L oiseau migrateur
171 pages
Français

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Description

L'oiseau migrateur est un journal que Christine Von Garnier a écrit sous forme de lettres envoyées à son mari resté en Namibie alors qu'elle a quitté ce pays en 1986 avec ses enfants, juste avant l'indépendance. Mais l'adaptation à la Suisse après vingt années passées en Namibie est difficile. Ce livre aborde l'importance de connaître d'autres cultures, de construire une identité plurielle et d'accepter de se métamorphoser comme la société mondiale elle-même se métamorphose.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2010
Nombre de lectures 302
EAN13 9782296934702
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L’OISEAU MIGRATEUR
ou la recherche de l’âme
Du même auteur


La Namibie vue de l’intérieur, Ed. Berger-Levrault, Paris, 1 re édit. 1984 ; 2 e édit. revue et mise à jour 1985.
Namibie, les derniers colons d’Afrique , Ed. L’Harmattan, Paris, 1987.
Traduction en allemand chez Rowohlt, Hamburg, 1987 : "Ich habe einen der letzten Kolonialherren Afrikas geheiratet, ein namibisches Tagebuch", Rororo aktuell. Epuisé.
Katutura revisited 1986 , Essays on a Black Namibian Apartheid Suburb, Angelus Printing, Windhœk, Namibia.
Kavango, where are you going ?, Angelus Printing, Windhœk, Namibia, 1986.
"Senghor speaks on Africa", occasional paper, The South African Institute for International Affairs, Johannesburg, 1982.
Prière à mon ange-gardien , Windhœk, Namibie (inédit), 1984.
L’Afrique pour passion. Dix ans de plaidoyer politique en Suisse et ailleurs, Ed. Saint Augustin, Saint-Maurice, Suisse, mars 2010.
Une centaine d’articles dans la Neue Zürcher Zeitung et le Journal de Genève, relatifs à la Namibie, occasionnellement l’Afrique du Sud (1970-1986). Depuis 1987, une cinquantaine d’articles d’Opinion dans plusieurs revues et journaux.


© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http://www. librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11950-5
EAN : 9782296119505

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Christine von Garnier


L’OISEAU MIGRATEUR
ou la recherche de l’âme


Journal Suisse-Namibie (1986-2009)
A mes petites-filles :
Camille, Julie, Sarah et Chiara
« Vous retournez en Suisse après 20 ans passés en Namibie pour avoir plus de sécurité pour vous et pour vos enfants ?
Dans un certain sens vous avez raison.
Mais attention, vous risquez d’y perdre votre âme !
La Suisse, cela pourrait être l’enfer pour vous.
Elle est si propre, si organisée dans les moindres détails, si tournée vers le bien-être matérialiste ». (1986)

Hans-Rudolf Müller-Schwefe {1}

« Le véritable défi auquel chacun se trouve confronté, c’est d’aller loin en soi.
C’est d’accueillir le ciel qui l’habite. C’est de raviver la liberté qui brûle.
C’est de se dresser dans sa pleine stature d’homme et de femme.
C’est de se laisser traverser par la douleur du monde…
La modernité a beaucoup apporté…Il serait malhonnête de le nier,…
Mais elle est usée, à bout de souffle et le moment est venu de la conduire plus loin
De la revisiter de l’intérieur, et c’est bien là
Que j’ose parler de spirituel… »

Gabriel Ringlet, « L’évangile d’un libre-penseur »


« Quand donc la politique prendra-t-elle en considération l’immense besoin d’amour de l’espèce humaine perdue dans le cosmos ? »

Edgar Morin
in Le Monde 13 juin 2009
L’ATTERRISSAGE
Lausanne, novembre 1986

Retour au Nord

L E PARADIS AUX INSTITUTIONS STABLES
Cher Piet,
Te souviens-tu du jour où nous avions décidé de mon retour au Nord ? J’y pense souvent, car j’essaye de me remémorer le contexte dans lequel nous avions pris cette décision douloureuse pour être sûrs d’avoir bien fait. Toi, tu ne m’en parles jamais. Peut-être préfères-tu l’oublier ?
C’était un soir à Hondiri, à la ferme de ton beau-frère en Namibie. Le soleil, boule de feu énorme se couchait dans le ciel enflammé. Tout baignait dans une lumière grandiose. La brousse rayonnait d’or, de pourpre et de mystère. Elle se préparait pour la nuit qui allait tomber rapidement. C’était l’heure où les bêtes se taisent peu à peu pour laisser place au silence impressionnant de la nuit africaine. Une jeune Africaine venait de nous apporter un seau de lait encore tout chaud. J’étais en train d’esquisser les grandes lignes d’un livre. Toi, tu t’entretenais avec les employés agricoles. Nous étions alors en 1984, six ans avant l’indépendance de ce pays. Les guérilleros du mouvement de libération (SWAPO) basé en Angola, faisaient de plus en plus d’incursions au nord pour tuer les fermiers blancs. La Namibie était en pleine effervescence, tourmentée par une guerre civile : extrémisme de droite et de gauche, occupation militaire sud-africaine, racisme, division dans les partis politiques, les familles, les Eglises. L’ennemi sournois et pervers était partout. Une période très difficile à supporter.
Nous souffrions tous : les Africains, non seulement parce qu’ils étaient traités comme des mineurs, mais aussi parce qu’ils étaient très durement touchés par les sanctions économiques contre l’Afrique du Sud. Les Blancs, parce qu’ils pressentaient la fin de leur monde et résistaient à la montée de l’histoire. Nous, moi surtout, nous posions la question : partir ou rester ? Il y avait l’avenir des enfants et ton travail qui était instable. Je me demandais comment nous allions survivre dans ces bouleversements de toute l’Afrique australe. Le Mozambique, l’Angola, la Rhodésie étaient « tombés ». A quand notre tour ? La résistance absurde de la minorité des Blancs ne faisait qu’accroître le climat de peur et de violences. Tu venais de perdre un travail pour la deuxième fois et moi j’avais terminé mes enquêtes sociologiques pour le compte des Eglises. Le renouvellement de mon mandat était incertain, car je devais laisser ma place à un Africain. Nous n’avions plus aucune sécurité financière.
Quelles tensions intérieures avons-nous vécues toi et moi, sans nous les avouer pour ne pas décourager l’autre ! Mais, il y a eu un moment où il a fallu se décider. L’avenir des enfants était en jeu et celui de toute la famille. Il y avait longtemps que j’y pensais, mais toi, tu restais toujours confiant, trop confiant dans une situation où les extrémismes politiques prenaient la direction de nos vies. Nous étions impuissants. Tu m’as dit soudain de partir avec les enfants en Suisse et que tu viendrais nous rejoindre plus tard.
Soulagée, j’ai accepté ta décision sans plus poser de questions, mais je savais que je quittais un pays que j’aimais profondément.
Ce soir, je reprends donc la plume depuis le Nord pour te raconter ma vie et ce que je découvre peu à peu dans cette Suisse que j’avais quittée il y a 20 ans et dans laquelle je me sens une étrangère tant elle a changé. Antoinette a préféré rester avec toi encore une année pour finir son degré secondaire. Je la comprends. Christophe passera son bac en Angleterre à « l’Atlantic College » pour lequel il a eu la chance d’obtenir une bourse d’études de la multinationale de l’uranium Rössing, un côté positif de cette institution qui favorise des cadres locaux de toutes les ethnies. Il viendra me rejoindre dans six mois. Je suis seule pour préparer le nid de notre avenir.
J’ai trouvé un vieil appartement dans le haut de Lausanne. La vue depuis le balcon du salon est si vaste que j’ai l’impression d’être un oiseau qui vole au-dessus de la ville. J’aperçois le grand lac Léman entouré par une chaîne de montagnes bordant l’entrée du Valais, en face les montagnes de France avec le Mont-Blanc et à droite celles du Jura. Par temps très clair, je peux voir le Jet d’Eau de Genève. Le regard peut se porter au loin et se perdre à l’infini, comme jadis à notre ferme à Welgelegen. L’endroit porte un nom que j’aime : le désert. Malheureusement, il n’y a plus rien de désertique. Il y a des maisons en béton à droite, à gauche et devant, et la forêt derrière. Une vieille habitante m’a dit qu’il y a trente ans, il y avait des arbres et des prés, et que les vaches venaient brouter et ruminer tranquillement devant la maison…
Pourtant, cette immensité m’apaise et je l’admire souvent. Elle me rappelle les grands espaces africains. En ce mois de novembre, la brume traîne sur le lac et les montagnes. Tout est enveloppé d’une lumière féerique et donne une impression de mystère. Cela rend tristes et peu loquaces mes collègues de travail. Moi, je trouve cela merveilleux et si reposant après vingt ans d’une lumière éclatante. Même les jours de pluie glaciale comme aujourd’hui me réjouissent !
Le logement est peu meublé. Je fais du camping et j’

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