Essai sur la race bovine gasconne
15 pages
Français

Essai sur la race bovine gasconne

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
15 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Essai sur la race bovine gasconneVincent Bravat1869Format djvuINTRODUCTION.―――――Aperçu général sur la Gascogne.La Gascogne (Vasconia des Romains) était une grande province de la France,faisant partie du gouvernement de Guyenne.Elle a pris ce nom des Gascons (Vascons), peuples du nord de l’Espagne qui s’enrendirent maîtres vers l’an 600. Tour-à-tour indépendante, anglaise ou française, laGascogne a été définitivement une province française depuis 1452, alors queCharles VII en chassa pour toujours les Anglais. Ceux-ci ne conservèrent plus alorsen France que la ville de Calais.A cette époque, on comprenait sous le nom de Gascogne, cette vaste étendue deterrain comprise entre la Garonne, l’Océan et les Pyrénées ; c’est-à-dire, une bonnepartie du sud-ouest de la France.Aujourd’hui, quelques restrictions sont faites à cet égard ; on comprend dans laGascogne, les départements du Gers, des Landes, des Hautes-Pyrénées ; la partiesud du département de Tarn-et-Garonne, du département de Lot-et-Garonne, et lapartie ouest de la Haute-Garonne, c’est-à-dire la partie de ces départementscomprise sur la rive gauche de la Garonne. Comme les Landes, les Hautes-Pyrénées et le Lot-et-Garonne ont une race de bœufs qui leur est propre, laGascogne se réduit, à mon point de vue, aux trois départements de Tarn-et-Garonne, de Haute-Garonne et du Gers.Voyons donc, dans une rapide esquisse, la topographie de ces trois départements.Le sol de cette région, sans offrir des ...

Informations

Publié par
Nombre de lectures 220
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Essai sur la race bovine gasconneVincent Bravat9681Format djvuINTRODUCTION.Aperçu général sur la Gascogne.La Gascogne (Vasconia des Romains) était une grande province de la France,faisant partie du gouvernement de Guyenne.Elle a pris ce nom des Gascons (Vascons), peuples du nord de l’Espagne qui s’enrendirent maîtres vers l’an 600. Tour-à-tour indépendante, anglaise ou française, laGascogne a été définitivement une province française depuis 1452, alors queCharles VII en chassa pour toujours les Anglais. Ceux-ci ne conservèrent plus alorsen France que la ville de Calais.A cette époque, on comprenait sous le nom de Gascogne, cette vaste étendue deterrain comprise entre la Garonne, l’Océan et les Pyrénées ; c’est-à-dire, une bonnepartie du sud-ouest de la France.Aujourd’hui, quelques restrictions sont faites à cet égard ; on comprend dans laGascogne, les départements du Gers, des Landes, des Hautes-Pyrénées ; la partiesud du département de Tarn-et-Garonne, du département de Lot-et-Garonne, et lapartie ouest de la Haute-Garonne, c’est-à-dire la partie de ces départementscomprise sur la rive gauche de la Garonne. Comme les Landes, les Hautes-Pyrénées et le Lot-et-Garonne ont une race de bœufs qui leur est propre, laGascogne se réduit, à mon point de vue, aux trois départements de Tarn-et-Garonne, de Haute-Garonne et du Gers.Voyons donc, dans une rapide esquisse, la topographie de ces trois départements.Le sol de cette région, sans offrir des plaines considérables, présente, cependant,des vallées assez étendues, couvertes d’une belle végétation, et coupées çà et làde coteaux plus ou moins élevés sur lesquels les fruits de la nature étaient aux yeuxdu vigilant cultivateur la récompense de ses pénibles labeurs.Ces coteaux ne sont pas généralement très élevés ; ils augmentent de hauteur ense rapprochant du sud. Ce sont, pour ainsi dire, les premiers gradins du vasteamphithéâtre qui se termine aux cimes des Pyrénées. Ces coteaux ne laissent pasentr’eux des espaces assez considérables pour former de grandes plaines.Cependant, au nord de la Gascogne, lui formant comme une demi-ceinture, setrouve la plaine de la Garonne, qui s’étend dans les départements de la Haute-Garonne, de Tarn-et-Garonne et de Lot-et-Garonne, se prolongeant ensuite jusqu’àBordeaux.Pour tout le reste de la région, c’est un entrecroisement de coteaux formant desvallées sur lesquelles serpentent, du Midi au Nord, des rivières, des cours d’eauportant la fraîcheur et la vie aux animaux et aux prairies qu’ils abreuvent.On y compte trois principales rivières : la Garonne, le Gers et la Baïse, qui ont pouraffluents un nombre considérable de petites rivières, de ruisseaux, aux bordsdesquels se trouvent en grande partie les prairies sur lesquelles on compte pourl’entretien de la race. Les ruisseaux ne pouvaient qu’être très multipliés dans unpays hérissé de coteaux : chaque gorge, en effet, a sa naïade qui, à sec ou à peuprès pendant l’été, fournit pendant les autres saisons, et surtout en hiver, assezd’eau aux ruisseaux avoisinants pour les forcer à sortir de leur lit et à promenerleurs eaux bienfaisantes sur les prairies qui en forment les rives. De cette manière,
une couche de limon est répandue sur les plantes qui redoublent d’ardeur sousl’action de cet amendement tout providentiel.La température est assez modérée dans cette région. Il en serait bien autrement,sans l’immense barrière qui sépare la France de l’Espagne. Sans les Pyrénées, eneffet, le nord de l’Espagne et le Midi de la France jouiraient de la mêmetempérature ; tandis que, lorsque l’habitant espagnol jouit de tous les agréments duprintemps, le montagnard français vit encore au sein des neiges et des glaces.Cette différence de température se fait aussi sentir, quoique bien atténuée, dansles coteaux de la Gascogne qui sont, comme je l’ai dit, les premiers gradins del’amphithéâtre. De là l’explication de ce fait contre nature, que dans le nord de laGascogne la température est plus élevée que dans le midi ; cela est dû àl’irradiation du versant nord des Pyrénées.Cependant cette température, toute modérée soit-elle, s’élève cependant assezquelquefois, pour gêner la croissance des plantes constituant les prairies, car onvoit quelquefois cette herbe rester sans vigueur, quand des pluies ne viennent pasde temps en temps activer sa végétation. Malgré ces exceptionnelles rigueurs detempérature, l’agriculteur gascon peut, son industrie aidant, récolter assez defourrages pour faire prospérer la race essentiellement de travail qui s’estdéveloppée dans sa région.Comparativement à la Normandie, par exemple, et toutes proportions d’élèvegardées, la quantité de fourrages est évidemment moins considérable ; mais peut-on comparer ces herbages aqueux de la Normandie aux fourrages fins etsubstantiels de la Gascogne renfermant pour ainsi dire en nature, l’énergiequ’absorbe directement l’animal ? Évidemment, non. Du reste, le but final de cesfourrages n’est pas le même, la Normandie élevant principalement des bœufs deboucherie, véritables greniers à fourrages, et des vaches pour la production du lait ;tandis que la Gascogne élève des bœufs robustes, énergiques, dont le but principalest le travail. Le bœuf gascon, du reste, semble comprendre jusqu’à un certain pointla parcimonie parmi laquelle il vit ; il est bien plus sobre, moins d’aliments lecontentent.Qu’on dise le rapport des prairies trop minime relativement au reste du terrain, jel’accorde volontiers et ne puis que m’associer aux efforts de tous ceux qui veulenten faire augmenter la proportion, car les prairies sont le nerf de l’agriculture.Elles donnent, en effet, la faculté de nourrir de nombreux bestiaux ; ceux-cifournissent beaucoup d’engrais qui doublent la fécondité des terres. Lespropriétaires gascons ne sont pas encore assez pénétrés de cette vérité ; c’est cequi fait que les prairies n’occupent encore que le septième au plus de la propriété ;tandis que si elles en formaient le quart ou le tiers, on récolterait, au moins, autantde grains qu’à présent et les profits sur les bestiaux seraient considérablementaugmentés. Les Anglais se sont basés en grande partie sur ce principe pour enarriver à la production et à l’amélioration de ces races qui ont fait l’admiration detous et la fortune de leurs propriétaires.Le terrain de la Gascogne est pour la plupart de formation secondaire, tertiaire encertains endroits. Les différentes natures de terre qui forment la couchesuperficielle du sol, sont éminemment argileuses, renferment plus ou moins decalcaire, se durcissent plus ou moins par les fortes chaleurs de l’été. Dans le pays,on les distingue en terre forte et en boulbène ; la première renferme du calcaire engrande quantité mêlé à de l’argile ; la seconde c’est de l’argile blanche mêlée desable.Une chose qui mérite à tous égards d’attirer l’attention de l’administration, c’estl’insuffisance des routes dans la Gascogne et notamment dans le département duGers où elles sont encore peu répandues. Cependant, les principaux centres sontréunis par des voies de communication assez aisées, et depuis quelques années,un nombre considérable de chemins vicinaux est venu suppléer au manque degrandes routes ; de sorte qu’on peut, maintenant, allers peu près partout et à sonaise de village en village. Mais il y a encore beaucoup à faire.Ces conditions topographiques et climatériques diverses auront leur influence surles races domestiques locales et notamment sur l’espèce bovine, dont lescaractères extérieurs portent l’empreinte de ce milieu spécial.Nous avons dit que le sol est assez irrégulier, qu’il présente des collines, desvallées, des coteaux. Quoi de plus propre à donner au bœuf cette sûreté du pied,cette rusticité qu’on doit trouver dans toute bonne race de travail ? Le bœuf, enmarchant sur les plaines, le long des vallées, conserve ses régularités d’aplomb, eten gravissant les coteaux, s’habitue peu à peu à la fatigue, à la résistance.
Les eaux fournies par les rivières et les ruisseaux sont de très bonne qualité etconcourent à entretenir la santé des animaux.Il n’y a pas de marais pouvant donner des maladies paludéennes, et c’est un pointtrès important, car le vent du sud-est, qui souffle très souvent dans cette région,pourrait facilement transmettre les effluves. Dès lors, le vent, qui aurait été levéhicule de ces effluves, devient par l’absence de celles-ci une des conditions desanté et de robusticité ; car les animaux étant peu à peu soumis à ceschangements de température, habituent leurs organes à se suppléer entr’eux dansle moment de ces variations et donnent plus de robusticité à la machine.La température modérée empêche de tomber dans les deux extrêmes inévitables,ou d’un bœuf énorme, lourd, lymphathique outre-mesure, développé par desaliments donnés en abondance, fournis par un climat froid et des localités basseset humides ; ou bien d’un bœuf de petite taille et nerveux, produit par un climatchaud et sec. Nous jouissons d’un climat tenant un juste milieu entre ces deuxextrêmes de température, nous pourrons donc produire un bœuf entre ces deuxextrêmes de conformation, ayant une taille moyenne, assez corsé, sans former unetrop lourde masse et présentant beaucoup de résistance.Les prairies, avons-nous dit, sont assez abondantes pour la quantité relativementminime de bœufs qu’on élève. Elles sont de bonne qualité, ce qui ne gâte rien pourélever des animaux robustes. Par une nourriture abondante, mais aqueuse, onproduit des animaux à gros volume dont le système digestif surtout s’amplifie, lesystème cellulaire devient abondant, l’animal est lymphatique et prédisposé àl’engraissement.Les inconvénients d’une nourriture abondante, mais peu substantielle, étant connus,il ne sera pas difficile de saisir les avantages d’une nourriture moins abondante,mais plus alibile. Par elle, l’animal acquiert beaucoup de force, d’énergie ; lapoitrine se dilate, le système musculaire se tasse, se raffermit, et sans que lesmuscles augmentent sensiblement de volume, leur force contractile est beaucoupplus considérable. En un mot, on a plus de force sous un même volume. Les oségalement se tassent, deviennent un peu plus volumineux, plus durs à cause del’abondance du calcaire dans les aliments.Le sol, avons-nous dit, est plutôt sec qu’humide, formé d’argile en grande quantité,mêlée de sable et de calcaire. Ce sont encore là autant de bonnes conditions, carle sol n’est pas assez humide pour graver les empreintes de son attribut surl’animal. Humide, en effet, il aurait donné un pied large, plat, faible, il aurait produitl’empâtement des membres ; sec, au contraire, il aurait produit un pied serré, trèsdur, susceptible de se gercer, et pouvant produire facilement des boiteries.Telle est, en quelques mots, la disposition des lieux où la race gasconne a prisnaissance, et où elle se perpétue depuis longtemps. Le peu que j’ai pu en diresuffira, je l’espère, pour faire comprendre la facilité avec laquelle on pourrait arriverà la perfectionner.Caractères généraux de la race bovine GasconeA — Caractères extérieurs. La race gascone est une des plus remarquables deFrance par l’uniformité et la fixité de ses caractères. Son pelage gris blaireau estreprésenté à peu près sur tous les individus. La couleur n’a pas cependant la mêmeintensité sur le même sujet ; certaines parties du corps sont plus foncées que sonensemble ; ainsi à la tête, vers sa partie inférieure surtout, la couleur est plussombre. Il en est de même de la partie inférieure des membres, surtout à la partieantérieure des boulets, à la couronne et à la partie antérieure de l’avant-bras. Il enest de même à l’encolure.A la partie supérieure, sur la ligne du dos, la nuance est plus claire et va en fondantsa couleur de plus en plus sombre, sur les côtés de la poitrine. La tête est large etcarrée, forte, présentant beaucoup de résistance ; elle est surtout large de la based’une corne à l’autre.Le mufle est toujours noir ou gris foncé ; au pourtour des yeux et au bord libre despaupières, leur formant comme une bordure, existe aussi un liseré noir. Les cornessont fortes à leur base, dirigées en avant en s’incurvant en bas et en dehors,
toujours noires à leur sommet. Le cou est court et volumineux, indiquant une grandepuissance ; à sa partie postérieure, chez le taureau, existe un renflement sorte deloupe qui relève son garrot. La ligne du dos est rectiligne, quelquefois, cependant,un peu infléchie en arrière du garrot. Le fanon a un développement moyen. Lepoitrail est large, développé, maintenant écartés l’un de l’autre les membresantérieurs. La poitrine est développée ; mais la côte est généralement un peu plate.Le ventre est assez volumineux.On reproche au bœuf gascon d’avoir la croupe trop rabattue, la queue attachée trophaut, le train postérieur trop étroit, de sorte qu’il y a un défaut d’harmonie entre letrain antérieur et le train postérieur. Cette particularité très évidente chez le mâle,est même apparente chez la femelle où le bassin est étroit, de sorte qu’il y a assezsouvent dans cette race des difficultés de part.Les membres sont forts, les rayons osseux développés, les articulations larges,portant le cachet d’une grande force d’impulsion ; le pied est moyen endéveloppement, très bien conformé, enveloppé dans une corne noire de très bonnequalité, protégeant l’animal contre les atteintes des corps extérieurs.Le bœuf gascon reflète une grande force, reconnaissable à la saillie et audéveloppement de la musculature générale, à sa peau épaisse pourvue de poilsassez développés. Sur sa physionomie on reconnaît au premier abord beaucoupd’intelligence et d’énergie. Il n’a pas cet air somnolent, dormeur debout, qu’onrencontre dans les races spécialement d’engrais ; mais un air de fierté et d’agilitéqui lui donne une distinction toute particulière.Lorsque leur éducation n’a pas été manquée, ils ont un naturel très doux, on lesmanie facilement, ils s’attellent fort bien et se plient à toutes les exigences del’homme.Des particularités caractéristiques trouvent maintenant leur place pour aider àdistinguer cette race ; elles méritent d’autant plus d’être citées, que lesconnaisseurs les estiment beaucoup et les considèrent comme un témoignage depureté, de noblesse et de bonne origine : A l’extrémité libre des bourses, l’entourantcomme une cupule, existe une partie de peau de couleur noire, bien délimitée etpourvue de poils fins à sa surface. Autour de la marge de l’anus existe aussi uncercle noir qu’on désigne sous le nom de cocarde. Au bord libre de l’oreille, existeune sorte de bordure noire d’environ un centimètre de largeur. Un dernier signecaractéristique que l’on prend en assez grande considération, c’est une partieblanche servant de bordure au mufle et entourant l’extrémité inférieure de la tête.B. — Qualité spéciales, origine. — Élevé dans une région où les travaux del’agriculture sont exclusivement confiés à l’espèce bovine, le bœuf gascon à unetrès grande importance, car il offre le type des races de travail. À ce point de vue, ilest le plus estimé de la région du Sud-Ouest, et sous d’autres points de vue il est undes meilleurs de France ; car, après avoir, pendant sa vie, usé ses forces auservice de son maître, il lui fournit après sa mort une excellente viande deconsommation. Il n’a pas le volume de certaines races du Nord, rendues pour ainsidire informes par une monstrueuse bouffisure de suif ; mais il fournit une viandegrasse à proximité, fine, de très bon goût et très nutritive. C’est, du reste, le propredes animaux de travail de s’engraisser facilement une fois qu’on les laisse sereposer : l’activité vitale de ces animaux est rendue très grande par l’exercice. Parle travail, en effet, les fonctions de nutrition se sont suractivées et ont fourni plus detonicité à la fibre musculaire. Il n’aurait pas fallu cependant outrer les exigences dutravail, car alors on ne serait arrivé qu’à ruiner l’économie même prématurément eton aurait manqué le but final, la boucherie. En modérant ce travail, au contraire, et lefaisant cesser alors que les mouvements de composition et de décomposition sontéquilibrés, on maintient cet équilibre tout en permettant le dépôt de graisse dû ausurcroît de nourriture qu’on a été obligé de donner pour favoriser ce but.On reproche à la vache Gascone de ne pas être assez bonne laitière ; mais elle nepeut avoir, pas plus que n’importe quelle race bovine, toutes les qualités à la fois ;et la réputation de bonne travailleuse, ainsi que la faculté de bien s’engraisseraprès, lui suffisent pour la faire estimer entre les races françaises. Du reste, lafaculté lactifère est une aptitude spéciale qu’on ne peut créer qu’en en sacrifiantd’autres et en mettant en jeu des moyens anti-hygiéniques impropres, parconséquent, à développer l’aptitude au travail.Il est donc bien établi que la race bovine gascone est spécialement une race detravail, une bonne race de consommation et une mauvaise laitière.Son centre de production est dans tout le département du Gers, de la Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne. C’est dans les coteaux du Gers, dans
l’arrondissement de Lombez, que la race a pris naissance ; c’est là aussi qu’on lareproduit avec ses caractères les plus uniformes. Mais de là elle s’irradie dans leslocalités environnantes en fondant ses caractères avec les races voisines : du côtéde l’Aveyron avec la race d’Aubrac, du côté de l’Ariège avec la race Carolaise et larace de St-Girons, du côté du Lot-et-Garonne avec le Garonnais du coteau ; du côtédes Pyrénées avec les races Béarnaise et Basquaise.Peut-être toutes ces races, qui ont entr’elles une certaine uniformité, dérivent-ellestoutes d’une race souche qui aurait existé d’abord dans la contrée et qui leur auraitdonné naissance. Quelle différence y a-t-il, en effet, entre la race Gascone et la raceCarolaise ? Aucune, si ce n’est que dans cette dernière la taille est moins élevée etles formes mieux arrondies, la conformation est meilleure, grâce aux sélectionsmieux suivies. Quant à la race d’Aubrac, il est assez difficile de la distinguer de larace Gascone ; comme celle-ci, elle est gris blaireau, elle a les mêmes aptitudes autravail et à l’engraissement, elles ont à peu près les mêmes caractères ; de sorteque mettant ensemble six animaux de l’une et de l’autre race, il est assez difficile dedistinguer à laquelle des deux ils appartiennent.Les propriétaires de l’Aveyron disent que la race Gascone n’est qu’unedescendance de la race d’Aubrac et que c’est cette dernière qui lui a donnénaissance. Mais les propriétaires gascons peuvent, aussi bien qu’eux, mieuxqu’eux peut-être, prendre le change et se donner satisfaction à leur tour, en disantque leur race a donné naissance à celle d’Aubrac. Un fait rendu certain aujourd’huipar la sanction de tous ceux qui se sont occupés de zootechnie, c’est que la raceGascone a pris naissance dans les coteaux du Gers où elle a uniformisé sescaractères. Ce n’est donc pas de celle d’Aubrac qu’elle est née, et si en réalitél’une d’elles a donné naissance à l’autre, c’est évidemment la race Gascone qui estla fondatrice. Quoiqu’il en soit de la race d’Aubrac, on ne saurait contester auxraces précédemment énoncées une ressemblance de type qui leur donne pourainsi dire un air de famille permettant de les ranger autour d’un centre communreprésenté par une race qui leur aurait servi de souche et autour duquel elles seseraient répandues. Pourquoi ce centre ne serait-il pas la race Gascone ? Il est aumoins permis de le supposer. M. Sanson (Livre de la Ferme) semble pencher verscette opinion quand il dit :« Le principal centre de production de la race Gascone est dans le département duGers dont elle est originaire. De là elle s’est répandue dans une partie dudépartement de Tarn-et-Garonne, dans la Haute-Garonne et jusque dans l’Ariègeen formant des tribus qui se distinguent seulement par des différences dans la tailleet le développement. »C. — Historique. — Malgré ses bonnes qualités, cette race n’est pas connuedepuis très longtemps. Grognier, dans la Maison Rustique (1837), parle des racesde Gascogne qu’il décrit comme, d’engrais ne servant guère ou pas, pour lestravaux de l’agriculture, vu que les bœufs d’Auvergne ou de Querci les remplaçaientpour faire les labours en Languedoc. Ces quelques mots qu’il en donne, font croirequ’il ne s’agissait pas de la race Gascone, ou que, s’il voulait parler d’elle, sescaractères et ses aptitudes se sont considérablement modifiés depuis trente ans. Ilest plus rationnel d’admettre qu’il a voulu faire le portrait de la race Garonnaise.Mais elle est restée dans l’oubli encore plus longtemps ; M. Magne, directeur del’École Vétérinaire d’Alfort, la connaissait à peine alors qu’il fit son Traité d’hygièneen 1857.On a cependant commencé à l’apprécier au concours international qui eut lieu àParis en 1856 et où elle se fit remarquer par sa bonne conformation. Quelquestypes que l’on y avait amenés, firent l’admiration des éleveurs du nord de la Franceet l’objet de louanges des agronomes les plus distingués. Ils admiraient leurconformation, leur air de fierté ; mais s’ils les eussent vus au travail, ils eussentcertainement bien plus admiré leur force.Avant cette époque, la race Gascone était très peu connue ; on avait vu, tout enpassant, ces animaux traîner la charrue dans notre pays ; mais comme ils avaientété peu étudiés et appréciés, on ne s’était pas donné la peine de les remarquer. Ilne fallut rien moins que la réunion dans notre capitale d’un nombre considérable deproduits de toute sorte, exposés par les diverses nations entre lesquelles devaientse distribuer les prix du concours, pour faire sortir de la nuit qui l’enveloppait, cetterace si importante, qu’on s’accorde à considérer aujourd’hui comme la meilleuretravailleuse de France.Hygiène du Bœuf gascon.
A. — Reproduction. — La reproduction, pour se faire, implique un premier acteessentiel qu’on nomme accouplement, saillie ou, d’une manière plus générale,monte. La monte, pour l’espèce bovine dans la Gascogne, se fait d’une manièreassez vicieuse. Une vache est-elle reconnue en rut, on choisit dans la journée lemoment qu’on a le plus libre et on la conduit au mâle qui se trouve ordinairementchez un des fermiers voisins, faisant ou non payer la saillie ; son devoir de voisin lelui défend le plus souvent. On prend de préférence un taureau qu’on sait avoirdonné l’année précédente un bon résultat avec une autre vache, sans tenir comptede la conformation de celle-ci, de la couleur du taureau, de son âge, de sa racemême ; car il arrive souvent pour ne pas perdre de temps à aller chercher loin cequ’il a près, le fermier gascon livre sa vache à un taureau Garonnais, dont lesformes sont faites, d’ailleurs, pour le séduire vite, mais qui sont loin de donner lerésultat qu’il en attend. Il l’a sous la main et il s’en sert d’une manière empirique,sans raisonner sur son emploi, sans s’assurer si sa conformation pourra, par laprocréation, corriger les défauts de la mère, sans se rendre compte que son emploipourra peut-être diminuer chez le produit l’aptitude au travail qui est une desqualités précieuses de notre race. On n’use pas, ou on use peu des taureauxétalons que le département met à la disposition des propriétaires, parce qu’ils sontpeu répandus et par conséquent trop éloignés les uns des autres pour pouvoir êtreà la portée des éleveurs. Encore une question de temps perdu que l’éleveur met enavant pour excuser sa traditionnelle routine. Souvent même la vache est conduitedans un coin du pâturage voisin, et le premier taureau qui s’est résigné à quitterl’herbe tendre pour accomplir l’acte de son sexe, fait la saillie. Ce sont là autant deprocédés vicieux qui, loin de faire supposer à l’éleveur une économie de temps,devraient lui montrer palpable une moins-value du produit obtenu ; moins-value qui,mise en ligne de compte, le dédommagerait et au-delà, du temps employé à choisirun meilleur reproducteur, si elle n’avait pas existé.Quoiqu’il en soit, la saillie étant faite, la vache est reconduite à l’étable, où elle estmaintenue dans une demi-diète jusqu’au lendemain matin. Ordinairement une seulesaillie suffit pour opérer la fécondation, et le lendemain on la remet au pâturageavec le reste du bétail.Alors commence la période de la gestation qui dure 9 mois pendant lesquels lafemelle pleine n’est soumise à aucune hygiène spéciale ; la nourriture, le travail,l’habitat sont les mêmes pour elle que pour le reste du bétail ; tout au plus cesse-t-on de la faire travailler sept à huit jours avant la mise-bas. Il arrive même que la bêteétant à la charrue ou à la charrette, on soit obligé de la dételer pour lui permettred’accomplir l’acte de la parturition dont on vient d’apercevoir les signesprécurseurs.La parturition, dans les cas les plus ordinaires, se fait d’une manièrephysiologique ; mais il arrive assez souvent qu’il y a difficulté de part due aumanque de largeur du train postérieur, impliquant l’étroitesse du bassin. Dans laplupart des cas, la vache, sentant les douleurs, trépigne, s’agite, pousse desmugissements plaintifs. Lorsque l’acte commence, elle porte en arrière ses deuxmembres postérieurs, de manière à ce que le fœtus descende doucement à lafaveur de ce plan incliné formé par leur disposition, jusque sur la litière moelleusedestinée à le recevoir. On détache alors la vache pour lui permettre de lécher sonveau. Quand celui-ci est bien sec et qu’il a pris un peu de force pour se soutenir surses membres, on le présente aux trayons de la mère et on le fait téter. Il y a despersonnes qui, au lieu de faire téter au veau ce premier lait, l’expulsent au moyende la mulsion, prétendant qu’il est trop aigre et pas assez fait pour ne pas nuire aunourrisson. C’est là une grave erreur, la nature fait trop bien ce qu’elle fait pour avoirmis à la place de cet indispensable laxatif, un liquide susceptible de nuire à sonnouveau protégé. Elle a, au contraire, mis tout exprès dans la première nourrituredu nouveau-né un principe particulier appelé colostron, destiné à évacuer de sonintestin les excréments alvins qui s’y sont accumulés pendant la vie intra-utérine etauxquels on donne le nom de méconium.B. Élevage du veau. — Voilà donc le nouvel être séparé de sa mère et devantdorénavant vivre de sa vie propre. Ici commence la période d’allaitement pendantlaquelle sa nourriture spéciale est le lait presque exclusivement ; si, cependant, ilest destiné à être vendu vers l’âge de quatre ou cinq mois, on est dans l’habitudede lui donner des fèves bouillies avec addition d’un peu de son. Afin de mieux ledisposer à la boucherie, on le fait aussi téter à plusieurs vaches qui souvent lereçoivent fort mal. Cette mauvaise habitude, outre l’inconvénient qu’elle a d’exposerle veau aux coups de sa nourrice improvisée, a aussi celui bien plus grand derogner la part du véritable nourrisson qui a bien besoin de tout le lait que sa mèrepeut lui fournir pour développer sa jeune constitution. Si on reconnaît au veau une
bonne conformation, ou que pour une raison quelconque, on se décide à le laissergrandir à la ferme pour en faire plus tard un bœuf, on le réduit spécialement au laitde sa mère, et une fois sevré, il vit presque exclusivement de ce qu’il trouve aupâturage.Lorsqu’on veut le sevrer (vers l’âge de quatre ou cinq mois), voici comment onprocède dans la plupart des cas : on le laisse sans téter un ou deux jours pendantlesquels on lui donne à l’étable du fourrage sec et un peu de farineux, puis on lelâche dans le pâturage avec la mère et le reste du bétail, après lui avoir placé unemuserole pourvue de pointes acérées, afin que celles-ci, venant à piquer lesmamelles de la mère lorsque le veau veut y porter ses lèvres, elle lui en défendel’approche. Ou bien on se contente d’enduire les trayons d’une matière quelconquesusceptible d’empêcher, par son odeur, l’approche du jeune veau, désormais privéde la nourriture maternelle. Ce sont là de mauvais procédés, car la mère, en sedéfendant, peut frapper contre les pointes de la muserole et se les enfoncer dans lepied. Le meilleur moyen, c’est de séparer pendant un septénaire la mère du petit etde nourrir convenablement celui-ci. Après ce temps, la mère a presque oubliéqu’elle avait un fils et le veau qu’il avait une mère.Le sevrage une fois terminé, commence, à proprement parler, la période del’élevage, et nous allons voir qu’il est assez mal pratiqué dans notre région.Aussitôt sevré, le jeune élève est, pour ainsi dire, abandonné à lui-même dans lespâturages, où il sait à peine ramasser l’herbe qui, dorénavant, sera son seulaliment. Il est ainsi mis, sans transition, du régime lacté au régime du vert ; tout auplus lui donne-t-on, dans le commencement, un peu de farine avant de le mettre aupâturage et quand il est rentré à l’étable. Mais bientôt, grâce à l’énergie derésistance que lui ont léguée ses parents, il est habitué à ce régime du vert, le seulauquel il sera soumis jusqu’à l’entrée de la mauvaise saison.Le veau a alors environ six mois ; les pâturages sont rasés, l’hiver a ramené lesfroids et la pluie, il est alors rentré en stabulation dans des étables mal aérées, malconstruites, généralement basses, étroites, ayant pour toute ouverture la ported’entrée du bétail et quelquefois une fenêtre ; le tout, du reste, parfaitementinsuffisant pour fournir assez d’air de rénovation. Aussi, quand on entre dans laplupart de ces étables, est-on frappé de la température sensiblement plus élevéeque celle du dehors ; les animaux sont placés là. en trop grand nombre et s’ytrouvent comme dans une étuve ; ils respirent à pleins poumons un air miasmatique,vicié par leur propre respiration et contraire à celui que prescrivent les règles d’unebonne hygiène. Ce sont là de très mauvaises conditions qui influent d’une manièrenotable sur la santé des animaux et dont on ne tient pas assez compte dans notrerégion, Il serait cependant d’un intérêt capital de se rappeler que c’est par un air debonne nature, qu’on entretient une des fonctions les plus importantes de la machineanimée, fonction sans laquelle les autres ne pourraient s’effectuer et apporter leurcontingent d’action dans l’entretien de la vie. Or, cet air, pour aussi sain soit-il, avantque les animaux n’y aient pénétré, devient bientôt anormal par leur exhalaisoncutanée et pulmonaire, si on n’a pas le soin de le tenir constamment renouvelé. Ony parviendra en construisant des étables assez spacieuses, assez hautes ; il faudramultiplier le nombre des ouvertures, les placer en regard, mais éviter avec le plusgrand soin que le courant d’air qui s’établira entr’elles tombe directement sur lesanimaux. Il faudra établir des barbacanes, des cheminées d’appel et enfin tout cequi est capable de donner une bonne aération.Non-seulement les jeunes élèves reçoivent une mauvaise aération ; mais encore ilssont mal pansés et mal nourris. On ne se rend généralement pas assez compte desbons effets du pansage ; on laisse les animaux pendant huit et même quinze jourssans les débarrasser des corps étrangers qui se sont insinués sur la peau et entreles poils. De cette façon, le produit de la transpiration cutanée, sans cesse chasséau dehors à travers les pores de la peau, s’agglutine avec les débris d’épidermequi se détachent constamment de sa surface et avec les corpuscules de poussièretoujours en mouvement dans l’air ; cet enduit, en se collant avec la base des poils,constitue une sorte de barrière qui empêche les fonctions de la peau, ou tout aumoins les gêne assez dans certains endroits pour occasionner quelquesdésordres. Il produit toujours une irritation de la peau, occasionnant unedémangeaison assez vive et souvent même une inflammation de ce tégument.Pour ce qui est de l’alimentation, elle est également mal entendue ; pendant l’hiverla nourriture, qui pourrait être si variée, est réduite simplement aux substancessuivantes : paille de blé et d’avoine, foin, luzerne et balles de graminées qui ont étéconservées pour cette saison depuis le dépiquage. Voilà, dans la très grandegénéralité des cas, à quoi se réduit la science de l’alimentation du bœuf dans laGascogne, jusqu’en avril, époque à laquelle le vert des prairies artificielles
commence à arriver et qui dure jusqu’en juin. Le jeune élève a alors un an ; on leremet au pâturage et il est soumis à la même série de soins jusqu’à l’âge de deuxans et demi, époque à laquelle on pratique généralement la castration.C. Dressage. – Bientôt après la guérison de l’opération commence le dressage. Ilest dans la destination du bœuf gascon d’être une race essentiellement de travail ;sa conformation, on le sait, s’y prête avec beaucoup de facilité. Le travail favorise ledéveloppement de l’individu, le maintient en santé, le rend plus énergique ; il faitdisparaître jusqu’à un certain point le lymphatisme. Il est surtout avantageux au pointde vue économique. Le travail paie l’entretien des animaux en même temps qu’illes rend plus propres à tous les usages ; la viande est meilleure, plus savoureuse,moins adipeuse, moins couverte de suif que chez les animaux qui n’ont jamaistravaillé. Il faut que l’on puisse engraisser les animaux économiquement, et un desmoyens d’y arriver, c’est de leur faire gagner par le travail les aliments qu’ilsconsomment.On le voit donc, le travail est très utile pour l’utilisation et l’hygiène du bœuf ; il s’agitde bien l’y préparer. Un des moyens pour y arriver est le dressage. C’est peut-êtrela question la mieux comprise des éleveurs gascons. Ils commencent de caresserle sujet dès son bas âge, l’habituent à se laisser approcher sans frayeur, se lerendent familier, lui parlent comme s’il pouvait les comprendre. Plus tard, lorsqu’ilpeut s’atteler, on le fixe au joug avec un bœuf déjà dressé, puis on joint ensembleles deux jeunes élèves, on leur fait faire de légers travaux et dans peu de temps ilsont compris ce qu’on exige d’eux. Peu à peu, on les met à un travail plus fort etbientôt le dressage est complet. Ce sont alors des bœufs que l’on emploie pourl’exploitation de la ferme ou que l’on vend pour le travail. Quand ils restent dans lepays, ils sont employés aux travaux de l’agriculture jusqu’à un âge avancé, tropavancé même pour pouvoir être livrés avec fruit à la boucherie. Voici ce que dit àce sujet M. Sanson dans le Livre de la Ferme : « Le progrès pour la race Gasconeconsiste à réduire, dès maintenant, la durée de la vie des individus par lerenouvellement plus fréquent des attelages de bœufs, en les livrant auxengraisseurs au moment où ils commencent à entrer dans la période décroissantede leur vie. On ne peut que perdre à faire travailler un bœuf au-delà de huit à neufans. Le capital qu’il représente va rapidement en décroissant à partir de cemoment. Le prix de revient de ses services se trouve donc augmenté d’autant. »Quant à l’engraissement, on le pratique fort peu dans notre contrée, aussi je ne m’yarrêterai pas.Amélioration de la race Gascone.La race bovine gascone, malgré ses bons caractères, ses remarquables aptitudes,a cependant besoin encore d’amélioration afin d’en arriver au perfectionnementdésirable. Pour atteindre ce but, on devra faire agir sur l’organisme les diversmoyens que la nature et la science ont mis à la disposition de l’homme. L’emploi deces agents doit être fait avec méthode, car c’est par leur application selon lesrègles, qu’on peut en obtenir la plus forte somme de résultats. On peut diviser lesagents susceptibles de produire l’amélioration des races en deux catégories : 1°les agents directs ; 2° les agents indirects.A. — Agents directs. — Les agents directs sont ceux qui agissent d’une manièredirecte, immédiate, sur les produits par l’union des producteurs, en un mot, ce sontles agents fournis par la génération qui produisent leur résultat sous l’influenced’une loi physiologique, l’hérédité.Choix des reproducteurs — C’est une des questions les plus importantes pourl’amélioration, question critérium de tout perfectionnement et par laquelle on doitcommencer d’asseoir ses manipulations comme on commence par les fondementsquand on veut construire un édifice. Ce fondement, malgré sa très grande utilité, estpeut-être la partie de l’édifice la plus mal comprise des éleveurs, celle qu’ils dirigentavec le moins d’intelligence. Nous avons vu, en effet, qu’ils se laissent entraîner parune question de temps, de routine et de hasard ; qu’ils se laissent souvent tenterpar l’harmonie de formes du taureau garonnais et le choisissent pour reproducteur.C’est une très mauvaise pratique ; on devrait exclusivement améliorer la race parelle-même. Il ne nous est pas permis, dans l’état actuel de notre agriculture, de fairedes croisements. Il faut donc choisir des reproducteurs dans la même race, ce quiconstitue l’appareillement ou la sélection.
Par la sélection, on fera naître des individus chez lesquels les formes et lesaptitudes seront gravées par les reproducteurs, avec d’autant plus d’efficacité queces derniers les auront possédées à un plus haut degré. Par le fait de l’hérédité, leproduit sera semblable à ses procréateurs, surtout si le type est devenu très stablepar la consanguinité. Or, la race Gascone, nous le savons, est une de celles quiprésentent le plus de fixité par ses caractères ; le véritable moyen de conservercette fixité sera donc d’accoupler entre individus de la même race. Pour aussiuniformes que soient les caractères de la race, ils ne sont pas semblables sur tousles animaux qui la composent ; car, s’il en était ainsi, le choix des reproducteursdeviendrait inutile et la sélection se ferait d’elle-même sans avoir besoin d’autresecours que le hasard. Il y a donc des types qui sont mieux conformés que d’autres,qui possèdent à un plus haut degré ces caractères particuliers propres aux racesde travail. Il faudra choisir ces sujets et les employer pour perpétuer l’espèce parcequ’ils l’amélioreront. Par la génération, en effet, le sperme du mâle et l’ovule de lafemelle se fondent entr’eux, les deux substances s’identifient et n’en forment qu’unequi sera plus tard le petit ; il est facile de comprendre, d’après cela, que l’êtreprocréé doive dépendre essentiellement de ses procréateurs et que saconformation soit d’autant mieux perfectionnée que celle de ses parents l’était elle-même à un plus haut degré.En étudiant les caractères de la race, outre ses qualités, j’ai signalé les principauxdéfauts dont elle est généralement entachée. J’ai dit qu’on reprochait souvent aubœuf gascon d’avoir la queue attachée trop haut, le train postérieur, principalement,trop étroit, la culotte pas assez étendue ; la ligne du dos un peu infléchie et la côteun peu plate. C’est en grande partie sur la connaissance de ces défauts, qu’ondevra s’appuyer pour améliorer avantageusement notre race. Le mal étant connu, ilsera facile de lui opposer un remède rationnel.La prévoyante nature, ici comme partout, a placé le remède à côté du mal, car aumilieu de ces animaux présentant généralement les défauts précédents, se trouventdes étalons très bien conformés susceptibles de donner de très bons produits.Quand on voudra choisir un reproducteur mâle, on fera attention qu’il ait le trainpostérieur large, développé, la fesse descendue et la côte ronde. Quant au défautde la queue, ce n’en est pas un en réalité, car il n’est guère nuisible si ce n’est aucoup d’œil qui ne se trouve pas flatté de voir cette sorte de promontoire terminant laligne du dos. Pour les autres qualités qu’il y aurait à examiner, annonçant uneaptitude au travail, il n’y a guère à s’en occuper, vu que tous les sujets ou à peu prèsles possèdent comme caractère typique, tant la race a pris de fixité, d’uniformité. Il yaura encore moins à s’en occuper quand on aura mis en pratique un moded’élevage plus rationnel que j’indiquerai plus loin.Choix des femelles. — Il est certainement d’une grande utilité de choisir un taureaubien conformé et susceptible de corriger en partie les défauts de la mère ; maiscela ne suffit pas. Malgré les progrès qu’a faits la science de l’élevage, beaucoupde propriétaires (et c’est le plus grand nombre) croient l’influence du mâle sur lesproduits bien supérieure à celle de la femelle. Il n’en est rien, cependant, l’influencedes reproducteurs est tout au moins égale, et s’il y a en réalité une prépondérance,elle est évidemment en faveur de la mère qui fait à elle seule, après la fécondationet pendant neuf mois, tous les frais de la nutrition du petit qu’elle porte dans son.niesPuisqu’il en est ainsi, on comprendra aisément l’insuffisance qu’il y a à s’en tenirexclusivement au choix du mâle. C’est sans doute l’effet de cette croyance seperpétuant par la tradition, qui fait que les éleveurs gascons ne font nulle attentionau choix des femelles ; ils les livrent indistinctement à la reproduction dès qu’ellesont atteint l’âge de trois ans. Toute leur attention se porte sur le choix des mâles etnous avons vu quel peu de soins ils y apportent. C’est là qu’on doit voir une descauses du peu de progrès réalisé chez nous dans l’économie du bétail. Il faut doncapporter le même soin au choix des mères, qu’on devrait accorder au choix desmâles ; inutile de le répéter.Il est certains défauts qui rendent tant le père que la mère incapables de donner debons produits, tels sont les tares, les défauts de conformation et les divers viceshéréditaires, car la mauvaise conformation se traduit, comme la bonne, mieuxqu’elle peut-être, par la loi d’hérédité. Aussi doit-on éviter, quand on fait le choix desreproducteurs, de prendre des animaux entachés de ces vices.Une mauvaise habitude de notre région, prise sans doute par esprit de faussespéculation, c’est de livrer les animaux à la reproduction alors qu’ils sont encoretrop jeunes. On veut le plus tôt possible tirer le plus grand parti des animaux, desfemelles surtout, et on s’empresse de les faire saillir espérant obtenir ce résultatchimérique ; mais il est plutôt fictif que réel, car les produits qu’on obtient dans ce
cas, non-seulement sont chétifs et de peu de valeur, mais encore ils éprouventfortement l’organisme de la jeune mère dont la valeur ultérieure peut être debeaucoup diminuée. Une des causes les plus puissantes qui maintiennentstationnaire l’amélioration de la race Gascone, est sans contredit cette funestehabitude de livrer à la reproduction les femelles alors qu’elles sont trop jeunes. Eneffet, en vertu de la loi d’hérédité. les formes et les aptitudes se transmettentd’autant mieux que les animaux sont arrivés à leur plus complet développement. Ilest évident qu’une femelle ayant à la fois à pourvoir à l’achèvement de saconstitution et au développement d’un fœtus, doit, jusqu’à un certain point,succomber à la tâche ; on comprend aisément qu’elle et son petit doivent seressentir d’une manière assez évidente de ce surcroît de fonctions. Il faudra doncattendre, dorénavant, un peu plus tard pour faire saillir la femelle. L’époque que l’onpourrait fixer pour cela serait de trois ans et demi à quatre ans. Pour le mâle onpeut, sans de graves inconvénients, le livrer à la reproduction dès l’âge de dix-huitmois à deux ans.Quant à ce qui est de la chimérique idée d’introduire comme reproducteurs desanimaux d’autres races ou d’autres pays, il ne faut pas y songer. Ce serait le vraimoyen de faire dégénérer la race au lieu de l’améliorer. Dans l’état actuel de notreagriculture, il n’y a que l’appareillement qui puisse être mis en pratique. Quand onaura modifié le système cultural, on pourra croiser la race avec des animauxprécoces qui produiront alors un bon résultat ; mais pour le moment, tenons-nous-en à la sélection.B. Agents indirects. — Parmi ces agents médiats ou indirects susceptibles demodifier la race, il y a les climats, les saisons, la nature du sol, l’alimentation, letravail et la castration. Les uns de ces modificateurs se produisentindépendamment de la volonté de l’homme, comme le climat, les saisons, la naturedu sol, son altitude, etc. ; ils ont été étudiés à propos de la topographie de laGascogne. Les autres sont sous la dépendance de l’homme qui les administred’une manière plus ou moins rationnelle ; ce sont : le travail, la nourriture, leshabitations, la castration. C’est de ces agents que je vais immédiatementm’occuper.Du travail. — Si un des moyens améliorateurs est mis en pratique dans laGascogne, c’est bien certainement celui-là. On l’emploie même avec excès, nonpas précisément dans un but d’amélioration, mais forcé que l’on est d’exécuteravec le bœuf les travaux de l’agriculture. On pourrait cependant faire ce travail parles chevaux ou les mules ; mais il n’offrirait pas les mêmes avantages. Du reste,cette manière de procéder est si bien ancrée dans les mœurs, que la scienceéconomique ne parviendrait pas à la détruire ; et c’est justice, car après unediscussion assez longue entre les partisans et les non-partisans du travail au bœuf,il a été admis par la plupart d’entr’eux que les travaux de l’agriculture avaient plusd’avantage à être exécutés par ce dernier que par les chevaux.Le travail, pour être un moyen améliorateur, devrait être réduit à une gymnastiquefonctionnelle, il devrait être employé modérément ; mais, poussé trop loin, commecela arrive souvent, il devient une cause de mine pour l’animal qui s’épuise enefforts. Par l’excès du travail, la circulation et la respiration s’accélèrent, le carboneest brûlé en plus grande quantité qu’à l’état normal ; il y en a plus de consommé queles aliments ne peuvent en fournir, et par conséquent, il n’y a plus balancement entrela force de composition et celle de décomposition ; de là résulte l’amaigrissementassez prononcé du sujet, de sorte qu’il est assez difficile de le rétablir pour laboucherie. Il faudrait, pour obvier à ces inconvénients, avoir un plus grand nombrede bêtes de travail pour qu’elles puissent se soulager les unes par les autres. Maisvouloir cela dans l’état actuel de notre agriculture, c’est vouloir l’impossible, vu quepar le système de culture employé aujourd’hui, on peut à peine récolter assez defourrage pour nourrir convenablement les animaux que l’on a déjà ; il est donc inutilede songer encore à en augmenter le nombre. Il faudrait modifier le système deculture ; alors on pourrait soumettre les bœufs à un travail plus modéré quidévelopperait leur système musculaire, éviterait ces amaigrissements excessifs, etpar cela seul permettrait plus tard un facile engraissement. On pourrait alors fairecesser le travail beaucoup plus tôt, ce qui serait un vrai progrès dans l’amélioration.Alimentation. — L’alimentation est un des plus puissants modificateurs quel’homme puisse mettre à profit pour améliorer d’une manière convenable la race quinous occupe. Question importante, s’il en est, et trop vaste pour pouvoir être traitéeau complet dans le peu d’espace qui me reste ; aussi me bornerai-je à résumertrès sommairement les quelques considérations générales qui en dépendent. C’estpar une alimentation plus abondante qu’on donnera plus d’ampleur aux animaux denotre région ; les formes s’arrondiront mieux, la masse se développera, la tailleaugmentera ; ils seront moins lestes. On peut jusqu’à un certain point comparer les
animaux aux plantes. Celles qui végètent dans des terrains riches en engrais et enmatières nutritives, prennent un très grand développement, tandis qu’elles restentchétives dans le cas contraire. L’effet, quoique moins sensible chez les animaux,peut lui être comparé. Pour s’en rendre un compte exact, on n’aurait qu’à suivre cequi se passe dans la nature.De deux animaux nés de la même mère et nourris différemment, l’un avecabondance, l’autre avec parcimonie, le premier prendra un développementconsidérable, tandis que l’autre restera chétif, peu développé. On le voit donc, lanourriture est d’une très grande importance dans l’amélioration de notre race ; maispour pouvoir la pratiquer convenablement dans notre région, il faudrait posséderdes ressources alimentaires que nous n’avons pas. Voilà justement où est la causedu mal, cause qui sera d’autant plus difficile à faire disparaître, que l’ons’abandonnera davantage à la puissance de la routine. Il faudrait, non-seulement,nourrir plus abondamment les animaux existant déjà, mais il faudrait encore enaugmenter le nombre. Alors, le travail se ferait plus facilement, les animaux sesoulageraient mutuellement, s’épuiseraient moins, et pourraient être livrés avec plusd’avantage au but final (la boucherie), auquel ils sont condamnés en naissant. Mais,dit Lafore, dans un remarquable mémoire qu’il adressait à la Société vétérinaire dudépartement de Lot-et-Garonne : « Dans les pays où les fourrages n’abondent pas,multiplier l’espèce, c’est la faire dégénérer, puisqu’on nourrit avec d’autant plus deparcimonie que les animaux sont en plus grand nombre. » Il faudrait donc, lapremière des choses, augmenter la proportion des prairies. Ce n’est pasabsolument des prairies naturelles que je veux parler, car, généralement, elles sontassez abondantes dans la Gascogne ; mais celles dont on devrait sérieusements’occuper d’augmenter la proportion, ce sont les prairies artificielles et les diversesplantes qui servent à la nourriture du bœuf. Voyons si le problème serait difficile àrésoudre. Il n’y a peut-être pas d’espèce animale plus facile à nourrir, qui ait unealimentation plus variée que le bœuf. Il est infiniment moins granivore que le chevalet pousse essentiellement à la culture fourragère — l’herbe et les racines. — Ilaccepte avec facilité beaucoup de plantes que le cheval ne voudrait pas manger.On lui donne des aliments secs, du vert de toutes les plantes artificielles, toutes lespailles de graminées, du foin de prairies naturelles et artificielles, toutes les fanesde plantes potagères ; les gousses de légumineuses, les feuilles d’arbre, d’acaciaet d’arbre des forêts dont ils sont friands ; des feuilles de vigne ; des racinesfourragères, telles que carottes, betteraves, raves, rutabaga, panais ; destubercules de pomme de terre et de topinambour. Les tiges de maïs et biend’autres substances peuvent aussi servir pour l’alimentation du bœuf, soit entièressi la plante est verte, soit écrasées si elle est sèche. Quant aux grains et auxfarineux, on n’en donne guère au bœuf, à moins qu’on ne veuille l’engraisser ou lemettre dans un état suffisant d’embonpoint pour en tirer un prix avantageux.Cette latitude dans l’énumération des substances employées à l’alimentation dubœuf est très importante, car avec des mélanges et les diverses préparations qu’onpeut faire subir aux aliments, on réalisera plus d’économie et on donnera auxanimaux une nourriture plus alibile, plus appétissante et convenant mieux à leurgoût. Après tous ces moyens, toutes ces ressources alimentaires dont peutdisposer l’éleveur, on est assez surpris de l’entendre se plaindre de la difficulté del’entretien hivernal de ses bestiaux. Ses doléances ne peuvent toucher que ceuxqui, à son exemple, ne connaissent pas le premier mot de la science alimentaire.Pendant l’été, on n’est jamais embarrassé, parce qu’on a les champs et les prés ;mais quand arrive la fin de l’hiver, l’absence de provisions fait qu’on n’a plus rien àleur donner ; aussi on est quelquefois obligé de vendre les animaux avec perte ; etd’en acheter de plus chers pour les travaux suivants. Ce sont là de très mauvaisescombinaisons, forcées à la vérité, mais qui pourraient très bien être évitées enfaisant des cultures dérobées à la fin de la saison. Il faudrait donc modifier lesystème cultural.Dans notre région, le mode d’assolement repose sur la jachère. Voici la rotationque l’on suit le plus généralement : La propriété est divisée en trois parties à peuprès égales. Une de ces parties étant semée en blé la première année, à ladeuxième on y sème de l’avoine, à la troisième on laisse la terre se reposer enjachère et depuis la récolte de l’avoine jusqu’à la moisson prochaine, on a del’herbe qui pousse dans ce champ et sert de nourriture au mouton, c’est une sortede pâture qui lui est exclusivement réservée. Après cela, c’est-à-dire en juin, onlaboure de nouveau cette terre, et après trois labours successifs et une fumuregénéralement insuffisante, on sème de nouveau du blé. Chacune des trois partiesde la propriété subit successivement cette rotation, de sorte que tous les ans unchamp est ensemencé de blé, l’autre d’avoine et le troisième est en jachère. Cen’est pas à dire, cependant, que la jachère soit complète, parce que chaquepropriétaire sème sur cette terre en repos, les diverses légumineuses dont il a
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents