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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 21 |
EAN13 | 9782824710037 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
LE COUSI N PONS
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LE COUSI N PONS
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1003-7
BI BEBO OK
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compris à Bib eb o ok.A D ON MICH ELE ANGELO
CAJET AN I, P RI NCE DE
T ÉANO .
’ au prince r omain, ni à l’héritier de l’illustr e maison de
Cajetani qui a four ni des p ap es à la Chrétienté , c’ est au savantC commentateur de D ante que je dé die ce p etit fragment d’une
longue histoir e .
V ous m’av ez fait ap er ce v oir la mer v eilleuse char p ente d’idé es sur
laquelle le plus grand p oète italien a constr uit son p oème , le seul que les
mo der nes puissent opp oser à celui d’Homèr e . Jusqu’à ce que je v ous eusse
entendu, la DI V I N E COMÉDI E me semblait une immense énigme , dont
le mot n’avait été tr ouvé p ar p er sonne , et moins p ar les commentateur s
que p ar qui que ce soit. Compr endr e ainsi D ante , c’ est êtr e grand comme
lui ; mais toutes les grandeur s v ous sont familièr es.
Un savant français se ferait une réputation, g agnerait une chair e et
b e aucoup de cr oix, à publier , en un v olume dogmatique , l’impr o visation
p ar laquelle v ous av ez char mé l’une de ces soiré es où l’ on se r ep ose
d’av oir v u Rome . V ous ne sav ez p eut-êtr e p as que la plup art de nos pr
o1Le cousin Pons Chapitr e
fesseur s viv ent sur l’ Allemagne , sur l’ Angleter r e , sur l’Orient ou sur le
Nord, comme des inse ctes sur un arbr e ; et, comme l’inse cte , ils en
deviennent p artie intégrante , empr untant leur valeur de celle du sujet. Or ,
l’Italie n’a p as encor e été e xploité e à chair e ouv erte . On ne me tiendra
jamais compte de ma discrétion liérair e . J’aurais pu, v ous dép ouillant,
de v enir un homme do cte de la for ce de tr ois Schleg el ; tandis que je vais
r ester simple do cteur en mé de cine so ciale , le vétérinair e des maux
incurables ne fût-ce que p our offrir un témoignag e de r e connaissance à mon
cicer one , et joindr e v otr e illustr e nom à ceux des Por cia, des San Se v
erino , des Par eto , des di Negr o , des Belgiojoso , qui r eprésenter ont dans la
COMÉDI E H UMAI N E cee alliance intime et continue de l’Italie et de la
France que déjà le Bandello , cet é vê que , auteur de contes très-drôlatiques,
consacrait de la même manièr e , au seizième siè cle , dans ce magnifique r
ecueil de nouv elles d’ où sont issues plusieur s piè ces de Shak esp e ar e ,
quelquefois même des rôles entier s, et te xtuellement.
Les deux esquisses que je v ous dé die constituent les deux éter nelles
faces d’un même fait. Homo duple x,a dit notr e grand Buffon, p our quoi
ne p as ajouter : Res duple x ? T out est double , même la v ertu. A ussi
Molièr e présente-t-il toujour s les deux côtés de tout pr oblème humain ; à
son imitation, Dider ot é crivit un jour : CECI N’EST P AS U N CON T E, le
chef-d’ œuv r e de Dider ot p eut-êtr e , où il offr e la sublime figur e de
mademoiselle de Lachaux immolé e p ar Gardanne , en r eg ard de celle d’un
p arfait amant tué p ar sa maîtr esse . Mes deux nouv elles sont donc mises
en p endant, comme deux jume aux de se x e différ ent. C’ est une fantaisie
liérair e à laquelle on p eut sacrifier une fois, surtout dans un ouv rag e où
l’ on essaie de r eprésenter toutes les for mes qui ser v ent de vêtement à la
p ensé e . La plup art des disputes humaines viennent de ce qu’il e xiste à la
fois des savants et des ignorants, constitués de manièr e à ne jamais v oir
qu’un seul côté des faits ou des idé es ; et chacun de prétendr e que la face
qu’il a v ue est la seule v raie , la seule b onne . A ussi le Liv r e Saint a-t-il jeté
cee pr ophétique p ar ole : Dieu liv ra le monde aux discussions. J’av oue
que ce seul p assag e de l’Écritur e de v rait eng ag er le Saint-Siég e à v ous
donner le g ouv er nement des deux Chambr es p our obéir à cee sentence
commenté e , en 1814, p ar l’ ordonnance de Louis X V I I I.
e v otr e esprit, que la p o ésie qui est en v ous pr otèg ent les deux
2Le cousin Pons Chapitr e
épiso des des P AREN TS P A U V RES
D e v otr e affe ctionné ser viteur ,
DE BALZA C.
Paris, août-septembr e 1846.
n
3LE COUSI N PONS
de l’après-midi, dans le mois d’ o ctobr e de
l’anné e 1844, un homme âg é d’une soix antaine d’anné es, mais à quiV tout le monde eût donné plus que cet âg e , allait le long du b
oule vard des Italiens, le nez à la piste , les lè v r es p ap elardes, comme un
nég o ciant qui vient de conclur e une e x cellente affair e , ou comme un g ar çon
content de lui-même au sortir d’un b oudoir . C’ est à Paris la plus grande
e xpr ession connue de la satisfaction p er sonnelle chez l’homme . En ap
erce vant de loin ce vieillard, les p er sonnes qui sont là tous l es jour s assises
sur des chaises, liv ré es au plaisir d’analy ser les p assants, laissaient toutes
p oindr e dans leur s phy sionomies ce sourir e p articulier aux g ens de
Paris, et qui dit tant de choses ir oniques, mo queuses ou comp atissantes,
mais qui, p our animer le visag e du Parisien, blasé sur tous les sp e ctacles
p ossibles, e xig ent de hautes curiosités vivantes. Un mot fera compr endr e
et la valeur ar ché ologique de ce b onhomme et la raison du sourir e qui
se rép était comme un é cho dans tous les y eux. On demandait à
Hyacinthe , un acteur célèbr e p ar ses saillies, où il faisait fair e les chap e aux
à la v ue desquels la salle p ouffe de rir e : « ― Je ne les fais p oint fair e , je
les g arde ? » rép ondit-il. Eh bien ! il se r encontr e dans le million d’acteur s
qui comp osent la grande tr oup e de Paris, des Hyacinthes sans le sav oir
4Le cousin Pons Chapitr e
qui g ardent sur eux tous les ridicules d’un temps, et qui v ous app araissent
comme la p er sonnification de toute une ép o que p our v ous ar racher une
b ouffé e de g aieté quand v ous v ous pr omenez en dé v orant quelque
chagrin amer causé p ar la trahison d’un e x-ami.
En conser vant dans quelques détails de sa mise une fidélité quand
même aux mo des de l’an 1806, ce p assant rapp elait l’Empir e sans êtr e p ar
tr op caricatur e . Pour les obser vateur s, cee finesse r end ces sortes
d’év o cations e xtrêmement pré cieuses. Mais cet ensemble de p etites choses
v oulait l’aention analytique dont sont doués les connaisseur s en
flânerie ; et, p our e x citer le rir e à distance , le p assant de vait offrir une de ces
énor mités à cr e v er les y eux, comme on dit, et que les acteur s r e cher chent
p our assur er le succès de leur s entrées . Ce vieillard, se c et maigr e , p
ortait un sp encer couleur noisee sur un habit v erdâtr e à b outons de métal
blanc !. . . Un homme en sp encer , en 1844, c’ est, v o y ez-v ous, comme si
Nap olé on eût daigné r essusciter p our deux heur es.
Le sp encer fut inv enté , comme son nom l’indique , p ar un lord sans
doute vain de sa jolie taille . A vant la p aix d’ Amiens, cet Anglais avait
résolu le pr oblème de couv rir le buste sans assommer le cor ps p ar le p oids
de cet affr eux car rick qui finit aujourd’hui sur le dos des vieux co cher s de
fiacr e ; mais comme les fi