Le Dilemme de la continuité et de la discontinuité
62 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Le Dilemme de la continuité et de la discontinuité , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
62 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

La pensée de Michel Foucault est souvent présentée comme une pensée discontinuitiviste, comme si la discontinuité était le seul thème administrant son travail. En étudiant ce que Foucault, lui-même, pouvait commenter à ce propos et en examinant de près son travail, nous pouvons constater que la discontinuité n'est pas le seul thème administrateur de son travail, et nous pouvons y trouver en abondance des images de continuité temporelle. Bien que, parfois, Foucault accorde un privilège à la discontinuité temporelle, ces images ne reflètent en aucun cas une quelconque opposition aux continuités, qui se trouvent par ailleurs de manière récurrente dans son entreprise. Cette recherche montre donc en premier lieu que ces deux thèmes relèvent d'une complexité méthodologique dans la pensée de Foucault. Nous montrons comment ces thèmes sont engagés par Foucault, dans un rapport loin d'être négatif ou paradoxal mais qui instaure leur complémentarité et qui les amène à cohabiter dans son œuvre. Pour ce faire, et dans un second temps, nous revenons alors sur la conception foucaldienne de l'histoire au sein de laquelle nous contextualisons ces deux thèmes dans leurs propres places théoriques et méthodologiques. Au final, nous verrons que ces conceptions de continuité, de discontinuité et ainsi sa définition de l'histoire ne sont pas possibles que par une lecture que Foucault a faite de Nietzsche pour bâtir une pensée de « singularité » et éviter à tout prix ne pas fonder ces recherches sur une théorie de la connaissance.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 26 mai 2016
Nombre de lectures 2
EAN13 9782342051797
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0026€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Dilemme de la continuité et de la discontinuité
Kaveh Dastooreh
Connaissances & Savoirs

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Connaissances & Savoirs
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Le Dilemme de la continuité et de la discontinuité
 
 
 
Aux copains de Paris V-Sorbonne
Remerciements
Le texte ci-présent est initialement le fruit d’une recherche universitaire ; il ne pouvait pas achever si le conseil et l’aide de mes entourages ne m’accompagnaient pas. Je remercie spécialement Monsieur Jan Spurk, mon directeur de thèse, pour ses conseils avisés et pour son soutien interminable. Séverine Mayol a fait la relecture méticuleuse d’une bonne partie du présent manuscrit ; je lui adresse mes remerciements.
Introduction
Le thème de la discontinuité semble en opposition avec le thème de la continuité, et l’œuvre de Foucault a été prise comme une entreprise privilégiant le premier au second 1 , et il semble d’ailleurs fort vraisemblable que les erreurs interprétatives concernant les liens entre continuité et discontinuité viennent de la confusion entre les catégories encadrant ces dernières. En revanche, nous soutenons l’idée qu’il y a plusieurs instants différents de continuités et de discontinuités et chacune mérite d’être analysé séparément. L’œuvre foucaldienne représente, à nos yeux, le meilleur exemple de la réunion de ces deux thèmes ; finalement, nous essayons d’adopter la pensée singulière propre à Foucault que nous apposerons à son propre travail.
Dans Les mots et les choses , Foucault s’oppose strictement à la « contradiction méthodique » qui règne dans les sciences humaines. Foucault argumente que l’entrecroisement des modèles doit être expliqué par les discussions des méthodes et que celles-ci n’ont ni leurs origines, ni leurs justifications dans une complexité contradictoire, comme opposer la genèse à la structure ou encore, la compréhension à l’explication, ce qui serait le caractère propre de l’homme 2 . Pourtant Foucault n’en reste pas là, et selon le même principe, critique les autres contradictions existantes non justifiées. Sa colère vise l’opposition opérée par les sciences humaines entre le point de vue de la discontinuité et celui de la continuité. Cette opposition couvre plusieurs niveaux : le seuil entre nature et culture, l’absence de formes intermédiaires et l’inexistence de continuum donné dans l’espace ou dans le temps 3 .
Nous pouvons rapidement extraire deux catégories de continuités et de discontinuités dans l’œuvre foucaldienne : la première, qui n’est pas de nature temporelle, couvre les débats concernant, par exemple, la nature et la culture. La seconde est de nature temporelle 4 . Nous ne développerons pas ici la première catégorie, mais nous nous concentrerons sur la seconde qui constitue l’objet de cette recherche. Nous aimerions préciser que, dans notre perspective, la non-temporalité doit être comprise comme un principe qui relève de la conviction théorique et philosophique de Foucault alors que la seconde est davantage l’aboutissement de ses recherches historiques. Toutefois, une des catégories associant continuité et discontinuité temporelle, n’est pas conçue sur le même principe des continuités et des discontinuités non temporelles. Si on peut trouver des connexions méthodologiques et théoriques entre ces deux catégories, elles doivent pour autant être analysées comme des thèmes qui ne suivent pas les mêmes principes méthodologiques. Notre objectif est de souligner ces différents instants de continuité et de discontinuités temporelles, en évitant de susciter pleinement, faute de place, les débats concernant les bases épistémologiques ou la théorie de la connaissance de ces instants. Bien qu’ici notre but restera avant tout de rester fidèle dans la description de ces instants divers, nous insistons sur le fait que pour Foucault de «  Les mots et les choses » , la continuité (temporelle) ne s’oppose pas à la discontinuité (temporelle). L’usage des mots « coupure » ou « rupture » ne doit pas être considéré comme un principe totalisant de sa méthode : la rupture n’est pas une notion fondamentale, c’est plutôt un « fait de constatation ». Pour Foucault, si la discontinuité est un concept valable pour les discours scientifiques, cela ne nous permet en aucun cas de généraliser cette règle de discontinuité. Dans les autres domaines de connaissances, les mutations brusques n’existent donc pas et l’on est, en réalité, dans des mutations continues. Il faut alors replacer le concept de discontinuité dans le contexte qui lui est propre et dans la singularité (de ce contexte) et ne pas le prendre comme un concept totalisant et omni-explicatif comme Foucault le recommande 5 .
Continuité et discontinuité ne sont pas seulement des déterminations philosophiques mais aussi des déterminations historiques, sociologiques, littéraires, etc. Notre hypothèse est alors que la discontinuité n’est pas qu’une formulation philosophique qui s’opposerait/que l’on opposerait à la continuité propre de la philosophie de l’histoire (par exemple celle d’Hegel), mais qu’il faut considérer la continuité et la discontinuité comme des choix méthodologiques complémentaires. En réalité, cette question de continuité et de discontinuité temporelle n’a qu’une valeur méthodologique et, dans le travail de Foucault, ce choix est abordé soit en termes de « niveau où l’on se place », soit en termes d’« objet que l’on choisit », et non en termes de disciplines, ou d’un quelconque autre postulat ou principe philosophique. Précisons alors que ces deux critères sont toujours commandés par une problématique liée au temps « présent » car, d’une manière ou d’une autre, celui-ci est « l’actualité » de la recherche. Comment l’histoire et le présent sont-ils attachés ? Y a-t-il une possibilité d’une histoire du présent ? Le présent est déjà dans l’archive ; lorsque l’archive fait valoir au présent la trace d’une existence passée. Le concept du présent s’oblige à nouveau, mais sous une configuration différente : la recherche foucaldienne, c’est le prolongement de l’analyse descriptive du passé à travers une problématisation de notre propre présent, cela veut dire qu’il faut tenter d’établir quelque chose comme une différence radicale par rapport à ce que nous sommes aujourd’hui. Il faut recourir à l’histoire non simplement comme un dispositif utile, mais particulièrement comme une démarche indispensable pour appréhender le présent. Le présent n’est pas le contemporain, mais c’est un aboutissement d’héritage et la suite d’une série de changements qu’il faut reconstruire pour saisir ce qui se passe d’original aujourd’hui. L’actualité est, ainsi, inscrite par un événement qui s’est passé déjà, tandis que la présence continue dans le présent. Un événement peut être politique ou non, mais, chaque événement sollicite sa propre périodisation. C’est l’importance actuelle d’un événement qui explique qui commande l’analyse du passé, et comment il faut chercher les traces d’un commencement de cet événement. Deleuze décrit une actualité foucaldienne comme la nouveauté d’un dispositif par rapport aux précédents : « Dans tout dispositif, il faut distinguer ce que nous sommes, et ce que nous sommes en train de devenir : la part de l’histoire, et la part de l’actuel. L’histoire, c’est l’archive, le dessin de ce que nous sommes et cessons d’être, tandis que l’actuel est l’ébauche de ce que nous devenons » 6 .
En empruntant le thème de la continuité élaboré par Koyré, Bachelard et Canguilhem, et à l’instar de l’École de Francfort et particulièrement Adorno, Foucault insiste à son tour sur le fait que la démarcation des discontinuités n’est ni un postulat, ni un résultat mais plutôt une « manière de faire », qui est induite par « l’objet » dont elle traite. On est donc en face d’un authentique choix de méthode. C’est ainsi l’objet d’étude qui déterminera la méthode et le parcours de recherche. L’objet n’est pas préalablement défini et un changement d’objet peut induire, à son tour, un changement de méthode. Pour Foucault, il n’y a pas, en effet, une seule méthode : la continuité ou la discontinuité comme thème constituant la méthode sont variables et changent selon les altérations que subit l’objet de recherche. Pour être juste avec Foucault, il faut avant tout lui appliquer une approche « foucaldienne » ; commenter Foucault, c’est le faire à la manière de Foucault : Foucault ne se borne pas au cadre restreint et limité d’une discipline. Chez Foucault tout commence par l’objet et son rapport à une problématisation singulière liée au présent. Revel a montré comment la discontinuité ne relevait pas, en réalité, de la rupture mais avant tout de la « différence » que l’on peut réduire à deux grands cas de figure : une différence qui joue sur la manière dont on observe la réalité et qui implique le regard qui fonctionne au niveau de l’histoire que l’on décrit, et qui met en évidence l’apparition d’éléments nouveaux, l’émergence de singularités, le passage à une autre phase de l’histoire dont il s’agit de comprendre la constitution 7 .
À partir d’exemples tirés de l’œuvre de Foucault, notre objectif est, ici, de montrer la multiplicité des formulations existantes de ces deux thèmes afin de démontrer leur coexistence. Dans cette première partie, nous utilisons prioritairement une démarche descriptive des instants foucaldiens. Cependant, lorsque le lien entre les thèmes et les formulations ne seront pas évidentes, nous aurons recourt à l’argumentation afin d’éclairer le lecteur sur notre réflexion. Nous verrons da

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents