Dérives sectaires

Renaud Leblond

Description

Mort du révérend Moon, arrestation du dernier membre d’Aum, découverte d’une secte souterraine en Russie… L’actualité ne cesse de nous le rappeler : loin de s’essouffler, les mouvements sectaires et à leur tête les gourous embrigadent toujours plus de victimes. Ces dernières années, de nouvelles formes de dérives sectaires, plus sournoises, se développent dans le monde de l’entreprise et de la santé. Ces gourous nouvelle génération exploitent l’engouement de nos sociétés pour le coaching et les thérapies alternatives. Avec des résultats aussi dramatiques que leurs prédécesseurs : suicides, dépressions, familles brisées par des accusations mensongères…

Une nouvelle façon d'aborder cette douloureuse question toujours d'actualité. C'est à la fois très pédagogique et très profond. – Irène Frain

Sujets

• Philosophie et théologie
• Religión
• Manipulation
• Gourou
• Secte

Informations

• Publié par: StoryLab Editions
• Date de parution: 14 septembre 2012
• Nombre de lectures: 3
• EAN13: 9782363150912
• Langue: Français

Extrait

Dérives sectaires : Les nouveaux gourous
Renaud Leblond
ISBN 978-2-36315-197-1

Septembre 2012
Storylab Editions
30 rue Lamarck, 75018 Paris
www.storylab.fr
Les ditions StoryLab proposent des fictions et des documents d'actualit lire en moins d'une heure sur smartphones, tablettes et liseuses. Des formats courts et in dits pour un nouveau plaisir de lire.

Table des mati res

Le mot de l’éditeur
Avant-propos de l'auteur
L’adepte, le groupe et le gourou
Les grandes étapes de l’emprise sectaire
Prison mentale
Dans la nébuleuse de l’ego
Ces faux souvenirs induits
Néochamanisme et dérives hallucinatoires
« Esclaves heureux »
Annexes
Cinq histoires qui ont défrayé la chronique
En bref
Pour aller plus loin
Lexique
Biographie
Dans la m me collection
Le mot de l’éditeur
Le 3 septembre 2012 disparaissait le révérend Moon, l’archétype même du gourou : mégalomane, autoritaire, milliardaire. Moins médiatiques, mais tout aussi préoccupants, de nouveaux gourous à la tête de microstructures infiltrent le monde de l’entreprise et de la santé, au nom de la religion très en vogue du développement personnel. Ils exploitent l’engouement pour le coaching et les thérapies alternatives, causant des dégâts considérables : dépressions, familles brisées à la suite d’accusations mensongères proférées, suicides…

En s’appuyant sur l’expertise de spécialistes et de nombreux témoignages, Renaud Leblond décrit avec précision le mécanisme de l’emprise sectaire et révèle les nouveaux dangers d’un phénomène en pleine évolution.
Avant-propos de l'auteur
En décembre 1995, Jean Vuarnet, ancien champion olympique de ski, perdait sa femme Edith et son fils Patrick dans le brasier de l'Ordre du Temple Solaire. Quelques semaines plus tard, avec Henri Haget, je l'aidai à rédiger son livre, Lettre à ceux qui ont tué ma femme et mon fils , (éd.Fixot). Le récit d'une longue descente en enfer... « Le moment est venu, disait-il, de m'adresser aux salopards qui ont assassiné Edith et Patrick, ou qui les ont poussés à se donner la mort, c'est pareil. Peu importe les circonstances exactes de leur départ. Il nous les ont volés ». Quinze ans plus tard, les gourous, ces marchands de chimères, experts en love bombing – « bombardement d'amour » – continuent à exploiter la moindre faille, le moindre signe de détresse chez les autres. Pour ensuite les ruiner, les isoler, les détruire. Avec ce document, j'ai voulu revenir sur cette mécanique d'emprise implacable, en détailler les étapes, les méthodes, les évolutions les plus récentes. Une sorte de manuel de vigilance.

Renaud Leblond
L’adepte, le groupe et le gourou
Pourquoi et comment entre-t-on dans un mouvement sectaire ? Tous les anciens adeptes témoignent d’un besoin énorme de mieux-être physique ou psychologique. La plupart d’entre eux ont cherché à répondre, à un moment critique de leur existence, à des angoisses pesantes, à un sentiment de vide et d’extrême souffrance. Plus qu’une recherche de spiritualité, c’est un profond malaise qui s’exprime alors. Beaucoup ont connu des moments de grande fragilité : décès d’un proche, déménagement, séparation, divorce, chômage, etc. À ces prédispositions individuelles s’ajoutent un grand désir de progrès personnel et une forte propension à faire confiance. Voilà pour le profil… Un profil qui transcende tous les milieux sociaux et fait de la majorité d’entre nous, un jour ou l’autre, une cible potentielle. L’entrée dans un mouvement sectaire, c’est la (mauvaise) rencontre entre un individu désorienté et un groupe prétendant apporter – enfin – la réponse tant attendue. Un soulagement qui prend la forme d’une « illusion groupale » : plus les rituels sont coûteux et les initiatives sévères, plus l’attrait pour le groupe est fort !

À ce sentiment d’appartenance au groupe, qui vient briser parfois des années de solitude et de doute, s’ajoute un besoin de s’en remettre tout entier à un leader. De se soumettre à un autre, imaginé comme grand et possédant la vérité. C’est l’entrée en scène du gourou, « la figure par excellence du père, que l’on peut suivre aveuglément » selon l’expression de Nathalie Luca, chercheuse au CNRS. La personnalité du leader, souvent torturée, peut être à la fois extrêmement chaleureuse, ce qui le rend très attachant, et particulièrement dure. Le leader se présente sous les traits d’un homme au savoir et aux pouvoirs exceptionnels. Il affirme avoir la capacité d’emmener ses disciples sur la voie de l’accomplissement, pendant et après la vie terrestre. Il dit entretenir une relation inédite avec le monde invisible, un privilège qu’il est prêt à partager avec tous ceux qui sauront le mériter.
Au sentiment d’appartenance au groupe s’ajoute un besoin de s’en remettre tout entier à un leader, imaginé comme grand et possédant la vérité.
L’adepte a alors l’impression d’être choisi par le gourou pour ses qualités propres : son engagement et sa force spirituelle. Il sort enfin de la masse du commun des mortels et se perçoit, avec fierté, comme un être supérieur. Protégé du doute et délivré de sa conscience par son rapport de servilité au leader, il balaie ses angoisses existentielles. C’est le début d’une emprise perverse qui le mènera à l’abdication de toute pensée personnelle, de tout esprit critique, à l’abandon du soin apporté à sa santé, son corps et son alimentation, et au renoncement à tous ses liens antérieurs.
L’adepte est-il dupe des objectifs réels du gourou ? « Dans la plupart des cas, observe la psychanalyste Anne-Lise Diet, il a une perception assez juste de la folie délirante du leader et de l’irruption d’un réel sordide... » Et pourtant, l’adepte persiste et signe. Difficile, en effet, de remettre en question ce qui a déjà tant coûté.

Un des gourous les plus célèbres est sans doute Raël, alias le Français Claude Vorilhon. Originaire du Puy-de-Dôme, l’homme a fait tous les métiers : pilote automobile, journaliste sportif, chanteur… Un parcours de touche-à-tout motivé par le seul désir de faire parler de lui. Le 13 décembre 1973, pourtant, il franchit un cap qui assure définitivement sa notoriété. Ce jour-là, dit-il, il rencontre, au Puy-de-Lassolas, près de Clermont-Ferrand, un extraterrestre qui lui explique les origines de la vie sur terre. À lui, Claude Vorilhon ! Deux ans plus tard, en octobre 1975, il raconte que d’autres extraterrestres, les Elohim, l’ont emmené sur une planète située à 9 000 milliards de kilomètres de la Terre. Là-bas, il a croisé Bouddha, Moïse, Mahomet et Jésus-Christ, « maintenus scientifiquement en vie en attendant de revenir un jour sur Terre ». Les Elohim lui ont expliqué comment ils ont conçu la vie en laboratoire. Ils lui ont révélé également que l’humanité sera bientôt anéantie par un conflit nucléaire mondial. Seuls les non-violents et ceux qui auront contribué au progrès de l’humanité seront sauvés… Celui qui se fait désormais appeler Raël relaie le message à ses amis terriens. Il fait construire une ambassade pour pouvoir accueillir des délégations d’Elohim. Raël devient le rempart contre l’apocalypse, le seul lien avec l’au-delà. La rumeur se répand sur ses pouvoirs surnaturels et son aura dépasse très vite les volcans d’Auvergne. L’écrivain Michel Houellebecq s’offrira même un stage d’immersion chez Raël avant d’écrire La Possibilité d’une île …
En échange de sa protection, Raël exige que ses adeptes reversent 10 % de leurs revenus à l’organisation. Une taxe à laquelle s’ajoute un 1 % patronal au bénéfice exclusif du gourou. À ces demandes financières exorbitantes s’ajoutent, selon Dominique de Saint-Hilaire, ex-adepte du mouvement auditionnée par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, des pratiques de « méditation sensuelle ». Prônées par Raël, elles ont éveillé la vigilance des institutions chargées de lutter contre les dérives sectaires. En 1997, Raël crée l’ordre des « cordons dorés », composé exclusivement de jeunes femmes à son service. Dominique de Saint-Hilaire affirme que Raël fait signer à ces élues un contrat au terme duquel elles ne peuvent refuser ses avances, sauf à être rétrogradées.

Manipulateur et dictatorial, le gourou ne supporte ni les obstacles ni les contradictions. Il accuse de traîtrise au premier soupçon. Il redoute les ambitions de ses lieutenants. Le leader de la secte n’est pas plus libre que ses fidèles. Il est, lui aussi, pris au jeu de