Et je m occuperai du feu
121 pages
Français

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Et je m'occuperai du feu , livre ebook

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121 pages
Français

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Description

J'aimerais être dans votre poche. Et sentir seulement le balancement de ce que vous êtes, vous faites : quelque chose de la vie qui passe. Sur la boîte d'allumettes que les hommes mettent dans leur poche, il y a une gitane.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2011
Nombre de lectures 265
EAN13 9782296802599
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ET JE M’OCCUPERAI DU FEU
Françoise Neveu
ET JE
M’OC


Ouvrages du même auteur :

« La vie, infiniment », Éditions de L’Harmattan, 2009
« Philomène et Chrysalide », NLE Éditions, 2002
« Des gens et des lettres », Éditions du Septentrion, 1997
« De l’idée à l’objet », Éditions Hermès, 1994

Site de l’auteur : www.textes.net
Atelier de travail de l’écriture
Désir d’écrire ?
Ateliers d’apprentissage créatif de l’écriture littéraire.
CUPERAI
DU FEU

Flâneries
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-54318-8
EAN : 9782296543188

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
À ma clairière, toujours.


« Si on ne me demande pas ce que c’est, je le sais,
si on me le demande, je ne le sais pas. »

Saint Augustin, Confessions, XI, 14
LE DÉHANC DE LA LUNE
I


Tandis que je parlais, la lune par la fenêtre m’est apparue,
Ronde, sur ce ciel bleu de matin si tôt, si connu ce bleu
Tant j’y viens souvent, là, et d’avant aussi,
Lune de jour vivante et vivace, lumineuse, installée
comme moi peut-être, installée –
Dans l’angle juste du croisement d’une cheminée
et de la crête du toit.




II


Mes paroles se déroulaient, fluides ou accroches, soutenues,
En matière syncopée peut-être, du matin ou de fenêtre,
ou d’ailleurs ;
J’étais sûre d’être devant une de ces cartes postales,
Parfois sur des présentoirs, presque trop parfaites,
Qui montrent en exagéré un paysage qu’on a vu la veille
Le regard alors normalement brouillé de soubresauts.

Ce qu’on a vu la veille était un peu flou, ou tremblant, ou fugitif,
Agité de légers sursauts et tremblements et vibrations tactiles,
Si bien que l’on aurait dit volontiers, ou pensé,
Que seule la poésie dans l’instant pourrait l’arrêter ;
Non la durée de l’instant, mais son bloc d’émerveillement,
Le sourdre, l’instiller, le mettre dans la vie vraie.
III


Mes paroles déroulaient devant la carte postale.

Mais voilà que maintenant elle avait bougé ;
La lune n’était plus ronde.
Elle descendait à vue d’œil dans l’angle de la cheminée et du toit.
Elle diminuait.
À vrai dire elle était en train de disparaître.

Comme je pensais à ce moment à la disparition de mes parents,
J’ai préféré dire : on dirait un coucher de lune.
J’y voulais un appel, inclus, à une certitude qu’elle revienne.
D’un demain.

Elle ne fut plus là.

Mes paroles vibraient, parlant d’autre chose, affleurant la perte ;
Parlant de gens qui, s’ils le voulaient, pourraient partager
Ou transmettre, mais préféraient garder pour eux.
Sans doute venaient-elles aussi combler cette part
Où manque vibrait ; J’insistais.

Quoi, leur excellence ?
Un instant de paysage !
IV


Lorsque soudain la lune est revenue…

De l’autre côté, à droite, le long de l’autre côté de la cheminée.
Réapparaissant, Déjà-demain, de plus en plus ronde,
Blanche, si blanche, me laissant dans le miracle


Du continu…


Et Je m’en souviens maintenant, mon père m’avait appris
Ce mouvement déhanché de la lune
Cet instant,

Déjà-demain de jour, de nuit, ça avance, tout le temps ;
en décalé ;

Syncopé de l’instant, rien ne l’arrête, elle arrive, elle repart,
Jamais à la même heure, jamais au même endroit,
Ça se tisse avec l’heure, le soleil, les étoiles, les planètes,
Sa cadence, son battement, balançant d’un côté, de l’autre,
Revenant sur terre de ce fait à tout instant et nous aussi avec.
SIMPLEMENT



Un homme assis dans un couloir.

Un homme, assis dans un couloir, sur une chaise qui aurait besoin d’un bon rempaillage.

Le couloir est rectangulaire. Sur la longueur, quatre portes d’un côté, quatre fenêtres de l’autre. L’homme est assis à l’extrémité gauche du couloir, de biais, du côté des fenêtres, tourné vers les portes. En face de lui, dans l’ombre, dans le contre-jour de l’autre extrémité, un mur aveugle.

On a posé devant lui une écuelle.
À ses pieds.

On la renouvelle tous les jours, même s’il n’y a pas touché. La personne, pour ce faire, passe par la porte dans son dos, à l’extrémité gauche du couloir.


La fille, car c’est une fille, est fluide ; une enveloppe serrée autour d’un corps sans « formes », un corps absent. Juste une jambe, un trait serré blanc. Et un bras, plus flottant ; trait blanc aussi. Les mains sont gainées de gants blancs. La bouche cachée d’un tissu blanc, jusque sur le nez, attaché derrière le bonnet élastique blanc qui moule le crâne.

(déchirer le tissu synthétique)


L’homme mange. Des haricots rouges. Il a poussé de côté la viande, qui n’aurait pas dû être. On l’en avait dispensé en entrant. Mais depuis quelques jours, on l’informe de cette manière que l’on est respectueux de ses désirs qui peuvent montrer des changements.
Le dialogue passe par la nourriture.


La plupart du temps, du côté des fenêtres, c’est la nuit. L’homme n’a encore jamais vu de lumière inhabituelle dans la nuit. Tous les jours de lune, la lune, chaque fois à une heure différente, apparaît en un point différent et parcourt les carreaux des fenêtres, et donc de son ombre le couloir, selon une autre trajectoire.

Si bien que l’homme connaît, à quelque variante près, toutes les trajectoires.

(le dernier rayon ira sur la porte du fond qu’il croyait aveugle)


Certains jours, certains jours de lune, sur sa chaise de paille, il semble à l’homme qu’il est là depuis des générations.

Quand il est venu, on lui a dit, il faudra de la patience, mais toutes les portes vont s’ouvrir.

On ne lui a pas parlé des fenêtres.
On ne lui avait pas parlé de la lune non plus.


La chaise entame ses fesses.

La paille entamée pique à travers la soie, blanche.
Parfois, quand il doit se changer, c’est-à-dire tous les deux jours, son costume est noir à pois blancs. Il ne le garde qu’un jour.

Parfois on lui laisse le costume noir à pois blancs plus longtemps, à côté de son écuelle, dans le respect du fait que ses désirs là aussi puissent montrer des changements. Il n’y a pas encore touché. Il ne met le costume noir à pois blancs que lorsqu’on le lui apporte et qu’on vient chercher le blanc pour le laver.

Un autre dialogue, plus immédiat, plus intérieur car non formulé, plus superficiel, passe par les vêtements.


La porte dans son dos s’ouvre.
L’écuelle est changée.


Sur chaque porte, une plaque, gravée en blanc sur fond noir, aux centre de la largeur et deux tiers de la hauteur. On est venu les lui poser il y a deux jours. Une sur chaque porte. Elles représentent le dessin d’une porte, la même que celle sur laquelle elles se trouvent. Ce sont toutes les mêmes portes.

C’est vrai que c’est plus clair maintenant. Il n’y a pas de question à se poser. Ce sont des portes.


L’homme qui est venu les poser, car c’était un homme, était une forme blanche aussi. Il a travaillé très vite. Avec beaucoup de précisions. Sans aucun outil. Sans bruit donc.

Juste le coup d’œil en tenant la plaque et se reculant, un coup d’œil en haut, en bas et de chaque côté. Trois portes sur quatre, avant le coup d’œil, la plaque était déjà bien placée. Pour la quatrième, c’était question de rien du tout. Il est reparti comme il était venu, dans un frottement de porte,

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