Bafouillou
62 pages
Français

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Bafouillou , livre ebook

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Description

Bafouillou, face au Web et contre la guerre, a fort à faire. Le lieu : Bibliothèque de Démosthène. Les personnages : Démosthène, grand orateur ; Bafouillou, serviteur de Démosthène ; Lucie, fille de Démosthène ; Madame Bastir, psychiatre, ancienne élève de Démosthène ; Frédéric Von Guguel (simplifié en F.V.G), informaticien.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 décembre 2009
Nombre de lectures 30
EAN13 9782296931657
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0424€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Bafouillou
© L’Harmattan, 2009
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-10773-1
EAN : 9782296107731

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Jean-Pierre PERRIN-MARTIN


Bafouillou


Comédie en alexandrins
Trois actes
Bibliothèque de Démosthène.
Les murs sont couverts de rayonnages remplis de livres et de documents.
Un bureau, une table, quelques chaises un fauteuil réglable.
Personnages
Démosthène, grand orateur.
Bafouillou, serviteur de Démosthène.
Lucie, fille de Démosthène.
Madame Bastir, psychiatre, ancienne élève de
Démosthène.
Frédéric Von Guguel (simplifié en F. V. G.),
informaticien.
Acte I
Scène 1
Bafouillou, Lucie.
Poursuivant une partie de Scrabble.
LUCIE
G, U, E, R, R, E, en six lettres, la guerre.
BAFOUILLOU
Un mot qui, ces temps-ci, tourmente votre père.
LUCIE
Les mots, les mots, les mots… Cher Monsieur Bafouillou,
Ne nous lassent-ils pas, ces millions de cailloux
Qui chargent nos discours, entêtés, indomptables ?
Et ne voilà-t-il pas que nous jouons au Scrabble !
BAFOUILLOU
Mademoiselle Lucie, de mots ma tête est folle.
Si ce goût-là m’a pris, ce n’est pas à l’école.
Je n’y ai pas brillé. C’est votre père, ici,
Avant que vous naissiez, qui m’a demandé si
Ces livres pleins de mots qui ploient les étagères
Et dont il a besoin, ces mille dictionnaires :
Académie, Littré, Larousse et patati
Et patata,des plus épais aux plus petits,
Je saurais les ranger, en chasser la poussière,
Vite trouver celui qui ferait son affaire.
J’ai su.
LUCIE
Fort bien, fort bien. C’est à vous de jouer.
BAFOUILLOU
Un mot me vient, un mot qui va vous secouer.
Il est grec, mais si beau ! Votre père l’adore :
"Logos".
LUCIE
Ô Bafouillou, tu me surprends encore !
BAFOUILLOU
Et du coup, te voilà, Lucie, qui me tutoies.
Tu redeviens Lucie comme autrefois.
Sous le coup du "Logos", plus de titre "Monsieur",
Ni "Demoiselle".
LUCIE
Mais ce "Logos" qui nous étonne,
Qu’en sais-tu, Bafouillou ?
BAFOUILLOU
J’en sais qu’à Ratisbonne
Benoît XVI, le pape, a brandi le "Logos",
Que Monsieur Démosthène l’a subi comme un os
En travers de sa gorge. Une immense colère,
Alors, s’est emparée de la voix de ton père.
Des phrases déferlant comme des tsunamis !
Quel sens a donc ce mot "Logos" qui s’est permis
De jeter Démosthène en pareilleéloquence ?
Je ne sais pas… Je reste un peu dans l’ignorance.
Je ne suis pas savant. Mais ce mot a le droit
De cité dans le Scrabble, ô Lucie, je le crois…
Tu dois en savoir long sur lui, toi, la linguiste.
LUCIE
Sois rassuré ! C’est bon… Saint Jean l’évangéliste
A dérobé le mot "Logos" au grand Platon
Dans sa caverne. Et puis, de nos jours, que voit-on ?
Le pape, à Ratisbonne, sous nos nez, le confisque…
Sur ton "Logos", je greffe un "Obélisque",
Et sept lettres placées, en empruntant un U
À "Brute". Pour sept jetons, le cinquante obtenu !
BAFOUILLOU
Soixante-douze points, tu cours vers la victoire.
Bravo, Lucie ! Mais je tiens bon dans les déboires.
Tiens ! En horizontal, je décoche "Nichons",
Avec un S au bout… Nous nous effarouchons ?
Pas de quoi, pas de quoi ! Simplement ce que donne
Au pluriel, au présent, la première personne
Du verbe "Nicher".
LUCIE
Soit ! Dis-moi, grand facétieux,
Je change de sujet, c’est un peu plus sérieux.
Connais-tu le nouveau, dont Démosthène assure
Qu’il va moderniser notre antique culture
À coups d’informatique ?
BAFOUILLOU
Il a les cheveux blonds,
Petit peu grisonnants, pas trop courts, pas trop longs.
Un Monsieur sûr de lui, prétentieux, conquérant.
LUCIE
Conquérant !… Bafouillou, dis-moi ce qui te prend !
BAFOUILLOU
Oh, si tu l’avais vu, invité par ton père
Entrer ici, Lucie, dans notre sanctuaire !
Il fit un grand salut, refusa le fauteuil
Que je lui proposais, mais réserva son œil
A toiser nos bouquins. Comme un grand général
Qui passe la revue, ou comme un cardinal
Qui va bénir la foule, d’un pas lent, il détaille
Nos chevaliers servants, nos paroissiens, nos ouailles
Alignés, chaque jour, avec le plus grand soin,
Comme de bons soldats sur le front du besoin,
Fidèlement prêts à soutenir l’éloquence
De ton père, à l’affût de mots, de références.
Il nous jaugeait, jaugeant notre bibliothèque.
Démosthène muet, comme on est aux obsèques,
Attendait, assis là où nous sommes assis.
Frédéric Von Guguel – car ce serait ainsi
Qu’il se nomme – quand fut son inspection finie,
Eut un rire moqueur, enfourcha l’ironie
Et, pompeux, célébra le trésor de savoir
Que nous emprisonnions dans notre réservoir.
« Je vous supplie, dit-il, mon ami Démosthène,
De déployer une panoramique antenne
Autour de vos discours, vers le Web, vers la Toile.
Je viens pour vous aider à hisser la grand-voile ! »
LUCIE
Tu trembles, Bafouillou ?
BAFOUILLOU
J’ai peur de ce nouveau.
LUCIE
De cette angoisse-là, dégage ton cerveau !
Nous avons à finir cette partie de Scrabble.
L’heure tourne et bientôt, nous aurons, c’est probable,
À laisser cette place à Madame Bastir,
Que mon père reçoit. Elle veut aboutir
À quelque grand discours…
BAFOUILLOU
À toi de jouer, Lucie !
LUCIE
Voilà, c’en est fini. Regarde et apprécie :
Trois lettres : C, O, R, en haut de ton "Nichons".
Vois-tu ce que ça donne ?
BAFOUILLOU
Eh oui, des Cornichons !
Entrent Démosthène et Madame Bastir.
Scène 2
Démosthène, Bafouillou, Lucie, Madame Bastir.

DEMOSTHENE

Excusez-nous !
LUCIE
De rien. La partie est finie.
DEMOSTHENE
s’adressant à Madame Bastir :

Madame, permettez que, sans cérémonie,
Je vous présente deux chers collaborateurs :
Ici, Lucie, ma fille, et là, mon serviteur
Bafouillou.
MADAME BASTIR
Enchantée, enchantée… Je m’appelle
Christine Bastir. Et ma confiance est fidèle
Au brillant professeur qui, jadis, m’enseigna
L’art de la rhétorique.
DEMOSTHENE
Quittons le charabia !
Vous m’avez pressenti, chère ancienne étudiante,
Pour un discours devant une assemblée savante
De psychas, de psychos, de psychiâs renommés,
Désireux de penser… Et vous vous estimez
En défaut d’éloquence, et vous comptez sur moi,
L’ancien qui vous apprit à donner de la voix,
Jadis ! Vous m’honorez, mais suis-je encore de taille ?

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