L État moderne et ses fonctions
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L'État moderne et ses fonctions , livre ebook

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Description

Extrait : "La conception que se font de l'État, de sa nature et de son rôle, les hommes de notre temps, paraît singulièrement confuse. Les attributions incohérentes, souvent contradictoires, qu'ils lui confient, témoignent du manque de netteté et de précision de leurs idées. Quand elle veut aborder ce thème d'un intérêt si décisif pour les destinées humaines, leur pensée flotte dans les brouillards." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares. Beaucoup de soins sont apportés à ces versions ebook pour éviter les fautes que l'on trouve trop souvent dans des versions numériques de ces textes. 

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Publié par
Nombre de lectures 27
EAN13 9782335050165
Langue Français

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Extrait

EAN : 9782335050165

 
©Ligaran 2015

LIVRE PREMIER L’État, la société et l’individu – La genèse des fonctions de l’État
CHAPITRE PREMIER Nécessité d’une conception exacte de l’État moderne et de ses fonctions
La conception que se font de l’État, de sa nature et de son rôle, les hommes de notre temps, paraît singulièrement confuse. Les attributions incohérentes, souvent contradictoires, qu’ils lui confient, témoignent du manque de netteté et de précision de leurs idées. Quand elle veut aborder ce thème d’un intérêt si décisif pour les destinées humaines, leur pensée flotte dans les brouillards.
Les mots de liberté, de progrès, d’initiative individuelle, de devoir social, d’action de l’État, d’obligation légale, se heurtent, comme au hasard, dans la bouche de nos législateurs et dans les écrits de nos polémistes. Il semble que beaucoup d’entre eux soient atteints de cette singulière maladie de la mémoire que l’on nomme aphasie, qui consiste à prendre pour exprimer une idée un mot qui n’a avec elle aucun rapport : quand ils prononcent liberté, il faut entendre servitude ; quand ils articulent progrès, il faut comprendre recul.
Cette notion de l’État et de sa mission, je voudrais l’examiner à nouveau. Bien d’autres, certes, l’ont fait dans ces derniers temps. L’Académie des sciences morales et politiques, en 1880, prenait pour sujet de l’un de ses nombreux concours : le rôle de l’État dans l’ordre économique ; elle couronnait deux mémoires distingués dus à deux professeurs de nos facultés de droit, M. Jourdan, d’Aix, et M. Villey, de Caen. Le cadre peut être plus étendu, car il ne s’agit pas seulement de l’ordre économique : l’État moderne déborde dans toutes les sphères de l’activité de l’homme : il menace la personne humaine tout entière.
Plus récemment, le corps savant que je viens de citer se livrait entre ses membres à une longue discussion sur les fonctions de l’État ; tous à peu près y prirent part : légistes, économistes, historiens, moralistes, philosophes.
Il me parut que les philosophes ne descendaient pas assez sur cette terre, et que, avec un grand talent d’abstraction, ils ignoraient la genèse de beaucoup des institutions humaines, certains attribuant à l’État une foule d’établissements qui proviennent de l’initiative libre : les banques, les caisses d’épargne, les sociétés de secours mutuels, les assurances, les hôpitaux, les monts de piété, etc.
Les moralistes me semblèrent céder à une sentimentalité excessive, qui risque d’énerver la société et l’homme lui-même. Le sujet ne me parut donc ni épuisé, ni même, dans ses grandes lignes, suffisamment éclairé.
Les pages les plus fortes qui aient été écrites récemment sur ce beau et vaste thème sont dues à Herbert Spencer et à M. Taine : le premier, qui, après avoir tracé avec sa pénétration incomparable, mais d’une manière épisodique, le caractère de l’État dans plusieurs de ses ouvrages : l’ Introduction à la science sociale et les Essais de politique, leur a consacré un petit volume lumineux : l’ Individu contre l’État, dont les titres de chapitres brillent comme des étoiles directrices : l’ Esclavage futur, les Péchés des législateurs, la Grande superstition politique ; le second, qui, avec son merveilleux talent de condensation, a trouvé le moyen, dans une étude sur la Formation de la France contemporaine , d’écrire, presque comme un hors-d’œuvre, en deux ou trois pages, la philosophie de la division des fonctions sociales et du rôle de l’État.
Mais Herbert Spencer et Taine n’ont éclairé le sujet que de très haut. Leur autorité peut être méconnue de ceux qui n’admettent d’autres arguments que les faits et les chiffres. Ils peuvent être accusés de parti pris ou d’idéologie, le premier surtout.
J’ai donc cru que l’on pouvait reprendre l’étude de l’État et de sa mission. La plupart des réflexions que je vais soumettre aux lecteurs sont antérieures au dernier livre d’Herbert Spencer. Elles ont formé la matière de mon cours du Collège de France dans l’année 1883-1884. Je les avais réunies, je les ai revues ; l’expérience des années récentes m’en a confirmé la vérité ; je les appuie sur de nouveaux exemples.
C’est de l’État moderne que je vais m’occuper, tel que l’a fait l’histoire, tel que l’ont transformé les découvertes et les applications des sciences.
Il est des questions qui ne peuvent rester dans le domaine de l’absolu et qui comportent nécessairement une part de relatif et de contingent. « L’État en soi » ressemble assez à « l’homme en soi », abstraction que l’esprit le plus délié a de la peine à saisir, qui ne lui apparaît que comme une ombre pâle aux contours indécis.
C’est des nations civilisées que je traite : je sais qu’il est parfois de mode de faire peu de cas de la civilisation. Dès le commencement de ce siècle, Fourier montrait un dédain inépuisable pour ce qu’il appelait « les civilisés » ; c’était, selon lui, une catégorie près de disparaître, qui allait prochainement rejoindre dans la tombe les deux catégories sociales antérieures, « les barbares » et « les sauvages ».
Aujourd’hui, parmi les écrivains qui se piquent de plus de rigueur que Fourier, il en est beaucoup aussi qui prennent la civilisation pour cible de leurs critiques ou de leurs sarcasmes. Dans une étude fort distinguée sur le grand théoricien libéral, Benjamin Constant, ne parlait-on pas dernièrement, dans une grande revue, du « travail de désagrégation sociale désigné sous le nom de civilisation » ? Voilà des jugements bien sévères.
Nous tenons, quant à nous, que cette civilisation qu’on qualifie aussi rudement a ses mérites, qu’elle a fait au genre humain un lit plus commode et plus doux que celui dont il s’est jamais trouvé en possession depuis qu’il a conscience de lui-même.
En dehors des fictions naïves, comme les Salente ou les Icarie, l’imagination n’arrive pas à se figurer avec netteté une contexture sociale qui diffère essentiellement de celle d’aujourd’hui. Des astronomes racontent que, dans certaines planètes qu’on suppose pouvoir être habitées, Mars entre autres, il se produit en quelques années des transformations extraordinaires : on dirait que des habitants y ont creusé des canaux gigantesques, et les fantaisistes vont jusqu’à attribuer à leurs ingénieurs une capacité qui dépasserait de beaucoup celle des nôtres. Il est possible que tout cela se voie dans la planète Mars.
Sur notre pauvre terre, nous jouissons d’une situation modeste, qui a l’avantage de s’être singulièrement améliorée, pour le bien-être de tous, depuis un siècle, depuis dix, depuis vingt. Il a fallu les efforts successifs de deux ou trois cents générations d’hommes pour nous procurer cette facilité relative d’existence, cette liberté morale, civile et politique, cet essor de nos sciences et de nos découvertes, cette transmission et cette rénovation incessante des lettres et des arts.
Des esprits superbes nous affirment que ce patrimoine est maigre et méprisable, que l’humanité ne saurait plus se résigner à l’accroître lentement à l’avenir par les moyens mêmes qui l’ont constitué dans le passé. Ils soutiennent que l’initiative individuelle, mère de tous ces progrès, a fait son temps ; qu’il faut constituer un grand organe central, qui, à lui seul, absorbe et dirige tout ; qu’une énorme roue motrice, substituée à des milliers de petits rouages inégaux et indépendants, produira des effets infiniment plus puissants et plus rapides ; qu’ainsi la richesse de l’humanité sera décuplée et que la justice régnera enfin sur cette terre.
Toutes ces promesses nous laissent sceptique. Nous nous rappelons ces fils de famille frivoles et présomptueux qui, ayant hérité d’une fortune laborieusement et patiemment acquise, méprisent les vertus modestes qui l’ont édifiée, et courent, pour l’accroître davantage, par des voies plus rapides, les aventures. Nous savons qu’il suff

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