Le maître-mot
273 pages
Français

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Le maître-mot , livre ebook

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Description

Ce roman aurait pu s'intituler "l'épopée du langage". Qui en serait le héros? Celui qui se sert goulûment de tous les mots du Plus Petit Larousse, afin de raconter ses aventures - ou ne serait-ce pas le Mot, le Maître absolu? Ce roman est une allégorie, ironique et tendre, moins de notre système de pensée que de la raison raisonnante de qui, pourtant, flue entièrement notre rapport à l'autre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2008
Nombre de lectures 74
EAN13 9782296188488
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0135€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE MAÎTRE-MOT

Daniel Cohen éditeur

Littératures, une collection dirigée par Daniel Cohen
Littératuresest une collection ouverte, tout entière, àl’écrire, quelle qu’en soit
la forme: roman, récit, nouvelles, autofiction, journal; démarche éditoriale
aussi vieille que l’édition elle-même. S’il est difficile de blâmer les ténors de
celle-ci d’avoir eu le goût des genres qui lui ont rallié un large public, il reste
que prescripteurs ici, concepteurs de la forme romanesque là, comptables de
ces prescriptions et de ces conceptions ailleurs, ont, jusqu’à un degré critique,
asséché le vivier des talents. L’approche deLittératures, chez Orizons, est
simple — il eût été vain de l’indiquer en d’autres temps —: publier des auteurs que
leur force personnelle, leur attachement aux formes multiples du littéraire, ont
conduits au désir de faire partager leur expérience intérieure. Du texte
dépouillé à l’écrit porté par le souffle de l’aventure mentale et physique, nous vénérons,
entre tous les critères supposant déterminer l’œuvre littéraire, le style.
Flaubert écrivant: « J’estimepar-dessus tout d’abord le style, et
ensuite le vrai», il savait avoir raison contre tous les dépérissements. Nous en
faisons notre credo. D.C.

Dans la même collection :
Bertrand du Chambon,Loin de V"r"nas#, 2008
Odette David,Le Maître-Mot, 2008
Jacqueline De Clercq,Le Dit d’Ariane, 2008
Toufic El-Khoury,Beyrouth pantomime, 2008
Gérard Gantet,Les hauts cris, 2008
Henri Heinemann,L’Éternité pliée, Journal, édition intégrale.
Gérard Laplace,La Pierre à boire, 2008
Enza Palamara,Rassembler les traits épars, 2008

ISBN 978-2-296-04684-9
© Orizons, chez L’Harmattan, Paris, 2008

Odette David

Le Maître-Mot

roman

2008

Du même auteur

CrépusculeetDésespoir, Paris,Poètes de France, 1971.

Le Vent du soleil, Paris,P. J. Oswald, 1976.

Borfiga le Poète,
Mentonnais, 1993.

Les Itinéraires
Nice.

Menton,

Société

d’Art et d’Histoire du

compagnonniques d’un gâte-sauces, DB Editions,

Autobiographie de convenance de Mme d’Épinay écrivain
philoe
sophe duXVIIIsiècle, L’Harmattan, Paris, 2007.

Colloque International sur Mme d’Epinay, CTEL, Nice, 2007,
(Odette David coordinatrice) à paraître

À mes enfants chéris
et auMaître du silencesans lequel le
Motne serait pas devenuMaître.

lizé, à la fin de l’automne, voit descendre de l’autobus venu
A
de l’aéroport de Nice par l’autoroute, un homme échevelé,
attifé d’une chemise échancrée, d’un certain âge. Personne ne
l’accueille, mais avec son corps d’athlète de compétition, il n’a
pas de mal à rassembler tout son attirail près du portail. Il
semble peu amène, bien qu’il chantonne. Fiévreuse, à cause
d’une angine et d’une crise d’arthrose traitée par acupuncture,
elle appréhende ce voisinage, car c’est avec grand bruit que
l’homme s’active au transbordement de ses affaires sur l’avenue.
Énervée d’être interrompue dans sa tâche de traductrice, elle se
lève, ouvre la fenêtre et, au lieu de répondre au geste amical qu’il
lui adresse, elle fait claquer les volets et s’alite. Sans s’en soucier,
plutôt sympathique, il joue à l’éclipse entre deux vols d’alouettes,
puis disparaîtderrière les grilles de sa propriété.
Ce n’estqu’auprintemps qu’elletentera de déclencherune
approche. Quandun orage d’apocalypse ébranche les platanes et
plonge le quartier périphérique dans l’obscurité, l’auventet une
partie des poutres de la charpente qu’Aubier a rénovées
s’effondrentetc’estl’ébranlement. De sa cachette, Alizé aperçoitsa
silhouette en contre-jour. Il estaffligé,transi de froid. Il s’appuie
contre l’aulne etreste pantois. Unetige de fer a failli l’éborgner.
Ahuri devantcetravail anéanti, il se dit: « Qu’est-il arrivé, quelle
calamité !Ilva falloir se retaper la corvée de l’échafaudage, la
pose des étais, fairevenirun charpentier… ».Ce
constatprovoque en luiune perte d’énergie ; aussi, affublée de saveste
d’astrakan sans élégance maistrès ample etchaude, Alizé se sert
d’une accalmie comme échappatoire.
Elle amorce la rencontre en éclaireur en se fiantauxbons
auspices de l’arc-en-ciel. Erreur de calcul ! Plaque de boue dans

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ODETTEDAVID

la charmille, elle trébuche et tombe. Une écharde plantée dans la
main, elle ne peut se relever. Prenantl’avantage, il arboreune
attitude aimable, lui propose son aide,vientà sa rescousse etelle
se redresse. Pour le charmer, levoyant trempé, elle lui dit sans
ambages de la suivre pour se mettre à l’abri, que ça ne sertà rien
de s’attendrir. Il la remercie de son accueil, s’installe près de
l’abat-jour etde la cheminée. Elle lui sertavec aménitéune
assiette de biscuits-apéritif auxanchois accompagnés de fonds
d’artichauts etd’unverre d’armagnac à l’arôme agréable qui le
tonifie. Retrouvantses ardeurs, apaisé, il plaisante :
– Ah, l’aubaine, quelqu’un d’affable commevous !Tant
pis pour lestuiles perdues etl’arche détruite, je m’y abonne !
Affranchis de la réserve, ils restentjusqu’à l’aube à
caqueter d’une manière arbitraire etparfois surunton
sentencieux, car leurs arguments n’ontguère de consistance. Alizé
éprouve de l’attraitpour cethomme d’un abord accessible,taillé
commeune armoire. Elle apprécie sa physionomie, ses
accrochecœurs châtains sur les tempes, ses yeux radieux en amande. Son
amabilité le rend séduisant.
Avec lui, pas de chicaneries, il réduitles explications à leur
plus simple compréhension. Cette aventure sous averse
détermine d’emblée la nature de leurs relations accommodantes et
affectueuses. Abstraction faite de quelques réticences, il assouvit
sa soif abondante de dire etAlizé, avide d’expulser ses
frustrations, alterne entre l’audition etl’abus de polémiques oude
relances éclectiques, ce qui les maintienten éveil jusqu’à l’aurore.
La première histoire qu’il évoque, réelle ouimaginaire, afflue à
ses lèvres en réponse à la question que lui pose Alizé sur laterre
d’origine de ses ancêtres.
Assis sur le fauteuil d’osier, les épaules baissées, il reste en
attente etpeuà peula réaction nostalgique adoucitsonvisage
austère. Rapidement, Alizé embraye et lui propose l’absorption
d’un café à l’italienne, puis il livre ses confidences plus à lui-même
qu’àun auditeur oubien ressemble àun redoutable académicien
s'habituant, en aparté, à démontrer sathéorie par recoupements.

LEMAÎTRE-MOT

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Bien qu’il lui en remontre, elle ne rechigne pas à faire le relevé de
l’essentiel de ses propos, puisqu’il le désire etqu’elleyconsent
par sympathie.Elle y rajoute des notes en marge et la pagination
recto-verso, envue de réduire les errata. Quelques phrasesun
peu trop recherchées sontraturées, mais grâce à cette récolte,
elle se métamorphose en membre d’une Académie savante,
capable d’appréciations subtiles. C’estmieuxque le
raccommodage des chaussettes !
Ses ascendants, agriculteurs embourgeoisés de la région
vosgienne, possédaientdes arpents deterres agraires avec droit
de pacage, près de la sous-préfecture. Son père, artilleur, servit
comme sous-officier dans les Armées. Il se souvientd’une
auberge entourée d’une haie d’aubépines, près d’un ruisseauqui
serpentaitàtravers les prés. Il attrapaitdes asticots, s’en servait
d’appâts pour pêcher la carpe etles ablettes. Sa mère pétrissaitla
pâte dupain auxenzymes (ou azymes), coupait les abats achetés
chez le tripier ou préparait l’aloyau tandis qu’il aidait son père à
nettoyer les alvéoles des ruches, à rentrer l’avoine. Il l’admirait
quand il

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