Eloge du séisme
154 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Eloge du séisme , livre ebook

-

154 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Les représentations du séisme examinées dans cet essai relèvent de registres très différents qui toutefois se font curieusement écho. Elles revêtent toutes un caractère historique, mythique et symbolique. De l'Antiquité à nos jours, philosophes, poètes, conteurs et écrivains ont exprimé leur émoi face à l'événement de la terre qui tremble, phénomène, de prime abord, inexplicable, ineffable. Le séisme se révèle alors dans son essence paradoxal comme une fin et un commencement, un malheur et une promesse.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 août 2015
Nombre de lectures 12
EAN13 9782336388953
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Copyright





























© L’Harmattan, 2015
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.harmattan.fr
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-73906-9
Marie-Denise Shelton







Eloge du séisme
Le tremblement de terre en littérature
Espaces Littéraires

Espaces Littéraires
Collection fondée par Maguy Albet


Dernières parutions

Marie-Antoinette BISSAY et Anis NOUAIRI, Lorand Gaspar et la matière-monde, 2015.
Thierry Jacques LAURENT , Le roman français au croisement de l’engagement et du désengagement, 2015.
Moussa COULIBALY et Damien BEDE , L’écriture fragmentaire dans les productions africaines contemporaines, 2015.
Jean Xavier BRAGER , De l’autre côté de l’amer, Représentations littéraires, visuelles et cinématographiques de l’identité pied-noir, 2015.
Isabelle CONSTANT, Le Robinson antillais. De Daniel Defoe à Patrick Chamoiseau , 2015.
Tiannan LIU, L’image de la Chine chez le passeur de culture François Cheng , 2015.
Jakeza LE LAY , Le Parnasse breton. Un modèle de revendication identitaire en Europe , 2015.
Servilien UKIZE, La pratique intertextuelle d’Alain Manbanckou. Le mythe du créateur libre , 2015.
Elena BALZAMO, « Je suis un vrai diable ». Dix essais sur Strindberg , 2014.
Fatima AHNOUCH, Littérature francophone du Maghreb. Imaginaire et représentations socioculturelles , 2014.
Céline BRICAIRE, Une histoire thématique de la littérature russe du XX e siècle. Cent ans de décomposition , 2014.
Elisabeth SCHULZ, Identité séfarade et littérature francophone au XX e siècle , 2014.
Jelena NOVAKOVI é , Ivo Andrié. La littérature française au miroir d’une lecture serbe, 2014.
Przemyslaw SZCZUR, Produire une identité , le personnage homosexuel dans le roman français de la seconde moitie du XIX e siècle (1859-1899), 2014.
Nabil EL JABBAR, L’œuvre romanesque d’Abdelkébir Khatibi , 2014.
André NOLAT, Les figures du destin dans les romans de Malraux , 2014.
Dédicace


à Dominique et Colette









Un remerciement spécial à Fazia Aitel pour son écoute et ses conseils
Merci également à Louison pour son soutien affectueux
Citation


Le sorcier noir sentenciait à l’office : « Le monde est comme une pirogue, qui, tournant et tournant, ne sait plus si le vent voulait rire ou pleurer »
(Saint-John Perse)
C’est le désastre obscur qui porte la lumière
(Maurice Blanchot)
AVANT-PROPOS
Port-au-Prince. Los Angeles. Deux villes où la terre a tremblé et tremblera. Deux lieux qui m’habitent et que j’habite. La pensée du séisme, dans sa réalité géologique comme dans sa dimension existentielle, est troublante et captivante. Il n’y a pourtant rien de morbide dans cette fascination. Si mon regard reste rivé au creux des failles, c’est que je cherche quelque chose que l’on n’entrevoit pas, ou à peine, dans l’orgie des images sur nos écrans, ou à la Une des journaux du monde entier. Un violent tremblement de terre a secoué Haïti le 12 janvier 2010. La réalité alors a basculé dans un tourbillon d’images confuses, de visions d’apocalypse. Où étais-je ce jour-là ? Chez moi, à Claremont, petite ville californienne, non loin de Los Angeles, où je vis depuis plus d’une trentaine d’années. Ce jour-là, je m’apprêtais justement à partir pour Haïti où je devais participer à un colloque international sur la littérature. Le thème retenu pour cette rencontre qui, bien entendu, n’a pas eu lieu, était Haïti au miroir du monde . Ironique et prophétique, le choix de ce titre illustre d’une façon étrange l’idée du hasard objectif si cher aux surréalistes. L’image d’Haïti devait en effet se refléter à l’infini dans le miroir du monde, sur tous les écrans cathodiques, à la une des journaux du monde entier. Les articles et coupures de journaux sont encore là que j’ai bien rangés dans un classeur. Il y a aussi les documents du voyage : billets d’avion, réservations d’hôtel, programme du colloque. Chaque fois que mon regard s’y pose, je ne peux réprimer un trouble profond et je pense au séisme qui a secoué le pays où je suis née. Etais-je, sans y avoir été, une rescapée du tremblement de terre ? Je me dis que j’aurais pu mourir broyée par des blocs de béton armé ; enterrée sous les décombres d’un immeuble détruit. J’imaginais le pire, comme pour accompagner Haïti dans son malheur. Les communiqués de presse ont capté le moment sismique avec précision : Magnitude sur l’échelle Richter entre 7.0 et 7.3. Jour : 12 Janvier 2010. Heure 16h53 10 seconde heure locale. Epicentre 18° 27’ 25 » Nord ; 72° 31’ 59 » Ouest.
Depuis, la vie a repris son cours. Pourtant, une menace pèse encore sur Haïti, sur nous. Les failles invisibles qui lézardent le sous-sol terrestre rejoignent les sinuosités de la conscience fracturée. Des peurs antiques ressurgissent . Dans le désarroi, on cherche à comprendre, à saisir le sens. Une histoire, la mienne propre, semblait s’effacer lentement. Une véritable hécatombe. On parle de 300 000 morts, sans compter les estropiés, les amputés, les sans-abris, les femmes violées, abandonnées et les malades exsangues du choléra. Les Haïtiens, dit-on, se démènent encore comme ils peuvent au milieu des décombres, des gravats, et des tentes où vivent toujours des milliers de sinistrés. On dit que rien n’a vraiment changé depuis l’événement du séisme. Une poignée d’affairistes continuent de s’enrichir, profitant du désastre national. La classe politique corrompue, quant à elle, se tient à l’affût pour une gestion cynique de la catastrophe. Les caméras du monde, hier fixés sur Haïti, sont parties. Elles sillonnent d’autres points du globe en quête d’autres événements spectaculaires. De toute façon, l’ampleur du désastre qui a frappé Haïti est encore pour moi à peine concevable. Comme pour conjurer le mal ou apaiser les dieux, les Haïtiens, paraîtil, refusent toujours de nommer le tremblement de terre par son nom ; ils l’appellent ‘la chose’, en créole ‘bagayla’ ; ou ‘Monsieur’ en raison, sans doute, de son arrogance ; ou encore ‘goudougoudou’, onomatopée qui désigne le grondement sourd ressenti au moment des secousses.
On vit dans l’assurance du solide, du stable ; notre conception de la vie se fonde sur des présupposés indéniables. Il y aura toujours un lendemain ; nous foulerons toujours la terre ferme, et rien ne peut ébranler notre foi en ces notions simples et rassurantes. Certes, d’autres événements catastrophiques se produisent qui viennent interrompre le cours normal de la vie, livrant des sociétés entières au désordre, au chaos : cyclones, tornades, tempêtes, éruptions volcaniques, guerres, génocides, épidémies. Ces catastrophes s’abattent sur les cités mais elles demeurent en quelque sorte, malgré leur violence ou leur soudaineté, concevables. Elles s’annoncent, se préparent, obéissent parfois à un rythme saisonnier. Elles font peur mais on s’y attend en quelque sorte. Les nuages s’amoncellent, le ciel s’assombrit, et le désastre survient. Ces catastrophes-là sont, comme qui dirait, à dimension humaine. Certes, il y a des morts, des cris, la désolation et la dévastation, mais l’idée même de la continuité de la vie n’est pas écartée. Les nuages se retireront, les vents s’apaiseront, la peur apprivoisée lentement s’estompera, et le jour se lèvera dans l’affliction certes mais non dans le glacial effroi que cause l’arbitraire infini du tremblement de terre.
Passés les premiers moments de stupeur, je me suis tournée instinctivement vers les écrivains, ces médecins de l’âme, pour trouver une explication. Le discours scientifique ne suffisait pas. Quoiqu’important, il ne répondait pas à mon attente. Le sismologue analyse des données, observe des faits, mais le matériau humain le laisse quelque peu indifférent. D’ailleurs, on sait qu’en matière de séisme, la science ne peut ni prévoir, ni prévenir, ni même décrire, et cela malgré les appareils

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents