André Cornelis
194 pages
Français
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Description

Paul Bourget, né à Amiens le 2 septembre 1852 et mort à Paris le 25 décembre 1935, est un écrivain et essayiste catholique français. Extrait : Et depuis lors, aucune nouvelle. Le soir de ce jour, quand le dîner, reculé de quart d'heure en quart d'heure, eut eu lieu sans que mon père rentrât, lui, si méticuleux, si ponctuel, ma mère commença de montrer une inquiétude qui ne fit que grandir, et qu'elle put d'autant moins me cacher que les dernières phrases de l'absent vibraient encore dans mes oreilles. C'était chose si rare qu'il parlât ainsi de ses occupations ! La nuit passa, puis une matinée, puis une après-midi. La soirée revint. Ma mère et moi, nous nous retrouvâmes en tête-à-tête, assis à la table carrée où le couvert, tout dressé devant la chaise vide, donnait comme un corps à notre épouvante. M. Jacques Termonde, qu'elle avait prévenu par une lettre, était arrivé après le repas. On m'avait renvoyé tout de suite, mais non sans que j'eusse eu le temps de remarquer l'extraordinaire éclat des yeux de cet homme, -- des yeux bleus qui d'habitude luisaient froidement dans ce visage fin, encadré de cheveux blonds et d'une barbe presque pâle. Les enfants ramassent ainsi de menus détails, aussitôt effacés, mais qui réapparaissent plus tard, au contact de la vie, comme certaines encres invisibles se montrent sur le papier à l'approche du feu. Tandis que j'insistais pour rester, machinalement j'observai avec quelle agitation ses belles mains, qu'il tenait derrière son dos, tournaient et retournaient une canne de jonc, objet de mes plus secrètes envies. Si je n'avais pas tant admiré cette canne, et le combat de centaures, travail de la Renaissance, qui se tordait sur le pommeau d'argent, ce signe d'extrême trouble m'eût échappé. Mais comment M. Termonde n'eût-il pas été saisi de la disparition de son meilleur ami ? Sa voix cependant était calme...

Informations

Publié par
Nombre de lectures 53
EAN13 9782824712734
Licence : Libre de droits
Langue Français

Extrait

P A U L BOU RGET
AN DRÉ CORN ELIS
BI BEBO O KP A U L BOU RGET
AN DRÉ CORN ELIS
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1273-4
BI BEBO OK
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Ex. XX, 13.
n
1D é dicace
M H  T aine ,
« L’ ouv rag e auquel on a le plus réflé chi doit êtr e honoré p arA le nom de l’ami qu’ on a le plus r esp e cté . . . » Per meez-moi,
mon cher Maîtr e , d’ empr unter cee phrase à la dé dicace de v otr e liv r e
De l’Intelligence , p our v ous offrir celle de mes études qui, me
semble-til, s’éloigne le moins de mon rê v e d’art : – un r oman d’analy se e x é cuté
av e c les donné es actuelles de la science de l’ esprit. Certes, la différ ence
est grande entr e v otr e vaste traité de psy chologie et cee simple planche
d’anatomie morale , quelque conscience que j’aie mise à en grav er le
minutieux détail. Mais le sentiment de vénération qu’ e xprime v otr e dé dicace
à l’ég ard du noble et infortuné Franz W œpk e n’était p as sup érieur à celui
dont v ous app orte aujourd’hui un faible témoignag e v otr e fidèle
Paul Bour g et.
Paris, 7 janvier 1887.
n
2CHAP I T RE I
  ’    , je me confessais. Combien j’ai souhaité de
fois êtr e encor e celui qui entrait dans la chap elle v er s les cinqQ heur es du soir , cee vide et fr oide chap elle du collèg e av e c ses
mur s crépis à la chaux, av e c ses bancs numér otés, son maigr e har
monium, sa criarde Sainte Famille , sa v oûte p einte en bleu et semé e d’étoiles.
Un maîtr e nous amenait, dix p ar dix. and ar rivait mon tour de
m’ag enouiller dans l’une des deux cases réser vé es aux p énitents sur chaque
côté de l’étr oite guérite en b ois, mon cœur baait à se r ompr e . J’
entendais, sans bien distinguer les p ar oles, la v oix de l’aumônier en train de
questionner le camarade à la confession duquel succèderait la mienne .
Ce chuchotement me p oignait, comme aussi le demi-jour et le silence
de la chap elle . Ces sensations, jointes à la honte de mes p é chés à dir e ,
me r endaient pr esque insupp ortable le br uit de la planchee que tirait le
prêtr e . À trav er s la grille , je v o yais son r eg ard aigu, son pr ofil si ar rêté ,
quoique le visag e fût gras et cong estionné . elle minute d’ang oisse à en
3André Cor nelis Chapitr e I
mourir , mais aussi quelle douceur ensuite ! elle impr ession de suprême
lib erté , d’intime allég e ance , de faute effacé e , et comme d’une b elle p ag e
blanche offerte à ma fer v eur p our la bien r emplir ! Je suis tr op étrang er
aujourd’hui à cee foi r eligieuse de mes pr emièr es anné es p our
m’imaginer qu’il y eût là un phénomène d’ ordr e sur natur el. Où gisait donc le
princip e de déliv rance qui me rajeunissait toute l’âme ? Uniquement dans
le fait d’av oir dit mes fautes, jeté au dehor s ce p oids de la conscience qui
nous étouffe . C’était le coup de bistouri qui vide l’ab cès. Hélas ! Je n’ai
p as de confessionnal où m’ag enouiller , plus de prièr e à mur mur er , plus
de Dieu en qui esp ér er ! Il faut que je me débar rasse p ourtant de ces
intolérables souv enir s. La trag é die intime que j’ai subie pèse tr op lourdement
sur ma mémoir e . Et p as un ami à qui p arler , p as un é cho où jeter ma
plainte . Certaines phrases ne p euv ent p as êtr e pr ononcé es, puisqu’ elles
ne doiv ent p as av oir été entendues. . . C’ est alor s que j’ai conçu l’idé e , afin
de tr omp er ma douleur , de me confesser ici, p our moi seul, sur un cahier
de p apier blanc, – comme je ferais au prêtr e . Je jeerai là tout le détail de
cee affr euse histoir e , mor ce au p ar mor ce au, comme le souv enir viendra.
Une fois cee confession finie , je v er rai bien si l’ang oisse est finie aussi.
Ah ! diminué e seulement !. . . ’ elle soit moindr e ! e je puisse aller et
v enir , av oir ma p art de la jeunesse et de la vie ! J’ai tant souffert et
depuis si longtemps, et je l’aime , cee vie , malgré ces souffrances. Un v er r e
de cee noir e dr ogue , de ce laudanum que j’ai dans un flacon, p our les
nuits où je ne dor s p as, et cee lente tortur e de mes r emords cesserait du
coup . Mais je ne p eux p as, je ne v eux p as. L’instinct animal de dur er
s’agite en moi, plus fort que toutes les raisons morales d’ en finir . Vis donc,
malheur eux, puisque la natur e te fait tr embler à l’imag e de la mort. La
natur e ? . . . Et c’ est aussi que je ne v eux p as aller encor e là-bas, dans cet
obscur monde où l’ on se r etr ouv e p eut-êtr e . Non, p as cee ép ouvante-là .
Je me suis pr omis de me p ossé der , et déjà je me p erds. Repr enons. V oici
donc mon pr ojet : fix er sur ces feuilles cee imag e de ma destiné e que je
ne r eg arde qu’av e c tant de tr ouble dans le mir oir incertain de ma p ensé e .
Je brûlerai ces feuilles quand elles ser ont couv ertes de ma mauvaise é
critur e . Mais cela aura pris cor ps et se tiendra de vant moi, comme un êtr e .
J’aurai mis de la lumièr e dans ce chaos d’atr o ces souv enir s qui m’affole .
Je saurai où j’ en suis de mes for ces. Ici, dans cet app artement où j’ai pris
4André Cor nelis Chapitr e I
la résolution suprême , il m’ est tr op aisé de me souv enir . Allons ! A u fait !
Je me donne ma p ar ole de tout é crir e . – Pauv r e cœur , laisse-moi compter
tes plaies.
n
5

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