SANG D'ENNUIS - (Extrait)

Anne Poitevin

Description

A tout éditeur littéraire qui lira cette publication :
J'ai quarante deux ans. J'exerce le métier de secrétaire. J'ai vécu une histoire familiale difficile et douloureuse. Lorsque le processus successoral s'en mêle, il n'est pas toujours facile de faire la part des choses. Il m'a fallu un peu plus de deux années, tenue par une force morale dont je ne soupçonnais pas l'existence, pour écrire mon récit. Au fil de l'écriture, j'ai pansé mes plaies, découvrant ce que j'aurais dû faire et ne pas faire.
Cette expérience, je souhaite la partager avec celles et ceux qui vivent des moments familiaux pénibles et déchirants. Je désire apporter une lueur d'espoir à tous ces gens qui pensent qu'ils ne pourront jamais sortir du tunnel un jour. Je ne prétends par avoir la recette miracle aux affaires familiales. J'espère simplement leur amener un peu d'apaisement et aider, par mon témoignage, quelques personnes prises dans les pièges de l'héritage en indivision, qui réveille de vieilles souffrances sans qu'elles soient jamais vraiment comprises.

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Informations

• Publié par: Celtic1969
• Publié le: 17 février 2012
• Nombre de lectures: 135
• Langue: Français

Extrait

Etrange coïncidence, au moment où j'écris ces quelques lignes, dans le train

matinal qui m'emmène là où je dois aller, je réfléchis à la manière dont je

vais introduire la seconde personnalité qui n'est pas négligeable dans cette

affaire, et voilà que le train passe, juste à cet instant précis, devant un

cimetière ; la Reine de tout, celle qui met le point final au livre de chaque

vie, je veux parler bien entendu de celle dont il m'est impossible d'écrire le

nom car elle est symbole de toute fin, aussi ne m'en veuillez pas trop si je ne

vous donne que la première lettre de son nom qui est la lettre "m".

Elle est l'une de mes vieilles connaissances. J'écris cela car elle s'est fait

connaître alors que j'étais encore une toute jeune enfant. Bien sûr, l'on m'en

avait inculqué la notion, peu d'année auparavant. Une notion de douceur, de

grand voyage lointain dont on ne revient jamais. En fait, je pense que la

notion a débuté avec la perte de ma grand-mère paternelle en 1973. J'étais

alors âgée de trois ans.

Sa maison se trouvait sur le même terrain que la nôtre. L'on disait "au fond

du jardin", comme l'adresse du cœur. Je ne sais si, maintenant, beaucoup

d'enfants ont cette chance. Il suffisait de prendre l'allée, de traverser le jardin

et je me retrouvais chez ma grand-mère paternelle. Elle est partie bien tôt.

J'avais tout à apprendre d'elle. Ce qui me peine le plus, c'est que je ne

parviens pas à me souvenir du timbre de sa voix. Je me rappelle néanmoins

que son débit de paroles était lent, calme et mesuré. Sa façon de parler

inspirait la sagesse. Mon grand-père maternel m'avait dit d'elle un jour,

pendant un déjeuner, alors que je n'avais que onze ans, qu'elle était une

personne respectable. Lorsque j'ai rapporté ces propos à papa, il en avait été

très touché et probablement surpris de l'admiration que son beau-père portait

à sa mère.

Dans les derniers temps de ses souffrances, maman allait la voir le plus

souvent possible. Trop fatiguée, ma présence et surtout la folle énergie des

mes trois ans étaient difficilement supportables pour elle. Aussi un jour,

2.

maman me dit :"je vais voir mémère. Je vais te laisser toute seule à la

maison. Tu es une grande fille, tu es sage, je n'en ai pas pour longtemps. Tu

m'as bien comprise ?" Je lui répondis que oui. Et je suis allée à la fenêtre de

la chambre de mes parents, debout sur leur lit, le nez collé au carreau,

regardant maman s'éloigner pour aller au fond du jardin. Je n'ai pas quitté

cette place jusqu'à son retour, son absence ayant duré environ une heure.

Maman était seule ce jour là avec une petite fille et une belle-mère

mourante.