déjà envisagée dans un ouvrage antérieur, Le Probable , le possible et le virtuel , Odile Jacob 1995, où se trouve exposée l’opposition du virtuel et de l’actuel.
De l’être au réel : le réel, concept moderne

Remarquons cependant tout d’abord que le problème moderne : qu’est-ce que le réel ? n’est pas posé en ces termes par les deux grands philosophes classiques Platon et Aristote . La question, héritée sans doute de Parménide , est alors très généralement exprimée par eux sous la forme : qu’est-ce que l’Être ? Leur vocabulaire ne comporte pas, à vrai dire, d’équivalents exacts du mot « réalité » de nos langues. L’expression qui sans doute recouvrirait le mieux notre sens serait formée justement à partir de mots signifiant l’Être, mais aussi de mots signifiant la vérité 1 . C’est ainsi que, dans Le Sophiste* , Platon , pour faire dire à l’étranger d’Elée que ce qui est vrai est « réellement existant », use de la périphrase ὁντως ὀν. Dans le même passage*, pour dire que l’image n’est pas un être

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents