Revue d'histoire littéraire de la France

Maurice Tourneux

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• French literature

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• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 56 Mo

Extrait

Revue
/^
dHistoite littétaite
de la France
PUBLIÉE
par la Société d'Histoire littéraire de la France
10^ —Année, igo3.
PARIS
LIBRAIRIE ARMAND COLIN
5, RUE DE MÉZIÉRES
1903Ta
zRevue
dHistoire littéraire
Francede la
OBSERVATIONS CRITIQUES ET LITTÉRAIRES
SUR UN OPUSCULE DE DIDEROT
(Lettre sur le commerce de la librairie.)
Dans un volume publié en 1859 sous ce titre : La propriété
siècle, Ed. Laboulaye etlittéraire au XVIIP MM. G. Guiffrey
inséraient, parmi d'autres pièces relatives à la même matière, un
Mémoire à M. de Sartine, directeur de la librairie, daté du mois
de mars 1764 et signé de Le Breton, syndic, en son nom et au
nom de ses adjoints. Puis, en 1861, comme annexe à la publi-
cation précédente, le second de ces deux éditeurs donnait « pour
la première fois » une Lettre de Diderot sur le commerce de la
1"67de juin et adressée au mêmeLibrairie, datée personnage que
Cette Lettre de Diderot est reproduite,le Mémoire. au tome XVIII
Œuvres complètes, par MM. Assézat et Tourneux^des
entre le Mémoire et la Lettre il existe une similitude, sinonOr
complète, assez grande toutefois pour qu'on soit tenlé de croire
au premier examen qu'ils constituent, non pas deux ouvrages
vraiment distincts, mais deux rédactions d'un seul et même
ouvrage, la Lettre un peu plus longue que le Mémoire, environ
et d'une forme sensiblement plus vive, originaled'un cinquième,
personnelle. Il est bien étrange que M. Guiffrey, dans les quatreet
pages d'introduction placées en tête de la Lettre, n'ait pas même
par un mot renvoyé le lecteur au Mémoire. Les éditeurs des
1. C'est donc à ce t. XVIII des CHEuvres de Diderot que sont faits les renvois
pour lepour la Lettre, à la publication de MM. Laboulaye et GuifTrey (Paris, 1839),
Mémoire.
11\kv. la France (10« Ann.). — X,d'hist. littér. deRKVUE D HISTOIRE LITTERAIRE DE LA FRANCE.2
Œuvres coinplètes n'ont pas d'abord réparé cette omission; mais
M.elle est relevée par Tourneux dans son article de 1883 sur
manuscrits de Diderot conservés en Russie, à la suite deles
M. Malapert qui avait fait la remarque quatre ans auparavant,
revient, cetteet à qui par conséquent, l'honneur de simple et
tardive découverte*.
Encore M. Malapert n'a-t-il lu et comparé les deux textes que
fort en gros. Ses préoccupations de juriste lui auront sans doute
fait négliger des variantes qui lui paraissaient une simple affaire
de forme. Il est très frappé, avec raison, de l'ampleur qu'a prise
«dans la Lettre de Diderot la partie relative aux livres prohibés »,
selon le terme consacré, aux « permissions tacites ». Il constateou,
aussi que Diderot a « profité de l'occasion » pour émettre des
idées d'une certaine hardiesse en faveur de la liberté d'imprimer.
servilement le«Diderot, ajoute-t-il, a... copié Mémoire de 1764,
pour tromper l'œil, il ait souvent changé le premierquoique,
mot des paragraphes, en mettant un cependant à la place d'un mais
et autres choses semblables. » Pas si servilement, en vérité; c'est,
non pas un seul passage, mais tout un ensemble de retouches
disséminées, qui distingue la Lettre du Mémoire, et pour la forme,
et même pour le fond. M. Malapert semble bien le reconnaître
parimplicitement le cas qu'il fait de la Lettre, tandis qu'il tient en
estime les « représentations » «fort mince des libraires : Ils exhu-
mèrent de leurs cartons, dit-il, les vieux mémoires qu'ils avaient
l'habitude de produire. Ils les firent un peu retoucher par un revi-
»seur... Mais par quel reviseur? Il aurait donc suffi à Diderot de
reprendre et de reviser à son tour, très légèrement, cette pré-
tendue compilation, pour en tirer la Lettre qui nous paraît si forte-
ment marquée de son empreinte? Cette transformation, opérée par
moyens si sommaires,des vaudrait à elle seule d'être analysée.
Enfin l'éditeur de Diderot n'aurait-il pas, pour rectifier le texte
de la Lettre, à tirer parti du Mémoire, dont elle n'est, en maint
endroit, que la reproduction à peu près littérale?
I
d'abord cette question,Touchons à toute technique, de critique
verbale.
lecture attentive de la Lettre, telle qu'elle est imprimée,Une
3"1. Archives des missions scientifiques et littéraires, série, t. XII, 1885. — Mala-
La législation sur lapropriétélittérairepert, Histoire abrégée de avant 1789. Paris, 1881,
37 suiv., 65 et suiv.p. el ^